TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
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Chambre 01
N° RG 22/00982 - N° Portalis DBZS-W-B7G-V45B
JUGEMENT DU 15 MARS 2024
DEMANDERESSE:
Mme [E] [K] épouse [L]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
représentée par Me Corinne THULIER-DESURMONT, avocat au barreau de LILLE
DÉFENDERESSE:
Mme [D] [K] épouse [F]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Alexis IHOU, avocat au barreau de LILLE
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Président: Anne BEAUVAIS,
Assesseur: Juliette BEUSCHAERT,
Assesseur: Marie TERRIER,
Greffier: Benjamin LAPLUME,
DÉBATS
Vu l’ordonnance de clôture en date du 20 Février 2023.
A l’audience publique du 12 Décembre 2023, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré,les avocats ont été avisés que le jugement serait rendu le 15 Mars 2024.
Vu l’article 804 du Code de procédure civile, Juliette BEUSCHAERT, juge préalablement désigné par le Président, entendu en son rapport oral, et qui, ayant entendu la plaidoirie, en a rendu compte au Tribunal.
JUGEMENT : contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au Greffe le 26 Janvier 2024 par Marie TERRIER, Présidente, pour la présidente empêchée Anne BEAUVAIS, assistée de Benjamin LAPLUME, Greffier.
Monsieur [N] [K] veuf de Madame [H] [A] prédécédée le [Date décès 3] 2020, est décédé à [Localité 11], le [Date décès 4] 2020.
Il a laissé pour recueillir sa succession, ses deux filles, issues de son union avec Madame [A] : Madame [E] [B] [P] [K] épouse [L] et Madame [D] [G] [I] [K] épouse [F], héritières chacune pour moitié.
L’acte de notoriété a été reçu par Maître [O] [J], notaire à [Localité 8], le 4 septembre 2020.
De la succession dépendent notamment deux biens immobiliers sis à [Adresse 5] et sis à [Adresse 2] ainsi que plusieurs actifs de portefeuilles bancaires.
Un projet de liquidation de la succession a été présenté par Maître [O] [J] aux parties. Plusieurs échanges sont intervenus entre les héritiers sur la composition de la masse partageable sans qu’elles parviennent à un accord permettant un partage amiable de la succession.
Par acte d’huissier en date du 4 février 2022, Madame [E] [L] a fait assigner Madame [D] [F] devant le Tribunal judiciaire de LILLE aux fins notamment d’ouverture des opérations de compte, liquidation partage de la succession de leur père.
Sur cette assignation, Madame [D] [F] a constitué avocat et les parties ont échangé leurs conclusions.
La clôture de l’instruction est intervenue le 20 février 2023 et l’affaire fixée à plaider à l’audience prise à juge rapporteur du 12 décembre 2023.
Aux termes des dernières conclusions signifiées par la voie électronique le 26 janvier 2023, Madame [E] [K] épouse [L] demande au tribunal de :
Vu l'article 840 du Code Civil,
Vu l’article 831-2 du Code civil,
Vu l’article 1742 du Code civil,
Vu les articles 700, 1360, 1361, 1364 et 1368 du Code de procédure civile,
- Débouter Madame [F]-[K] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions et en particulier :
- de sa demande de fixation de la valeur de l’immeuble de [Localité 13] à 220 000 € ;
- de sa demande de fixation de la valeur de l’immeuble de [Localité 11] à 190 000 € ;
- de sa demande d’attribution préférentielle de l’immeuble de [Localité 11] ;
- de ses demandes au titre du rapport à succession de l’ensemble des loyers, des sommes de 2 639 €, 13 008 € et 47 513 € ;
- de sa demande de fixation du loyer de l’immeuble de [Localité 13] à la somme de 950 € ;
- de se demande de reconnaissance d’un recel d’actif successoral ;
- de sa demande de condamnation à des dommages et intérêts ;
- de sa demande relative au paiement du retard des droits successoraux ;
- de sa demande d’autorisation à régler seule l’ensemble des dettes successorales ;
- de sa demande de condamnation à régler la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
- Ordonner l’ouverture des opérations de liquidation et partage de la succession de Monsieur [N] [K], retraité, veuf de Madame [H] [A], décédé le [Date décès 4] 2020 au domicile de sa fille [E] [L]-[K], [Adresse 5];
- Désigner Maître [O] [J], Notaire à [Localité 8], afin de procéder à la liquidation de la succession ;
- Dire et juger que l’immeuble de [Localité 13] sera repris pour une valeur de 213 000€;
- Attribuer l’immeuble de [Localité 13] préférentiellement à Madame [L]-[K] ;
- Fixer la date de jouissance divise sur l’immeuble de [Localité 13] au 1er juillet 2018;
- Dire et juger que le Notaire devra procéder à l’estimation de l’immeuble de [Localité 11] ;
- Rappeler que, conformément aux dispositions de l’article 1368 du Code de procédure civile, dans le délai d’UN AN suivant sa désignation, le Notaire dressera un état liquidatif qui établit les comptes entre copartageants, la masse partageable, les droits des parties et la composition des lots à répartir ;
- Autoriser le Notaire à interroger les fichiers FICOBA et CIRNS ;
- Commettre un juge pour surveiller les opérations du Notaire et dire que le Notaire en référera au Juge commis en cas de difficulté ;
- Ordonner la prise en charge par la succession des frais liés à la mission du Notaire ;
- Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir ;
- Condamner Madame [D] [F]-[K] à verser à Madame [L]-[K] la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance, dont distraction au profit de Maître Corinne THULIER, membre de la SCP CARNOT JURIS FAMILLE, Avocat aux offres de droit.
Madame [E] [L] invoque au soutien de sa demande d’attribution préférentielle du bien sis à [Localité 13], qu’elle est légitime à la solliciter puisque le bien constitue sa résidence principale notamment au moment du décès, en vertu d’un bail sous signature privée.
Au soutien de sa demande de voir débouter Madame [D] [F] pour l’attribution préférentielle de l’immeuble sis à [Localité 11], elle fait valoir que sa sœur ne bénéficie d’aucun contrat de location sur ce bien, qu’elle ne démontre pas y avoir résidé et ne justifie ainsi pas remplir les conditions de l’article 831-2 du Code civil applicable.
Quant à l’évaluation de l’immeuble de [Localité 13], elle souligne que l’évaluation voulue par la défenderesse correspond à la valeur d’acquisition du bien en 2018 ; qu’elle-même accepte que soit reprise sa valeur d’acquisition au 28 mars 2018, mais après déduction de la valeur du mobilier, soit 213.000 euros ; et que ce faisant, elle souhaite que la jouissance divise soit fixée au 1er juillet 2018, date du bail, ce qui permet de clore le débat sur la fixation de la valeur de l’immeuble au jour le plus proche du partage sauf accord sur une date antérieure, en application des dispositions des articles 832-4 et 829 du Code civil.
S’agissant du loyer litigieux, Madame [E] [L] réplique que la valeur locative du bien sollicitée par Madame [D] [F] ne tient pas compte des travaux importants et nécessaires qu’elle a réglés personnellement et qui auraient dû être pris en charge par les propriétaires. Elle invoque que pour la fixation du loyer, il a été tenu compte de cette contrepartie et soutient que sans ces travaux, la prise à bail au profit d’un tiers n’aurait pu avoir lieu. Par ailleurs, elle précise que ces travaux n’ont pas entraîné une destruction de l’immeuble mais étaient nécessaires. Elle rejette la comparaison avec la valeur locative fiscale et la valeur locative de référence invoquée par Madame [D] [F], non représentative de la situation.
Madame [E] [L] conteste le rapport demandé à la succession des loyers en invoquant que l’administration fiscale n’a émis aucune contestation au sujet du montant du loyer. Elle soutient que la donation n’est pas caractérisée en l’absence de dépossession du donateur ou de remise d’un bien ou d’une somme d’argent et que la présence d’un bail écrit démontre l’absence d’intention libérale. Elle souligne particulièrement que ses parents déclaraient les loyers perçus au titre de la déclaration de revenus.
Affirmant qu’elle n’a pas perçu toutes les sommes déclarées fiscalement par ses père et mère, Madame [E] [L] s’oppose, à supposer le versement effectif pour toutes les sommes déclarées, à la restitution à la succession de ce qu’elle a perçu au titre d’une aide alimentaire, en invoquant que Madame [D] [F] a elle-même encaissé des sommes dont elle n’entend pas faire le rapport.
Elle soutient que l’aide alimentaire exclut l’idée d’une intention libérale selon les dispositions des articles 843, 852 et 205 et suivants du Code civil. Elle souligne la modestie de ses propres revenus à l’époque et précise que cette aide représentait moins de 10% des revenus des débiteurs et n’a pas entamé le capital des époux. Elle précise que les sommes ont été déclarées, ce qui en exclut le caractère libéral. Elle ajoute que l’administration fiscale n’a jamais remis en question la déductibilité de l’aide alimentaire et ni donc envisagé une fraude.
Sur la demande de condamnation au recel successoral, Madame [E] [L] rétorque que Madame [F] ne caractérise ni l’élément matériel ni l’élément intentionnel du recel successoral, soulignant qu’il n’y a jamais eu dissimulation, qu’il s’agisse de l’aide perçue, du contrat d’assurance vie ou de la somme perçue pour l’achat d’un véhicule.
Madame [E] [L] s’oppose à la demande de rapport de la somme de 2.639,00 euros formée par la défenderesse, en soulignant qu’il ressort du tableau en pièce 30 établi par la défenderesse que cette dernière a elle-même reçu plus de 16.000 euros, et qu’il n’y a aucune raison qu’elle-même soit contrainte au rapport et pas sa sœur ; qu’en tout état de cause ses relevés bancaires sur lesquels la défenderesse appuie sa demande de rapport de la somme de 2.639 euros, ne permettent pas de distinguer ladite somme de l’aide alimentaire qu’elle a perçue sur la période.
Madame [E] [L] acquiesce au rapport de la somme de 13.008,00 euros au titre du financement du véhicule, faisant valoir qu’elle ne l’avait jamais contesté, sauf à avoir demandé, dans un souci d’équité, que Madame [D] [F] rapporte elle-même l’aide qu’elle avait reçue à deux occasions pour des véhicules.
Concernant les frais et pénalités de retard, Madame [E] [L] invoque qu’elle a procédé à la régularisation de chaque document sollicité par l’étude notariale afin de permettre le paiement des acomptes à l’administration fiscale, que la preuve de son inertie coupable n’est pas rapportée.
Sur l’autorisation de paiement de toutes les dettes sans son accord, Madame [E] [L] allègue que la preuve d’une réticence de sa part n’est pas apportée pour justifier d’une telle mesure.
Quant à la récompense sollicitée au titre de la jouissance privative du logement, elle souligne que la demande n’est pas reprise au dispositif des écritures de la défenderesse, soulignant qu’elle est en tout état de cause irrecevable, le mécanisme des récompenses relevant de la liquidation des régimes matrimoniaux.
Par conclusions récapitulatives signifiées par la voie électronique le 18 janvier 2023, Madame [D] [K] épouse [F] demande au tribunal de :
Vu les dispositions des articles 843, 815, 893 et suivants du code civil
Vu l’opposition de Madame [L] à la liquidation amiable de la succession
Se déclarer compétentRecevoir Madame [K] [F] en ses demandes reconventionnelles, et la dire bien fondéesDire et juger qu’il y a lieu d’ordonner la liquidation judiciaire de la succession [K] [A]Constater qu’un projet a déjà été élaboré par Me [J] mais les parties étant en désaccord,Désigner Me [J] à l’effet de poursuivre les opérations de liquidation partageFixer le prix du bien immobilier sis à [Adresse 5] d’une contenance de 3a 32 ca à la somme de 220 000 eurosFixer le prix de l’appartement sis à [Localité 11] de type 4, aussi à usage d’habitation, (lieu de vie du couple avant le décès de Madame [K]) d’une contenance de 85 m2 environ au [Adresse 2] à 190 000 eurosDire et juger que les deux lots d’immeuble seront attribués à chacune des deux enfants le bien de [Localité 13] à Madame [L]. Madame [F] ne s’y oppose pasAttribuer de façon préférentielle l’appartement sis [Adresse 2] à Madame [F] [D]Dire que ces valeurs seront retenues pour le partage ou, à défaut le prix réel de la vente desdits biensConstater la donation déguisée dont avait bénéficié Madame [E] [L] au titre de don manuel improprement qualifié de « pension alimentaire » et l’achat caché d’un véhicule à son profitOrdonner la réintégration de la somme de 47 513€ au compte de la liquidation de la succession au titre du rapportDire et juger que le bail conclu entre les défunts et Madame [E] [L] constitue une donation déguisée rapportable à la succession avec la valeur locative réelle de 950€ par mois jusqu’au jour de la signature de l’acte liquidatifDire et juger que le refus de réintégration des sommes reçues par Madame [L] en dons manuels, la tentative de dissimulation de ces dons et l’achat du véhicule de 13008€ constituent un recel d’actif successoralFixer le loyer de la maison sis à [Localité 13] à 950 euros par mois en raison de la situation géographique du bien, de la valeur locative de référence du secteur et à partir de la date de prise de possession des lieux par les époux [L]Rapporter l’intégralité des loyers à la succession soit 950€ depuis la date du bail dont bénéficie Mme [L]Dire et juger que le véhicule offert à Madame [L] [E] quelques semaines avant le décès de M. [N] [K] constitue une donation manuelle déguisée dont rapport à la succession pour le prix de ce véhicule soit 13 008 euros ou à tout le moins un recelRapporter la somme de 2639€ à la succession découverte dans les chéquiers détenus par madame [E] [L]Constater que Madame [L] n’a pas donné son accord en temps utile pour le paiement des droits de la succession aux services fiscauxCondamner Madame [L] à assurer exclusivement la charge des frais et pénalités relatifs au retard de paiement des droit successoraux et autres frais de retardAutoriser Madame [F] ou le notaire à régler toutes les dettes grevant éventuellement les immeubles ainsi que les droits successoraux sans l’accord préalable de Mme [L] en cas d’opposition persistante de cette dernièreCondamner Madame [L] à 15 000€ de dommages et intérêts au titre du préjudice subi du fait de recel et du désagrément subi par madame [F]Condamner Madame [E] [L] [K] à payer à Madame [K] [F] la somme de 5000 euros en application de l’article 700 du CPCCondamner Madame [E] [L] [K] aux entiers frais et dépens en ce compris les frais extrajudiciaires dont distraction au bénéfice de Maitre IHOU avocat aux offices en application de l’article 699 du CPCDire n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir ;
S’agissant de la valeur de l’immeuble sis à [Localité 13] à 220.000,00 euros et de la valeur locative, Madame [D] [F] se prévaut des ventes récentes du secteur et soutient que le bien a été sous-évalué lors des estimations en raison des destructions engendrées par les travaux de Madame [E] [L]. Elle allègue que ces travaux n’étaient pas nécessaires et qu’aucune autorisation de l’indivision n’a été sollicitée pour les effectuer, postérieurement au décès de Monsieur [K]. Elle sollicite la fixation du prix de l’appartement de [Localité 11] à 185.000 euros au regard d’une évaluation récente ou 190.000 euros.
Madame [D] [F] fait ensuite valoir que le loyer de 500,00 euros au titre du bail consenti par les défunts à la requérante constitue une donation déguisée rapportable en ce qu’il est sous-évalué, la valeur retenue par les impôts étant de 1.250,00 euros et par l’agence [9] de 950,00 euros. Elle argue que Madame [E] [L] ne paie à ce jour aucun loyer. En conséquence, elle demande au tribunal de fixer le loyer à 1250 euros ou 950 euros et de voir ordonner le rapport à la succession des loyers soit 950 euros depuis la date du bail.
Elle fait également valoir que « récompense est due à Madame [F] sur la jouissance privative du bien par [E] [L] à hauteur de la moitié de 950€ de loyer par mois à compter de la date du bail jusqu’à parfait partage de la succession », sur le fondement de l’article 815-9 du Code civil.
Au soutien de sa demande de rapport à la succession des sommes versées au titre de la pension alimentaire, Madame [D] [F] fait valoir que ces versements n’étaient pas justifiés, [E] [K] étant alors majeure non scolarisée, non indigente et salariée. Elle allègue pour établir que les sommes ont été effectivement perçues, qu’elles ont été déclarées à l’administration fiscale tant par les défunts que par [E] [K], et précise qu’ils l’aidaient régulièrement car elle ne travaillait pas, que Madame [E] [K] a vécu chez eux du fait qu’elle était sans emploi et ne pouvait être autonome. Elle invoque que le refus de rapporter cette somme constitue une volonté de dissimulation constitutive de recel successoral.
Madame [D] [F] soutient que Madame [E] [L] a tenté de dissimuler la somme perçue pour l’acquisition d’un véhicule en n’effectuant pas de déclaration volontaire au notaire et en prétextant en premier lieu avoir eu recours à un prêt. Elle allègue, concernant l’achat de son propre véhicule, avoir remboursé par ses derniers personnels un prêt bancaire.
Elle se prévaut de l’inertie de sa sœur qui ne répond pas aux demandes formulées par le notaire engendrant des frais et pénalités.
Au soutien de sa demande indemnitaire, elle se prévaut du recel et des désagréments engendrés par la recherche des dons perçus et dissimulés par sa sœur.
Sur ce,
Le tribunal rappelle, à titre liminaire, qu'il n'est pas tenu de statuer sur les demandes de «constatations» ou de «dire et juger» qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.
I. Sur l’ouverture des opérations de liquidation et de partage de la succession
En application des dispositions de l’article 815 du Code civil, nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu'il n'y ait été sursis par jugement ou convention.
Le texte n’implique pas que le tribunal statue sur l’imputabilité de l’échec des démarches amiables. Il faut mais il suffit qu’un indivisaire souhaite sortir de l’indivision pour qu’il puisse faire valoir ce droit en justice à défaut d’avoir trouvé un accord amiable.
Aux termes de l’article 825 du Code civil, la masse partageable comprend les biens existants à l’ouverture de la succession et dont le défunt n’a pas disposé à cause de mort. Elle est augmentée des valeurs soumises à rapports ou à réduction ainsi que des dettes des copartageants envers le défunt ou envers l’indivision.
Il résulte des écritures des parties que des démarches en vue du partage ont été initiées mais que les copartageants ont des différends relatifs au calcul de leurs droits.
Il convient en conséquence d’ordonner l’ouverture des opérations de compte liquidation et partage des successions de [H] [C] [A] décédée le [Date décès 3] 2020 et de [N] [K] décédé le [Date décès 4] 2020.
En application de l’article 1364 du Code de procédure civile, si la complexité des opérations le justifie, le tribunal désigne un notaire pour procéder aux opérations de partage et commet un juge pour surveiller ces opérations. Le notaire est choisi par les copartageants et, à défaut, par le tribunal.
En l’espèce, compte tenu de la présence d’immeubles et de la nécessité de procéder à des comptes entre les parties, il y a lieu de désigner Maître [O] [J], notaire à [Localité 8] pour la poursuite et l’achèvement des opérations de partage, selon mission précisée au dispositif de la présente décision, à l’encontre de laquelle aucune des parties n’a formulé de grief.
Il y a lieu de prévoir que le notaire sera autorisé à consulter le FICOBA, le FICOVIE et l’AGIRA.
II. Sur les immeubles relevant de la succession
1- Sur l’évaluation des biens immobiliers
L’article 829 du Code civil énonce qu’en vue de leur répartition, les biens sont estimés à leur valeur à la date de la jouissance divise telle qu'elle est fixée par l'acte de partage, en tenant compte, s'il y a lieu, des charges les grevant.
Cette date est la plus proche possible du partage.
Cependant, le juge peut fixer la jouissance divise à une date plus ancienne si le choix de cette date apparaît plus favorable à la réalisation de l'égalité.
a- Sur le bien immobilier sis à [Localité 13]
En l’espèce, la demande de la requérante tendant à voir fixer la date de jouissance divise au 1er juillet 2018, ne peut qu’être rejetée, dans la mesure où cette date est antérieure au décès soit à une date où l’indivision successorale n’avait pas même débuté, étant relevé de surcroît qu’il n’est pas fait la démonstration qu’une date plus ancienne que la date la plus proche du partage serait plus favorable à la réalisation de l’égalité.
Il s’agit d’une maison mitoyenne construite en 1972 d’une surface habitable de 105 m2, comprenant quatre chambres, un jardin et un garage, sur une parcelle de 332 m2, dans un lotissement. Elle est occupée par la requérante en vertu d’un bail conclu le 1er juillet 2018. A ce jour, il est justifié d’une estimation en date du 25 janvier 2022 par [9] à hauteur de 190.000 euros. C’est cette valeur qu’a retenue le notaire dans son projet, sur le fondement d’une évaluation réalisée également par Maître [M].
Le bien avait été acquis en 2018 à hauteur de 220.000,00 euros dont 7.000 euros au titre des meubles.
Il ressort des échanges entre les parties et des pièces produites, que des travaux d’amélioration ont été réalisés en 2018, 2019 et 2020. Il ressort également des pièces produites que des travaux étaient encore en cours lors de l’estimation du bien en 2022.
Compte tenu de ces éléments et des prétentions respectives des parties, il apparaît justifié de retenir une valeur de 213.000 euros pour ce bien.
b- Sur le bien sis à [Adresse 12]
Le projet de partage fixe la valeur du bien à 180.000 euros selon estimation de [7]. La défenderesse fournit une estimation faite par [6] en date du 21 juin 2021, fixant la valeur de l’immeuble à 185.000,00 euros +/-5%. La requérante ne présente aucun moyen relativement à la valeur de cet appartement.
Compte tenu de ces éléments, il convient de fixer la valeur du bien sis à [Localité 11] à 180.000 euros.
2- Sur l’attribution préférentielle des biens
Par application de l’article 831-2 du Code civil, tout héritier copropriétaire peut demander l'attribution préférentielle de la propriété qui lui sert effectivement d'habitation, s'il y avait sa résidence à l'époque du décès.
a. Sur le bien sis à [Adresse 5]
En l’espèce, Madame [E] [L] dispose d’un bail sous seing privé en date du 30 juin 2018 portant sur le bien immobilier sis à [Localité 13] où il n’est pas contesté qu’elle a établi sa résidence principale et y demeure encore.
Il en résulte que les conditions de l’article 831-2 du Code civil sont remplies et au demeurant, Madame [D] [F] ne s’oppose pas à l’attribution de l’immeuble à Madame [E] [L].
Il y a lieu de faire droit à la demande d’attribution préférentielle du bien immobilier sis à [Localité 13] de Madame [E] [L].
b. Sur le bien sis à [Adresse 12]
En l’espèce, il ressort des débats que le bien immobilier sis à [Localité 11] constituait la résidence principale des défunts. Il n’est ni démontré ni même revendiqué par Madame [D] [F] qu’elle y ait établi sa résidence principale, à la date du décès, alors qu’elle se domicilie à [Localité 10].
Les conditions de l’article 831-2 du Code civil n’étant pas réunies, il y a lieu de débouter Madame [D] [F] de sa demande d’attribution préférentielle du bien sis à [Localité 11].
III. Sur les autres demandes formées par Mme [D] [F]
Sur la demande au titre d’une donation déguisée portant sur des sommes versées à titre de pension alimentaire
Selon l’article 843 du Code civil, tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l'actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ; il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu'ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale.
Les legs faits à un héritier sont réputés faits hors part successorale, à moins que le testateur n'ait exprimé la volonté contraire, auquel cas le légataire ne peut réclamer son legs qu'en moins prenant.
Mais selon l’article 852 du Code civil, les frais de nourriture, d'entretien, d'éducation, d'apprentissage, les frais ordinaires d'équipement, ceux de noces et les présents d'usage ne doivent pas être rapportés, sauf volonté contraire du disposant.
Le caractère de présent d'usage s'apprécie à la date où il est consenti et compte tenu de la fortune du disposant.
Il résulte de la combinaison des articles 205 et 207 que les parents doivent les aliments à leurs enfants qui sont dans le besoin.
En l’espèce, les défunts ont déclaré fiscalement avoir versé à titre de pension alimentaire au bénéfice de [E] [L] les sommes suivantes :
2006 : 3 162 €
2007 : 4 320 €
2008 : 5 400 €
2009 : 5 733 €
2010 : 3 098 €
2011 : 6 300 €
2012 : 6 500 €
2013 : 6 500 €
2014 : 6 500 €
TOTAL 47 513 €
Madame [E] [L] soutient rapidement ne pas avoir perçu toutes les sommes fiscalement déclarées mais ne produit aux débats que des relevés de comptes sans préciser les sommes qu’elle aurait effectivement perçues au titre de chaque année en comparaison avec la somme déclarée fiscalement. Il y a donc lieu de considérer que les sommes stipulées dans les déclarations de revenus tant des défunts que de [E] [L] ainsi que dans les déclarations sur l’honneur des parents ont été effectivement versées.
Sur la qualification de sommes ainsi versées, il convient de déterminer si les remises de fonds litigieuses à Madame [E] [L] étaient destinées à assurer le respect par les parents de leur obligation alimentaire à l’égard de leur fille ou procédaient d’une intention libérale de la gratifier.
En l’espèce, ces versements se sont étalés sur plusieurs années. Ces sommes représentaient entre 258,16 € et 541,66 € par mois selon les années, soit une moyenne mensuelle de 439,94 €.
Or, il ressort des déclarations de revenus de Madame [E] [L] que celle-ci a perçu :
2006 : 2003 euros
2007 : 1940 euros
2008 : 1563 euros
2009 : 697 euros
2010 : 615 euros
2011 : 13.082 euros dont 1291 euros de revenus personnels Mme [E] [L] étant alors mariée avec un enfant
2012 : 12.424 euros dont 735 euros de revenus personnels
2013 : 11 981 euros
2014 : 11.933 euros
Il en ressort suffisamment que la requérante était dans une situation de besoins eu égard aux faibles ressources dont elle disposait, y compris à compter de 2011 alors que même si le couple disposait de revenus, ceux-ci étaient modestes pour une famille de trois personnes.
Il ressort des déclarations de revenus produites aux débats que les défunts disposaient d’un revenu imposable oscillant entre 50.000 euros et 68.000 euros, et que leur patrimoine n’a pas semblé être entamé par ces versements, au vu de la déclaration de succession, aux termes de laquelle l’actif net s’élève à 1.580.514, 64 euros.
Il s’en déduit que les versements des sommes litigieuses ne sauraient s’analyser en donations rapportables et il convient de rejeter la demande de rapport de la somme de 47 513 €.
Sur le financement de l’acquisition d’un véhicule par Madame [E] [L]
Il ressort des écritures de l’intéressée que Madame [E] [L] ne conteste pas devoir rapport à la succession du montant avancé pour l’achat du véhicule à son profit par son père en 2020, soit la somme de 13.008,00 euros.
En conclusion, il y a lieu de constater le rapport à l’actif successoral de la somme de 13.008,00 euros au titre du don de somme d’argent pour l’achat d’un véhicule.
Sur la demande d’un montant de 2.639 euros
La défenderesse demande au tribunal d’ordonner le rapport de ladite somme correspondant aux sommes identifiées sur des relevés bancaires comme des chèques ayant été émis au bénéfice de la demanderesse. Cependant, lesdits relevés bancaires ne sont pas produits et la demande s’appuie sur un document intitulé « relevé de chèques et de virements » consistant en un document dactylographié listant notamment, par banque concernée, des chèques avec leur numéro mais sans indication du bénéficiaire et alors que le montant ne correspond pas au montant de la demande. Le documents liste encore les chèques émis au bénéfice de la défenderesse puis des virements et billets [14] au bénéfice de la requérante, ce qui ne correspond pas plus à la prétention. En tout état de cause, il s’agit d’un document établi par la défenderesse elle-même donc non probant.
La demande de ce chef ne peut qu’être rejetée.
Sur le loyer relatif à l’immeuble de [Localité 13]
Aux termes du bail sous seing privé en date du 30 juin 2018 conclu entre les défunts et [E] [L], relatif à l’immeuble sis à [Localité 13] et dépendant de la succession, que Mme [E] [L] occupe encore, le loyer est fixé à 500,00 euros.
Dans son courrier du 25 janvier 2021, Maître [M], notaire à [Localité 13], fixe la valeur locative du bien à hauteur de 800 euros, sous réserve d’effectuer les travaux de mise aux normes du logement. L’agence [9] fixe, pour sa part, la valeur locative du bien à 950 euros. Mais ce montant est retenu le 31 mars 2022 et uniquement si les travaux en cours (fenêtres et porte d’entrée, sol séjour, sol chambres et salle de bains) sont réalisés.
De surcroît, il apparaît encore que des travaux ont déjà été réalisés depuis 2018, ainsi qu’il ressort des factures au nom du mari de [E] [L] ou des époux versées aux débats - revêtement de sol, lavabos dans la salle de bains, porte d’entrée, baies vitrées de la cuisine et du salon, volet électrique.
La défenderesse fonde également sa demande sur « la valeur retenue par les impôts à savoir 1250 € (cf Impôt foncier Pièces 22 ) » mais la pièce n’est pas produite aux débats et ne figure pas au bordereau de pièces lequel ne mentionne d’ailleurs en pièce 22 que l’évaluation par [9].
Ainsi, outre qu’elle se revendique d’une évaluation fiscale dont elle ne justifie pas, la défenderesse se prévaut d’évaluations de la valeur locative postérieures de plusieurs années de la mise en location, alors que de surcroît ces évaluations conditionnent la valeur proposée à la réalisation de travaux. Il ne saurait donc en être conclu qu’au jour de la conclusion du bail, le prix du loyer avait été sous-évalué.
Puis, la défenderesse soutient de façon péremptoire que les loyers n’ont pas été versés mais elle ne verse aucun relevé bancaire pour en justifier, alors même qu’ayant effectué un détail des virements et chèques qu’elle juge douteux, il apparaît qu’elle a eu à sa disposition au moins une partie des relevés bancaires de ses parents. Or, c’est à elle qui revendique le rapport à la succession d’apporter à tout le moins un commencement de preuve.
Toutes demandes du chef des loyers seront rejetées.
Il sera observé ici que la demande additionnelle de rapport de la moitié de 950 euros de loyer par mois à compter de la date du bail jusqu’à parfait partage de la succession au titre d’une récompense pour la jouissance privative du logement sis à [Localité 13] par Madame [L] fondée sur l’article 815-9 du code civil n’est pas reprise au dispositif, en sorte qu’il ne sera pas statué sur ce point, en application des dispositions de l’article 768 du Code de procédure civile.
Sur la demande indemnitaire au titre du recel
L’article 778 du Code civil dispose que sans préjudice de dommages et intérêts, l’héritier qui a recelé des biens ou des droits d’une succession ou dissimulé l’existence d’un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l’actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés. Les droits revenant à l’héritier dissimulé et qui ont ou auraient pu augmenter ceux de l’auteur de la dissimulation sont réputés avoir été recelés par ce dernier.
Lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l’héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part.
Ainsi, caractérisent le recel toutes les fraudes au moyen desquelles un héritier cherche, au détriment de ses cohéritiers, à rompre l’égalité du partage, soit qu’il divertisse des effets de la succession en se les appropriant indûment, soit qu’il les recèle en dissimulant sa possession dans les circonstances où il serait, d’après la loi, tenu de la déclarer.
Madame [D] [F] sollicite l’application des sanctions du recel à l’encontre de Madame [E] [L] pour le refus de réintégrer les sommes reçues en dons manuels, la tentative de dissimulation des dons et l’achat d’un véhicule.
a. Sur les sommes versées au titre de la pension alimentaire et les loyers
En l’espèce, dans la mesure où le rapport n’a pas été ordonné pour ces sommes litigieuses dont il a été dit que leur versement ne caractérisait pas une donation déguisée, les demandes au titre du recel ne sauraient aboutir.
b. Sur le recel successoral au titre du don manuel permettant l’achat d’un véhicule
En l’espèce, seul le courrier du conseil de Madame [D] [F] en date du 5 octobre 2020 à destination du notaire mentionne que Madame [E] [L] a eu recours à un prêt bancaire pour l’achat de son véhicule. Ce seul écrit émanant du conseil de la personne reprochant un recel, ne peut constituer la preuve d’une tentative de dissimulation de celle-ci.
Puis, il résulte des écritures du conseil de Madame [E] [L] qu’elle reconnaît avoir bénéficié de la somme de 13.008,00 euros pour l’acquisition d’un véhicule et que cette somme sera rapportée à l’actif successoral.
En conséquence, la dissimulation n’est pas établie en sorte qu’il y a lieu de débouter Madame [D] [F] de sa demande de condamnation de Madame [E] [L] au titre du recel successoral.
Sur la charge des frais et pénalités relatifs au retard de paiement des droit successoraux et autres frais de retard
En l’espèce, il ressort des échanges avec le notaire fournis par les parties :
- que les parties ont accepté que des actions dépendant de la succession soient vendues puis qu’un acompte de 188.722 euros soit versé à l’administration fiscale au titre des droits de mutation le 31 mars 2020 ;
- que par un courrier du 22 février 2021, le conseil de Mme [E] [L], demanderesse à l’instance, a manifesté son accord au paiement des droits de succession en précisant l’ordre de vente des titres ;
- que dans un courrier adressé à Mme [F] le 20 septembre 2021, le notaire indiquait qu’il n’y avait pas d’accord commun entre les héritières sur l’ordre de vente des titres ;
- par un mail du notaire du 16 décembre 2021, le notaire informait les parties qu’un accord commun pour la vente des titres avait été trouvé ;
- par mail du 26 janvier 2022, le notaire demandait notamment aux conseils des parties si elles étaient d’accord sur le projet de déclaration de succession ;
- par mail du 29 mars 2022, le notaire relançait les parties sur la déclaration de succession, rappelant que les titres avaient bien été vendus mais qu’il convenait d’effectuer la déclaration de succession pour régler les droits de succession, précisant que des pénalités couraient depuis le 1er janvier 2021 ;
- dans un mail du 11 mai 2022, le notaire répondait à Mme [D] [F] qu’à ce jour il n’avait pas encore réceptionné l’accord de [E] [L] au paiement des droits de succession et au projet de déclaration de succession.
S’il ressort de ces échanges que [E] [L] n’avait en mai 2022 pas encore répondu à la demande du notaire de janvier 2022, il n’apparaît pas que les pénalités qui pourraient être réclamées depuis le 1er janvier 2021 à lire le notaire, seraient uniquement imputables à l’inertie alléguée de la demanderesse.
La demande de ce chef sera rejetée.
Sur l’autorisation à régler les dettes grevant les immeubles et les droits successoraux
Mme [D] [F] ne fonde pas juridiquement sa demande. Au demeurant, l’article 815-5 du code civil qui permet d’autoriser judiciairement un indivisaire à passer seul un acte, suppose la démonstration, qui n’est pas faite ici, d’un refus mettant en péril l’intérêt commun.
La demande de ce chef sera ainsi rejetée.
IV. Sur les dépens et autres frais de l’article 700 du Code de procédure civile
Sur les dépens
Il y a lieu de prévoir que les dépens, en ce non compris les frais extrajudiciaires, seront employés en frais privilégiés de partage, avec faculté de distraction au bénéfice de Maître Corinne THULIER, membre de la SCP CARNOT JURIS FAMILLE, avocat, et de Maître IHOU avocat, en application de l’article 699 du Code de procédure civile.
Sur les frais irrépétibles
L’équité ne commande pas de condamner l’une quelconque des parties au paiement d’une indemnité pour frais irrépétibles. Tant les demandeurs que les défendeurs seront déboutés de leur demande de ce chef.
Il y a lieu de rappeler que la présente décision est assortie de l’exécution provisoire de plein droit.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort :
ORDONNE l’ouverture des opérations de compte, liquidation, et partage de l’indivision successorale consécutive aux décès de [H] [C] [A] décédée le [Date décès 3] 2020 et de Monsieur [N] [K] décédé le [Date décès 4] 2020 ;
DESIGNE pour procéder à ces opérations, Maître [O] [J], notaire à [Localité 8];
RAPPELLE :
que le notaire exerce sa mission en qualité d’auxiliaire de Justice et que ses opérations sont soumises au régime des articles 1365 et suivants du code de procédure civile,
qu’afin de permettre au notaire de recenser l’ensemble des éléments d’actif et de passif, composant chacune des trois masses indivises les héritiers doivent remettre au notaire les pièces justificatives fiables et utiles à l’accomplissement de sa mission sur sa demande et qu’il appartiendra le cas échéant aux héritiers de qualifier précisément leurs prétentions, notamment quant aux fins de réintégration à la masse indivises d’éventuelles libéralités,
que les héritiers pourront y être enjoints, y compris sous astreinte par le juge commis s’ils ne déferrent pas à la demande du notaire,
qu’en vertu de l’article R444-61 du code de commerce, “préalablement à la signature des actes dont ils sont chargés, les notaires réclament la consignation d'une provision suffisante pour couvrir l'émolument correspondant ainsi que, le cas échéant, les frais et débours” qu’en vertu de l’égalité dans le partage, il incombe à chaque héritier d’y satisfaire.
AUTORISE le notaire à consulter le FICOBA, le FICOVIE et l’AGIRA aux fins d’accomplissement de sa mission ;
RAPPELLE que conformément aux dispositions de l'article 1368 du code de procédure civile, dans le délai d'un an suivant sa désignation, le notaire dressera un état liquidatif qui établit les comptes entre copartageants, la masse partageable, les droits des parties et la composition des lots à répartir ;
RAPPELLE que conformément aux dispositions de l'article 1373 du même code, en cas de désaccord des héritiers et légataires au sujet de ce projet d'état liquidatif, le notaire transmettra au juge commis un procès-verbal reprenant les dires respectifs des parties ainsi que ce projet ;
DIT que ces opérations seront surveillées par le Magistrat de la Première Chambre Civile, chargé de la surveillance des opérations de liquidation et partage ;
REJETTE la demande de fixation de la date de jouissance divise sur l’immeuble de [Localité 13] au 1er juillet 2018 ;
FIXE la valeur de l’immeuble sis à [Adresse 5] à 213 000 euros ;
FIXE la valeur de l’appartement sis [Adresse 12] à 180.000,00 euros ;
DEBOUTE Madame [E] [L] de sa demande d’évaluation de l’immeuble sis à [Localité 11] par le notaire chargé de la succession ;
ATTRIBUE préférentiellement l’immeuble sis à [Adresse 5] Madame [E] [K] épouse [L] ;
DEBOUTE Madame [D] [F] de sa demande d’attribution préférentielle de l’appartement sis à [Adresse 12];
DEBOUTE Madame [D] [F] de sa demande de requalification de la pension alimentaire en donation déguisée ;
DEBOUTE Madame [D] [F] de sa demande de rapport à l’actif successoral de la somme de 47 513€ ;
DEBOUTE Madame [D] [F] de sa demande de requalification du bail d’habitation en donation déguisée ;
DEBOUTE Madame [D] [F] de sa demande tendant à voir fixer le loyer de la maison sis à [Localité 13] à 950 euros par mois en raison de la situation géographique du bien, de la valeur locative de référence du secteur et à partir de la date de prise de possession des lieux par les époux [L] ;
DEBOUTE Madame [D] [F] de sa demande tendant à voir ordonner le rapport de l’intégralité des loyers à la succession soit 950€ depuis la date du bail dont bénéficie Mme [L],
CONDAMNE [E] [L] à rapporter la somme de 13.008,00 euros au titre du financement du véhicule ;
DEBOUTE Madame [D] [F] de sa demande de rapport à l’actif successoral de la somme de 2.639,00 euros ;
DEBOUTE Madame [D] [F] de sa demande indemnitaire au titre du recel successoral ;
DEBOUTE Madame [D] [F] de sa demande de condamnation de Madame [E] [L] au règlement de toutes les charges des frais et pénalités de retard de paiement des droits successoraux ;
DEBOUTE Madame [D] [F] de sa demande d’autorisation à régler seule ou par le notaire toutes les dettes grevant les immeubles et les droits successoraux sans l’accord préalable de Madame [E] [L] en cas d’opposition persistante de cette dernière ;
DEBOUTE Madame [D] [F] de sa demande faite sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
DEBOUTE Madame [E] [L] de sa demande faite sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
DIT que les dépens, en ce non compris les frais extrajudiciaires, seront employés en frais privilégiés de partage ;
ACCORDE faculté de recouvrement des dépens à Maître Corinne THULIER, membre de la SCP CARNOT JURIS FAMILLE, avocat, et à Maître IHOU, avocat ;
RAPPELLE que la présente décision est assortie de l’exécution provisoire.
LE GREFFIER POUR LA PRESIDENTE EMPECHEE
Benjamin LAPLUMEMarie TERRIER