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03/09/2024 | FRANCE | N°24/06928

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, J.l.d. hsc, 03 septembre 2024, 24/06928


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BOBIGNY



ORDONNANCE STATUANT SUR LA POURSUITE D'UNE MESURE D'HOSPITALISATION COMPLÈTE
-
DÉLAI DE 6 MOIS

MESURE ORDONNÉE EN APPLICATION DE
L'ARTICLE 706-135 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE

N RG 24/06928 - N Portalis DB3S-W-B7I-ZZAG
MINUTE:

Nous, Raphaëlle AGENIE-FECAMP, juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de BOBIGNY, assisté de Caroline ADOMO, greffier, avons rendu la décision suivante concernant :

LA PERSONNE EN SOINS PSYCHIATRIQUES :

Monsieur [U] [A]
né le 13 Décembre 1

971 à [Localité 5]
[Adresse 3]
[Localité 4]

Etablissement d’hospitalisation: L’EPS DE [7], sis [Adresse 2]

présent as...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BOBIGNY

ORDONNANCE STATUANT SUR LA POURSUITE D'UNE MESURE D'HOSPITALISATION COMPLÈTE
-
DÉLAI DE 6 MOIS

MESURE ORDONNÉE EN APPLICATION DE
L'ARTICLE 706-135 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE

N RG 24/06928 - N Portalis DB3S-W-B7I-ZZAG
MINUTE:

Nous, Raphaëlle AGENIE-FECAMP, juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de BOBIGNY, assisté de Caroline ADOMO, greffier, avons rendu la décision suivante concernant :

LA PERSONNE EN SOINS PSYCHIATRIQUES :

Monsieur [U] [A]
né le 13 Décembre 1971 à [Localité 5]
[Adresse 3]
[Localité 4]

Etablissement d’hospitalisation: L’EPS DE [7], sis [Adresse 2]

présent assisté de Me Hassna ZAHRI, avocat commis d’office

PERSONNE A L’ORIGINE DE LA SAISINE

Madame la directrice de L’EPS DE [7]
Absente

MINISTÈRE PUBLIC

Absent
A fait parvenir ses observations par écrit le 02 septembre 2024

La chambre d’instruction de la Cour d’Appel de Paris a prononcé une décision de déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental et a ordonné sur le fondement de l’article 706-135 du code de procédure pénale l’hospitalisation d’office de Monsieur [U] [A]

Depuis cette date, Monsieur [U] [A] fait l’objet d’une hospitalisation complète au sein de L’EPS DE [7].

Le 26 Août 2024, le représentant de l'Etat a saisi le juge des libertés et de la détention aux fins de poursuite de l’hospitalisation complète de Monsieur [U] [A].

Le 14 août 2024, deux expertises psychiatriques contradictoires ont été rendues concernant Monsieur [U] [A].

Le collège mentionné à l’article L. 3211-9 du code de la santé publique a rendu un avis le 26 août 2024

A l’audience du 03 Septembre 2024, Me Hassna ZAHRI, conseil de Monsieur [U] [A], a été entendu en ses observations;

L’affaire a été mise en délibéré à ce jour.

MOTIFS

Vu l’ordonnance de la chambre de l’instruction près la cour d’appel de Paris ordonnant l’admission en soins psychiatriques sous la forme d’une hospitalisation complète de Monsieur [U] [A] en date du 27 06 2024;

Vu le certificat médical dit des 24 heures établi le 28 06 2024 par le Dr [P];

Vu le certificat médical dit des 72 heures établi le 30 06 2024 par le Dr [S];

Vu les certificats médicaux mensuels en date du 26 07 2024 établi par le Dr [F] et le 26 08 2024 par le Dr [C];

Vu l’avis du collège médical en date du 26 07 2024 concluant à la levée de la mesure;

Vu le certificat aux fins de mainlevée de la mesure établi par le Dr [P] le 26 07 2024;

Vu le rapport d’expertise du Dr [H] en date du 14 08 2024 concluant que le patient doit être maintenu en hospitalisation complète;

Vu le rapport d’expertise du Dr [E] en date du 14 08 2024 concluant que la mesure d’hospitalisation sous contrainte n’est plus justifiée;

Vu l’avis du collège médical en date du 26 08 2024;

Vu la saisine du directeur d’établissement reçues au greffe du service du juge des libertés et de la détention près le tribunal judiciaire de Bobigny le 26 08 2024 ;

Vu les réquisitions écrites du ministère public en date du 2024 ;

Vu le débat contradictoire en date du 03 09 2024 ;

Vu les articles L3211-1 et suivants, L3213-1 et suivants du code de la santé publique ;

L’hospitalisation sans son consentement d’une personne atteinte de troubles mentaux doit respecter le principe, résultant de l’article 66 de la Constitution, selon lequel la liberté individuelle ne saurait être entravée par une rigueur qui ne soit pas nécessaire (Conseil Constitutionnel, décision 2010/71 QPC du 26 novembre 2010). La protection de la liberté individuelle peut notamment trouver sa limite dans la protection de la sécurité de la personne objet des soins et des tiers auquel elle pourrait porter atteinte.

Selon l'article L. 3213-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut être admise en soins psychiatriques sans son consentement, sur décision du représentant de l’Etat dans le département, que si ses troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public.

Le juge des libertés et de la détention doit contrôler en application de l’article L3216-1 du code de la santé publique la régularité des décisions administratives prises en matière d’hospitalisation complète. En application de l’article L3211-3 du code de la santé publique il doit aussi veiller, à ce que les restrictions à l’exercice des libertés individuelles du patient soient adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en œuvre du traitement requis. Le juge ne peut dans le cadre de son contrôle se substituer à l’autorité médicale s’agissant de l’évaluation du consentement du patient, du diagnostic posé ou des soins.

L’article 706-135 du code de procédure pénale dispose que, lorsque la chambre de l'instruction ou une juridiction de jugement prononce un arrêt ou un jugement de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, elle peut ordonner, par décision motivée, l'hospitalisation d'office de la personne s'il est établi par une expertise psychiatrique figurant au dossier de la procédure que les troubles mentaux de l'intéressé nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public.

L’article L3213-8 du code de la santé publique dispose que « I.-Si le collège mentionné à l'article L. 3211-9 émet un avis selon lequel la mesure de soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète dont fait l'objet une personne mentionnée au II de l'article L. 3211-12 n'est plus nécessaire et que la mesure de soins sans consentement peut être levée, le représentant de l'Etat dans le département ordonne une expertise de l'état mental de la personne par deux psychiatres choisis dans les conditions fixées à l'article L. 3213-5-1. Ces derniers se prononcent, dans un délai maximal de soixante-douze heures à compter de leur désignation, sur la nécessité du maintien de la mesure de soins psychiatriques.

II.-Lorsque les deux avis des psychiatres prévus au I confirment l'absence de nécessité de l'hospitalisation complète, le représentant de l'Etat ordonne la levée de la mesure de soins psychiatriques.

Lorsque ces avis divergent ou préconisent le maintien de la mesure de soins psychiatriques et que le représentant de l'Etat la maintient, il en informe le directeur de l'établissement d'accueil, qui saisit le juge des libertés et de la détention afin que ce dernier statue à bref délai sur cette mesure dans les conditions prévues à l'article L. 3211-12. Le présent alinéa n'est pas applicable lorsque la décision du représentant de l'Etat intervient dans les délais mentionnés aux 1° et 2° du I de l'article L. 3211-12-1. »

L’article 3211-12 du code de la santé publique dispose que « I.-Le juge des libertés et de la détention dans le ressort duquel se situe l'établissement d'accueil peut être saisi, à tout moment, aux fins d'ordonner, à bref délai, la mainlevée immédiate d'une mesure de soins psychiatriques prononcée en application des chapitres II à IV du présent titre ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale, quelle qu'en soit la forme.
(…)
II.-Le juge des libertés et de la détention ne peut statuer qu'après avoir recueilli l'avis du collège mentionné à l'article L. 3211-9 du présent code lorsque la personne fait l'objet d'une mesure de soins ordonnée en application de l'article L. 3213-7 du même code ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale à la suite d'un classement sans suite, d'une décision d'irresponsabilité pénale ou d'un jugement ou arrêt de déclaration d'irresponsabilité pénale prononcés sur le fondement du premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal et concernant des faits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement en cas d'atteinte aux personnes ou d'au moins dix ans d'emprisonnement en cas d'atteinte aux biens.

Le juge ne peut, en outre, décider la mainlevée de la mesure qu'après avoir recueilli deux expertises établies par les psychiatres inscrits sur les listes mentionnées à l'article L. 3213-5-1 du présent code.»

Monsieur [U] [A] était hospitalisé (e) à l’Etablissement Public de Santé de Ville Evrard sans son consentement le 27 06 2024 dans les conditions rappelées ci-dessus.

Les certificats médicaux établis par le 28 06 2024 par le Dr [P] et le 30 06 2024 par le Dr [S] pendant la période d’observation décrivaient en ces termes l’existence de troubles mentaux : bonne conscience des troubles du comportement et de sa pathologie, acceptation des soins, propos cohérents et adaptés, humeur stable. Ils concluaient au maintien de la mesure d’hospitalisation complète.

L’hospitalisation complète de Monsieur [U] [A] se poursuivait depuis cette date sur décision du représentant de l’Etat en date du 01 07 2024 et des certificats médicaux mensuels de situation étaient établis conformément à la loi par les médecins en charge de Monsieur [U] [A].

Le certificat médical établi le 26 07 2024 par le Dr [F] relevait une nette amélioration clinique, un amendement des troubles et une bonne collaboration aux soins et le collège médical préconisait le maintien de la mesure dans l’attente de la demande de mainlevée. Le Dr [P] préconisait le 26 07 2024 la levée de la mesure. Dans son certificat médical du 26 08 2024, le Dr [C] notait une amélioration de son état, une stabilité, un discours cohérent, une critique des troubles et une adhésion aux soins, la mesure devant être maintenu dans l’attente de la décision de levée.

Suivant expertise du Dr [H] en date du 14 08 2024, il était relevé que depuis son hospitalisation (suite à une tentative de meurtre au préjudice de policiers municipaux), le patient n’avait pas bénéficié de permissions ni d’un programme de soins et qu’une incertitude persistait quant à sa prise en charge pour un hébergement à sa sortie. L’expert notait l’« absence de véritable critique concernant son passage à l’acte » et retenait sa dangerosité psychiatrique du fait de sa « fragilité psychotique, de la fragile alliance thérapeutique avec survenue d’épisodes psychotiques aigus dans un contexte d’arrêt de traitement et de prise de toxiques », le patient ayant de « multiples antécédents psychiatriques avec décompensation à répétition ». Il préconisait la mise en place d’un lieu d’hébergement stable et encadré, avec traitement neuroleptique injectable avant organisation de permissions de sortir, puis d’un programme de soins, avant levée de la mesure de contrainte.
Le Dr [E] relevait quant à lui suivant rapport du 14 08 2024 l’absence chez le patient de signe en faveur d’un épisode délirant aigu, l’absence d’élément clinique de dangerosité psychiatrique de longue date et constatait que le patient se montrait critique, culpabilisé et compliant. Il concluait à la levée de la mesure d’hospitalisation.

Le collège médical du 26 08 2024 relevait que l’état clinique du patient était toujours stable, le contact de bonne qualité, le discours adapté, l’absence d’idée délirante et d’expérience hallucinatoire, la critique des troubles et la compliance aux soins. Il concluait au maintien de la mesure « en attendant la réponse du juge ».
L’état de santé de Monsieur [U] [A] était considéré comme compatible avec son audition par le juge des libertés et de la détention.

A l'audience, Monsieur [U] [A] expliquait qu’il avait volé des cigarettes, avait un couteau qu’il avait refusé de lâcher à l’arrivée des policiers, précisait qu’il était alors en pleine dépression. Il se disait schizophrène, ajoutant qu’il avait été diagnostiqué en prison. Il réfutait toute consommation de stupéfiants, ou d’alcool. Il recevait les visites de son fils avec son frère. Il s’agissait de sa 3ème hospitalisation suite à des crises d’angoisse.

Le conseil de Monsieur [U] [A] était entendu en ses observations.

Monsieur [U] [A] fait l’objet d’une mesure de soins ordonnée en application de l’article 706-135 du code de procédure pénale.

Il convient en conséquence d’ordonner deux mesures d’expertise conformément aux dispositions du III de l’article L. 3211-12-1 du même code.

PAR CES MOTIFS

Le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bobigny, après débats tenus en audience publique dans la salle d’audience aménagée à l’établissement public de santé de [7], au centre [6] situé [Adresse 1], statuant au tribunal par décision susceptible d'appel,

Ordonne deux mesures d'expertise psychiatrique de Monsieur [U] [A];

Désigne pour y procéder Dr [X] [Y] et Dr [M] [J] ;

Dit qu'après avoir pris connaissance de la procédure et s'être fait communiquer le dossier du patient, les experts procéderont séparément à l'examen clinique de celui-ci ainsi qu'à tous autres examens qu'ils estimeront utiles à l'accomplissement de leurs missions ;

Dit que les experts pourront se faire communiquer tous autres documents qu'ils estimeront utiles à l'accomplissement de leurs missions ;

Dit que chacun des deux experts déposera un rapport contenant tous éléments techniques permettant d'apprécier :

- si la personne faisant l'objet des soins est atteinte de troubles mentaux,
- dans l'affirmative, si ces troubles mentaux nécessitent des soins,
- dans l'affirmative si ceux-ci compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public,
- s'il existe des motifs médicaux qui font obstacle, dans son intérêt, à l'audition par le juge de la personne faisant l'objet des soins ;

Dit que chacun de ces deux rapports, établi en double exemplaire, sera transmis au greffe du juge des libertés et de la détention, au plus tard impérativement le [date de dépôt du rapport] ;
[au cas d'espèce, il convient de se reporter aux dispositions combinées des articles R. 3211-30 et L. 3211-12-1 I du code de la santé publique]
Dit que s'agissant de l'avance de frais d'expertise, il sera fait application des dispositions des articles R. 93 et R. 93-2 du C.P.P.;

Renvoie l'affaire à l’audience du 10 septembre 2024

Dit que cette ordonnance bénéficie de plein droit de l'exécution provisoire.

Fait et jugé à Bobigny, le 03 Septembre 2024

Le Greffier

Caroline ADOMO

Le premier vice-président
Juge des libertés et de la détention

Raphaëlle AGENIE-FECAMP

Ordonnance notifiée au parquet le à

le greffier

Vu et ne s'oppose :

Déclare faire appel :


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : J.l.d. hsc
Numéro d'arrêt : 24/06928
Date de la décision : 03/09/2024
Sens de l'arrêt : Renvoi à une autre audience

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-09-03;24.06928 ?
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