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27/05/2024 | FRANCE | N°21/02675

France | France, Tribunal judiciaire de Lille, Chambre 01, 27 mai 2024, 21/02675


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Chambre 01
N° RG 21/02675 - N° Portalis DBZS-W-B7F-VIND


JUGEMENT DU 27 MAI 2024



DEMANDERESSE :

Mme [G] [H] veuve [W]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Virginie STIENNE-DUWEZ, avocat au barreau de LILLE


DÉFENDERESSE :

La S.A.R.L. unipersonnelle 70 FOOD,
immatriculée au RCS de LILLE METROPOLE sous le n°509 298 600,
ayant son siège social au [Adresse 1] à [Localité 3] prise en la personne de son représentant légal audit siège
[Adresse 1]
[

Localité 3]
représentée par Me Priscilla PUTEANUS, avocat au barreau de LILLE



COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président : Aurélie VERON, Vic...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Chambre 01
N° RG 21/02675 - N° Portalis DBZS-W-B7F-VIND

JUGEMENT DU 27 MAI 2024

DEMANDERESSE :

Mme [G] [H] veuve [W]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Virginie STIENNE-DUWEZ, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDERESSE :

La S.A.R.L. unipersonnelle 70 FOOD,
immatriculée au RCS de LILLE METROPOLE sous le n°509 298 600,
ayant son siège social au [Adresse 1] à [Localité 3] prise en la personne de son représentant légal audit siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Priscilla PUTEANUS, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président : Aurélie VERON, Vice-présidente, statuant en qualité de Juge Unique, en application de l’article R 212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire,

Greffier : Benjamin LAPLUME,

DÉBATS :

Vu l’ordonnance de clôture rendue en date du 06 juillet 2023, avec effet au 30 Juin 2023;

A l’audience publique du 12 Février 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré, les avocats ont été avisés que le jugement serait rendu le 15 avril 2024, prorogé au 06 mai 2024 puis prorogé pour être rendu le 27 Mai 2024

JUGEMENT : contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au Greffe le 27 Mai 2024, et signé par Aurélie VERON, Président, assistée de Benjamin LAPLUME, Greffier.

EXPOSE DU LITIGE

Mme [G] [H] veuve [W] est propriétaire d'un immeuble sis [Adresse 1] depuis le 2 septembre 2019 suite à la révocation de la donation faite à son fils par jugement de cette date.

Par acte sous seing privé du 1er novembre 2008, Mme [H] a donné à bail à la S.A.R.L. 70 Food en cours de constitution des locaux au sein de l'immeuble sis [Adresse 1] moyennant le règlement d'un loyer annuel de 8 760 euros. Le bail a été conclu pour une durée de neuf années, à compter du 1er novembre 2008.

Le bail s'est poursuivi par tacite prolongation.

Par courrier du 11 septembre 2020, Mme [H] a avisé la SARL 70 Food de ce qu'elle était de nouveau la propriétaire de l'immeuble

Se plaignant d'impayés de loyers, par acte d'huissier du 21 octobre 2020, Mme [G] [H] veuve [W] a fait délivrer à la S.A.R.L. 70 Food un commandement de payer visant la clause résolutoire pour un montant de 11 173,47 euros.

Par exploit d’huissier délivré le 15 avril 2021, Mme [G] [H] veuve [W] a assigné la S.A.R.L. 70 Food devant le tribunal judiciaire de Lille en constat de l'acquisition de la clause résolutoire et en paiement des loyers et charges.

Dans ses dernières conclusions signifiées par la voie électronique le 27 mars 2023, Mme [H] demande à la juridiction de :

- Constater la résiliation de plein droit du bail commercial suite au défaut de paiement des loyers, charges, prestations et frais dans le délai d’un mois à compter du commandement de payer visant la clause résolutoire signifié le 21 octobre 2020;

- A défaut, le cas échéant, prononcer la résiliation du bail pour manquement du bailleur à ses obligations ;

- Par voie de conséquence, déclarer la SARLU 70 Food sans droit au maintien dans les lieux ;

-La Condamner à délaisser et rendre libres de toute personne et de tout bien les lieux qu’elle occupe situé [Adresse 1] en satisfaisant aux obligations d’un locataire sortant ;

- Juger que faute pour elle de le faire immédiatement elle sera expulsée ainsi que tous les occupants de son chef avec au besoin le concours de la force publique ;

- La Condamner à lui payer en deniers ou quittances valables la somme de 7 893,88 euros avec intérêts au taux légal à compter du 21 octobre 2020, lesquels porteront intérêts au taux légal à chaque échéance annuelle et pour la première fois le 21 octobre 2021 ;

- Juger que les condamnations porteront intérêts au taux légal à compter du commandement pour la somme énoncée dans les causes du commandement et de la présente assignation pour le surplus conformément aux dispositions de l’article 1231-6 du code civil ;

- La Condamner à lui payer une indemnité d’occupation due jusqu’à complète libération des lieux, ladite indemnité d’occupation s’élevant mensuellement aux prix du loyer actuel, charges comprises ;

- Juger que la part correspondant aux charges dans cette indemnité d’occupation pourra être réajustée au cas où les charges réelles dépasseraient 12 fois la provision;

- Condamner la SARLU 70 Food à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

- La Condamner à remettre en état le local technique dans le délai de 8 jours à compter du jugement à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

- La Condamner à payer la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers frais et dépens ;

- La Débouter de l’ensemble de ses demandes.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 2 juin 2023, la S.A.R.L. 70 Food s’oppose aux demandes formées à son encontre. Elle sollicite de la juridiction de :

- Surseoir à l'exécution des poursuite à son égard ;

- Débouter Mme [H] de sa demande de résiliation du bail commercial suite au défaut de paiement du loyer ;

- La Débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

En conséquence,

- Dire et Juger que sa dette est d'un montant de 1 160 euros ;
l'Autoriser à procéder au paiement de l'arriéré de manière échelonnée sur une durée ne pouvant excéder vingt-quatre mois à compter du jugement à intervenir, en sus du loyer courant ;

- Dire qu'à défaut d'un seul versement à l'échéance, l'intégralité de la dette sera immédiatement exigible sans mise en demeure préalable ;

- Rappeler que la décision suspend les procédures d'exécution et que les majorations d'intérêts ou les pénalités encourues à raison du retard cessent d'être dues pendant le délai fixé par la décision ;

- Condamner Mme [H] à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Il est renvoyé aux conclusions récapitulatives des parties pour un plus ample exposé des motifs conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture des débats est intervenue le 30 juin 2023 par ordonnance du 6 juillet 2023 avec fixation de l'affaire à l'audience du 12 février 2024 à l'issue de laquelle la décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 15 avril 2024 prorogé au 27 mai 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, les demandes des parties tendant à voir le tribunal "constater" ou "dire et juger" ne constituant pas des prétentions au sens des articles 4, 5, 31, 768 et 954 du code de procédure civile mais des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions, il n'y a pas lieu de statuer sur celles ci.

I- Sur la résiliation du contrat de bail

1- Sur la clause résolutoire

- Sur l'acquisition de la clause résolutoire

Aux termes des articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

L’article 1353 du code civil dispose qu'il incombe à celui qui réclame l’exécution d’une obligation de la prouver. Celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

L'article 1224 du code civil dispose que la résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice. Selon l'article 1225 du même code, la clause résolutoire précise les engagements dont l'inexécution entraînera la résolution du contrat. La résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse, s'il n'a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l'inexécution. La mise en demeure ne produit effet que si elle mentionne expressément la clause résolutoire.

En vertu de l'article L.145-41 du code de commerce, qui est d'ordre public, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai. Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1345 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.

En application de cet article, la clause résolutoire d'un bail commercial doit s'interpréter strictement et doit être mise en œuvre de bonne foi.

En l'espèce, le contrat de bail à usage commercial prévoit en pages 10/11 une clause résolutoire ainsi rédigée :

« Il est expressément stipulé qu'à défaut de paiement à son échéance d'un seul terme de loyer ou de ses accessoires et, un mois après un simple commandement de payer, fait à personne ou à siège social ci-après élu, contenant déclaration par le bailleur de son intention d'user du bénéfice de la présente clause, demeuré infructueux, le présent bail sera résilié si bon semble au bailleur, même dans le cas de paiement postérieur à l'expiration du délai ci-dessus. La résiliation interviendra alors de plein droit sans qu'il soit besoin de former aucune demande judiciaire. »

Le commandement de payer visant la clause résolutoire a été délivré le 21 octobre 2020 pour un montant en principal de 10 981,66 euros correspondant aux loyers de septembre 2019 à octobre 2020 d'un montant mensuel de 730 euros et à la taxe foncière de 2019 d'un montant proratisé de 761,66 euros.

La SARL 70 Food justifie des versements suivants :

500 euros le 10 septembre 2019 par virement à M. [U] [W]500 euros le 10 décembre 2019 par virement à M. [U] [W]500 euros le 11 février 2020 par virement à M. [U] [W]730 euros le 22 septembre 2020 par virement à Mme [G] [W]730 euros le 13 octobre 2020 par virement à Mme [G] [W]1500 euros le 27 octobre 2020 par virement à M. [U] [W] (avec la mention loyer + eau+ taxe foncière dernier trimestre 2019)1320 euros le 28 octobre 2020 par virement à M. [U] [W] (avec la mention loyer+ taxe foncière dernier trimestre 2019 + eau 2019)730 euros le 12 novembre 2020 par virement à Mme [G] [W].
= 6 510 euros.

Les quittances de loyer produites, qui ne correspondent aux virements dont la société 70 Food justifie, ni s'agissant des montants, ni s'agissant des dates, sont insuffisants à établir la preuve de règlements.

Le jugement du tribunal de grande instance de Lille du 2 septembre 2019, devenu définitif, a prononcé la révocation pour cause d'ingratitude de la donation faite par Mme [H] à son fils M. [U] [W] et a en conséquence décidé que devaient lui être restituées la moitié en plein propriété et la moitié en usufruit de l'immeuble situé [Adresse 1]. En revanche, Mme [H] a été déboutée de sa demande de restitution des loyers depuis l'assignation.

Mme [H] ne justifie pas avoir avisé le locataire de cette décision et de ce que les loyers devaient désormais lui être réglés avant son courrier recommandé du 11 septembre 2020. Elle ne peut donc se plaindre de ce qu'avant cette date, le preneur a réglé le loyer entre les mains de M. [U] [W]. Ainsi les virements effectués les 10 septembre 2019, 10 décembre 2019 et 11 février 2020 doivent être pris en compte au titre du règlement du loyer. A l'inverse, les virements effectués les 27 et 28 octobre 2020 sur le compte de M. [U] [W] ne constituent pas des règlements des loyers puisqu'ils n'ont pas été effectués auprès de la nouvelle bailleresse, le preneur étant avisé du changement.

En toute hypothèse, la société 70 Food ne justifie pas s'être acquittée des causes du commandement dans le délai d'un mois à compter de sa délivrance, soit avant le 21 novembre 2020.

Il convient en conséquence de constater l'acquisition de la clause résolutoire à la date du 21 novembre 2020.

Sur les effets de la résiliation du bail
L'expulsion du locataire et de tout occupant de son chef sera ordonnée, si besoin avec le concours de la force publique, à défaut de départ volontaire des locaux dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision.

Le maintien dans les lieux du preneur postérieurement à la résiliation du bail cause un préjudice au bailleur qu'il convient de réparer par l'allocation d'une indemnité d'occupation mensuelle qui sera justement fixée au même montant que le loyer augmenté des charges réelles.

II- Sur le paiement des loyers et des charges

Aux termes des articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

L’article 1353 du code civil dispose qu'il incombe à celui qui réclame l’exécution d’une obligation de la prouver. Celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

En l'espèce, la requérante produit un décompte manuel faisant état d'un arriéré locatif de 7 893,88 euros au 24 février 2023 se décomposant en :

1920 euros d'arriérés de loyers de 2019253,88 euros de taxe foncière 20191340 euros d'arriérés de loyers de 20204380 euros de caution.

Le preneur se prévaut de règlements supplémentaires. Cependant, ainsi que cela a été relevé précédemment, les cinq quittances de loyer émanant de M. [U] [W] datées du 8 novembre 2020 faisant état de trois règlements de 730 euros pour les loyers de septembre à décembre 2019, d'un règlement de 700 euros au titre de la facture d'eau de l'année 2019 et d'un règlement de 930 euros au titre de la taxe foncière 2019, l'ensemble de ces règlements ayant été effectué le 30 octobre 2020, sont en contradiction avec les virements dont il est justifié pour le mois d'octobre 2020, quant aux dates et aux montants.

Au surplus, il sera à nouveau relevé que le preneur étant avisé depuis le 11 septembre 2020 du changement de propriétaire depuis septembre 2019, il ne pouvait valablement s'acquitter des loyers et charges entre les mains de M. [U] [W]. Compte tenu de ces éléments, ces quittances ne justifient pas de règlements des sommes dues à Mme [H].

Pour le mois de décembre 2020, il est justifié d'un seul virement de 730 euros (pièce 4 défendeur). Pour le mois de juillet 2020, il n'est justifié que de deux virements de 730 euros et 500 euros (pièce 32 défendeur). De même, pour le mois de juillet 2022, il n'est justifié que d'un virement de 730 euros (pièce 52 défendeur).

Ainsi, la société 70 Food ne justifie pas d'autres paiements que ceux repris par la bailleresse dans son décompte. Elle ne justifie pas davantage du paiement de la caution de 4 380 euros.

En conséquence, il convient de la condamner à payer à Mme [H] la somme totale de 7 893,88 euros arrêtée au 24 février 2023, au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation.

Cette somme portera intérêts au taux légal, à compter du 21 octobre 2020.

La capitalisation sera ordonnée.

III- Sur la demande de délais de paiement

Aux termes de l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.

Il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.

La décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.

Toute stipulation contraire est réputée non écrite.

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux dettes d'aliment.

L'article L.145-41 du code de commerce dispose en outre que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.

En l'espèce, la société 70 Food sollicite l'octroi de délais de paiement afin de s'acquitter de sa dette sans faire état d'autres difficultés financières que celles liées au covid-19, soit datant de plusieurs années. Elle ne s'explique ni ne justifie de sa situation financière et de trésorerie ni ne précise les mensualités de remboursement dont elle pourrait s'acquitter en sus du loyer courant de 730 euros par mois. Par ailleurs, force est de constater qu'au cours de l'année 2022 et du début de l'année 2023, elle n'a effectué qu'un seul versement de 500 euros en sus du loyer courant pour apurer sa dette.

En conséquence, compte tenu de l'absence de justification de sa situation financière par le preneur et de sa capacité à respecter un échéancier et en considération des besoins de la créancière personne physique, il convient de débouter la société 70 Food de sa demande de délais de paiement et de sa demande consécutive de suspension des effets de la clause résolutoire.

Elle sera de même déboutée de sa demande de sursis à l'exécution des poursuites.

IV- Sur la demande de dommages-intérêts

Selon l'article 1231-6 du code civil, les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte. Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l'intérêt moratoire.

En l'espèce, Mme [H] ne justifie ni d'un préjudice autre que le retard de paiement ni de la mauvaise foi du débiteur dans le retard de règlement des loyers.

En conséquence, elle sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts.

V- Sur la demande de remise en état du local technique

A titre liminaire, il convient de rappeler que, conformément à l'article 768 du code de procédure civile, le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion. En outre, en vertu de ce même article, les parties doivent formuler expressément leurs prétentions et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune des prétentions est fondée avec indication pour chacune des prétentions des pièces invoquées et de leur numérotation.

Dans ses conclusions, Mme [H] ne distingue pas l'exposé des faits et de la procédure de la discussion des prétentions, ni ne distingue pour chaque prétention les moyens de fait et de droit.

Ainsi, s'agissant de la demande de remise en état du local technique, non seulement la demande est imprécise en ce qu'elle n'explicite pas les travaux réclamés au titre de la remise en état mais encore l'absence de paragraphe distinct dans les conclusions relatif à cette prétention ne permet pas de déterminer le fondement juridique et les moyens de fait sur lesquels se base la requérante.

Il sera également relevé que Mme [H] semble indiquer que le local technique n'est pas compris dans le bail, de sorte qu'il ne peut être demandé au locataire de procéder aux réparations locatives dans cette pièce.

Au regard de ces éléments et notamment de l'absence de précision sur les travaux que Mme [H] entend voir réaliser dans le local technique, il convient de rejeter sa demande de remise en état sous astreinte du local technique.

VI- Sur les demandes accessoires

1. Sur l'exécution provisoire

Aux termes de l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

2. Sur les frais irrépétibles et les dépens

La S.A.R.L. 70 Food succombant au principal, elle supportera les dépens de la présente instance et sera redevable d’une indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile qui sera justement fixée à la somme de 1 200 euros.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, par décision contradictoire et en premier ressort,

CONSTATE la résiliation du bail commercial liant Mme [G] [H] veuve [W] à la S.A.R.L. 70 Food portant sur le local commercial situé [Adresse 1] par l'effet de l'acquisition de la clause résolutoire à la date du 21 novembre 2020 ;

DÉBOUTE la S.A.R.L. 70 Food de sa demande de délais de paiement ;

LA DÉBOUTE de sa demande de sursis à l'exécution des poursuites ;

ORDONNE l'expulsion de la S.A.R.L. 70 Food du local commercial sis [Adresse 1] à défaut de libération volontaire effective dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision et avec le concours de la force publique si nécessaire ;

CONDAMNE la S.A.R.L. 70 Food à une indemnité d'occupation mensuelle équivalente au loyer mensuel augmenté des charges réelles à compter de la résolution du bail, soit à compter du 21 novembre 2020 et jusqu'à la libération complète des locaux avec remise des clés ;

CONDAMNE la S.A.R.L. 70 Food à payer à Mme [G] [H] veuve [W] la somme de 7 893,88 euros arrêtée au 24 février 2023, au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation avec intérêts au taux légal à compter du 21 octobre 2020 ;

ORDONNE la capitalisation des intérêts ayant couru chaque année ;

DÉBOUTE Mme [H] de sa demande de dommages-intérêts ;

LA DÉBOUTE de sa demande de remise en état du local technique sous astreinte ;

CONDAMNE la S.A.R.L. 70 Food à payer à Mme [G] [H] veuve [W] la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE la S.A.R.L. 70 Food de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit ;

DÉBOUTE Mme [G] [H] veuve [W] de ses autres demandes ;

DÉBOUTE la S.A.R.L. 70 Food de ses autres demandes ;

CONDAMNE la S.A.R.L. 70 Food aux dépens de la présente instance.

LE GREFFIERLA PRÉSIDENTE

Benjamin LAPLUMEAurélie VERON


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lille
Formation : Chambre 01
Numéro d'arrêt : 21/02675
Date de la décision : 27/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-27;21.02675 ?
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