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04/09/2024 | FRANCE | N°24/02610

France | France, Tribunal judiciaire de Draguignan, Referes construction, 04 septembre 2024, 24/02610


T R I B U N A L JUDICIAIRE
D E D R A G U I G N A N
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O R D O N N A N C E D E R É F É R É
CONSTRUCTION



RÉFÉRÉ n° : N° RG 24/02610 - N° Portalis DB3D-W-B7I-KFXD

MINUTE n° : 2024/415

DATE : 04 Septembre 2024

PRÉSIDENT : Monsieur Frédéric ROASCIO

GREFFIER : M. Alexandre JACQUOT



DEMANDEURS

Madame [S] [T] épouse [N], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Georges GOMEZ, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE

Monsieur [W] [N], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Georges

GOMEZ, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE


DEFENDERESSES

S.A.R.L. DI GIOVANNI MIDI HABITAT, dont le siège social est sis [Adresse 4]
représentée pa...

T R I B U N A L JUDICIAIRE
D E D R A G U I G N A N
____________

O R D O N N A N C E D E R É F É R É
CONSTRUCTION

RÉFÉRÉ n° : N° RG 24/02610 - N° Portalis DB3D-W-B7I-KFXD

MINUTE n° : 2024/415

DATE : 04 Septembre 2024

PRÉSIDENT : Monsieur Frédéric ROASCIO

GREFFIER : M. Alexandre JACQUOT

DEMANDEURS

Madame [S] [T] épouse [N], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Georges GOMEZ, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE

Monsieur [W] [N], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Georges GOMEZ, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE

DEFENDERESSES

S.A.R.L. DI GIOVANNI MIDI HABITAT, dont le siège social est sis [Adresse 4]
représentée par Me Lionel FERLAUD, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

S.A. MMA IARD, dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Antoine FAIN-ROBERT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

Société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES, dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Antoine FAIN-ROBERT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

DÉBATS : Après avoir entendu à l’audience du 26 Juin 2024 les parties comparantes ou leurs conseils, l’ordonnance a été rendue ce jour par la mise à disposition de la décision au greffe.

copie exécutoire à
Me Antoine FAIN-ROBERT
Me Lionel FERLAUD
Me Georges GOMEZ

1 copie dossier

délivrées le :

Envoi par Comci à Me Antoine FAIN-ROBERT
Me Lionel FERLAUD
Me Georges GOMEZ

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par acte authentique du 17 février 2020, Madame [S] [T] épouse [N] et Monsieur [W] [N] ont fait l'acquisition auprès de Monsieur [V] [R] et Madame [Z] [O] d'une maison à usage d'habitation située [Adresse 2].

Cette maison a été édifiée selon un contrat de construction de maison individuelle conclu le 27 juin 2016 entre les consorts [R]-[O] et la SARL DI GIOVANNI MIDI HABITAT, cette dernière étant assurée au titre de sa responsabilité décennale par les compagnies MMA, couvrant également le bien immobilier par une assurance dommages-ouvrage.

La réception sans réserve de la maison est intervenue le 27 juin 2018.

Ayant constaté l'apparition de fissures dans la maison, les époux [N] ont adressé le 13 mai 2022 une déclaration de sinistre aux MMA et, sur la base d'un rapport d'expertise préliminaire dommages-ouvrage établi le 8 juin 2022 par le cabinet SARETEC, les compagnies MMA ont accepté la prise en charge partielle des désordres et ont proposé par courrier du 5 juin 2023 une indemnité à hauteur de 76 898,70 euros correspondant à un agrafage des fissures et à des injections de résine à réaliser par la société GEOSEC.

Ayant demandé en vain à l'assureur dommages-ouvrages la révision des travaux réparatoires proposés et par exploits de commissaire de justice des 12 et 18 mars 2024, les époux [N] ont fait assigner en référé la SARL DI GIOVANNI MIDI HABITAT ainsi que les compagnies MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES en leur double qualité d'assureur dommages-ouvrage et d'assureur de la SARL DI GIOVANNI MIDI HABITAT, et ce aux fins principales de solliciter sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile la désignation d'un expert chargé d'examiner les désordres.

Suivant leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 25 juin 2024, Madame [S] [T] épouse [N] et Monsieur [W] [N] sollicitent du juge des référés du tribunal judiciaire de Draguignan, au visa des articles 145 du code de procédure civile, L.42-1 (en réalité L.242-1) du code des assurances et 1792 et suivants du code civil, de :
JUGER les requérants bien fondés à voir instaurer une mesure expertale au contradictoire des MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES en leur double qualité d'assureur dommages-ouvrage et assureur décennal du constructeur de maison individuelle ;
DESIGNER désigner tel expert qu'il plaira au tribunal, dont la spécialité sera la géotechnique (C-01.25), lequel pourra prendre l'initiative de recueillir l'avis d'un autre technicien, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne, et aura pour mission, les parties régulièrement convoquées et connaissance prise des documents et pièces par elles produits, de :
se rendre sur les lieux, [Adresse 2] à [Localité 3], se faire remettre tous documents qu'il estimera utiles à l'accomplissement de sa mission entendre tout sachant,décrire brièvement l'opération de construction litigieuse, rechercher les documents contractuels, préciser la nature des contrats d'assurance souscrit,préciser la date d'ouverture du chantier,entendre les parties, recueillir leurs dires et explications,dresser un bordereau des documents communiqués, étudier et analyser ceux en rapport avec le litige,visiter et décrire les lieux litigieux (description accompagnée de clichés photographiques),établir la chronologie des étapes des travaux en précisant très exactement la teneur des travaux entrepris, le rôle ou la mission de chaque intervenant (partie à la procédure),déterminer l'existence des désordres invoqués malfaçons, non-conformités, non-réalisations et autres incidents de construction expressément invoqués dans l'assignation et les conclusions postérieures et les documents auxquels ces écritures se réfèrent, les examiner, les décrire et préciser leur nature, date d'apparition et importance (degré de gravité, désordre généralisé ...),

donner tous éléments permettant de déterminer si les dommages constatés compromettent la solidité de l'ouvrage ou s'ils sont de nature à le rendre impropre à sa destination,au besoin, dire si les dommages constatés atteindront de manière certaine un degré de gravité décennale dans le délai de dix ans à compter de la réception,en rechercher les causes et origines et préciser à qui ils sont imputables et dans quelles circonstances et proportions et ce, en indiquant s'ils proviennent d'un vice de conception, d'une non-conformité aux documents contractuels ou aux règles de l'art ou d'une exécution défectueuse,fournir tous éléments techniques et de fait de nature à permettre à la juridiction de déterminer les responsabilités et les parts de responsabilité encourues (en pourcentage) en expliquant de la manière la plus claire possible les éléments techniques et de fait permettant à la juridiction de déterminer les fautes ou manquements qui ont pu être commis,décrire le principe des travaux nécessaires à la reprise pérenne des désordres et donner son avis sur leur coût, si possible à l'aide de devis présentés par les parties, ainsi que leur durée normalement prévisible,analyser les préjudices invoqués et rassembler les éléments propres à en établir le montant plus largement, fournir toute précision technique et de fait utile à la solution du litige,donner au tribunal tous éléments pour les permettre d'apurer les comptes entre les parties,s'expliquer techniquement dans le cadre de ces chefs de missions sur les dires et observations des parties qu'il aura recueillis après leur avoir fait part au moins un mois auparavant de sa note de synthèse qui devra comporter son chiffrage des travaux de reprise et de réfection,rédiger une conclusion qui reprendra, chef de mission par chef de mission, sans procéder par renvois, le résultat de ses investigations, ladite conclusion devant préciser la date de réception et pour chaque désordre :• s'il était apparent au jour de la réception : oui / non
• s'il a fait l'objet d'une réserve : oui / non
• si, à son avis, il rend l'ouvrage impropre à sa destination : oui / non
• les parts de responsabilité proposées
• le coût des réparations ;
REJETER la fin de non-recevoir soulevée par les MMA ;
REJETER la demande d'article 700 présentée par les MMA ;
CONDAMNER les MMA à leur verser aux époux [N] la somme de 1500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre entiers dépens ;
JUGER que les époux [N] pourvoiront aux frais d'expertise judiciaire ;
JUGER que les dépens seront provisoirement mis à leur charge, sauf décision ultérieure du juge du fond ;
REJETER toutes, demandes, fins et conclusions contraires ;
RESERVER les dépens et subsidiairement condamner tout contestant aux paiements de ces derniers.

Suivant ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 25 juin 2024, la SARL DI GIOVANNI MIDI HABITAT sollicite, au visa de l'article 145 du code de procédure civile, de :
A titre principal, DEBOUTER les époux [N] de l'ensemble de leurs demandes ;
Les condamner à lui payer la somme de 1200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

A titre subsidiaire, DONNER ACTE aux MMA de leurs plus expresses protestations et réserves ;

CONDAMNER les époux [N] aux entiers dépens.

Suivant leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 24 avril 2024, la société d'assurance mutuelle MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES et la SA MMA IARD sollicitent, au visa de l'article 145 du code de procédure civile, de :
A titre principal , DEBOUTER les époux [N] de l'ensemble de leurs demandes ;
CONDAMNER les époux [N] à leur payer la somme de 1200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

A titre subsidiaire, leur DONNER ACTE de leurs plus expresses protestations et réserves ;
LIMITER la mission judiciaire aux chefs suivants :
- donner au tribunal tout élément technique permettant de déterminer si la solution de reprise objet de l'offre indemnitaire formulée par les MMA est suffisante pour remédier aux désordres allégués ;- chiffrer le coût des travaux de reprise permettant de remédier aux désordres ;
En tout état de cause, CONDAMNER les époux [N] aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens, il est renvoyé aux écritures des parties conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

DISCUSSION

Sur la demande de désignation d'un expert

Aux termes de l'article 145 du code de procédure civile, « s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé. »

Les requérants prétendent justifier d'un motif légitime à voir ordonner une mesure d'expertise judiciaire puisqu'ils ont contesté les solutions réparatoires préconisées par l'assureur dommages-ouvrage, qu'aucune fin de non-recevoir ne peut leur être opposée de ce chef en l'absence de production par les MMA d'un courrier ou d'une quittance subrogative tendant à justifier l'acceptation de l'indemnité. Ils ajoutent que leur contestation n'a donné lieu à aucune investigation technique complémentaire par l'assureur. Ils soulignent qu'aucune indemnité n'a été versée par l'assureur suite à la prétendue acceptation.

Les défendeurs considèrent qu'aucun motif légitime n'est caractérisé pour prétendre à une insuffisance de la solution réparatoire proposée. Les assureurs estiment que seule la mise en œuvre des travaux de reprise permettrait de jauger d'une prétendue insuffisance.

En l'espèce, il sera d'abord relevé qu'aucune fin de non-recevoir n'est présentée par les compagnies MMA, particulièrement en leur qualité d'assureur dommages-ouvrage. Il n'y a donc pas lieu de statuer sur ce point contrairement à ce que prétendent les requérants.

Il est rappelé que l'existence de contestations sérieuses ne constitue pas un obstacle à la mise en œuvre des dispositions de l'article 145 précité.

Il appartient au juge saisi de l'application de ce texte de caractériser le motif légitime d'ordonner une mesure d'instruction sans toutefois procéder préalablement à l'examen de la recevabilité d'une éventuelle action, non plus que de ses chances de succès sur le fond.

Il suffit de constater qu'un tel procès est possible, qu'il a un objet et un fondement suffisamment déterminés, que sa solution peut dépendre de la mesure d'instruction sollicitée et que celle-ci ne porte aucune atteinte illégitime aux droits et libertés fondamentaux d'autrui. De plus, le litige potentiel ne doit pas être manifestement voué à l'échec.

Il est constant que Monsieur [N] a accepté le 21 juin 2023 l'offre d'indemnité proposée et, s'il est mentionné dans les pièces des requérants un refus par mail du 22 juin 2023, ce courriel n'est pas produit aux débats.

Ainsi, il ne peut être contesté un accord sur l'indemnité de 76 898,70 euros TTC au vu des propositions réparatoires formulées par le cabinet SARETEC dans le cadre de l'expertise préliminaire dommages-ouvrage.

Les époux [N] fondent leur contestation des solutions réparatoires préconisées par le cabinet SARETEC sur la base du courrier de leur conseil du 9 octobre 2023 qui indique :
qu'un renforcement structurel est à envisager à la lecture du rapport géotechnique de la société GE2E avec mise en place d'un drainage périphérique en amont reliant un exutoire gravitaire ;qu'il est à prévoir un trottoir périphérique avec contre-pente et cunette de récolte pour assurer une meilleure gestion des eaux ;que la reprise par plots ne fait pas l'objet d'un devis ;que le drainage préconisé ne prévoit qu'une géomembrane périphérique et est uniquement envisagé en façade Nord, sans réalisation de trottoir périphérique ;que la réalisation d'un enduit de type I3 sur les façades concernées paraît insuffisant et ne peut être effectuée que sur trois des quatre pans des façades ;que la reprise des fissures ne concerne pas les génoises alors qu'il s'agit de la poursuite du dommage initial du phénomène de fissuration observé.
L'ensemble de ces éléments a donné lieu à une réponse détaillée en date du 14 décembre 2023 par le cabinet SARETEC, qui justifie sa position par des considérations techniques. Il est notamment répondu que la solution par plots est adaptée seulement à des réparations ponctuelles, que la pose de la géomembrane en périphérie de la maison se substitue à un trottoir, outre le fait que le revêtement de type I3 s'opère sur les seules façades fissurées, avec une teinte identique à l'existant et répond au besoin d'élasticité pour couvrir d'éventuelles microfissures.

Aucun élément technique n'est produit par les requérants pour contester ces réponses.

Il est indifférent à ce stade que l'indemnité ait été ou non effectivement versée et que les requérants n'aient pas sollicité une provision représentant les trois-quarts de l'indemnité comme le prévoit l'article L.242-1 du code des assurances en matière de contestation de l'indemnité de l'assureur dommages-ouvrage.

En effet, si la bonne foi des époux [N] ne peut être remise en question, ces derniers ne disposent d'aucun élément permettant de prouver leur motif légitime de voir ordonner une expertise, alors qu'ils ont accepté la prise en charge de l'indemnité de l'assureur dommages-ouvrage et qu'à ce stade il ne peut être établi un quelconque risque d'inefficacité des travaux réparatoires préconisés.

En l'absence de motif légitime répondant aux critères de l'article 145 précité, les époux [N] seront déboutés de leur demande principale tendant à la désignation d'un expert.

Sur les demandes accessoires

Les dépens de l'instance seront laissés à la charge des requérants, partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile. Il ne peut être réservé les dépens de la présente instance de référé dans l'attente d'une instance au fond dont le principe n'est pas certain et, de la même manière, il ne peut être distingué entre une charge provisoire des dépens de l'instance de référé et une charge définitive éventuellement décidée au fond, les dépens de l'instance au fond étant distincts de ceux de référé. Les époux [N] seront ainsi déboutés de leurs demandes relatives aux dépens.

Enfin, l'équité ne commande pas de condamner l'une des parties à payer les frais irrépétibles d'une autre partie. Il n'y a lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile de sorte que les époux [N] et la société DI GIOVANNI MIDI HABITAT seront déboutés de leurs demandes de ce chef.

PAR CES MOTIFS

Nous, juge des référés, statuant après débats en audience publique, par décision contradictoire mise à disposition au greffe, exécutoire de droit et en premier ressort,

DEBOUTONS Madame [S] [T] épouse [N] et Monsieur [W] [N] de l'intégralité de leurs demandes,

CONDAMNONS Madame [S] [T] épouse [N] et Monsieur [W] [N] aux dépens de l'instance,

DISONS n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETONS le surplus des demandes.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe, les jours, mois et an susdits.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Draguignan
Formation : Referes construction
Numéro d'arrêt : 24/02610
Date de la décision : 04/09/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-09-04;24.02610 ?
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