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24/06/2024 | FRANCE | N°21/07952

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Chambre 01, 24 juin 2024, 21/07952


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Chambre 01
N° RG 21/07952 - N° Portalis DBZS-W-B7F-V2LL


JUGEMENT DU 24 JUIN 2024



DEMANDERESSE :

Mme [D] [L]
exerçant en nom personnel sous l’enseigne “Friterie BLA”, immatriculée au RCS de LILE n° 341 022 671
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par Me Fabrice SAVOYE, avocat au barreau de LILLE


DÉFENDERESSE :

ETABLISSEMENT PUBLIC FONCIER DES HAUTS-DE-FRANCE
pris en la personne de son Directeur domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]>[Localité 3]
représentée par Me Coralie FLORES, avocat au barreau de LILLE, postulant et Me Morgane BLOTIN, avocat au barreau de PARIS, pla...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Chambre 01
N° RG 21/07952 - N° Portalis DBZS-W-B7F-V2LL

JUGEMENT DU 24 JUIN 2024

DEMANDERESSE :

Mme [D] [L]
exerçant en nom personnel sous l’enseigne “Friterie BLA”, immatriculée au RCS de LILE n° 341 022 671
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par Me Fabrice SAVOYE, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDERESSE :

ETABLISSEMENT PUBLIC FONCIER DES HAUTS-DE-FRANCE
pris en la personne de son Directeur domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Coralie FLORES, avocat au barreau de LILLE, postulant et Me Morgane BLOTIN, avocat au barreau de PARIS, plaidant

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président : Aurélie VERON, Vice-présidente, statuant en qualité de Juge Unique, en application de l’article R 212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire,

Greffier : Benjamin LAPLUME,

DÉBATS :

Vu l’ordonnance de clôture en date du 04 Juillet 2023 ;

A l’audience publique du 18 Mars 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré, les avocats ont été avisés que le jugement serait rendu le 10 juin 2024 puis prorogé pour être rendu le 24 Juin 2024.

JUGEMENT : contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au Greffe le 24 Juin 2024, et signé par Aurélie VERON, Président, assistée de Benjamin LAPLUME, Greffier.

EXPOSE DU LITIGE

Par acte du 9 juin 2006, la S.C.I. Concorde a donné à bail à Mme [D] [L] un emplacement de 43 m² situé en front à rue de la [Adresse 4] à [Localité 5] pour une durée de neuf années à compter du 1er mai 2006 et moyennant un loyer trimestriel de 900 euros hors taxe.

Le 7 avril 2015, l'Etablissement public foncier Nord-Pas-de-Calais a acquis l'immeuble.

Par acte extrajudiciaire délivré le 22 septembre 2017, l'Etablissement public foncier a donné congé à Mme [L] avec refus de renouvellement et refus de paiement d'une indemnité d'éviction, à effet du 31 mars 2018.

Mme [L] s'est maintenue dans les lieux au-delà de cette date.

Par ordonnance du 28 mai 2019, le juge des référés du tribunal judiciaire de Lille a ordonné une expertise de l'indemnité d'éviction.

L'expert a établi son rapport le 31 janvier 2020.

Par ordonnance du 21 septembre 2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de Lille a dit n'y avoir lieu à référé s'agissant de la demande d'expulsion compte tenu de l'existence d'une contestation sérieuse.

Par exploit d’huissier délivré le 30 décembre 2021, Mme [D] [L] a assigné l'Etablissement public foncier Nord-Pas-de-Calais devant le tribunal judiciaire de Lille aux fins de paiement d'une indemnité d'éviction.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 1er décembre 2022, Mme [D] [L] sollicite la condamnation de l'EPF à lui payer :

Au titre de l'indemnité d'éviction du fonds de commerce :
remplacement : 220 000 eurostransfert 144 800 eurostrouble d'exploitation : 55 000 euros ;
les dépens en ce compris les frais d'expertise ;
la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 30 mai 2023, l'Etablissement public foncier Nord-Pas-de-Calais devenu l'Etablissement public foncier des Hauts de France s’oppose aux demandes formées à son encontre. Il sollicite de la juridiction de :

A titre principal,

Dire et juger que le statut des baux commerciaux est inapplicable dans la mesure où les conditions de l'article L.145-1 du code de commerce ne sont pas réunies;
En conséquence,

Débouter Mme [D] [L] de ses demandes,

A titre subsidiaire,

Rejeter la demande d'indemnité d'éviction formulée par Mme [L] s'établissant à la somme de 419 800 euros ;
La Fixer à de plus justes proportions ;
En tout état de cause,

Condamner Mme [L] à lui payer une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 outre les dépens.

Il est renvoyé aux conclusions récapitulatives des parties pour un plus ample exposé des motifs conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture des débats est intervenue par ordonnance du 4 juillet 2023 avec fixation de l'affaire à l'audience du 18 mars 2024 à l'issue de laquelle la décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 13 mai 2024 prorogé au 24 juin 2024 dans l'attente du dossier de plaidoiries du demandeur.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, les demandes des parties tendant à voir le tribunal "constater" ou "dire et juger" ne constituant pas des prétentions au sens des articles 4, 5, 31, 768 et 954 du code de procédure civile mais des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions, il n'y a pas lieu de statuer sur celles ci.

I- Sur la demande d'indemnité d'éviction

Aux termes des articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

Selon l'article L. 145-14 du code de commerce, le bailleur peut refuser le renouvellement du bail. Toutefois, le bailleur doit, sauf exceptions prévues aux articles L. 145-17 et suivants, payer au locataire évincé une indemnité dite d'éviction égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement. Cette indemnité comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que des frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur, sauf dans le cas où le propriétaire fait la preuve que le préjudice est moindre.

L'article L.145-1 I- du code de commerce dispose que le statut des baux commerciaux s'applique aux baux des immeubles ou locaux dans lesquels un fonds est exploité, que ce fonds appartienne, soit à un commerçant ou à un industriel immatriculé au registre du commerce et des sociétés, soit à un chef d'une entreprise du secteur des métiers et de l'artisanat immatriculée au registre national des entreprises, accomplissant ou non des actes de commerce, et en outre :

1° Aux baux de locaux ou d'immeubles accessoires à l'exploitation d'un fonds de commerce quand leur privation est de nature à compromettre l'exploitation du fonds et qu'ils appartiennent au propriétaire du local ou de l'immeuble où est situé l'établissement principal. En cas de pluralité de propriétaires, les locaux accessoires doivent avoir été loués au vu et au su du bailleur en vue de l'utilisation jointe ;

2° Aux baux des terrains nus sur lesquels ont été édifiées - soit avant, soit après le bail - des constructions à usage commercial, industriel ou artisanal, à condition que ces constructions aient été élevées ou exploitées avec le consentement exprès du propriétaire.

En l'espèce, le contrat de bail est intitulé « bail de terrain nu à destination commerciale ». Il prévoit la location d'un « emplacement d'une superficie d'environ 43 m² (suivant la zone hachurée sur le plan ci-annexé) situé en front à rue de la [Adresse 4] à [Localité 5], sur une parcelle figurant au cadastre pour 40 ares […]. ».

Il est stipulé en préambule du contrat : « Il est précisé que le présent bail n'est pas soumis au statut des baux commerciaux .».

L'emplacement a été loué à Mme [L] en vue de l'exploitation d'une activité de friterie, et il n'est pas contesté que le terrain est loué « nu », de sorte que pour remplir les conditions pour se prévaloir du statut des baux commerciaux et d'un droit à indemnité d'éviction, Mme [L] doit justifier remplir les conditions édictées au I 2° de l'article L145-1.

L'édification d'une construction s'apprécie au regard des critères de fixité et de solidité du bâtiment.

Il résulte des photographies annexées au rapport d'expertise et de celle intégrée dans les conclusions du défendeur que la friterie est installée dans une baraque mobile de type « Algeco », sans fondation, ni soubassement, ni scellement au sol, qui peut être déplacée.

La structure ne présente ainsi pas les caractéristiques de fixité et de solidité du bâtiment permettant de la qualifier de construction au sens de l'article L.145-1 I- 2°.

Par ailleurs, Mme [L] ne justifie pas avoir obtenu le consentement exprès du propriétaire pour l'édification d'une telle construction.

Ces éléments sont confortés par la volonté expresse des parties de ne pas soumettre le bail au statut des baux commerciaux, celle-ci étant exprimée dans la convention.

En conséquence, le bail du 9 juin 2006 n'est pas soumis au statut des baux commerciaux et Mme [L] ne peut prétendre à une indemnité d'éviction.

Elle sera donc déboutée de sa demande à ce titre.

II- Sur les demandes accessoires

1. Sur l'exécution provisoire

Aux termes de l'article 514 du code de procédure civile, applicable aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

2. Sur les frais irrépétibles et les dépens

Mme [D] [L] succombant au principal, elle supportera les dépens de la présente instance et sera redevable d’une indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile qui sera justement fixée à la somme de 2 500 euros.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, par décision contradictoire et en premier ressort,

DÉBOUTE Mme [D] [L] de sa demande au titre de l'indemnité d'éviction ;

CONDAMNE Mme [D] [L] à payer à l'Etablissement public foncier des Hauts de France la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE Mme [D] [L] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit ;

DÉBOUTE Mme [D] [L] de ses autres demandes ;

DÉBOUTE l'EPF de ses autres demandes ;

CONDAMNE Mme [D] [L] aux dépens de la présente instance.

LE GREFFIERLA PRÉSIDENTE

Benjamin LAPLUMEAurélie VERON


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Chambre 01
Numéro d'arrêt : 21/07952
Date de la décision : 24/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-24;21.07952 ?
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