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28/05/2024 | FRANCE | N°24/00393

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Référés expertises, 28 mai 2024, 24/00393


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
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Référés expertises
N° RG 24/00393 - N° Portalis DBZS-W-B7I-YA5X
SL/SH


ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
DU 28 MAI 2024



DEMANDEURS :

Mme [M]-[Y] [H] épouse [B]
[Adresse 7]
[Localité 9]
représentée par Me Jonathan DA RE, avocat au barreau de VALENCIENNES

M. [N] [B]
[Adresse 7]
[Localité 9]
représenté par Me Jonathan DA RE, avocat au barreau de VALENCIENNES



DÉFENDERESSES :

GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE HPM
[Adresse 6]
[Localité 8]

représentée par Me Bernadette NGO MASSOGUI, avocat au barreau de LILLE, postulant et Me Marie MASSON, avocat au barreau de COMPIEGNE, plaidant

EARL [X]
[Adresse 3...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Référés expertises
N° RG 24/00393 - N° Portalis DBZS-W-B7I-YA5X
SL/SH

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
DU 28 MAI 2024

DEMANDEURS :

Mme [M]-[Y] [H] épouse [B]
[Adresse 7]
[Localité 9]
représentée par Me Jonathan DA RE, avocat au barreau de VALENCIENNES

M. [N] [B]
[Adresse 7]
[Localité 9]
représenté par Me Jonathan DA RE, avocat au barreau de VALENCIENNES

DÉFENDERESSES :

GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE HPM
[Adresse 6]
[Localité 8]
représentée par Me Bernadette NGO MASSOGUI, avocat au barreau de LILLE, postulant et Me Marie MASSON, avocat au barreau de COMPIEGNE, plaidant

EARL [X]
[Adresse 3]
[Localité 9]
représentée par Me Jean-philippe VERAGUE, avocat au barreau d’ARRAS

JUGE DES RÉFÉRÉS : Sarah HOURTOULE, 1ere VP adjointe, suppléant le Président en vertu des articles R. 212-4 et R. 212-5 du Code de l’Organisation Judiciaire

GREFFIER : Martine FLAMENT lors des débats et Sébastien LESAGE lors de la mise à disposition

DÉBATS à l’audience publique du 14 Mai 2024

ORDONNANCE du 28 Mai 2024

LA JUGE DES RÉFÉRÉS

Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil et avoir mis l’affaire en délibéré, a statué en ces termes :

Monsieur [N] [B] et Madame [M] [Y] [H] épouse [B] sont propriétaires de l’immeuble situé au [Adresse 7] à [Localité 9] (parcelle cadastrée section A n°[Cadastre 1]).

Ils indiquent que durant les mois de juin 2023 et novembre 2023, de graves intempéries et orages ont touchés la commune et que l’eau et la boue se sont accumulés dans leur sous-sol d’habitation et leur jardin. Ils exposent que l’eau et la boue viennent d’un champ voisin exploité par l’EARL [X] (parcelle cadastrée section A n°[Cadastre 2]).

Le GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE HFM a consenti un bail rural à Monsieur [Z] [X] le 14 mai 2018 pour une durée de 9 ans à compter du 1er octobre 2017, pour les parcelles cadastrées sur la commune d’[Localité 9], section A n°[Cadastre 2], section ZD n°[Cadastre 4] et section ZD n°[Cadastre 5], mises à disposition au profit de l’EARL [X] qui exploite ces parcelles.

Exposant avoir constaté des désordres, Monsieur [N] [B] et Madame [M] [Y] [H] épouse [B] ont, par actes séparés du 20 et 29 février 2024, fait assigner l’EARL [X] et le GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE HFM devant le président du tribunal judiciaire de LILLE, statuant en référé, pour :
Vu l’article 145 du Code de procédure civile,
Vu les articles 640 et 641 du Code civil,
- DESIGNER tel expert qu’il plaira à Monsieur le Juge des référés, avec pour mission de :
- Se rendre sur les lieux, après avoir convoqué les parties et leurs Conseils ;
- Se faire remettre tous les documents et pièces qu’il estimera utile à l’accomplissement de la mission ;
- Examiner les désordres évoqués dans le corps de l’assignation et des éventuelles conclusions, ainsi qu’au sein des pièces communiquées et au besoin, en entendant tout sachant ;
- En déterminer les causes en précisant, et les décrire, dans leur nature, leur importance, dire s’ils affectent l’usage attendu du bien et dans l’affirmative, dire dans quelle mesure ;
- Rechercher les causes exactes de la coulée de boue du 23 juin 2023 ;
- Dire si cette coulée a été aggravée par les cultures présentes sur la parcelle cadastrée A[Cadastre 2]
- Décrire les travaux propres à remédier aux désordres en évaluant leur coût et leur durée d’exécution, ainsi que les dommages directs et indirects, matériels, immatériels, corporels subis par la demanderesse ;
- Fournir tous les éléments techniques et de fait, de nature à permettre à la juridiction quoi serait ultérieurement saisi de se prononcer sur les responsabilités encourues et les garanties engagées ;
- Faire toutes remarques utiles à la résolution du présent litige ;
- Etablir un pré-rapport, en laissant un délai suffisant aux parties leur permettant de formuler leurs observations ;
- Répondre aux dires des parties ;
- Dire que l'expert sera mis en œuvre et accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du Code de procédure civile et que, sauf conciliation des parties, il déposera son rapport au secrétariat-greffe de ce Tribunal dans les six mois de sa saisine ;
- Dire qu'il en sera référé en cas de difficultés.
- Réserver les dépens.

L’affaire a été appelée à l’audience du 26 mars 2024 et renvoyée à la demande des parties pour être plaidée le 14 mai 2024.

A cette date, Monsieur [N] [B] et Madame [M] [Y] [H] épouse [B] représentés par leur avocat sollicitent le bénéfice leurs dernières écritures déposées à l’audience et reprises oralement et reprennent les demandes de leur exploit introductif d’instance.

Aux termes de ses conclusions, l’EARL [X], représentée par son avocat, demande au président du tribunal judiciaire, statuant en référé, de :
Vu les dispositions des articles 145 et 146 du CPC,
- Débouter les époux [B] de leur demande d’expertise,
A titre subsidiaire,
- Constater que l’EARL [X] émet les plus expresses protestations et réserves d’usage
- Donner notamment mission à l’expert :
- “Dire si la coulée de boue dont se plaignent les époux [B] est liée exclusivement à l’ampleur des précipitations et à la topographie des lieux, ou si une intervention humaine a aggravé la servitude d’écoulement légalement prévue par l’article 640 du Code civil ;
- Donner un avis sur le caractère imprévisible et insurmontables des coulées de boue intervenues le 23 juin 2023".
- Statuer de ce que de droit quant aux dépens.
- Dire et juger que les demandeurs auront à faire l’avance des frais d’expertise judiciaire.

Aux termes de ses conclusions, le GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE HFM, représenté par son avocat, demande au président du tribunal judiciaire, statuant en référé, de :
Vu l’article 145 du code de procédure civile
Vu le plan Géoportail
- RECEVOIR les conclusions du GFA HFM,
- PRENDRE ACTE des protestations et réserves de la société GFA HFM,
- PRÉCISER la mission de l’expert :
- Dire que l’expert devra avoir la spécialité agricole ;
- Indiquer si le propriétaire du sol peut être tenu pour responsable des éventuels préjudices subis par les demandeurs ;
- Dire que les frais d’expertise seront supportés par les consorts [B]

- ORDONNER que les frais d’expertise seront supportés par M. et Mme [B]
En tout état de cause,
- RÉSERVER les dépens,
- CONDAMNER M. et Mme [B] à verser la somme de 1.500 euros au GFA HFM, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Conformément aux dispositions des articles 455 et 446-1 du code de procédure civile, il est fait référence à l’acte introductif d’instance et aux écritures des parties qui ont été soutenues oralement.

La présente décision, susceptible d’appel, est contradictoire.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande d'expertise

Les époux [B] estiment avoir subi d’importants sinistres de dégâts des eaux, en lien direct avec le ruissellement des eaux de pluies provenant de la parcelle exploitée par l’EARL [X], et appartement au GFA de HFM.
Ils précisent que le champ exploité par l’EARL [X] a la particularité d’être à la fois en surplomb et en déclivité vers leur habitation.
Ils sollicitent qu’un expert détermine les causes du sinistre et proposent toute solution permettant d’y mettre fin, d’en chiffrer le coût et de déterminer les préjudices subis outre la détermination des conditions d’exercice de la servitude d’écoulement des eaux pluviales.
Monsieur [N] [B] et Madame [M] [Y] [H] épouse [B] répondent aux moyens avancés par la SARL [X], en expliquant que l’article 146 du code de procédure civile ne s’applique pas, selon une jurisprudence lorsque la mesure d’instruction est sollicitée en vertu de l’article 145 du même code.
Les demandeurs ajoutent que pour l’application de l’article 640 du Code civil, est compétent, en premier ressort, le juge du tribunal judiciaire du canton et que l’expertise permettra de déterminer les conditions d’exercice de la servitude d’écoulement.

La société GFA HFM formule protestations et réserves et conteste toute responsabilité dans le dommage survenu.

La SARL [X] s’oppose à l’expertise et fait valoir qu’en application de l’article 146 du code de procédure civile, une mesure d’instruction ne peut être ordonnée pour suppléer la carence des parties dans l’administration de la preuve et qu’en l’espèce, les demandeurs imputent sans aucun élément probatoire les coulées de boue à une prétendue exploitation défaillante par l’EARL [X] de la parcelle A1298.
La société ajoute qu’en application de l’article 640 du code civil, le fonds inférieur, celui des consorts [B], doit recevoir les eaux qui en découlent naturellement sans que la main de l’homme y ait contribué. En l’espèce, la main de l’EARL [X] n’a en rien modifié la servitude légale que supporte le fonds inférieur, si ne c’est que le caractère exceptionnel des précipitations, qui a probablement causé ou aggravé la servitude que supporte le fonds des consorts [B].
A titre subsidiaire, la SARL [X] formule les protestations et réserves d’usage.

A titre liminaire, il est constant, que l’article 146 du code de procédure civile relatif aux mesures d’instruction ordonnées au cours d’un procès ne s’applique pas lorsque le juge est saisi d’une demande fondée sur l’article 145 du même code.

Selon l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé. Il suffit qu’un procès futur soit possible, qu’il ait un objet et un fondement suffisamment déterminé, que le demandeur produise des éléments rendant crédibles ses suppositions, sans qu’il n’y ait lieu à exiger un commencement de preuve des faits invoqués, que l’expertise est justement destinée à établir; que sa solution puisse dépendre de la mesure d’instruction sollicitée, que celle-ci ne soit pas vouée à l’échec en raison d’un obstacle de fait ou de droit et ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d’autrui.
L’existence de contestations, même sérieuses, ne constitue pas un obstacle à la mise en œuvre des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile, l’application de ce texte n’impliquant aucun préjugé sur la responsabilité des personnes appelées comme parties à la procédure, ni sur les chances de succès du procès susceptible d’être ultérieurement engagé.

Les photographies versées aux débats (pièces demandeurs n°6 , 7, 8, 14, 15 et 16) ne permettent pas d’établir ni la réalité des lieux photographiés, ni la date des clichés pris s’agissant de tirage papier imprimé et annoté par les demandeurs.
L’accord pour l’indemnisation de leur dommage par leur assurance habitation la CIC ASSURANCES suite à un sinistre en date du 1er juin 2018 concerne un sinistre de 2018. (pièce demandeurs n°9)

La facture du 14 novembre 2023 établie par la société CM SERVICES pour la réalisation d’un terrassement et la pose d’une pompe de relevage (pièce n°10 demandeur) et le devis du 27 septembre 2023 de la société DPK pour des travaux d’aménagement d’extérieur pavage et mur pour un montant de 15 829 euros (pièce demandeurs n°13) ne permettent pas d’établir les désordres invoqués mais simplement la réalisation d’un terrassement et l’installation d’une pompe de relevage.

Le courrier du 29 novembre 2023 de la MEL est une réponse au courrier des époux [B] s’agissant du problème de ruissellement et la MEL les invite à se tourner vers leur assurance habitation ainsi qu’à prendre contact avec l’agriculteur concerné. (pièce demandeurs n°12)
Le courrier de l’union des experts Haut de France du 13 novembre 2023 les invite aussi à prendre attache avec leur assurance. (Pièce demandeurs n°11)
Cependant, les époux [B] ne produisent pas leur déclaration de sinitre ni les démarches qu’ils auraient faites auprès de leurs voisins.

Monsieur [N] [B] et Madame [M] [Y] [H] épouse [B] échouent à démontrer leur préjudice et à justifier d’un motif légitime pour obtenir la désignation d’un expert.

En conséquence, ils seront déboutés de leur demande de désignation d’un expert judiciaire.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le juge des référés a l’obligation de statuer sur les dépens en application des dispositions de l’article 491 du code de procédure civile. Il ne saurait donc réserver les dépens comme sollicité par Monsieur [N] [B] et Madame [M] [Y] [H] épouse [B] et le GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE HFM.

L’article 491, alinéa 2 du Code de procédure civile dispose que le juge statuant en référé statue sur les dépens. L’article 696 dudit Code précise que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

Monsieur [N] [B] et Madame [M] [Y] [H] épouse [B], qui succombent, doivent supporter la charge des dépens, conformément aux dispositions susvisées.

En application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, la partie tenue aux dépens ou à défaut, la partie perdante, est condamnée au paiement d’une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, en tenant compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée.

Aucun élément tiré de l’équité ou de la situation économique de Monsieur [N] [B] et Madame [M] [Y] [H] épouse [B] ne permet d’écarter la demande du GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE HFM formée sur le fondement des dispositions susvisées. Celle-ci sera cependant évaluée à la somme de 1000 euros.

Sur l’exécution provisoire

La présente décision, susceptible d’appel, est exécutoire par provision, en application des dispositions des articles 484, 514 et 514-1, alinéa 3, du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance de référé, par mise à disposition au greffe, après débats en audience publique, par décision contradictoire et en premier ressort ;

Renvoyons les parties à se pourvoir sur le fond du litige ;

Par provision, tous moyens des parties étant réservés ;

Déboutons Monsieur [N] [B] et Madame [M] [Y] [H] épouse [B] de leur demande de désignation d’un expert ;

Condamnons Monsieur [N] [B] et Madame [M] [Y] [H] épouse [B] à payer au GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE HFM la somme de 1000 euros (mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons Monsieur [N] [B] et Madame [M] [Y] [H] épouse [B] au paiement des dépens de la présente instance,

Rappelons que la présente ordonnance est exécutoire par provision.

La présente ordonnance a été signée par la juge et le greffier.

LE GREFFIER LA JUGE DES RÉFÉRÉS

Sébastien LESAGE Sarah HOURTOULE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Référés expertises
Numéro d'arrêt : 24/00393
Date de la décision : 28/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-28;24.00393 ?
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