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12/08/2024 | FRANCE | N°22/04779

France | France, Tribunal judiciaire de Draguignan, Chambre 3 - construction, 12 août 2024, 22/04779


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE DRAGUIGNAN
_______________________

Chambre 3 - CONSTRUCTION

************************

DU 12 août 2024
Dossier N° RG 22/04779 - N° Portalis DB3D-W-B7G-JQVO
Minute n° : 2024/230

AFFAIRE :

[U] [I] et [E] [I] C/ [T] [H] et Maître [V] [S], notaire associé membre de la SAS “B&tt Notaires”



JUGEMENT DU 12 Août 2024




COMPOSITION DU TRIBUNAL :

PRÉSIDENT : Madame Nadine BARRET, Vice-Présidente, statuant à juge unique

Greffière présente lors des débats : Madame Cécile CAR

TAL
Greffière faisant fonction lors de la mise à disposition : Madame Evelyse DENOYELLE

DÉBATS :

A l’audience publique du 08 mars 2024
A l’issue...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE DRAGUIGNAN
_______________________

Chambre 3 - CONSTRUCTION

************************

DU 12 août 2024
Dossier N° RG 22/04779 - N° Portalis DB3D-W-B7G-JQVO
Minute n° : 2024/230

AFFAIRE :

[U] [I] et [E] [I] C/ [T] [H] et Maître [V] [S], notaire associé membre de la SAS “B&tt Notaires”

JUGEMENT DU 12 Août 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

PRÉSIDENT : Madame Nadine BARRET, Vice-Présidente, statuant à juge unique

Greffière présente lors des débats : Madame Cécile CARTAL
Greffière faisant fonction lors de la mise à disposition : Madame Evelyse DENOYELLE

DÉBATS :

A l’audience publique du 08 mars 2024
A l’issue des débats, les parties ont été avisées que le jugement serait prononcé par mise à disposition au greffe le 14 juin 2024, prorogé au 12 juillet 2024 puis au 12 août 2024

JUGEMENT :

Rendu après débats publics par mise à disposition au greffe, par décision réputé contradictoire et en premier ressort

copies exécutoires à :
- Me Geoffrey BARTHELEMY - 66
- Me Jean-Louis DAVID - ([Localité 10])

Délivrées le 12 août 2024

Copie dossier

NOM DES PARTIES :

DEMANDEURS :

Monsieur [U] [I]
demeurant [Adresse 7] - [Localité 8]

Monsieur [E] [I]
demeurant [Adresse 6] - [Localité 1]

tous deux représentés par Maître Jean-Louis DAVID, avocat au barreau de GRASSE

D’UNE PART ;

DÉFENDEURS :

Monsieur [T] [H]
demeurant [Adresse 2] - [Localité 3] (SUISSE)

représenté par Maître Geoffrey BARTHELEMY, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

Maître [V] [S]; notaire associé membre de la SAS “B&tt Notaires” demeurant [Adresse 5] - [Localité 9]

non représenté

D’AUTRE PART ;

******************

FAITS, PROCÉDURE ET PAREMENTIONS DES PARTIES

Par exploits délivrés les 05 juillet 2022 et 24 août 2022, les consorts [I] faisaient assigner Monsieur [H] et Maître [S], notaire à [Localité 11], sur le fondement des articles 1103, 1104, 1304 et 1231 du code civil.

Les consorts [I] exposaient avoir signé une promesse de vente de leur propriété cadastrée AK [Cadastre 4] à [Localité 11], rédigée par Maître [S], au profit de Monsieur [H].

La promesse de vente était consentie pour une durée expirant le 03 septembre 2021 à 16 heures et pour le prix de 2 400 000 euros. La défaillance du bénéficiaire leur ouvrirait droit à une indemnité d’immobilisation d’un montant de 120 000 euros.

À la demande du bénéficiaire un avenant été signé qui prorogeait la promesse jusqu’au 02 novembre 2021 à 18 heures et prévoyait le paiement au consort [I] par prélèvement sur l’indemnité d’immobilisation de la somme de 60 000 euros lors de la signature.

Cette somme devait s’imputer sur le prix de vente en cas de réitération de la promesse au plus tard le 02 novembre 2021. En cas de nouvelle défaillance du bénéficiaire l’avenant stipulait un ordre irrévocable de ce dernier de verser au promettant le solde de l’indemnité d’immobilisation de 60 000 euros. Il était expressément stipulé qu’en cas d’absence de signature au plus tard le 02 novembre 2021 le bénéficiaire perdrait intégralement l’indemnité d’immobilisation de 120 000 euros.

Le bénéficiaire était à nouveau défaillant au 02 novembre 2021. C’est alors que le notaire indiquait aux consorts [I] qu’il avait reçu un courrier du conseil du bénéficiaire en date du 29 octobre 2021 lui interdisant de débloquer les fonds.

Par la suite le bien avait été vendu à des tiers.

Par courrier en date du 17 mai 2022 le conseil des consorts [I] écrivait au notaire pour lui demander de libérer les fonds. Maître [S] persistait néanmoins à conditionner le versement de l’indemnité d’immobilisation à l’accord de Monsieur [H].

Observant que l’ensemble des conditions suspensives, relatives aux renseignements d’urbanisme, et à l’élargissement de la voirie avaient été remplies, avant la date stipulée à l’avenant, les consorts [I] demandaient la libération par le notaire de la somme de 60 000 euros entre leurs mains, la condamnation de Monsieur [H] à leur verser la somme de 6 000 euros (3 000 euros à chacun) au titre de l’indemnisation de leur préjudice financier, outre la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles, et à régler les dépens.

Dans le dernier état de leurs écritures notifiées par voie électronique le 11 mai 2023, ils persistaient dans leurs prétentions, portant leur demande de frais irrépétibles à la somme de 3 480 euros chacun.

Ils soutenaient que la fin de non-recevoir opposée par le défendeur au titre de la clause de conciliation préalable aurait dû être évoquée devant le juge de la mise en état conformément à l’article 789 du code de procédure civile.

Au surplus la clause ne prévoyait qu’une faculté pour les parties de soumettre le différend à un conciliateur.

Sur le fond, ils maintenaient leur analyse de la clause relative à l’indemnité d’immobilisation, le juge ne pouvant la dénaturer alors qu’elle était claire et précise et n’avait pas la nature d’une clause pénale. Ils observaient que le défendeur avait bien payé la somme de 60 000 euros à titre d’indemnité d’immobilisation et non à titre de clause pénale.

Dans le dernier état de ses écritures notifiées par voie électronique le 13 janvier 2023, Monsieur [H] demandait le rejet des prétentions des consorts [I].

À titre principal il soutenait qu’à défaut d’avoir mis en œuvre la clause de conciliation prévue à la promesse de vente, leur demande était irrecevable.

À titre subsidiaire, il demandait qu’il leur soit enjoint de produire l’acte de vente du bien, intervenue postérieurement à la non réalisation de la promesse.

Il soutenait que la clause relative à l’indemnité d’immobilisation s’analysait comme une clause pénale et qu’en application de l’article 1231-5 du code civil, le tribunal devrait la diminuer à la somme de 60 000 euros déjà réglée.

Il demandait la condamnation des consorts [I] à lui verser 3 000 euros au titre des frais irrépétibles et à régler les dépens.

Maître [S] ne constituait pas avocat.

Pour un plus ample exposé des faits moyens et prétentions des parties il est renvoyé aux écritures susvisées conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

La procédure était clôturée par ordonnance en date du 09 octobre 2023 et l’affaire était audiencée pour être plaidée à l’audience du 11 janvier 2024 puis renvoyée à l’audience du 8 mars 2024. L’affaire était mise en délibéré le 14 juin 2024, prorogé au 12 juillet 2024 puis au 12 août 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de conciliation préalable :

La clause figurant en page 33 du compromis de vente prévoit qu’en cas de litige entre les parties, l’une d’elles pourra préalablement à toute instance judiciaire soumettre le différend à un conciliateur.

Il s’agit donc d’une simple faculté et non d’une obligation. Au surplus toute fin de non-recevoir doit désormais être évoqué devant le juge de la mise en état.

Le moyen sera donc écarté.

Sur les conditions suspensives particulières :

La condition suspensive particulière relative à l’obtention d’un certificat d’urbanisme informatif précise que selon courrier de la mairie de [Localité 11] en date du 02 février 2021, celle-ci ne répondra pas aux demandes relatives à cette pièce. Dès la signature du compromis la réalisation de cette condition suspensive était dépourvue d’ambiguïté, a fortiori pour le défendeur, professionnel de l’immobilier.

Quant à l’éventuel élargissement de la voirie, la lettre de renseignements d’urbanisme en date du 19 mars 2021 annexée à l’acte du 24 mars 2021 établissait que celui-ci en avait été informé.

Les consorts [I] seront donc déboutés de leur demande.

Ce moyen sera donc écarté.

Sur la clause relative à l’indemnité d’immobilisation :

La stipulation d’une indemnité d’immobilisation n’a pas pour objet de faire assurer par une des parties l’exécution de son obligation, mais de compenser pour le promettant le préjudice résultant de l’impossibilité de vendre le bien durant le délai de réalisation de la promesse. En cas de réalisation de la vente elle s’impute sur le prix et ne saurait donc constituer une pénalité convenue à l’avance par les parties à un contrat pour sanctionner l’inexécution d’une obligation contractuelle, conformément à l’article 1231-5 du code civil.

Il n’y a donc pas lieu à requalification de la clause figurant en page 07 de la promesse de vente, confirmée en page 03 de l’avenant prorogeant le délai d’exécution de la promesse de vente au 02 novembre 2021.
Le défendeur a de fait acquiescé à la nature compensatoire de l’indemnité en acceptant la libération par le notaire de la somme de 60 000 euros entre les mains des demandeurs.

En application de la clause relative à l’ordre irrévocable de versement complémentaire, il sera fait droit à la demande principale tendant à autoriser le notaire à verser aux consorts [I] le solde de l’indemnité d’immobilisation de 60 000 euros.

Sur le préjudice financier :

Il est constant que la somme de 60 000 euros aurait dû être versée spontanément en exécution des stipulations de l’avenant susvisé courant novembre 2021. Malgré des demandes répétées, le notaire a refusé de verser le solde, au motif que le bénéficiaire ne lui donnait pas son accord.

La somme réclamée par les demandeurs correspond à 10 % de la somme dont chacun est privé depuis cette date, et paraît dépourvue d’exagération au regard du préjudice ainsi causé.

Il sera donc fait droit à la demande de condamnation de Monsieur [H] à leur verser la somme de 3 000 euros à chacun.

Sur les dépens :

Monsieur [H] partie perdante sera condamné aux dépens de l’instance.

Sur l’article 700 du code de procédure civile :

Monsieur [H] partie perdante sera condamnée à verser aux consorts [I] la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Sur l’exécution provisoire :

Le défendeur soutient au dispositif de ses conclusions que l’exécution provisoire est incompatible avec la nature de l’affaire sans apporter aucun élément de démonstration.

Il apparaît au contraire qu’il n’existe aucun motif sérieux d’écarter l’exécution provisoire de droit du présent jugement.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,

Vu les articles 1103, 1104 et 1231-5 du code civil,

ECARTE la fin de non recevoir tirée du défaut de tentative de conciliation préalable ;

DÉBOUTE Monsieur [T] [H] de sa demande de requalification de la clause relative à l’indemnité d’immobilisation en clause pénale ;

ORDONNE à Maître [V] [S], notaire associé membres de la SAS B&tt notaires à [Localité 11] de libérer sans délai entre les mains de Monsieur [U] [I] et de Monsieur [E] [I] le solde de l’indemnité d’immobilisation de 60 000 euros ;

CONDAMNE Monsieur [T] [H] à verser à Monsieur [U] [I] la somme de 3 000 euros et à Monsieur [E] [I] la somme de 3 000 euros en indemnisation de leur préjudice financier ;

CONDAMNE Monsieur [T] [H] aux dépens de l’instance ;

CONDAMNE Monsieur [T] [H] à verser à Monsieur [U] [I] et Monsieur [E] [I] la somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

DIT n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Draguignan
Formation : Chambre 3 - construction
Numéro d'arrêt : 22/04779
Date de la décision : 12/08/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 18/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-08-12;22.04779 ?
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