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28/05/2024 | FRANCE | N°24/00444

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Référés expertises, 28 mai 2024, 24/00444


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
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Référés expertises
N° RG 24/00444 - N° Portalis DBZS-W-B7I-YBTH
SL/SH


ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 28 MAI 2024



DEMANDEUR :

M. [E] [R]
[Adresse 3]
[Localité 6]
représenté par Me Grégory DUBOCQUET, avocat au barreau de LILLE



DÉFENDERESSE :

S.N.C. OUVRIE
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Simon FROMONT, avocat au barreau de DOUAI







JUGE DES RÉFÉRÉS : Sarah HOURTOULE, 1ere VP adjoint

e, suppléant le Président en vertu des articles R. 212-4 et R. 212-5 du Code de l’Organisation Judiciaire

GREFFIER : Martine FLAMENT lors des débats et Sébastien LESAGE lors de la...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Référés expertises
N° RG 24/00444 - N° Portalis DBZS-W-B7I-YBTH
SL/SH

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 28 MAI 2024

DEMANDEUR :

M. [E] [R]
[Adresse 3]
[Localité 6]
représenté par Me Grégory DUBOCQUET, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDERESSE :

S.N.C. OUVRIE
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Simon FROMONT, avocat au barreau de DOUAI

JUGE DES RÉFÉRÉS : Sarah HOURTOULE, 1ere VP adjointe, suppléant le Président en vertu des articles R. 212-4 et R. 212-5 du Code de l’Organisation Judiciaire

GREFFIER : Martine FLAMENT lors des débats et Sébastien LESAGE lors de la mise à disposition

DÉBATS à l’audience publique du 14 Mai 2024

ORDONNANCE du 28 Mai 2024

LA JUGE DES RÉFÉRÉS

Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil et avoir mis l’affaire en délibéré, a statué en ces termes :

EXPOSE DU LITIGE

Suivant acte authentique de vente en date du 03 février 2011, reçu par Me [G], Notaire à [Localité 8], Monsieur [E] [R] a acquis auprès de la SNC OUVRIE une maison à usage d’habitation en l’état futur d’achèvement, formant le lot n°28 d’un ensemble immobilier “Les cottages du Parc” sis [Adresse 9] à [Localité 6].

Monsieur [E] [R] indique que la remise des clés est intervenue le 21 janvier 2022, date à laquelle un procès-verbal de livraison, comportant diverses réserves, a été régularisé.

Monsieur [E] [R] expose avoir constaté l’apparition de désordres, et notamment des odeurs nauséabondes persistantes, une fissure dans le plafond du séjour et l’apparition d’une tâche d’humidité sur le plafond de la cuisine, pour lesquels il a informé la SNC OUVRIE et sollicité de cette dernière qu’elle y remédie.

C’est dans ces conditions que Monsieur [E] [R] a, par acte de commissaire de justice du 08 mars 2024, fait assigner la SNC OUVRIE devant le président du tribunal judiciaire de LILLE statuant en référé, pour obtenir la désignation d’un expert, au visa des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile, les dépens étant réservés.

L’affaire a été appelée à l’audience du 26 mars 2024 et renvoyée au 14 mai 2024 pour y être plaidée.

A cette date, Monsieur [E] [R], représenté par son avocat, sollicite le bénéfice de ses dernières conclusions et demande au président du tribunal judiciaire, statuant en référé, de
Vu l’article 145 du Code de procédure civile,
- Débouter la SNC OUVRIE de ses demandes, fins et prétentions;
- Désigner tel expert qu’il plaira avec pour mission, tous droits et moyens des parties étant réservés, les parties entendues ainsi que tout sachant, s’il y a lieu connaissance prise de tous documents et en s’entourant de tous renseignements à charge d’en indiquer la source :
*se faire communiquer par les parties tous documents utiles à l’accomplissement de sa mission ;
*se rendre au domicile de Monsieur [E] [R] sis à [Adresse 3] et visiter les lieux ;
*dresser un état descriptif des désordres, vices et défauts dénoncés dans la présente assignation et repris au procès-verbal de constat de Maître [C] [J], en constater la réalité et en déterminer la nature et l’étendue ;
*donner son avis sur les mesures conservatoires et/ou préventives à mettre en œuvre et qui s’avèreraient nécessaires pour garantir la sécurité des occupants de l’immeuble ;
*donner son avis sur la nature, les causes et l’origine de ces désordres, vices et défauts;
*donner son avis sur le caractère décennal de ces désordres, vices et défauts;
*donner son avis sur la nature, le coût et la durée probable des travaux destinés à la reprise des désordres, vices et défauts ;
*fournir tous éléments techniques et de fait de nature à permettre, le cas échéant, à la Juridiction de déterminer les responsabilités éventuellement encourues et d’évaluer l’ensemble des préjudices subis et à subir par Monsieur [E] [R], tant matériels qu’immatériels ;
- Fixer la consignation qui devra être déposée au Greffe ;
- Dire que l’Expert devra déposer son rapport au Greffe pour qu’il soit statué ce que de droit ;
- Réserver les dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions, la SNC OUVRIE, représentée par son avocat, demande au président du tribunal judiciaire, statuant en référé, de :
Vu l’article 145 du Code de procédure civile,
Rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,
A titre principal :
- Apprécier l’existence d’un intérêt légitime, au sens de l’article 145 du Code de procédure civile, à la désignation d’un expert compte tenu de l’absence de motif invoqué par M. [R]
- Condamner M. [R] à verser à la Société OUVRIE la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du CPC ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.
A titre subsidiaire :
En conséquence, et si l’intérêt légitime est retenu, juger la Société OUVRIE recevable et bien fondée à formuler ses plus expresses réserves quant à la demande d’expertise présentée par M. [R] ;

Conformément aux dispositions des articles 455 et 446-1 du code de procédure civile, il est fait référence à l’acte introductif d’instance et aux écritures des parties qui ont été soutenues oralement.

La présente décision, susceptible d’appel, est contradictoire.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande d'expertise :

Selon l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé. Il suffit qu’un procès futur soit possible, qu’il ait un objet et un fondement suffisamment déterminé, que le demandeur produise des éléments rendant crédibles ses suppositions, sans qu’il n’y ait lieu à exiger un commencement de preuve des faits invoqués, que l’expertise est justement destinée à établir; que sa solution puisse dépendre de la mesure d’instruction sollicitée, que celle-ci ne soit pas vouée à l’échec en raison d’un obstacle de fait ou de droit et ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d’autrui.

L’existence de contestations même sérieuses ne constitue pas un obstacle à la mise en oeuvre des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile, l’application de ce texte n’impliquant aucun préjugé sur la responsabilité des personnes appelées comme parties à la procédure, ni sur les chances de succès du procès susceptible d’être ultérieurement engagé.

Sur le fondement des dispositions précitées, Monsieur [E] [R] sollicite la désignation d’un expert judiciaire.

Pour s’opposer à titre principal à la demande, la SNC OUVRIE soutient que Monsieur [E] [R] n’invoque dans son assignation aucun fondement juridique, ce qui ne crée pas le motif légitime de la demande. Elle fait valoir qu’il apparait que Monsieur [E] [R] ne dispose plus des garanties de bonne fin et de parfait achèvement opposables aux entreprises comme au vendeur VEFA et ne peut donc agir que sur d’autres fondements pour justifier de son motif légitime. En outre, elle soutient que la mise en exergue d’un quelconque manquement de sa part aurait dû être davantage étayée par Monsieur [E] [R] et qu’en l’état le motif légitime qui serait tiré d’un manquement de sa part à l’une de ses obligations est inexistant.
Susbidiairement, et si l’intéret légitime est retenu, la SNC OUVRIE formule protestations et réserves d’usage quant à la demande d’expertise.

L'intérêt légitime visé à l'article 145 précité ne s’apprécie pas en fonction de la qualification juridique d'une demande en justice qui n'est pas formée mais au regard des liens juridiques existant entre les parties et de la nécessité de recueillir contradictoirement et avant tout procès la preuve d'un fait dont dépend la solution du litige.

En l’espèce, les pièces produites aux débats et notamment le rapport d’expertise amiable “dommages-ouvrage” réalisé par le cabinet STELLIANT Expertise construction en date du 16 février 2023 ainsi que le procès-verbal de constat par commissaire de justice en date du 22 novembre 2023 rendent vraisemblable l’existence des désordres invoqués par Monsieur [E] [R].

Il apparaît nécessaire, au vu de ces pièces, que soient vérifiés, par le biais d'une expertise contradictoire et avant tout procès, les griefs allégués par le demandeur, et de disposer d'un avis technique sur l'origine, la cause et les conséquences de ces désordres.

Monsieur [E] [R] justifie donc d’un motif légitime au sens des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile pour obtenir la désignation d’un expert en vue d’établir, avant tout procès, la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution du litige.

En conséquence, il convient de faire droit à la demande d’expertise. La mission de l’expert, qu’il appartient au juge de fixer conformément aux dispositions de l’article 265 du code de procédure civile, sera définie au dispositif de la présente ordonnance.

Sur l’article 700 du Code de procédure civile et les dépens :

Monsieur [E] [R] dans l’intérêt et à la demande duquel la mesure d’instruction est ordonnée en avancera les frais et supportera les dépens de la présente instance.

A ce stade de la procédure, il n’est pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais par elle engagés dans le cadre de la présente instance au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
La demande de Monsieur [E] [R] à ce titre sera donc rejetée.

La présente décision est exécutoire par provision, en application des dispositions des articles 484, 514 et 514-1 alinéa 3 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance de référé, contradictoire et en premier ressort, mise à disposition au greffe, après débats en audience publique,

Renvoyons les parties à se pourvoir sur le fond du litige ;

Par provision, tous moyens des parties étant réservés ;

Ordonnons une expertise et Désignons en qualité d'expert :

M. [T] [S] [Z]
[Adresse 7]
[Localité 5]

expert inscrit sur la liste de la cour d’appel de DOUAI, lequel pourra prendre l’initiative de recueillir l’avis d’un autre technicien, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne ;

Avec mission de :
-se rendre sur les lieux dans l’immeuble situé [Adresse 3] à [Localité 6], après y avoir convoqué les parties,
-se faire communiquer tous documents et pièces nécessaires à l’accomplissement de sa mission;
-examiner les défauts, malfaçons, non-façons, non-conformités allégués dans l’assignation et les pièces qui y sont annexées; Les décrire en indiquer l’origine, l’étendue, la nature, l’importance, la date d’apparition, selon toute modalité technique que l’expert estimera nécessaire; en rechercher la ou les causes et déterminer à quels intervenants, ces désordres, malfaçons et inachèvements sont imputables et dans quelles proportions;
-dire si les travaux contestés ont été réalisés conformément aux documents contractuels et conformément aux règles de l’art;
-indiquer si les désordres allégués sont de nature à compromettre la solidité de l’ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination.
-décrire les travaux de reprise et procéder à un chiffrage desdits travaux,
-fournir tous éléments techniques et de fait de nature à déterminer les responsabilités encourues et évaluer les préjudices subis de toute nature, directs ou indirects, matériels ou immatériels résultant des désordres, notamment le préjudice de jouissance subi ou pouvant résulter des travaux de remise en état;
-dire si des travaux urgents sont nécessaires soit pour empêcher l’aggravation des désordres et du préjudice qui en découle, soit pour prévenir les dommages à la personne ou aux biens; Dans l’affirmative, à la demande d’une partie ou en cas de litige sur les travaux de sauvergarde nécessaires, décrire ces travaux et en faire une estimation sommaire, dans un rapport intermédiaire qui devra être déposé aussitôt que possible;
-fournir toutes les indications sur la durée prévisible des réfections ainsi que sur les préjudices accessoires qu’ils pourraient entraîner tels que privation ou limitation de jouissance ;
-donner son avis sur les comptes entre les parties ;

Disons que pour procéder à sa mission l’expert devra :
-convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils,
-recueillir leurs observations à l'occasion de l'exécution des opérations ou de la tenue des réunions d'expertise ;
-se faire remettre toutes pièces utiles à l'accomplissement de sa mission, notamment, s’il le juge utile, les pièces définissant le marché, les plans d’exécution, le dossier des ouvrages exécutés ;
-se rendre sur les lieux et si nécessaire en faire la description, au besoin en constituant un album photographique et en dressant des croquis ;
-définir un calendrier prévisionnel de ses opérations à l’issue de la première réunion d’expertise, ou dès que cela lui semble possible, et en concertation avec les parties; l’actualiser ensuite dans le meilleur délai :
→ en faisant définir un enveloppe financière pour les investigations à réaliser, de manière à permettre aux parties de préparer le budget nécessaire à la poursuite de ses opérations,
→ en les informant de l’évolution de l’estimation du montant prévisible de ses frais et honoraires et en les avisant de la saisine du juge du contrôle des demandes de consignation complémentaire qui s’en déduisent, sur le fondement de l'article 280 du code de procédure civile, et dont l'affectation aux parties relève du pouvoir discrétionnaire de ce dernier au sens de l'article 269 du même code ;
→ en fixant aux parties un délai impératif pour procéder aux interventions forcées
→ en les informant, le moment venu, de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse ;
-adresser aux parties au terme de ses opérations, un document de synthèse, sauf exception dont il s’expliquera dans son rapport (par ex : réunion de synthèse, communication d’un projet de rapport) et y arrêter le calendrier impératif de la phase conclusive de ses opérations, compte-tenu des délais octroyés devant rester raisonnable :
→ fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse ;
→ rappelant aux parties, au visa de l’article 276 alinéa 2 du code de procédure civile, qu’il n’est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au delà de ce délai.

Fixons à la somme de 2.000 euros, le montant de la provision à valoir sur les frais d’expertise qui devra être consignée par la partie demanderesse, à la Régie d’avances et de recettes du tribunal judiciaire de LILLE avant le 02 juillet 2024 ;

Disons que faute de consignation de la présente provision initiale dans ce délai impératif, ou demande de prorogation sollicitée en temps utile, la désignation de l’expert sera aussitôt caduque et de nul effet, sans autre formalité requise, conformément aux dispositions de l'article 271 du code de procédure civile;

Disons que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 248, 263 à 284-1 du code de procédure civile et qu'il déposera l'original de son rapport et en copie sous forme d’un fichier PDF, enregistré sur une clef USB, au Greffe du Tribunal Judiciaire de LILLE, Service du Contrôle des expertises, [Adresse 1], dans le délai de six mois, à compter de la consignation sauf prorogation de ce délai dûment sollicitée en temps utile de manière motivée auprès du Juge du Contrôle ;

Disons que l’exécution de la mesure d’instruction sera suivie par le juge du service du contrôle des expertises de ce tribunal, spécialement désigné à cette fin en application des articles 155 et 155-1 du même code ;

Déboutons Monsieur [E] [R] de sa demande en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Laissons à la charge de Monsieur [E] [R] les dépens de la présente instance ;

Rappelons que la présente ordonnance est exécutoire par provision.

La présente ordonnance a été signée par la juge et le greffier.

LE GREFFIER LA JUGE DES RÉFÉRÉS

Sébastien LESAGE Sarah HOURTOULE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Référés expertises
Numéro d'arrêt : 24/00444
Date de la décision : 28/05/2024
Sens de l'arrêt : Désigne un expert ou un autre technicien

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-28;24.00444 ?
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