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17/08/2024 | FRANCE | N°24/03735

France | France, Tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer, Jld, 17 août 2024, 24/03735


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Au nom du Peuple Français

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOULOGNE SUR MER

ORDONNANCE STATUANT SUR UNE DEMANDE DE MAINTIEN EN RÉTENTION ET SUR LE CONTRÔLE DE LA RÉGULARITÉ D’UNE DÉCISION DE PLACEMENT EN RÉTENTION

MINUTE : 24/1296
Appel des causes le 17 Août 2024 à 10h00 en visioconférence
Div\étrangers
N° étr\N° RG 24/03735 - N° Portalis DBZ3-W-B7I-756LR

Nous, Mme DESWARTE Anne, Vice Présidente au Tribunal Judiciaire de BOULOGNE SUR MER, Juge des Libertés et de la Détention, assistée de Mme CHAIB Samira, Greffier, sta

tuant en application des articles L.742-1, L.743-4, L.743-6 à L.743-8, L. 743-20 et L. 743-24 du Code de l...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Au nom du Peuple Français

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOULOGNE SUR MER

ORDONNANCE STATUANT SUR UNE DEMANDE DE MAINTIEN EN RÉTENTION ET SUR LE CONTRÔLE DE LA RÉGULARITÉ D’UNE DÉCISION DE PLACEMENT EN RÉTENTION

MINUTE : 24/1296
Appel des causes le 17 Août 2024 à 10h00 en visioconférence
Div\étrangers
N° étr\N° RG 24/03735 - N° Portalis DBZ3-W-B7I-756LR

Nous, Mme DESWARTE Anne, Vice Présidente au Tribunal Judiciaire de BOULOGNE SUR MER, Juge des Libertés et de la Détention, assistée de Mme CHAIB Samira, Greffier, statuant en application des articles L.742-1, L.743-4, L.743-6 à L.743-8, L. 743-20 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile ;

Vu le Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile notamment en ses articles L. 741-1 et suivants ;

Vu les dispositions des articles L.741-10, L743-3 à L743-20, L743-24, R. 741-3 et R743-1 à 743-7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Monsieur [I] [F]
de nationalité Kazakhe
né le 20 Mars 2003 à [Localité 4] (KAZAKHSTAN), a fait l’objet :

– d’une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination de la reconduite, lui faisant interdiction de retour sur le territoire français prononcée le 03 mars 2023 par M. LE PREFET DE SEINE ET MARNE , qui lui a été notifié le même jour
– d’un arrêté ordonnant son placement en rétention administrative pour une durée de quatre jours, prononcé le 13 août 2024 par Mme PREFET DE L’OISE , qui lui a été notifié le 13 août 2024 à 15h50
Vu la requête de Monsieur [I] [F] en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative en date du 16 Août 2024 réceptionnée par le greffe du juge des libertés et de la détention le 16 Août 2024 à 15h20 ;

Par requête du 16 Août 2024 reçue au greffe à 12h36, Monsieur le Préfet invoquant devoir maintenir l’intéressé au-delà de quatre jours, demande l’autorisation de prolonger ce délai pour une durée de VINGT-SIX jours maximum.

En application des articles L.743-9 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile il a été rappelé à l’intéressé, assisté de Me Cécile LANNOY, avocat au Barreau de BOULOGNE-SUR-MER et commis d’office, les droits qui lui sont reconnus pendant la rétention et a été informé des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant ; qu’il a été entendu en ses observations.

L’intéressé déclare : Je souhaite être assisté d’un avocat. Je suis tchéchène.

Me Cécile LANNOY entendue en ses observations : je soutiens le défaut de base légale puisqu’il y a eu un placement au CRA sur la base d’une OQTF de mars 2023. Le délai de validité est expiré. La loi n’est pas rétroactive selon la jurisprudence de [Localité 8] et de [Localité 3]. Je vous demande donc la remise en liberté de Monsieur [F].

L’intéressé : pour le sac qu’on me reproche, le procureur avait dit que je n’était pas coupable. J’ai donné des papiers, tous les papiers nécessaires.

Me Cécile LANNOY entendue en ses observations : Je rajoute que Monsieur a produit tous les justificatifs nécessaires pour demander une assignation à résidence. Il est pleinement inséré en France. Il a fait état de présence en France depuis ses dix ans. Il a produit une promesse d’embauche. Je soulève également le défaut d’examen de la situation personnelle de l’intéressé et de la possibilité de l’assigner à résidence.

Audience suspendue et mise en délibéré.

MOTIFS

Sur la défaut de base légale de l’arrêté de placement en rétention administrative :

Selon l'article L.741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction issue de la loi n°2024-42 du 26 janvier 2024, en vigueur depuis le 28 janvier 2024 administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger dans l'un des cas prévus à l'article L73 1-1, notamment (1°) s'il fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins de trois ans auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé, lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.

Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3.

Le conseil de l'intéressé soutient que cet article dans sa nouvelle rédaction est inapplicable car non conforme au principe de non rétroactivité de la loi.

En l'espèce, premièrement le législateur a prévu expressément le caractère d'applicabilité immédiate de cette disposition.

Secondement, le texte de loi a été examiné par le conseil constitutionnel (décision n° 2023-863 DC du 25 janvier 2024 NOR : CSCL2402481S JORF n°0022 du 27 janvier 2024), qui n'a pas invalidé l'article discuté.

Troisièmement, la rétroactivité doit être distinguée de l'application immédiate de la nouvelle norme aux situations en cours, c'est-à-dire des situations qui, nées dans le passé, se poursuivent postérieurement à l'édiction de l'acte en cause.

Son application ne vaut alors que pour l'avenir. Concrètement, l'intéressé a fait l'objet d'une mesure d'éloignement le 3 mars 2023 régulièrement notifiée.

Cette décision a donc créé une situation juridique qui ne s'est pas réalisée puisqu'il n'a pas été reconduit.

Il n'en demeure pas moins que la situation «'potentielle'» de reconduite antérieure était légalement constituée.

A la différence, une loi rétroactive permettrait de reconduire M. [I] [F] en créant une situation qui n'existait pas antérieurement.

Ainsi, M. [I] [F] reste soumis aux effets de l'obligation de quitter le territoire français pour l'applicabilité immédiate de l'article suscité dans sa nouvelle rédaction.

Le moyen sera donc rejeté.

Sur le défaut d’appréciation de la situation personnelle et de la possibilité d’assigner à résidence :

M. [I] [F] reproche à l’administration de ne pas avoir tenu compte de son insertion et de ne pas avoir correctement apprécié sa situation personnelle en vue d’envisager une assignation à résidence.

En l’espèce, l’arrêté critiqué précise qu’il s’est soustrait à la mesure d’éloignement du 03 mars 2023 ; qu’il a été interpellé pour tentative de remise illicite d’objet à détenu à [Localité 2] le 12 août 2024 ; qu’il est défavorablement connu des services de police ; qu’il ne présente pas de garantie de représentation en ce qu’il ne peut justifier de la possession de documents d’identité ou de voyage en cours de validité ; qu’il déclare être domicilié [Adresse 1] à [Localité 7] sans founir de justificatif de domicile ; que l’effectivité et la stabilité de son logement ne sont pas avérées ; qu’il n’envisageait pas de retour en Russie.

Il résulte des pièces produites par Monsieur [F] à l’appui de son recours que le [Adresse 1] à [Localité 7] constitue une adresse postale de l’accueil solidaire [6].

Monsieur [F] ne justifie pas de son adresse actuelle, ni ne produit d’attestation d’hébergement. S’il fournit par ailleurs un certificat de scolarité, celui-ci est valable pour l’année scolaire 2019-2020.

Par ailleurs, sa promesse d’embauche du 21 mai 2024 est émise sous condition de la délivrance d’un titre de séjour régulier. Or, ce dernier n’est pas titulaire d’un tel document.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, il y a lieu de considérer que l’administration a fait une exacte appréciation de sa situation personnelle.

Sur la demande d’assignation à résidence judiciaire :

L’intéressé ne présente pas de garanties suffisantes pour la mise à exécution de la mesure de reconduite à la frontière, des mesures de surveillance sont nécessaires.

Eu égard aux nécessités invoquées par Mme PREFET DE L’OISE, il convient de rejeter le recours en annulation formé par l’intéressé et d’accorder la prolongation demandée.

PAR CES MOTIFS

PRONONÇONS la jonction avec l’affaire n°24/3721

REJETONS le recours en annulation de Monsieur [I] [F]

AUTORISONS l’autorité administrative à retenir : Monsieur [I] [F] dans les locaux ne relevant pas de l’Administration pénitentiaire pour une prolongation de rétention administrative d’une durée maximale de VINGT-SIX JOURS soit jusqu’au : 12 septembre 2024

FAISONS DROIT au recours en annulation de Monsieur [I] [F]

REJETONS la demande de maintien en rétention administrative de Mme PREFET DE L’OISE

ORDONNONS que Monsieur [I] [F] soit remis en liberté à l’expiration d’un délai de vingt quatre heures suivant la Notification à Monsieur le Procureur de la République de BOULOGNE SUR MER de la présente ordonnance sauf dispositions contraires prises par ce magistrat.

INFORMONS Monsieur [I] [F] qu’il est maintenu à la disposition de la justice pendant un délai de vingt quatre heures à compter de la notification de la présente ordonnance au procureur de la République et le cas échéant, jusqu’à ce qu’il soit statué sur l’effet suspensif de l’appel ou la décision au fond, que pendant ce délai il peut contacter un avocat, un tiers, rencontrer un médecin et s’alimenter.

RAPPELONS à l’intéressé qu’il a l’obligation de quitter le territoire national.

NOTIFIONS sur le champ la présente ordonnance par mail au CRA pour remise à l’intéressé qui, en émargeant ci-après, atteste avoir reçu copie et avisons l’intéressé de la possibilité de faire appel, devant le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué, de la présente ordonnance dans les vingt quatre heures de son prononcé ; l’informons que la déclaration d’appel doit être motivée et peut être transmise par tout moyen (notamment par mail via la boîte structurelle : [Courriel 5] ) au greffe de la Cour d’Appel de DOUAI ; lui indiquons que seul l’appel formé par le ministère public peut être déclaré suspensif par le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué.

L’Avocat, Le Greffier, Le Juge,


décision rendue à
L’ordonnance a été transmise ce jour à Mme PREFET DE L’OISE
Ordonnance transmise au Tribunal administratif de LILLE
N° étr\N° RG 24/03735 - N° Portalis DBZ3-W-B7I-756LR

Décision notifiée à ...h...

L’intéressé, L’interprète,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer
Formation : Jld
Numéro d'arrêt : 24/03735
Date de la décision : 17/08/2024
Sens de l'arrêt : Maintien de la mesure de rétention administrative

Origine de la décision
Date de l'import : 25/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-08-17;24.03735 ?
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