TRIBUNAL DE PROXIMITÉ DE PANTIN
[Adresse 5]
[Localité 8]
Tél:[XXXXXXXX02]
Fax : [XXXXXXXX01]
@ : [Courriel 9]
REFERENCES : N° RG 23/03699 - N° Portalis DB3S-W-B7H-YSVF
Minute :
JUGEMENT
Du : 06 Août 2024
Monsieur [J] [Z]
C/
Société RATP HABITAT
JUGEMENT
Après débats à l'audience publique du 10 Juin 2024, le jugement suivant a été rendu par mise à disposition au greffe le 06 Août 2024;
Sous la Présidence de Madame Armelle GIRARD, juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de BOBIGNY siégeant au tribunal de proximité de PANTIN, assistée de Madame Martine GARDE, greffier ;
ENTRE :
DEMANDEUR :
Monsieur [J] [Z]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 7]
Présent et assisté de Me Nolwenn COSQUER HÉRAUD, avocat au barreau de PARIS
DÉFENDEUR :
Société RATP HABITAT
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentée par Me Antoine BENOIT-GUYOD, avocat au barreau de PARIS
Copie exécutoire délivrée le :
à : Me Nolwenn COSQUER HÉRAUD
Me Antoine BENOIT-GUYOD
Expédition délivrée le
à : Monsieur Le Préfet de la SEINE-SAINT-DENIS
EXPOSÉ DU LITIGE
Suivant contrat à effet du 29 novembre 2021, la SA RATP HABITAT a donné en location à Monsieur [J] [Z] un immeuble à usage d'habitation sis [Adresse 3], [Localité 7], moyennant un loyer mensuel de 404,84 €, outre provision sur charges.
Suivant contrat à effet du 26 janvier 2022, il a conclu avec la même société un contrat de location d'un emplacement de stationnement n°62 lié à son logement, situé à la même adresse.
Par lettre recommandée du 19 janvier 2023, la SA RATP HABITAT a donné congé à Monsieur [J] [Z] de ladite place de stationnement, la résiliation prenant effet le 19 février 2023.
Suite à la saisine d'un conciliateur de justice relative à un trouble anormal du voisinage lié à l'emplacement de parking, un constat de carence a été dressé en date du 30 novembre 2023, la SA RATP HABITAT opposant un refus de concilier.
Par requête formée le 6 décembre 2023, Monsieur [J] [Z] a attrait la SA RATP HABITAT devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Pantin, alléguant un manquement du bailleur à ses obligations d'entretenir le logement et d'assurer sa jouissance paisible.
L'audience s'est tenue le 10 juin 2024.
À cette audience, Monsieur [J] [Z], représenté par son conseil qui s'est rapporté oralement à ses dernières conclusions visées à l'audience auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé des moyens, sollicite du juge au bénéfice de l'exécution provisoire :
De condamner la SA RATP HABITAT à réparer le chauffage et à lui remettre le bip interphone ainsi que les clés du second portail ;D'ordonner à la SA RATP HABITAT de faire cesser tout trouble de voisinage ;De condamner la SA RATP HABITAT au paiement des sommes suivantes : 5 000 € en réparation du manquement du bailleur à son obligation d'assurer la jouissance paisible du logement ;500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.De rejeter l'ensemble des demandes adverses.In limine litis, il invoque la recevabilité de la saisine par requête en ce que sa demande chiffrée n'excède pas 5 000 €.
Au visa des articles des articles 1719, 544 et 1242 du code civil et l'article 6)b) de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, Monsieur [J] [Z] soutient au fond que la SA RATP HABITAT n'a pas respecté ses obligations d'entretenir le logement et de lui en assurer une jouissance paisible.
Concernant l'état du logement, il expose que malgré plusieurs demandes orales, les réparations du chauffage défectueux n'ont pas été réalisées, empêchant l'arrivée d'eau chaude, ce dont il estime apporter preuve suffisante. Il ajoute que le bip d'entrée ne lui a pas été remis, de même que les nouveaux codes d'accès, le contraignant à être dépendant de l'entrée d'autres résidents dans l'immeuble. Il déplore également un manque d'hygiène sur son emplacement de parking, causé par une fuite d'eau usée dégageant une odeur nauséabonde et rendant le parterre sale.
Concernant l'absence de jouissance paisible, il indique avoir fait l'objet d'incivilités, d'injures discriminatoires et de violences de la part du gardien de l'immeuble, préposé du bailleur. Il soutient en outre que le bailleur n'a pas mis tout en œuvre afin d'éviter la dégradation de la serrure de sa porte en raison d'un liquide disposé en l'absence de surveillance du gardien. Enfin, il fait valoir que les images des caméras de vidéo-surveillance ne respectent pas la réglementation relative à la protection de la vie privée et à la captation d'images, que le gardien ne s'est pas présenté au rendezvous fixé par Free pour l'installation de la fibre pour lequel il avait posé une journée de travail, que l'étiquette sur sa boîte aux lettres a été modifiée et ses lettres mises dans la poubelle, et qu'il lui a été refusé de changer de place de parking alors même que l'état de son emplacement ne lui permettait pas de l'utiliser.
Au soutien de sa demande d'indemnisation, il expose que les incivilités du gardien, auxquelles il est confronté en permanence, l'ont contraint à suivre un traitement médicamenteux afin d'apaiser son anxiété.
En réponse aux arguments de la société défenderesse, il observe que l'éventuelle qualification pénale des agissements du gardien n'exclut pas l'exercice d'une action civile. De plus, il argue que ni la nature pénale des faits, ni la commission de ces agissements en-dehors de ses fonctions de gardien, par ailleurs non démontrée, ne caractérisent un cas de force majeure susceptible d'exonérer la société défenderesse de sa responsabilité.
Enfin, s'agissant des demandes reconventionnelles formées par la SA RATP HABITAT, il sollicite le débouté de la demande en résiliation du bail. Il conteste avoir prononcé les mots qui lui sont attribués. Il fait valoir que les attestations produites proviennent de proches du gardien et qu'il n'y a pas de plainte d'autres occupants de l'immeuble à son égard. Il indique par ailleurs avoir fait une demande de changement de logement auprès de la SA RATP HABITAT afin de mettre fin à cette situation conflictuelle.
La SA RATP HABITAT, représentée par son conseil qui a repris oralement ses dernières conclusions visées à l'audience auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé des moyens, demande au juge :
De débouter Monsieur [J] [Z] de l'ensemble de ses demandes ;Reconventionnellement, de prononcer la résolution judiciaire du bail consenti à Monsieur [J] [Z] pour défaut de jouissance paisible ;En conséquence, d'ordonner l'expulsion de Monsieur [J] [Z] et de tout occupant de son chef, et ce, au besoin avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier ;D'ordonner que le sort des meubles et objets garnissant les lieux loués soit régi par les dispositions des articles L433-1 et L433-2 du code des procédures civiles d'exécution aux frais, risques et périls du défendeur ;De condamner Monsieur [J] [Z] à lui verser les sommes suivantes : -
une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer en cours, révisable et augmenté des charges locatives, jusqu'à l'expulsion effective des lieux ;
- 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Au visa de l'article 818 du code de procédure civile, la SA RATP HABITAT fait valoir que les demandes relatives à la réparation du chauffage, à la remise du bip interphone et des clés du second portail sont irrecevables car formées par requête et qu'elles sont indéterminées. Du fait de leur connexité avec la demande d'indemnisation, elle considère que cela rend la saisine du tribunal irrecevable.
Concernant les désordres allégués, elle conteste toute cause d'indécence. Elle expose que le chauffage fonctionne normalement et que le demandeur échoue à apporter la preuve du contraire. De plus, elle soulève qu'il ne pèse aucune obligation particulière de gardiennage sur le bailleur, lequel n'est par ailleurs pas responsable de l'acheminement du courrier.
S'agissant des troubles du voisinage évoqués, elle indique qu'un badge a été remis au demandeur au siège social fin mai 2023, lequel lui permet d'entrer dans la résidence et dans son logement. Elle ajoute qu'elle n'a aucune obligation d'assurer une jouissance paisible de la place de parking en application de l'article 1719 du code civil, celle-ci étant limitée à la durée du bail, qui a été résilié. En outre, elle fait valoir qu'elle n'est pas responsable des agissements allégués de son préposé, lesquels sont susceptibles de revêtir une qualification pénale engageant la responsabilité pénale de ce dernier et non la responsabilité civile de la société. Par ailleurs, au visa de l'article L121-1 du code pénal, elle observe que les faits prétendument commis l'auraient été en-dehors de l'exercice normal des fonctions du gardien.
Elle souligne que l'indemnisation demandée par Monsieur [J] [Z] correspond à plus de dix mois de loyer principal du logement.
Au soutien de sa demande reconventionnelle en résiliation du bail, elle expose que le locataire cause un trouble manifeste au sein de la résidence, en occupant sans droit ni titre un emplacement de stationnement, en proférant des menaces et des injures à caractère raciste à l'encontre du gardien qu'elle emploie depuis de nombreuses années, et en commettant des violences à son égard. Elle ajoute qu'elle doit veiller à préserver la sécurité et la santé de ses employés au titre d'une obligation de résultat.
L'affaire a été mise en délibéré au 6 août 2024.
MOTIFS DE LA D ÉCISION
I. Sur la recevabilité des demandes de réparation du chauffage, de remise du bip et des clés de portail et d'injonction de faire cesser tout trouble de voisinage
Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir, tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond pour défaut du droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
L'article 125 du code de procédure civile fait obligation au juge de relever d'office les fins de non-recevoir d'ordre public et notamment celles portant sur les conditions de saisine de la juridiction.
Il ressort de l'article 818 du code de procédure civile que la demande en justice est formée par assignation sauf dans le cas prévu en son second alinéa où elle peut être formée par requête.
L'article 818 précité n'autorisant la saisine du tribunal par requête que pour les demandes dont le montant n'excède pas 5 000 €, il en résulte que ce mode de saisine n'est pas ouvert dans les cas où la demande est indéterminée.
Il est de jurisprudence constante que toute demande tendant à la condamnation du défendeur à l'exécution d'une obligation de faire constitue en elle-même une demande indéterminée.
En l'espèce, Monsieur [J] [Z] sollicite notamment du juge des contentieux de la protection qu'il condamne le bailleur à la réparation de son chauffage, à la remise du bip interphone et des clés de portail ainsi qu'à faire cesser tout trouble du voisinage. Ces demandes, en ce qu'elles constituent des obligations de faire, sont par nature indéterminées.
Dès lors, les demandes de Monsieur [J] [Z] relatives à la réparation du chauffage, à la remise du bip interphone et des clés de portail ainsi qu'à l'injonction de faire cesser tout trouble du voisinage, doivent être déclarées irrecevables.
En revanche, la demande de dommages-intérêts pour trouble de jouissance paisible, qui repose sur un fondement juridique et des arguments propres, est recevable.
II. Sur la demande d'indemnisation relative au manquement du bailleur à son obligation d'assurer la jouissance paisible du logement
En vertu de l'article 1719 du code civil, le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière :
1° De délivrer au preneur la chose louée et, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent. Lorsque des locaux loués à usage d'habitation sont impropres à cet usage, le bailleur ne peut se prévaloir de la nullité du bail ou de sa résiliation pour demander l'expulsion de l'occupant ;
2° D'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée ;
3° D'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail ;
4° D'assurer également la permanence et la qualité des plantations.
L'article 6 de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989 dispose quant à lui que le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé, exempt de toute infestation d'espèces nuisibles et parasites, répondant à un critère de performance énergétique minimale et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation.
Le bailleur est obligé :
de délivrer au locataire le logement en bon état d'usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement (…), d'assurer au locataire la jouissance paisible du logement et, sans préjudice des dispositions de l'article 1721 du code civil, de le garantir des vices ou défauts de nature à y faire obstacle, hormis ceux qui, consignés dans l'état des lieux, auraient fait l'objet de clause expresse mentionnée au a ci-dessus, d'entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat et d'y faire toutes les réparations autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux (…) ;L'obligation du bailleur d'assurer au preneur la jouissance paisible du logement est une obligation de résultat qui engage sa responsabilité, sauf à démontrer que le trouble empêchant une jouissance paisible trouve son origine dans un cas de force majeure ou une faute du preneur.
Aux termes de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Conformément aux dispositions de l'article 9 du code de procédure civile, il appartient à la partie qui sollicite des dommages et intérêts de démontrer l'existence de son préjudice.
En l'espèce, le demandeur invoque plusieurs moyens aux fins de démontrer le manquement de la société bailleresse à son obligation d'assurer une jouissance paisible du logement, qu'il convient d'examiner successivement.
S'agissant du manque d'hygiène de l'emplacement de parking et l'impossibilité de jouir du parking
Au soutien de ce moyen, Monsieur [J] [Z] produit en premier lieu :
Deux photographies datées des 1er mars et 22 décembre 2022, non cadrées et floues, d'une place de stationnement emplie d'eau, mais dont il n'est pas possible de déterminer la localisation.Une photographie du 22 décembre 2022 montrant un parterre sale. Une photographie datée du 25 janvier, sans davantage de précision, non cadrée. Une photographie non datée, montrant un emplacement de stationnement n°62, supportant plusieurs sacs de détritus. Ces photographies, à les supposer probantes en l'absence de certitude sur les lieux visibles, ne permettent que des constatations visuelles et non techniques, insusceptibles de caractériser la nature, l'ampleur ou les causes des désordres. En effet, elles ne sont pas corroborées par d'autres éléments, à l'instar par exemple d'un constat de commissaire de justice ou des services d'hygiène et salubrité de la ville.
En outre, la main courante déposée par le demandeur le 14 février 2023, évoquant une fuite d'eau depuis décembre 2021 et la présence d'eau usée sur l'emplacement de parking le 24 janvier 2023, ne peut être considérée comme un élément objectif en ce qu'elle ne repose que sur ses propres déclarations.
La société défenderesse quant à elle, évoque la survenue d'une fuite sur le réseau d'assainissement des eaux usées début 2023, après que des coulures soient apparues épisodiquement en 2022.
Elle fournit un bon de commande du 3 octobre 2023 ainsi que trois factures d'un prestataire de travaux datant du mois de novembre 2023 concernant la reprise du réseau d'assainissement des eaux usées, soit ultérieurement aux photographies prises par Monsieur [J] [Z] en 2022 :
Une facture de 2 695 € TTC comprenant la dépose et la mise en décharge de l'enrobé existant, ainsi que l'ouverture d'une tranchée entre les deux regards existants ;Une facture de 1 852,40 € TTC comprenant la mise en œuvre d'un ballon sur le réseau pour bloquer temporairement l'écoulement lors des travaux, la dépose et le remplacement du tuyau existant ; Une facture de 2 728 € TTC comprenant le remblaiement de la tranchée, la reprise en grave de l'allée et la réfection des enrobés à chaud.Dès lors, il apparaît que si la survenance d'une fuite d'eau n'est pas contestée, ni sa date d'apparition ni sa durée ne sont déterminées. Il est en revanche démontré que des travaux ont été effectués par la bailleresse en novembre 2023 conformément à ses obligations.
En l'absence de constat technique sur les lieux litigieux, il ne peut être tiré de conséquence sur d'éventuelles répercussions de cette fuite sur l'usage du locataire et donc un éventuel préjudice. Par ailleurs, il n'est pas contesté que le contrat de bail de l'emplacement de parking de Monsieur [J] [Z] a été résilié à compter du 19 février 2023, soit quelques jours seulement après la main courante déposée par le locataire. Il découle de ces deux éléments qu'il ne pouvait se prévaloir d'un droit à utiliser une autre place vacante.
Dès lors, ce moyen ne saurait prospérer afin d'engager la responsabilité de la société défenderesse.
S'agissant du comportement allégué du gardien de l'immeuble
En vertu de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
L'article 1242 dispose notamment que l'on est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde. Son cinquième alinéa indique que les maîtres et les commettants sont responsables du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés.
La responsabilité du commettant du fait du préposé implique l'existence d'un lien de subordination, caractérisé par le pouvoir de donner des ordres au préposé.
L'engagement de la responsabilité du commettant du fait de son préposé exige trois conditions, l'existence d'un lien de préposition, une faute du préposé ainsi que le rattachement du fait dommageable au rapport de préposition.
En l'espèce, si l'existence d'un lien de préposition entre la société défenderesse et le gardien d'immeuble ne fait pas débat, il convient d'examiner si la preuve d'un fait dommageable commis par le gardien, Monsieur [W] [S], est rapportée.
À cet égard, Monsieur [J] [Z] fournit :
Plusieurs photographies non circonstanciées d'un homme non identifié, réalisant un doigt d'honneur, à côté d'un chariot d'entretien.Une photographie d'un véhicule laissant apparaître quelques rayures, sans autre indication.Des mains courantes en date des 14 février 2023, 10 octobre 2023 et 5 janvier 2024 ainsi qu'une plainte du 28 juin 2023 évoquant un différend avec le gardien de l'immeuble, des menaces d'expulsion, des faits de violence de ce dernier, le refus de le laisser se stationner sur un emplacement de stationnement malgré l'inondation du sien, ainsi que le changement de l'étiquette apposée sur sa boîte aux lettres et le jet de son courrier dans la poubelle.Un avis de passage indiquant l'absence de nom sur la boîte aux lettres du locataire et une demande de retrait de la lettre recommandée le 09 avril.Un message de l'opérateur téléphonique Free du 16 mars fixant un rendez-vous de raccordement à la fibre le 17 mars 2023 entre 10h et 12h, ainsi qu'un second message du 17 mars non lisible dans son entièreté. Il y a lieu de relever que les mains courantes et la plainte susvisées, qui permettent certes d'établir l'existence d'un différend ancien entre Monsieur [J] [Z] et Monsieur [W] [S], ne peuvent être considérées comme des éléments objectifs afin de caractériser les troubles évoqués. En effet, elles ne reposent que sur ses propres déclarations. Les suites pénales ne sont pas connues, alors même qu'il est évoqué par Monsieur [J] [Z] dans la main courante en date du 5 janvier 2024 une convocation devant le procureur de la République. Pas d'autre élément d'enquête ou constatation n'est transmis, tel un certificat médical des UMJ ou des attestations de témoins.
Les photographies, non circonstanciées et qui n'établissent pas l'identité de la personne photographiée, ne permettent pas davantage d'objectiver les déclarations du demandeur. Il en est de même de l'avis de passage produit qui, s'il mentionne l'absence de nom sur la boîte aux lettres du demandeur, n'établit aucun lien avec d'éventuels agissements du gardien. Le fait que les clés du local à vélo aient été remises tardivement à Monsieur [J] [Z] n'est pas démontré, et au surplus, rien ne permet d'en déduire qu'il s'agit d'une discrimination.
S'agissant de l'absence alléguée du gardien au rendez-vous fixé par Free, le manquement invoqué ne correspond à aucune obligation appartenant au préposé ou à la bailleresse.
Dès lors, la responsabilité de la société défenderesse ne peut être engagée de ce fait.
S'agissant du manquement allégué à la sécurité et à la réglementation
En vertu de l'article L. 271-1 du code de la sécurité intérieure, les propriétaires, exploitants ou affectataires, selon le cas, d'immeubles à usage d'habitation et de locaux administratifs, professionnels ou commerciaux doivent, lorsque l'importance de ces immeubles ou de ces locaux ou leur situation le justifient, assurer le gardiennage ou la surveillance de ceux-ci et prendre les mesures permettant d'éviter les risques manifestes pour la sécurité et la tranquillité des locaux.
Afin de satisfaire à cette obligation, le bailleur fait assurer, dans les conditions et selon les modalités prévues au présent chapitre, le gardiennage ou la surveillance des immeubles collectifs à usage locatif dont il a la gestion.
Les dispositions du premier alinéa s'appliquent à tout bailleur dès lors qu'il gère cent logements locatifs ou plus dans un immeuble ou groupe d'immeubles collectifs formant un ensemble situé soit dans une zone urbaine sensible définie au 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, soit dans une commune dont la population dépasse 25 000 habitants ou qui est comprise dans une aire urbaine d'un seul tenant regroupant au moins 50 000 habitants et dont une ou plusieurs communes comptent plus de 15 000 habitants.
En l'espèce, le demandeur reproche à la bailleresse de n'avoir pas tout mis en œuvre afin d'éviter la dégradation de la serrure de sa porte. Cependant, aucun document versé par les parties ne permet au juge d'établir si l'immeuble de la SA RATP HABITAT, sis [Adresse 3], [Localité 7], rempli les conditions pour l'application des textes précités.
Or en dehors du cas prévu par le code de la sécurité intérieure, le bailleur n'a pas d'obligation de surveillance ou de garde et les troubles de fait causés par les tiers ne sont donc pas garantis, à moins que le bailleur n'ait aggravé le dommage par sa faute. Ainsi, et ce même en présence d'un gardien, le bail ne constitue pas une obligation contractuelle de faire surveiller et sécuriser les locaux loués par une société de gardiennage.
Par conséquent, il ne peut être caractérisé un manquement de la bailleresse de ce chef.
Concernant le non-respect de la réglementation des images de caméras de vidéo-surveillance allégués, force est de constater que le demandeur n'apporte pas la preuve de ses allégations. Par ailleurs, la société défenderesse ne verse aux débats aucune image de vidéo-surveillance.
*
Au regard de l'ensemble de ces éléments, il apparaît que Monsieur [J] [Z] n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, d'un manquement de la SA RATP HABITAT à ses obligations contractuelles.
Au surplus, si le demandeur produit une ordonnance en date du 15 mai 2023 comprenant notamment un antidépresseur et un médicament destiné à traiter l'insomnie, il n'est pas démontré un lien de cause à effet entre l'existence des troubles allégués et l'état de santé de l'intéressé.
Par conséquent, Monsieur [J] [Z] sera débouté de sa demande d'indemnisation pour préjudice de jouissance.
III. Sur la demande reconventionnelle en résiliation du bail
Sur la loi applicable au litige
À titre préliminaire, il y a lieu de préciser que la loi n°2023-668 du 27 juillet 2023, portant notamment réforme de l'article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 et des articles L.412-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, applicables au présent litige, est entrée en vigueur le 29 juillet 2023, lendemain de sa publication au Journal officiel de la République.
En application de l'article 2 du code civil, il sera rappelé que la loi ne dispose que pour l'avenir et n'a pas d'effet rétroactif.
En l'espèce, la requête à l'origine de la présente procédure ayant été formée le 6 décembre 2023, il y a lieu d'appliquer les dispositions précitées telles qu'issues de cette réforme.
Sur le prononcé de la résiliation du bail et l'expulsion
En vertu des articles 1728 et 1729 du code civil, le preneur est tenu d'user de la chose louée raisonnablement ; si le preneur n'use pas de la chose louée raisonnablement ou emploie la chose louée à un autre usage que celui auquel elle a été destinée, ou dont il puisse résulter un dommage pour le bailleur, celui-ci peut, suivant les circonstances, faire résilier le bail.
Selon l'article 7 de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989, le locataire est obligé d'user paisiblement des locaux loués suivant la destination qui leur a été donnée par le contrat de location.
La jouissance paisible des lieux est donc une obligation essentielle du contrat de location.
Aux termes de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
Il appartient au juge d'apprécier souverainement si les manquements imputés sont d'une gravité suffisante pour justifier la résiliation du contrat.
En l'espèce, les deux manquements invoqués par la bailleresse concernent l'occupation sans droit ni titre d'un emplacement de stationnement ainsi que des menaces, injures à caractère raciste et violences du locataire à l'égard du gardien de l'immeuble où habite Monsieur [J] [Z].
L'utilisation temporaire d'autres places de stationnement que celle qui faisait l'objet de son bail n'est pas contestée par le locataire, qui l'explique par la présence d'une fuite d'eau sur sa propre place de parking et le caractère vacant des autres emplacements. Néanmoins, en dehors d'un seul courrier envoyé le 16 janvier 2023 au locataire, la bailleresse n'apporte pas la preuve du caractère répété dans le temps, en dehors du moment où avait lieu la fuite d'eau, de ce trouble. Il ne s'agit de plus pas d'un manquement suffisamment grave pour justifier la résiliation du bail. Par ailleurs, il se déduit des échanges de mails produits entre Monsieur [J] [Z] et la société bailleresse entre le 19 avril et le 4 mai 2023, et notamment du mail en date du 4 mai 2023, que la SA RATP HABITAT était prête à conclure un nouveau bail pour un emplacement de parking si le locataire acceptait de présenter ses excuses à son employé, ce qui indique que ce seul manquement n'était pas non plus rédhibitoire pour la bailleresse.
Dans le courrier précité du 16 janvier 2023, la SA RATP HABITAT évoque également un comportement inadapté du locataire envers le gardien Monsieur [W] [S], notamment à travers des gestes insultants filmés par les caméras de vidéo-surveillance, ainsi que la dégradation de la chaîne et de l'anti-vol installés par la société. Cette lettre, en ce qu'elle repose sur les propres déclarations de la défenderesse et n'est pas étayé par un autre élément extérieur notamment des images de vidéosurveillance, ne saurait être considérée comme un élément objectif, bien qu'elle soit utile à la chronologie des faits.
En revanche, dans sa plainte en date du 19 décembre 2023, Monsieur [W] [S] dénonce des insultes de la part de Monsieur [J] [Z], lequel aurait donné des coups de pied dans la porte de sa loge pour le faire sortir puis l'aurait agrippé au niveau du bras et aurait craché sur lui. Si l'hématome qu'il décrit n'est pas constaté par l'agent de police judiciaire qui enregistre sa plainte, son récit des faits est corroboré par deux attestations de témoins. Monsieur [B] [M] déclare aux termes d'une attestation remplissant les formes exigées par le code de procédure civile avoir assisté à ces faits, dont il décrit le même déroulé que Monsieur [W] [S]. Par ailleurs, Madame [K] [O], locataire qui se trouvait chez elle lors de ces événements, relate la même scène dans une attestation elle aussi conforme aux exigences procédurales. Ces trois témoignages font état des mêmes insultes racistes, ainsi que notamment de l'insulte « fils de pute », des coups violents dans la porte, de la volonté de faire sortir le gardien de sa loge et de l'état d'agressivité forte de Monsieur [J] [Z]. Monsieur [B] [M] corrobore le fait que Monsieur [J] [Z] ait attrapé Monsieur [W] [S] par le bras.
Monsieur [J] [Z] conteste ces témoignages au motif que Monsieur [B] [M] et Madame [K] [O] seraient des amis du gardien sans en fournir de preuve. Ces derniers ont en outre bien été informés des conséquences pénales de la production d'une fausse attestation en justice.
Monsieur [W] [S] a déposé une seconde plainte le 24 janvier 2024, où il fait état d'une scène d'insultes similaires (« ta mère la pute », « sale noir ») de la part de Monsieur [J] [Z]. Les attestations de témoins n'évoquent pas ces faits mais Madame [K] [O] affirme avoir été témoin d'une autre scène similaire avant le mois de décembre 2023 et avoir été choquée des insultes racistes ainsi que « des insultes proférées sur la mère du gardien ».
Ces différents éléments croisés permettent de caractériser les propos insultants et racistes tenus par Monsieur [J] [Z] à l'encontre de Monsieur [W] [S], ainsi qu'au moins une scène de violences (coups dans la porte, contact physique au niveau du bras). Il est également évoqué une dégradation de la porte de la loge par les trois témoignages et donc du bien de la SA RATP HABITAT.
Il n'a pas été démontré dans le cadre de cette instance que Monsieur [W] [S] aurait été quant à lui violent envers Monsieur [J] [Z], des violences réciproques n'excluant pas en tout état de cause la responsabilité de chacune des parties impliquées.
Il n'est pas produit de pièce de nature à établir que d'autres locataires rencontrent des difficultés avec
Monsieur [W] [S].
En conclusion, ce comportement discriminatoire et violent, quand bien même Monsieur [J] [Z] aurait des griefs envers la manière dont le gardien exerce ses fonctions et y compris en cas d'incivilités de sa part, constitue sans conteste une réaction disproportionnée et un manquement à la jouissance paisible des lieux loués.
Les lieux des faits constituent le lieu de travail de Monsieur [W] [S], dont il convient de garantir la sécurité, le relogement de Monsieur [J] [Z] étant dès lors opportun.
Ces éléments caractérisent un manquement suffisamment grave aux obligations découlant du bail, qui justifie la résiliation du contrat à compter du présent jugement et l'expulsion de Monsieur [J] [Z] et de tous occupants de son chef des lieux, au besoin avec l'aide de la force publique et d'un serrurier dans les formes et délais prévus par les articles L. 412-1, R. 412-1 et suivants, L. 431-1 et suivants et R. 411-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution.
Conformément aux articles L. 433-1, R. 433-1 et suivants du même code, la SA RATP HABITAT sera autorisée à procéder à l'enlèvement de tous les biens mobiliers garnissant les lieux loués et à les faire entreposer dans tel local de son choix aux frais et périls de Monsieur [J] [Z].
L'indemnité d'occupation vise à pallier le préjudice subi par l'occupation des personnes présentes dans les lieux sans droit ni titre. Monsieur [J] [Z] occupe désormais les lieux sans droit ni titre et cause, par ce fait, un préjudice au bailleur qu'il convient de réparer.
Il sera donc condamné à payer à la SA RATP HABITAT une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus en cas de non-résiliation du bail, et ce à compter du présent jugement et jusqu'à la date de libération effective des lieux.
Conformément aux dispositions de l'article 1231-7 du code civil, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal, même en l'absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. En conséquence, les indemnités d'occupation échues à ce jour produiront intérêts au taux légal à compter de la présente décision, et toutes les indemnités d'occupation ultérieures non payées à terme se verront augmentées des intérêts au taux légal à compter de la date de leur exigibilité.
IV. Sur les demandes accessoires
En application de l'article 696 du code de procédure civile, il convient de condamner Monsieur [J] [Z], partie perdante, au paiement des dépens.
Conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée et il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation.
En l'espèce, Monsieur [J] [Z], tenu aux dépens, sera condamné à verser à la SA RATP HABITAT une somme de 500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
En application de l'article 514 du code de procédure civile, la présente décision est de droit exécutoire.
PAR CES MOTIFS
La juge des contentieux de la protection, statuant après débats tenus en audience publique, par jugement contradictoire, public, et en premier ressort,
DÉCLARE irrecevables les demandes de Monsieur [J] [Z] relatives à la réparation du chauffage, la remise du bip et des clés de portail ainsi qu'à la cessation de tout trouble de voisinage;
DÉBOUTE Monsieur [J] [Z] de sa demande d'indemnisation en réparation du manquement du bailleur à son obligation d'assurer la jouissance paisible du logement ;
PRONONCE la résiliation du bail à effet du 29 novembre 2021 entre la SA RATP HABITAT et Monsieur [J] [Z] relatif aux locaux sis [Adresse 3], [Localité 7] à compter du présent jugement ;
ORDONNE en conséquence l'expulsion de Monsieur [J] [Z] ainsi que tout occupant de son chef, des lieux sis [Adresse 3], [Localité 7] ;
DIT qu'à défaut pour Monsieur [J] [Z] d'avoir volontairement quitté les lieux, il sera procédé à son expulsion et à celle de tous occupants de son fait, avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier, si besoin est conformément aux dispositions des articles L. 412-1, R. 4121 et suivants du code de procédure civile ;
AUTORISE la SA RATP HABITAT à procéder à l'enlèvement de tous les biens mobiliers garnissant les lieux loués et à les faire entreposer dans tel local de son choix aux frais et périls de Monsieur [J] [Z] conformément aux articles L. 433-1, R. 433-1 et suivants du même code ;
RAPPELLE qu'il ne pourra être procédé à l'expulsion qu'après l'expiration d'un délai de deux mois suivant la délivrance d'un commandement de quitter les lieux par commissaire de justice, et que toute expulsion forcée est prohibée entre le 1er novembre de chaque année jusqu'au 31 mars de l'année suivante conformément aux dispositions des articles L. 412-1 et L. 412-6 du code des procédures civiles d'exécution ;
CONDAMNE Monsieur [J] [Z] à verser à la SA RATP HABITAT une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant équivalent au loyer et aux charges, tel qu'il aurait été si le contrat s'était poursuivi normalement, à compter du présent jugement et jusqu'à la date de libération effective des lieux ;
DIT que l'indemnité d'occupation sera due au prorata temporis et payable à terme et au plus tard le dernier jour de chaque mois ;
CONDAMNE Monsieur [J] [Z] aux dépens de l'instance ;
CONDAMNE Monsieur [J] [Z] à verser à la SA RATP HABITAT la somme de 500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
DÉBOUTE Monsieur [J] [Z] de sa demande sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que la présente décision est assortie de plein droit de l'exécution provisoire ;
DIT que copie de la présente décision sera communiquée par les soins du greffe au représentant de l'État dans le département, en application de l'article R. 412-2 du code des procédures civiles d'exécution.
LA GREFFIÈRE LA JUGE