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21/08/2024 | FRANCE | N°24/00715

France | France, Tribunal judiciaire de Draguignan, Referes generaux, 21 août 2024, 24/00715


T R I B U N A L J U D I C I A I R E
D E D R A G U I G N A N
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O R D O N N A N C E D E R E F E R E


REFERE n° : N° RG 24/00715 - N° Portalis DB3D-W-B7I-KDPD

MINUTE n° : 2024/ 393

DATE : 21 Août 2024

PRESIDENT : Madame Nathalie FEVRE

GREFFIER : M. Alexandre JACQUOT




DEMANDERESSE

Commune de [Localité 5], dont le siège social est sis [Adresse 4] - [Localité 1]
représentée par Me Clémence MONEL, avocat au barreau de MARSEILLE



DEFENDERESSE

Communauté de Communes PROVENCE V

ERDON, dont le siège social est sis [Adresse 3] - [Localité 2]
représentée par Me Grégory MARCHESINI, avocat au barreau de TOULON


DEBATS : Après av...

T R I B U N A L J U D I C I A I R E
D E D R A G U I G N A N
____________

O R D O N N A N C E D E R E F E R E

REFERE n° : N° RG 24/00715 - N° Portalis DB3D-W-B7I-KDPD

MINUTE n° : 2024/ 393

DATE : 21 Août 2024

PRESIDENT : Madame Nathalie FEVRE

GREFFIER : M. Alexandre JACQUOT

DEMANDERESSE

Commune de [Localité 5], dont le siège social est sis [Adresse 4] - [Localité 1]
représentée par Me Clémence MONEL, avocat au barreau de MARSEILLE

DEFENDERESSE

Communauté de Communes PROVENCE VERDON, dont le siège social est sis [Adresse 3] - [Localité 2]
représentée par Me Grégory MARCHESINI, avocat au barreau de TOULON

DEBATS : Après avoir entendu à l’audience du 15 Mai 2024, les parties comparantes ou leurs conseils ont été avisées que la décision serait rendue le 19 Juin 2024 puis a été prorogée au 26 Juin 2024, 03 Juillet 2024, 10 Juillet 2024, 17 Juillet 2024 et 21 Aout 2024. L’ordonnance a été rendue ce jour par la mise à disposition de la décision au greffe.

copie exécutoire à
Me Grégory MARCHESINI
Me Clémence MONEL

copie dossier

délivrées le

Envoi par Comci à Me Grégory MARCHESINI
Me Clémence MONEL

EXPOSE DU LITIGE

La communauté de communes PROVENCE VERDON est chargée de la collecte et du traitement des déchets sur le territoire des communes qu’elle regroupe, dont celle de [Localité 5].

Depuis 2018, cette dernière se plaint de la prestation réalisée et notamment la fréquence des passages qu’elle considère insuffisante, conduisant à la présence d’amas d’ordures dans l’intervalle.

Elle a mis en demeure le 29 décembre 2023 la communauté de communes de procéder systématiquement à la collecte du surplus des déchets ménagers résultant de cette insuffisance et d’organiser la collecte pour répondre aux exigences du IV de l’article R2224-24 du code général des collectivités territoriales.

Par acte du 22 Janvier 2024, la commune de [Localité 5] a fait assigner la communauté de communes PROVENCE VERDON à comparaître devant le président du tribunal judiciaire de Draguignan statuant en référé pour, sur le fondement de l’existence d’un trouble manifestement illicite et d’un dommage imminent, voir :
- Juger qu’il convient de faire cesser le trouble manifestement illicite résultant de l’irrégularité des collectes des ordures ménagères et assimilées sur le territoire communal ;
- Juger qu'il convient de faire cesser le trouble manifestement illicite découlant de l’incomplétude des collectes des ordures ménagères et assimilées sur le territoire communal ;
- Juger qu’il convient de faire cesser le trouble manifestement illicite caractérisé par le trouble anormal de voisinage causé par l’irrégularité, l’incomplétude et l’absence de collecte des déchets ménagers et assimilés ;
- Juger qu'il convient de faire cesser le trouble manifestement illicite résultant de l’absence de collecte des ordures ménagères et assimilées sur une partie du territoire communal ;
-Juger qu’il convient de faire cesser le trouble manifestement illicite représenté par le trouble de jouissance perpétré sur le domaine privé de la commune ;
-luger qu’il convient de prévenir le dommage imminent résultant de l’irrégularité des collectes des ordures ménagères et assimilées sur le territoire communal ;
-Juger qu’il convient de faire cesser le dommage imminent résultant de l’irrégularité et de l’incomplétude des collectes des ordures ménagères et assimilées sur le territoire communal ;
-Juger qu’il convient de prévenir le dommage imminent découlant de l’absence de collecte des ordures ménagères et assimilées sur une partie du territoire communal ;
-Juger que pour faire cesser le trouble manifestement illicite énoncé et prévenir un dommage imminent il convient d’ordonner qu’il soit procédé systématiquement et entièrement à la collecte des déchets ménagers et assimilés sur le territoire communal ;
-Juger que pour faire cesser le trouble manifestement illicite, il appartient à la communauté de communes Provence verdon de procéder à la remise en état du domaine privé de la commune en tant que ce dernier a été altéré en raison de l’irrégularité, l’incomplétude et l’absence de collecte des déchets ménagers et assimilés ;
-luger que pour faire cesser le trouble manifestement illicite découlant de l’irrégularité, l’incomplétude et l’absence des collectes des ordures ménagères et assimilées sur le territoire communal, il convient d’ordonner que la communauté de communes communique à l’ensemble des administrés la position des points de collecte sur le territoire communal, ainsi que les modalités de collecte des déchets ménagers et assimilés ;
-Juger que la communauté de communes Provence verdon a commis une faute en ne respectant pas ses obligations tenant à la collecte des déchets ménagers e assimilés ;
-Ordonner le paiement d’une provision d’un montant de 6000 euros à verser à la commune de [Localité 5] en raison de la faute commise par la communauté de communes ;
-Condamner la défenderesse au paiement de trois mille euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions notifiées via le RPVA le 26 mars 2024 développées à l’audience, la communauté de communes PROVENCE VERDON soulève in limine litis l’incompétence des juridictions judiciaires pour connaître des demandes de la commune s’agissant de l’exécution du contrat conclu avec la société VEOLIA pour l’occupation du domaine public que constituent les voies et leurs abords, dans le cadre de la collecte des déchets en points d’apports volontaires.
Elle soutient également le défait d’intérêt à agir de la commune qui a perdu toute compétence en matière de déchets.
Sur le fond elle sollicite le rejet des demandes en l’absence de dommage imminent et de trouble manifestement illicite et l’absence de préjudice non sérieusement contestable.
Elle demande 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Au dernier état de ses demandes notifiées via le RPVA le 13 mai 2024 et reprises à l’audience, la commune de [Localité 5] demande au président du tribunal judiciaire de Draguignan statuant en référé et sur le fondement de l’article 835 du code de procédure civile de :
- Juger qu’il convient de faire cesser le trouble manifestement illicite résultant de l’irrégularité de la collecte des déchets ménagers et assimilés sur le territoire communal ;
-Juger qu’il convient de faire cesser le trouble manifestement illicite caractérisé par le trouble anormal de voisinage causé par l’irrégularité, l’incomplétude et l’absence de collecte des déchets ménagers et assimilés ;
-Juger qu’il convient de faire cesser le trouble manifestement illicite résultant de l’absence de collecte des déchets ménagers et assimilés sur une partie du territoire communal ;
- Juger qu’il convient de faire cesser le trouble manifestement illicite représenté par le trouble de jouissance perpétré sur le domaine privé de la commune ;
- Juger qu’il convient de faire cesser le trouble manifestement illicite résultant du comportement déloyal du président de la communauté de communes au préjudice de la commune de [Localité 5] ;
-Juger qu’il convient de faire cesser le dénigrement perpétré au préjudice de l’image de la commune de [Localité 5] et de son maire en exercice par le président de la communauté de communes et le responsable du pôle prévention et gestion des déchets, caractérisé par une communication malveillante ;
-Juger qu’il convient de prévenir le dommage imminent résultant de l’irrégularité de la collecte des déchets ménagers et assimilés sur le territoire communal ;
- Juger qu’il convient de faire cesser le dommage imminent résultant de l'irrégularité et de l’incomplétude de la collecte des déchets ménagers et assimilés sur le territoire communal ;
-Juger que pour faire cesser le trouble manifestement illicite et prévenir le dommage imminent, il convient d’ordonner qu’il soit procédé systématiquement et entièrement à la collecte des déchets ménagers et assimilés sur le territoire communal ;
- Juger que pour faire cesser le trouble manifestement illicite, il appartient à la communauté de communes Provence Verdon de procéder à la remise en état du domaine privé de la commune en tant que ce dernier a été altéré en raison de l'irrégularité, l’incomplétude et l’absence de collecte des déchets ménagers et assimilés, et ce dans un délai raisonnable ;
- Juger que pour faire cesser le trouble manifestement illicite découlant de l’irrégularité, l'incomplétude et l’absence de collecte des déchets ménagers et assimilés sur le territoire communal, il convient d’ordonner que la communauté de communes communique à l’ensemble des administrés la position des points de collecte sur le territoire communal, ainsi que les modalités de collecte des déchets ménagers et assimilés et une feuille de route d’amélioration du service public industriel et commercial dans un délai de 5 jours à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir ;
- Juger que pour faire cesser le trouble manifestement illicite résultant du dénigrement perpétré par le président de la communauté de communes et le responsable du pôle prévention et gestion des déchets au préjudice de l’image de la commune et de son maire en exercice, il convient d’ordonner que ces derniers cessent la campagne de dénigrement à l’encontre de la commune et de son maire en exercice et qu’ils portent à la connaissance de l’ensemble des administrés l’absence de compétence et de responsabilité du maire en matière d’irrégularité et d’incomplétude de collecte des déchets ménagers et assimilés dans un délai de 5 jours à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir ;
-Juger que la communauté de communes Provence verdon a commis une faute en ne respectant pas ses obligations tenant à la collecte des déchets ménagers et assimilés ;
-Ordonner le paiement d’une provision d’un montant de 6 000 euros (SIX MILLE EUROS) à verser à la commune de [Localité 5] en raison de la faute commise par la communauté de communes, la condamnation au paiement de trois mille euros (TROIS MILLE EUROS) au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Elle soulève l’absence de pouvoir du président de l’intercommunalité pour représenter la communauté de communes.
Elle fait valoir la compétence exclusive de la communauté de communes en matière de collecte des déchets ménagers et assimilés, que le trouble persiste causant un préjudice aux administrés, qu’il y a urgence et prétend à la compétence des juridictions judiciaires pour connaître de sa demande, le service d’élimination des déchets ménagers constituant un service public industriel et commercial de sorte que les litiges relatifs aux relations entre le service et ses usagers dont elle fait partie, relève de la compétence du juge judiciaire et que des points de collecte sont situés sur le domaine privé de la commune, que le trouble manifestement illicite résulte aussi du dénigrement de l’image de la commune et le dommage imminent du fait d’un nouvel épisode d’irrégularité de la collecte, que la communauté de communes a manqué à son obligation de faire.

MOTIFS

L’article L5211-9 du code général des collectivités qui prévoit que : « Le président est l'organe exécutif de l'établissement public de coopération intercommunale... Il représente en justice l'établissement public de coopération intercommunale » est précisément contraire et donne par le seul effet de la loi, le pouvoir au président de représentation en justice de la communauté de communes.

Il en résulte que le président de la communauté de communes représente celle-ci en justice.
L’article L5211-2 du code général des collectivités territoriales prévoit : « A l'exception de celles des deuxième à quatrième alinéas de l'article L. 2122-4, les dispositions du chapitre II du titre II du livre Ier de la deuxième partie relatives au maire et aux adjoints sont applicables au président et aux membres du bureau des établissements publics de coopération intercommunale, en tant qu'elles ne sont pas contraires aux dispositions du présent titre. »

Il résulte de l’extrait du registre des délibérations produit en pièce 37 par la défenderesse que le président de la communauté d’agglomération a reçu par une délibération communautaire du 13 octobre 2020, délégation pour ester en justice pour défendre les intérêts de la communauté de communes et de la délibération du 23 janvier 2024 l’autorisation d’ester en justice dans le cadre du recours intenté par la commune de [Localité 5].
La communauté de communes est donc recevable en sa défense.

Ainsi que le rappelle la commune de [Localité 5], le traitement et la collecte des déchets ménagers relève de la compétence obligatoire des établissements publics de coopération territoriale en vertu de L5214-16 5° du code général des collectivités territoriales depuis la loi du 21 février 2022.

Il résulte par ailleurs des dispositions de l’article L2333-76 du code général des collectivités territoriales que « Les communes, les établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats mixtes qui bénéficient de la compétence prévue à l'article L. 2224-13 peuvent instituer une redevance d'enlèvement des ordures ménagères calculée en fonction du service rendu dès lors qu'ils assurent au moins la collecte des déchets des ménages ».

Le tribunal des conflits juge qu’en substituant une rémunération directe du service par l'usager à une recette de caractère fiscal, le législateur a entendu permettre à ces collectivités publiques de gérer ce service comme une activité industrielle ou commerciale.

Il résulte de la facture de la communauté de communes Provence VERDON à la commune de [Localité 5] que le service d’enlèvement des ordures ménagères donne lieu à la perception d’une redevance à son égard.

La juridiction judiciaire est compétente pour connaître des litiges relatifs aux rapports entre ce service et les usagers : la commune du fait de son assujettissement personnel à la redevance peut être considérée comme un usager.
En ce cas cependant, elle ne peut prétendre devant le tribunal judiciaire qu’à la défense de ses intérêts propres liés aux difficultés rencontrées au niveau des points d’apport concernés par la redevance à laquelle elle est assujettie, à savoir les « cantines scolaires ».

En l’espèce, elle fait référence à longueur de conclusions au fait que le trouble cause des préjudices graves et immédiats aux administrés, que la commune connaît une situation d’insalubrité et de risque pour la sécurité des personnes, que la collecte est irrégulière et incomplète sur le territoire communal : ses demandes ont d’ailleurs trait à la collecte sur le territoire communal et à l’information des administrés.

Sa demande de provision a également trait au préjudice né de l’absence de collecte complète et régulière sur le territoire communal.

Elle produit au surplus un album photos de multiples points d’apports sur le territoire communal, d’amas de déchets sur les trottoirs et aux bords des voies de circulation qui ne peuvent en tout état de cause pas constituer le « domaine privé » de la commune, dont l’existence n’a été justifiée par aucun titre de propriété dans le cadre des débats.

Il ressort de ces éléments que la commune de [Localité 5], collectivité territoriale, qui n’a pas attrait en la cause la société titulaire du marché public, entend faire juger au bénéfice de ses administrés, ce qu’elle considère être des manquements de la communauté de communes, autre collectivité territoriale, à ses obligations légales dans le domaine de la collecte des déchets ménagers sur son territoire pour y voir mettre un terme.

S’agissant dès lors de la mise en œuvre de la responsabilité administrative, les juridictions judiciaires ne sont pas compétentes pour connaître de ces demandes, à les supposer recevables.

Quant aux faits de « dénigrement perpétré par le président de la communauté de communes et le responsable du pôle prévention et gestion des déchets », il s’agirait également de rechercher la réparation d’une faute commise par les élus ou les agents de la collectivité, contentieux qui ne relève pas de la compétence du juge judiciaire.

La commune de [Localité 5] qui succombe supportera les dépens et le paiement de la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Nous, Nathalie Fèvre, présidente, statuant en référé, par ordonnance mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

DISONS les juridictions judiciaires incompétentes pour connaître des demandes,

CONDAMNONS la commune de [Localité 5] aux dépens,

CONDAMNONS la commune de [Localité 5] à payer à la communauté de communes PROVENCE VERDON la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe, les jours, mois et an susdits.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Draguignan
Formation : Referes generaux
Numéro d'arrêt : 24/00715
Date de la décision : 21/08/2024
Sens de l'arrêt : Se déclare incompétent

Origine de la décision
Date de l'import : 29/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-08-21;24.00715 ?
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