MINUTE N° :
ORDONNANCE DU : 03 Septembre 2024
DOSSIER N° : N° RG 24/00942 - N° Portalis DB3T-W-B7I-VB5Y
CODE NAC : 50D - 0A
AFFAIRE : [I] [B] C/ [P] [F]
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE CRETEIL
Section des Référés
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
LE JUGE DES REFERES : Madame Elise POURON, Juge
LE GREFFIER : Madame Stéphanie GEULIN, Greffier
PARTIES :
DEMANDERESSE
Madame [I] [B] née le 19 Mars 1977 à DIEPPE (76), demeurant 16 B rue de la Cote aux brebis - 27120 HOULBEC COCHEREL
représentée par Me Sandrine PRISO, avocate au barreau de l’ESSONNE
DEFENDEUR
Monsieur [P] [F], demeurant 23 ter boulevard de Strasbourg - 94130 NOGENT SUR MARNE
non représenté
Débats tenus à l’audience du : 23 Juillet 2024
Date de délibéré indiquée par le Président : 03 Septembre 2024
Ordonnance rendue par mise à disposition au greffe le 03 Septembre 2024
EXPOSE DU LITIGE
Le 16 février 2022 Madame [I] [B] a acquis un véhicule d’occasion de marque CITROEN, modèle PICASSO , immatriculé AG-876-CA auprès de Monsieur [P] [F] pour le prix de 2.500 euros.
Le véhicule a rapidement présenté des signes de dysfonctionnement.
Une expertise amiable a été diligentée et un rapport d’expertise a été rendu le 17 août 2022.
C’est dans ces conditions que par acte d’huissier du 6 juin 2024, Madame [I] [B] a fait assigner Monsieur [P] [F] devant la juridiction des référés du tribunal judiciaire de Créteil aux fins d’obtenir la désignation d’un expert judiciaire.
Le dossier a été évoqué à l’audience du 23 juillet 2024, au cours de laquelle Madame [I] [B] a maintenu ses demandes.
Il est renvoyé à l’acte introductif d’instance pour un plus ample exposé des moyens qui y sont contenus.
Assigné conformément aux dispositions de l’article 659 du code de procédure civile, Monsieur [P] [F] n'a pas constitué avocat, de sorte qu’il est statué par décision réputée contradictoire.
À l’audience du 23 juillet 2024, l’affaire a été mise en délibéré, les parties étant informées que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande d’expertise :
Aux termes de l'article 145 du code de procédure civile, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.
Ce texte suppose l'existence d'un motif légitime c'est à dire un fait crédible et plausible, ne relevant pas de la simple hypothèse qui présente un lien utile avec un litige potentiel futur dont l'objet et le fondement juridique sont suffisamment déterminés et dont la solution peut dépendre de la mesure d'instruction sollicitée à condition que cette mesure ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d'autrui. Elle doit être pertinente et utile.
Ainsi, si le demandeur à la mesure d'instruction n'a pas à démontrer l'existence des faits qu'il invoque puisque cette mesure in futurum est justement destinée à les établir, il doit néanmoins justifier d'éléments rendant crédibles ses suppositions et justifier que le litige potentiel n'est pas manifestement voué à l'échec et que la mesure est de nature à améliorer la situation probatoire du demandeur.
La faculté prévue à l'article 145 du code de procédure civile ne saurait, en outre, être exercée à l'encontre d'un défendeur qui, manifestement, et en dehors même de toute discussion au fond, ne serait pas susceptible d'être mis en cause dans une action principale.
De plus, si la partie demanderesse dispose d'ores et déjà de moyens de preuves suffisants pour conserver ou établir la preuve des faits litigieux, la mesure d'instruction demandée est dépourvue de toute utilité et doit être rejetée.
Enfin, l'application de cet article n'implique aucun préjugé sur la responsabilité des parties appelées à la procédure, ni sur les chances de succès du procès susceptible d'être ultérieurement engagé.
En l’espèce, Madame [I] [B] n'a pas à démontrer l'existence de désordres ou fautes qu'elle invoque puisque cette mesure in futurum est justement destinée à les établir. Elle doit seulement justifier d'éléments rendant crédibles ses suppositions.
Or, tel est le cas au vu du rapport d’expertise amiable établi par le cabinet CREATIV en date du17 août 2022 constatant notamment que l’origine de l’avarie se trouvait au niveau de la boîte de vitesse automatique et plus particulièrement du bloc hydraulique, défaut dû à un défaut de pression d’huile interne dans le bloc ayant provoqué des dommages irréversibles. L’expert a indiqué que le véhicule était impropre à la circulation et que la responsabilité du vendeur sur le fondement des articles 1641 du code civil pouvait être engagée.
Il importe peu à ce stade que ces éléments n’aient pas été contradictoirement débattus, la mesure d'instruction sollicitée ayant précisément pour objet de rendre les constatations de l'expert contradictoires.
Au regard de ces éléments, et alors que le débat sur la teneur et l’imputabilité des désordres relève du juge du fond, Madame [I] [B] dispose d'un motif légitime à faire établir les désordres qu'elle allègue, un procès éventuel n’étant pas manifestement voué à l'échec.
Du tout, il résulte que les conditions d’application des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile sont réunies et qu’il convient d’ordonner la mesure d’expertise requise, dans les termes du dispositif, en mettant à la charge de Madame [I] [B] le paiement de la provision initiale.
Sur les demandes accessoires :
L’article 491, alinéa 2 du code de procédure civile précise que la juridiction des référés statue sur les dépens. L’article 696 dudit code dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
A la lumière de ce qui précède, l’expertise étant ordonnée à la demande et dans l’intérêt de Madame [I] [B], pour lui permettre ultérieurement et éventuellement d’engager une instance judiciaire, les dépens doivent provisoirement demeurer à sa charge.
PAR CES MOTIFS
Statuant par mise à disposition de la présente ordonnance au greffe le jour du délibéré après débats en audience publique, par décision réputée contradictoire, en premier ressort et en matière de référé,
Ordonnons une mesure d’expertise,
Désignons pour y procéder :
Monsieur [V] [N]
7, rue Descartes
95330 DOMONT
Port. : 06.75.80.43.08
Mèl : [N].[V].expert@gmail.com
expert inscrit sur les listes de la Cour d’appel de Versailles, lequel, sollicité préalablement à sa désignation l’a acceptée par courriel du 25 juillet 2024 et pourra prendre l’initiative de recueillir l’avis d’un autre technicien, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne, avec mission de :
Relever et décrire les désordres et malfaçons allégués expressément dans l’assignation et affectant le véhicule litigieux, un véhicule d’occasion de marque CITROEN, modèle PICASSO , AG-876-CA , ainsi que les non conformités et/ou inachèvements allégués au regard des documents contractuels liant les parties ;
En détailler l’origine, les causes et l’étendue, et fournir tous éléments permettant à la juridiction de déterminer à quels intervenants ces désordres, malfaçons et inachèvements sont imputables, et dans quelles proportions ;
Indiquer les conséquences de ces désordres, malfaçons et inachèvements quant à la solidité, l'habitabilité, l'esthétique du véhicule , et, plus généralement quant à l'usage qui peut en être attendu ou quant à la conformité à sa destination ;
Le cas échéant, déterminer leur origine ou leur cause, dire si ces désordres étaient apparents à la date d'acquisition du véhicule ou s'ils sont apparus postérieurement ; dans le premier cas, dire s'ils pouvaient être décelés par un automobiliste profane ; dans le second, dire s'ils trouvent leur origine dans une situation antérieure à l'acquisition ;
Dire si ces défauts auraient dû apparaître lors du contrôle technique ; dire s'ils ont été mentionnés correctement sur le contrôle technique ; dire si leur mention aurait pu modifier l'opinion de l'acquéreur sur le prix de cession ;
Dire si les éventuelles réparations effectuées antérieurement à la cession ont été conduites conformément aux documents contractuels et aux règles de l’art ;
Donner son avis sur les solutions appropriées pour y remédier, telles que proposées par les parties ; évaluer le coût des travaux utiles à l’aide de devis d’entreprises fournis par les parties ;
Donner à la juridiction du fond éventuellement saisie tous éléments permettant d’évaluer la valeur vénale du véhicule automobile à la date de la cession ; en particulier, dire s’il était économiquement réparable ;
Donner son avis sur les préjudices, notamment le préjudice de jouissance, et coûts induits par ces désordres, malfaçons, inachèvements ou non conformités et sur leur évaluation, dès lors que ces demandes sont présentées de manière motivée ;
Rapporter toutes autres constatations utiles à l'examen des prétentions des parties ;
Donner, le cas échéant, son avis sur les comptes entre les parties ;
Désignons le magistrat chargé du contrôle des expertises pour contrôler les opérations d’expertise ;
Disons que pour procéder à sa mission l’expert devra :
- convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l'occasion de l'exécution des opérations ou de la tenue des réunions d'expertise ;
- se faire remettre toutes pièces utiles à l'accomplissement de sa mission ;
- se rendre sur les lieux où se trouve le véhicule et si nécessaire en faire la description, au besoin en constituant un album photographique et en dressant des croquis ;
- à l’issue de la première réunion d’expertise, ou dès que cela lui semble possible, et en concertation avec les parties, définir un calendrier prévisionnel de ses opérations ; l’actualiser ensuite dans le meilleur délai :
* en faisant définir une enveloppe financière pour les investigations à réaliser, de manière à permettre aux parties de préparer le budget nécessaire à la poursuite de ses opérations;
* en indiquant les mises en cause, les interventions volontaires ou forcées qui lui paraissent nécessaires et en invitant les parties à procéder auxdites mises en cause dans le délai qu’il fixera ;
* en les informant de l’évolution de l’estimation du montant prévisible de ses frais et honoraires et en les avisant de la saisine du juge du contrôle des demandes de consignation complémentaire qui s’en déduisent ;
* en les informant, le moment venu, de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse ;
- au terme de ses opérations, adresser aux parties un document de synthèse, sauf exception dont il s’expliquera dans son rapport (par ex. : réunion de synthèse; communication d’un projet de rapport), et y arrêter le calendrier de la phase conclusive de ses opérations :
* fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse,
*rappelant aux parties, au visa de l’article 276 alinéa 2 du code de procédure civile, qu’il n’est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au-delà de ce délai.
Fixons à la somme de 1 500 € la provision concernant les frais d'expertise qui devra être consignée par Madame [I] [B] à la régie du tribunal judiciaire de CRETEIL dans le mois qui suit la demande de consignation adressée par le greffe ;
Disons que faute de consignation de la provision dans ce délai impératif, ou demande de prorogation sollicitée en temps utile, la désignation de l'expert sera caduque et de nul effet ;
Disons que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 248, 263 à 284-1 du code de procédure civile et qu'il déposera l’original et une copie de son rapport au greffe du tribunal, dans les six mois de la réception de l'avis de consignation, sauf prorogation de ce délai, dûment sollicitée en temps utile auprès du juge du contrôle, ainsi qu’une copie du rapport à chaque partie (ou à son avocat pour celles étant assistées) ;
Disons que l’exécution de la mesure d’instruction sera suivie par le juge du service du contrôle des mesures d’instruction de ce tribunal, spécialement désigné à cette fin en application des articles 155 et 155-1 du même code ;
Rappelons aux parties les dispositions de l’article 2239 du code civil :
“La prescription est également suspendue lorsque le juge fait droit à une demande de mesure d'instruction présentée avant tout procès.
Le délai de prescription recommence à courir, pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois, à compter du jour où la mesure a été exécutée”.
Disons que les dépens resteront à la charge de Madame [I] [B] ;
Rappelons que la présente ordonnance bénéficie de plein droit de l’exécution provisoire.
FAIT AU PALAIS DE JUSTICE DE CRETEIL, le 3 septembre 2024 .
LE GREFFIER LE JUGE DES REFERES