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03/09/2024 | FRANCE | N°23/03815

France | France, Tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse, 3ème chambre civile, 03 septembre 2024, 23/03815


REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOURG EN BRESSE

3e chambre civile

JUGEMENT DU 03 SEPTEMBRE 2024

N° RG 23/03815 - N° Portalis DBWH-W-B7H-GS6V

N° minute : 24/00083

Dans l’affaire entre :

DEMANDEURS

Monsieur [M] [T] [K] [H]
né le 24 avril 2004 à [Localité 4]
demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Julie CARNEIRO avocat au barreau de l’Ain, substituée par Me Sophie PRUGNAUD-SERVELLE, avocat au barreau de l’Ain

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle num

éro C-01053-2023-2908 du 31/10/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de BOURG EN BRESSE)

Madame [S] [Z] [D] [R] épouse [...

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOURG EN BRESSE

3e chambre civile

JUGEMENT DU 03 SEPTEMBRE 2024

N° RG 23/03815 - N° Portalis DBWH-W-B7H-GS6V

N° minute : 24/00083

Dans l’affaire entre :

DEMANDEURS

Monsieur [M] [T] [K] [H]
né le 24 avril 2004 à [Localité 4]
demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Julie CARNEIRO avocat au barreau de l’Ain, substituée par Me Sophie PRUGNAUD-SERVELLE, avocat au barreau de l’Ain

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro C-01053-2023-2908 du 31/10/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de BOURG EN BRESSE)

Madame [S] [Z] [D] [R] épouse [H]
demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Julie CARNEIRO avocat au barreau de l’Ain, substituée par Me Sophie PRUGNAUD-SERVELLE, avocat au barreau de l’Ain

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro C-01053-2023-2909 du 31/10/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de BOURG EN BRESSE)

et

DEFENDERESSE

S.A. BANQUE POPULAIRE BOURGOGNE FRANCHE COMTE
dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Me Luc ROBERT avocat au barreau de l’Ain,substitué par Me Patricia DASSONVILLE, avocat au barreau de l’Ain


COMPOSITION DU TRIBUNAL

Magistrat : Madame POMATHIOS,
Greffier : Madame TALMANT, Greffier

Débats : en audience publique le 14 Mars 2024
Prononcé : décision rendue publiquement par mise à disposition au greffe le 03 Septembre 2024

copies délivrées le 03 SEPTEMBRE 2024 à :
Monsieur [M] [T] [K] [H]
Madame [S] [Z] [D] [R] épouse [H]
S.A. BANQUE POPULAIRE BOURGOGNE FRANCHE COMTE

formule(s) exécutoire(s) délivrée(s) le 03 SEPTEMBRE 2024 à :
Monsieur [M] [T] [K] [H]

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [M] [H] est titulaire d’un compte courant numéro 42419398757 ouvert dans les livres de la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté depuis le 03 mars 2020.

Le 17 décembre 2022, Monsieur [M] [H] a déposé plainte pour escroquerie commise à son encontre entre le 16 et le 17 décembre 2022, ayant retiré la somme de 1 850 euros qui aurait dû lui être versée sur son compte bancaire pour acheter des tickets PCS pour le compte d’une personne avec laquelle il dialoguait depuis le 30 novembre 2022 sur le réseau social Instagram afin d’effectuer une optimisation fiscale.

Par courrier du 09 janvier 2023, Madame [S] [R] épouse [H] a sollicité auprès de la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté le remboursement de la somme de 1 850 euros à son fils, Monsieur [M] [H], qui a opéré des retraits car ladite somme apparaissait créditée sur son compte bancaire.

Par courrier en réponse du 13 janvier 2023, la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté a informé Madame [S] [R] épouse [H] qu’elle refusait de donner une suite favorable à sa demande au motif qu’il résultait de la convention de compte souscrite par Monsieur [M] [H] que le client acceptait la faculté pour la banque de rectifier par contre-passation le montant annoncé en cas de différence entre celui-ci et le montant reconnu par la banque et qu’il apparaissait que son fils avait librement communiqué ses coordonnées bancaires à un tiers et avait librement effectué des retraits d’espèces dans un guichet de retrait automatique exigeant l’utilisation physique d’une carte et la frappe du code confidentiel attaché à cette dernière, carte toujours en sa possession.

Par courrier recommandé du 31 janvier 2023, Monsieur [M] [H] a saisi le médiateur de la consommation de la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté du litige l’opposant à l’organisme bancaire.

Par courrier du 30 mai 2023, le médiateur de la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté a informé Monsieur [M] [H] qu’il était d’avis que la banque lui rembourse la comme de 1 500 euros correspondant à ses deux retraits du 16 décembre 2022, la banque ayant inscrit sans réserve au crédit de son compte des espèces dont elle ne disposait pas, créant l’illusion qui lui a permis de retirer l’argent, mais que Monsieur [M] [H] devait garder à sa charge la somme de 350 euros réglée le 20 décembre 2022 alors qu’il pouvait par simple consultation de son compte réalisé qu’il était victime d’une escroquerie.

Par courrier du 06 juin 2023, la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté a informé Monsieur [M] [H] qu’elle n’acceptait pas la proposition de solution du médiateur.

C’est dans ces conditions que par acte de commissaire de justice du 21 décembre 2023, Monsieur [M] [H] et Madame [S] [R] épouse [H] ont fait assigner la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté devant le tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse à l’audience du 18 janvier 2024, aux fins de voir, sur le fondement de l’article R 631-3 du code de la consommation, ainsi que des articles 1103, 1104, 1231-1 et 1240 du code civil, de :
- se déclarer compétent pour statuer sur la présente action recevable,
- déclarer la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté responsable du dommage subi par Monsieur [M] [H] au titre de sa responsabilité contractuelle,
- condamner la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté à verser à Monsieur [M] [H] la somme de 1 850 euros au titre de sin préjudice matériel et 1 000 euros au titre de son préjudice moral,
- déclarer la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté responsable du dommage subi par Monsieur [M] [H] au titre de sa responsabilité délictuelle,
- condamner la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté à verser à Madame [S] [R] épouse [H] la somme de 1 000 euros au titre de son préjudice moral,
- condamner la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté à verser à Monsieur [M] [H] et Madame [S] [R] épouse [H] la somme de 1 000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
- condamner la même aux entiers dépens de l’instance.

L’affaire a été renvoyée à la demande des parties, pour échange des pièces et des conclusions, à l’audience du 14 mars 2024, date à laquelle elle a été retenue.

A cette audience, Monsieur [M] [H] et Madame [S] [R] épouse [H], représentés par leur conseil, maintiennent leurs demandes telles qu’elles ressortent de l’assignation et s’en rapportent aux termes de celle-ci, ainsi qu’aux pièces qu’ils déposent.

Au soutien de leurs prétentions, les demandeurs font valoir notamment que :
- étudiant, Monsieur [M] [H] a été victime d’une escroquerie de la part d’une personne vantant sur Instagram les mérites d’un système “d’optimisation fiscale” et l’invitant à percevoir très rapidement une commission de 350 euros, et ce alors qu’il était âgé de seulement 18 ans et n’avait pas de ressources à l’approche de noël ; qu’il lui a été demandé de communiquer son RIB afin qu’une somme de 1 850 euros lui soit créditée et qu’il devait, après perception de cette somme, acquérir la somme de 1 850 euros en coupon PCS s’achetant en bureau de tabac, à charge pour le destinataire des fonds de lui rétrocéder la somme de 350 euros ; que rassuré après avoir vu son compte crédité d’une remise espèces de 1 850 euros le mercredi 14 décembre 2022, il a entrepris deux jours plus tard, soit le vendredi 16 décembre 2022, d’acheter les coupons PCS en bureau de tabac ; qu’il a ainsi effectué deux retraits d’espèces de 1 000 euros et 500 euros et qu’atteignant le plafond de retrait, il a réglé les 350 euros restants par carte bancaire ; que le jour même, la banque a débité la somme de 1 850 euros suite à l’annulation du dépôt espèces,
- s’agissant de la responsabilité contractuelle de la banque envers Monsieur [M] [H] :
* s’il est légitime que la banque procède au comptage des espèces déposées en compte, elle doit non seulement émettre une réserve à ce titre afin d’en alerter le titulaire du compte et vérifier, si ce n’est quotidiennement, les dépôts dans un délai raisonnable, ce qui n’a pas été le cas en l’espèce ; que la banque est, par sa négligence dans le contrôle des espèces, fautive et doit rembourser au demandeur la somme de 1 850 euros au titre de son préjudice matériel,
* la défenderesse, par sa contre-passation, a d’office procédé à une action en répétition de l’indu alors que la négligence de cette dernière dans la vérification des espèces l’a privée de son droit à restitution des sommes créditées à tort,
* dans son dépôt de plainte du 17 décembre 2022, Monsieur [M] [H] a déclaré avoir réalisé la veille le paiement par carte bancaire de 350 euros non encore présenté sur le compte, de sorte qu’il ne pouvait pas s’apercevoir de la contre-passation du dépôt d’espèces lors de ce paiement,
* le débit opéré par la banque alors qu’il ne disposait pas d’autorisation de découvert l’a placé dans une situation financière inextricable ; que le 03 février 2023, il a été contraint de souscrire un prêt de 15 000 euros pour acquérir un véhicule suffisamment confortable en raison de ses problèmes de santé afin de se rendre au travail ; qu’il a été moralement très affecté, ainsi que cela résulte des attestations produites, ne sachant pas comment il allait payer son carburant pour trouver un patron et se rendre à son travail en alternance débutant en janvier 2023 ; que son préjudice moral sera justement évalué à la somme de 1 000 euros,
- s’agissant de la responsabilité délictuelle de la banque envers Madame [S] [R] épouse [H], cette dernière a été contrainte de combler son découvert en réalisant un virement de 1 900 euros en date du 03 janvier 2023 afin d’éviter à son fils sans ressources des agios et frais complémentaires ; qu’elle disposait toutefois déjà d’un budget particulièrement serré de sorte que depuis bientôt un an, elle ne parvient plus à finir les fins de mois ; que l’état financier et psychologique dans lequel se trouve la demanderesse, confirmée par les attestations produites, est directement dû au manquement contractuel de la banque qui sera condamnée à lui verser la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,
- tous deux ne sont bénéficiaires de l’aide juridictionnelle qu’à hauteur de 25 %, de sorte qu’ils exposent des frais de conseil.

La Banque Populaire Bourgogne Franche Comté, représentée par son conseil, s’en rapporte à ses conclusions écrites et aux pièces qu’elle dépose. Elle demande ainsi au tribunal, sur le fondement des articles 1103 et suivants, 1231 et suivants et 1240 du code civil, de :
A titre principal,
- débouter Monsieur [M] [H] et Madame [S] [R] épouse [H] de l’ensemble de leurs demandes,
A titre infiniment subsidiaire,
- fixer le préjudice financier subi par Monsieur [M] [H] à la somme de 1 500 euros,
- débouter Monsieur [M] [H] et Madame [S] [R] épouse [H] de leurs demandes d’indemnisation de leur préjudice moral,
Dans tous les cas,
- condamner Monsieur [M] [H] et Madame [S] [R] épouse [H] in solidum à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, la défenderesse fait valoir notamment que :
- la somme de 1 850 euros en espèces a fait l’objet d’un dépôt déplacé, c’est-à-dire d’un dépôt effectué dans une banque dépendant d’un autre réseau régional que celle du client ; qu’il est contractuellement prévu que si le dépôt n’est pas fait de façon contradictoire, tel qu’un dépôt d’espèces au moyen d’une enveloppe avec un bordereau de remise, il est au final pris en compte le montant reconnu par la banque après comptage et vérification des billets ; qu’il est également prévu que le client accepte que la banque rectifie le montant initial par une contre-passation ; que le dépôt d’espèces a été effectué le 14 décembre 2022 et que dès le 16 décembre 2022, elle a procédé à une contre-passation après avoir vérifié le dépôt qui ne contenait aucune espèce valable ; qu’elle a donc respecté les termes de la convention de compte et a agi de manière diligente ; que Monsieur [M] [H] savait ne pas être à l’origine du dépôt d’espèces, dont il ne pouvait être certain de la réalité, ce qui impliquait nécessairement d’attendre la vérification du montant réellement déposé ; qu’une vérification le surlendemain du dépôt est un délai parfaitement raisonnable,
- Monsieur [M] [H], qui ne présente aucune vulnérabilité particulière, a communiqué ses coordonnées bancaires à un tiers qu’il ne connaissait pas et avec lequel il était entré en contact via les réseaux sociaux dans l’espoir d’obtenir une rétribution facile ; que le demandeur a effectué des retraits d’espèces importants au moyen de sa carte et de son code secret sans y être contraint pour acquérir des bons PCS dont il a communiqué des photographies à un tiers inconnu permettant leur utilisation immédiate sans possibilité de connaître l’identité du bénéficiaire des bons ; que c’est donc la grave négligence de Monsieur [M] [H] qui est à l’origine directe de son préjudice et du préjudice moral de sa mère,
- à titre infiniment subsidiaire, si le tribunal retient une faute de la banque, le préjudice matériel de Monsieur [M] [H] ne peut être indemnisé au-delà de la somme de 1 500 euros, dans la mesure où il n’est pas établi que le paiement CB de 350 euros a été effectué avant que la banque procède à la contre-passation du débit de 1 850 euros qui a permis à Monsieur [M] [H] d’avoir connaissance de l’escroquerie ; que s’agissant du préjudice moral allégué de Monsieur [M] [H], ce dernier a contracté un prêt de 15 000 euros quelques semaines après les faits pour acquérir un véhicule, montant correspondant à un véhicule onéreux difficilement compatible avec une situation financière altérée source d’angoisses ; que s’agissant du préjudice moral allégué de Madame [S] [R] épouse [H], il n’est pas établi que le virement effectué sur le compte de son fils pour renflouer le découvert du compte l’a mis dans une situation financière difficile, cette dernière disposant d’une épargne qui a continué à augmenter suite aux faits.

Par application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer, pour l’exposé complet des moyens des parties, à l’assignation des demandeurs et aux conclusions sus-visées de la défenderesse.

L’affaire a été mise en délibéré au 28 mai 2024, prorogé au 20 juin 2024, puis au 03 septembre 2024.

MOTIFS

Sur les demandes en paiement formulées par Monsieur [M] [H]

L’article 1103 du code civil dispose que les contrats régulièrement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

En application de l’article 1104 du même code, ils doivent être exécutés de bonne foi.

Aux termes de l’article 1231-1 du même code, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

- Sur la responsabilité contractuelle de la banque

Monsieur [M] [H] reproche à la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté d’avoir commis une faute en créditant son compte de la somme de 1 850 euros le 14 décembre 2022 et en annulant cette opération par le jeu d’une contre-passation de cette écriture le 16 décembre 2022, après avoir constaté que l’enveloppe remise par un tiers dans une banque dépendant d’un autre réseau régional que la sienne ne contenait aucune espèce valable.

La défenderesse invoque les conditions générales de la convention de compte de dépôt pour s’exonérer de sa responsabilité, sans toutefois préciser les articles ou la page auquels elle se réfère.

Il résulte de l’article 2.1 des dites conditions générales que le compte enregistre les opérations de dépôt effectuées par versements d’espèces, remises de chèques et virements initiés par le client depuis un autre compte ou par des tiers en sa faveur.

L’article 6.1.1.1 des conditions générales précise que :
- le client peut réaliser notamment des versements d’espèces avec une enveloppe autocollante dans les urnes des guichets de la banque, que l’enveloppe comporte un bordereau de versement en trois exemplaires que doit compléter le client, que l’exemplaire détachable que conserve le client ne vaut pas preuve de la matérialité du dépôt et du montant allégué et que le compte du client est crédité du montant allégué,
- le versement d’espèces effectué au moyen d’une enveloppe autocollante ne donnant pas lieu à une reconnaissance contradictoire du montant des valeurs déposées, seul le montant reconnu après comptage effectué par la banque ou son prestataire est pris en compte,
- le client accepte la faculté pour la banque de rectifier par contre-passation le montant allégué en cas de différence entre celui-ci et le montant reconnu par la banque ou son prestataire.

Toutefois, il apparaît que l’article 6.1.1.1 sus-visé est strictement applicable aux relations entre la banque et son client et ne concerne que les versements d’espèce effectués par ce dernier sur son compte et non ceux effectués par des tiers, au moyen d’une remise déplacée effectuée dans une banque dépendant d’un autre réseau régional que celle du client.

Au surplus, la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté n’a nullement mentionné en regard de l’écriture comptable litigieuse son caractère provisoire dans l’attente d’une quelconque vérification des espèces créditées.

La défenderesse a ainsi commis une faute directement et exclusivement à l’origine du dommage subi par Monsieur [M] [H] qui n’était pas à l’origine du versement des espèces et qui a ainsi pu croire qu’il disposait bien sur son compte de la somme de 1 850 euros créditée.

- Sur les préjudices

Monsieur [M] [H] sollicite d’une part la somme de 1 850 euros en réparation de son préjudice matériel.

Il n’est pas contesté que suite au crédit de son compte le 14 décembre 2022 d’une somme de 1 850 euros, le demandeur a effectué deux retraits le 16 décembre 2022 d’un montant respectif de 1 000 euros et de 500 euros en vue de l’achat de tickets PCS avant que la contre-passation de l’écriture de 1 850 euros ne soit effectuée.

S’agissant du paiement de 350 euros réalisé par carte bancaire, la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté soutient qu’il n’est pas démontré que celui-ci a été effectué avant qu’elle ne procède à la contre-passation litigieuse.

S’il résulte du relevé du compte de Monsieur [M] [H] que le paiement de 350 euros a été débité avec une date de valeur au 19 décembre et une date comptable au 20 décembre 2022, il n’en demeure pas moins que déjà dans sa plainte en date du 17 décembre 2022, le demandeur expliquait qu’il avait acheté 8 tickets PCS pour un montant total de 1 850 euros au moyen de deux retraits d’argent d’un montant total de 1 500 euros et d’un paiement par carte bancaire, compte tenu de son plafond de retrait, de 350 euros, lesdits 350 euros devant être débités de son compte prochainement.

Il apparaît ainsi que les 350 euros, différence entre les 1 850 euros crédités sur son compte le 14 décembre 2022 et les 1 500 euros retirés en espèces, avaient d’ores et déjà été payés par carte bancaire lors de son dépôt de plainte et il n’est pas contesté que la SNC AC2P mentionnée comme étant la bénéficiaire des 350 euros est bien un bureau de tabac, corroborant ainsi les déclarations du demandeur.

Il y a donc lieu de considérer que le paiement de 350 euros a été réalisé dans le même trait de temps que les deux retraits d’espèce de 1 500 euros et qu’il a donc été effectué avant la contre-passation litigieuse.

Au vu de ces éléments, la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté sera condamnée à payer à Monsieur [M] [H] la somme de 1 850 euros en réparation de son préjudice matériel.

Le demandeur sollicite d’autre part la somme de 1 000 euros en réparation de son préjudice moral.

Toutefois, il est constant que le découvert bancaire de Monsieur [M] [H] a été comblé par la somme de 1 900 euros versée par sa mère le 03 janvier 2023, de sorte que ledit découvert n’a perduré que pendant 18 jours et les attestations versées aux débats ne sont pas corroborées par les relevés du compte de dépôt du demandeur qui ne font état d’aucune difficulté financière spécifique au regard des dépenses effectuée, étant souligné que Monsieur [M] [H] ne donne pas d’information sur le livret jeune qu’il paraît détenir. Par ailleurs, le prêt réalisé par ce dernier de 15 000 euros apparaît sans lien avec le litige.

En outre, le demandeur ne justifie pas que son affection morale soit en lien direct et certain avec la faute commise par l’organisme bancaire et non avec l’escroquerie dont il a été victime.

Au vu de ces éléments, Monsieur [M] [H] sera débouté de sa demande en paiement de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral.

Sur la demande en paiement formulée par Madame [S] [R] épouse [H]

L’article 1240 du code civil dispose que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Madame [S] [R] épouse [H] sollicite la somme de 1 000 euros en réparation de son préjudice moral, causé selon elle par la faute contractuelle commise par la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté à l’égard de son fils, Monsieur [M] [H].

S’il est constant que la demanderesse a versé la somme de 1 900 euros afin de combler le découvert de son fils, les attestations qu’elle verse aux débats pour justifier d’une impossibilité de parer aux imprévus du fait de ce litige et de difficultés financières en résultant ne sont pas corroborées par les relevés bancaires qu’elle verse aux débats et qui font état d’une épargne existante d’au moins 7 873,93 euros sur son livret d’épargne qui n’a pas été affectée.

Au vu de ces éléments, Madame [S] [R] épouse [H] échoue à rapporter la preuve d’un préjudice moral résultant de difficultés financières en lien direct et certain avec la faute contractuelle commise par la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté à l’égard de son fil et elle sera par suite déboutée de sa demande en paiement de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral.

Sur les demandes accessoires

La Banque Populaire Bourgogne Franche Comté, partie perdante à titre principal, sera déboutée de sa demande d’indemnité judiciaire et condamnée aux dépens de l’instance, qui seront recouvrés comme en matière d’aide juridictionnelle.

L’équité commande par ailleurs de condamner la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté à payer à Monsieur [M] [H] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

L’équité commande en revanche de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de Madame [S] [R] épouse [H].

Enfin, il sera rappelé que la présente décision est exécutoire par provision en application des dispositions de l'article 514 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal statuant après débats en audience publique, par jugement contradictoire, rendu en dernier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe,

Condamne la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté à payer à Monsieur [M] [H] la somme de 1 850 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice matériel,

Déboute Monsieur [M] [H] de sa demande en paiement de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,

Déboute Madame [S] [R] épouse [H] de sa demande en paiement de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,

Condamne la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté à payer à Monsieur [M] [H] la somme de 750 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté et Madame [S] [R] épouse [H] de leur demande d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la Banque Populaire Bourgogne Franche Comté aux dépens de l’instance, qui seront recouvrée comme en matière d’aide juridictionnelle,

Rappelle que la présente décision est exécutoire par provision,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes.

Ainsi dit et jugé par mise à disposition au greffe les jours, mois et an susdits.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse
Formation : 3ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 23/03815
Date de la décision : 03/09/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-09-03;23.03815 ?
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