TRIBUNAL JUDICIAIRE
de BOBIGNY
JUGEMENT CONTENTIEUX DU 24 JUILLET 2024
Chambre 21
AFFAIRE: N° RG 18/04191 - N° Portalis DB3S-W-B7C-RXGX
N° de MINUTE : 24/00384
Madame [R] [O] veuve [P] agissant en sa qualité d’ayant droit de son époux [L] [P]
née le [Date naissance 6] 1957 à [Localité 20] (MAROC)
[Adresse 13]
[Localité 17]
représentée par Me Etienne RIONDET de la SELARL RIONDET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R024
Monsieur [M] [P] agissant en sa qualité d’ayant droit de son père [L] [P]
né le [Date naissance 5] 1977 à [Localité 19]
[Adresse 13]
[Localité 17]
représenté par Me Etienne RIONDET de la SELARL RIONDET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R024
Monsieur [J] [P] agissant en sa qualité d’ayant droit de son père [L] [P]
né le [Date naissance 7] 1978 à [Localité 22] (93)
[Adresse 13]
[Localité 17]
représenté par Me Etienne RIONDET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R024
Monsieur [S] [P] agissant en sa qualité d’ayant droit de son père [L] [P]
né le [Date naissance 9] 1981 à [Localité 22]
[Adresse 12]
[Localité 16]
représenté par Me Etienne RIONDET de la SELARL RIONDET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R024
Madame [G] [Z] [P] épouse [O] agissant en sa qualité d’ayant droit de son père [L] [P]
née le [Date naissance 10] 1985 à [Localité 22] (93)
[Adresse 3]
[Localité 15]
représentée par Me Etienne RIONDET de la SELARL RIONDET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R024
Madame [K] [P] agissant en sa qualité d’ayant droit de son père [L] [P]
née le [Date naissance 4] 1990 à [Localité 21] (93)
[Adresse 13]
[Localité 17]
représentée par Me Etienne RIONDET de la SELARL RIONDET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R024
DEMANDEURS
C/
SECURITE SOCIALE DES INDEPENDANTS URSSAF
[Adresse 2]
[Localité 18]
défaillant
ONIAM
[Adresse 26]
[Adresse 1]
[Localité 14]
représentée par Me Juliette MENDES RIBEIRO de l’AARPI BJMR Avocats, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0730
DEFENDEURS
_______________
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Madame Karima BRAHIMI, Vice-Présidente, statuant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l’article 812 du code de procédure civile, assistée aux débats de Monsieur Maxime-Aurelien JOURDE, greffier.
DÉBATS
Audience publique du 22 Mai 2024.
JUGEMENT
Rendu publiquement, par mise au disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort, par Madame Karima BRAHIMI, Vice-Présidente, assistée de Monsieur Maxime-Aurelien JOURDE, greffier.
****************
EXPOSÉ DU LITIGE
Le 25 janvier 2009, Monsieur [L] [P] a ingéré des produits caustiques.
Il a été transporté par les services de secours à l’hôpital [24] à [Localité 23].
A son arrivée à l’hôpital, Monsieur [P] présentaient des brûlures de l’œsophage et de l’estomac ayant nécessité notamment une œsophagectomie et une gastrectomie. Il a ensuite été transféré en réanimation chirurgicale.
Monsieur [P] a présenté le 30 janvier 2009 une pneumopathie infectieuse à SAMS. Il a également présenté une infection à Klébsiella Oxytoca le 01 février 2009.
Il a été victime d’un choc septique le 11 février 2009, d’un choc cardiogénique (récupéré) le 14 février 2009 et est décédé le [Date décès 8] 2009 suite à une défaillance multiviscérale avec pneumopathie infectieuse poly bactérienne au premier plan.
Les consorts [P] ont saisi la chambre régionale de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux d’Ile-de-France, qui, par décision du 27 septembre 2011, a rejeté leur demande d’indemnisation considérant que le décès de Monsieur [P] ne pouvait être imputé à un accident médical fautif ou non fautif.
Par acte des 30 et 31 janvier 2018, Madame [R] [O] veuve [P], Monsieur [M] [P], Monsieur [J] [P], Monsieur [S] [P], Madame [G] [Z] [P] et Madame [K] [P], ont assigné l'Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux, des Affections Iatrogènes et des Infections Nosocomiales (ONIAM) et la Sécurité Sociale des Indépendants URSSAF, devant le tribunal de grande instance de Bobigny, aux fins d'indemnisation des préjudices subis suite au décès de Monsieur [L] [P].
Par jugement du 14 janvier 2020, le tribunal a sursis à statuer sur l'ensemble des demandes, et, avant dire droit, ordonné une expertise médicale confiée au Docteur [H], remplacé par le Docteur [I] par ordonnance de remplacement d’expert du 16 février 2021.
L’expert a déposé son rapport le 06 avril 2022.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 26 janvier 2023, Madame [R] [O] veuve [P], Monsieur [M] [P], Monsieur [J] [P], Monsieur [S] [P], Madame [G] [Z] [P], Madame [K] [P] demandent notamment :
de faire droit à l’ensemble des demandes fins et conclusions des consorts [P],de les déclarer recevables et bien fondés en leur action,de juger que le décès de Monsieur [P] est la conséquence d’une infection nosocomiale,de dire que l’indemnisation des préjudices en résultant devra être prise en charge au titre de la solidarité nationale par l’ONIAM,En conséquence,
de condamner l’ONIAM à verser aux Consorts [P] au titre des préjudices extra-patrimoniaux de Monsieur [P] les sommes suivantes : ▪ 17.500,00 € au titre des souffrances endurées,
▪ 3.500,00 € au titre du préjudice esthétique temporaire,
▪ 28.000,00 € au titre du préjudice d’angoisse de mort imminente,
de condamner l’ONIAM à verser au titre des préjudices patrimoniaux et extra-patrimoniaux des consorts [P] en leur nom personnel les sommes suivantes : ▪ 538.928,18 € à Madame [O] veuve [P],
▪ 38.888,89 € à Monsieur [M] [P],
▪ 38.888,89 € à Monsieur [J] [P],
▪ 28.888,89 € à Monsieur [S] [P],
▪ 10.000,00 € à Madame [A] [P],
▪ 10.000,00 € à Monsieur [N] [P],
▪ 62.144,49 € à Madame [K] [P],
▪ 28.888,89 € à Madame [G] [P],
de condamner l’ONIAM au paiement de la somme de 9.000,00 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,d’ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir,de condamner aux entiers dépens de la procédure ainsi que les frais d’expertise, dont distraction au profit de Maître Etienne RIONDET, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Les requérants soutiennent que Monsieur [L] [P] est décédé des suites d’une infection nosocomiale.
Ils considèrent que l’infection présentée par Monsieur [P] n’était pas en incubation et ne trouve donc pas son origine dans son état antérieur mais a bien été contractée au cours de l’hospitalisation.
Les requérants soutiennent que le lien entre l’infection nosocomiale et le décès ne saurait donc être écarté par l’état immunodéprimé de Monsieur [P].
Ils concluent que dans ces conditions, au regard de ce faisceau d’indices précis et concordants, le caractère nosocomial de l’infection subie par Monsieur [P] est valablement établi et que l’ONIAM est tenu de les indemniser de leurs préjudices au titre de la solidarité nationale.
S’agissant des préjudices, ils sollicitent l’indemnisation de l’intégralité des préjudices subis par la victime directe et par les victimes indirectes en s’appuyant notamment sur le rapport d’expertise et divers pièces qu’ils produisent.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 20 novembre 2023, l’ONIAM demande notamment :
A titre principal :
de débouter les Consorts [P] de leur demande d’indemnisation en application des dispositions de l’article L 1142-1 et L 1142-1-1 du code de la santé publique au titre d’une infection nosocomiale à l’origine du décès de Monsieur [L] [P],de mettre l’ONIAM hors de cause,de laisser à la charge des demandeurs les dépens,
A titre subsidiaire : de limiter les indemnités allouées aux Consort [P] aux sommes suivantes :
Au titre du préjudice de Monsieur [L] [P] :
o Souffrances endurées : 11502,00 €,
o Préjudice esthétique : rejet à défaut 1500,00 €,
o Préjudice d’angoisse de mort imminente : rejet,
Au titre du préjudice propre des Consorts [P] :o de surseoir à statuer sur les frais d’obsèques et préjudices économiques en l’absence de créance des tiers payeurs,
o subsidiairement de débouter les Consorts [P] de leurs demandes au titre des préjudices économiques de Madame [O] veuve [P] et Madame [K] [P],
o de débouter les Consorts [P] de leur demande au titre d’un préjudice d’inquiétude,
o de limiter les indemnités allouées au titre du préjudice d’accompagnement à la somme de 500 € pour Madame [O] et chacun des enfants,
o de limiter les indemnités allouées au titre du préjudice d’affection aux sommes suivantes :
Pour Madame [O] veuve [P] : 15 000 € ,
Pour chacun des enfants hors foyer ([M], [J], [S] et [G] [P]) : 4000,00 €,
Pour Madame [K] [P] : 12 000,00 €,
Pour chacun des petits-enfants : 2 000,00 €,
de les débouter de leur demande d’article 700 dirigée à l’encontre de l’ONIAM,de statuer ce que de droit sur les dépens.
L’ONIAM soutient que l’origine des phénomènes infectieux est en rapport avec la pathologie initiale gravissime présentée par Monsieur [P] et soutient que, comme le rappelle l’expert, dans les formes graves des brûlures, comme c’est le cas en l’espèce, les infections sont inévitables.
L’ONIAM conclut qu’il ne saurait y avoir ainsi de droit à indemnisation au profit des consorts [P] en l’absence de démonstration d’une infection nosocomiale et donc imputable de manière directe et certaine aux soins prodigués.
L’office sollicite le rejet des demandes présentées par les requérants.
Subsidiairement, s’agissant des préjudices, l’ONIAM sollicite la réduction des demandes indemnitaires formulées par les requérants à de plus justes proportions.
L’office sollicite de surseoir à statuer concernant la demande au titre des frais d’obsèques et le rejet des demandes formulées au titre du préjudice d’angoisse de mort imminente, au titre du préjudice économique, au titre du préjudice d’inquiétude.
La Sécurité Sociale des Indépendants n’a pas constitué avocat.
Il convient en application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile de se référer aux prétentions et moyens développés dans les écritures des parties.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 20 février 2024. L’affaire a été appelée à l’audience du 22 mai 2024. La décision a été mise en délibéré au 04 septembre 2024 avancée au 24 juillet 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le droit à indemnisation des victimes
Aux termes de l’article L1142-1 du code de la santé publique :
« I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute.
Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère.
II. - Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire.
Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret ».
Les demandeurs soutiennent que le caractère nosocomial de l’infection résulte en définitive d’une double démonstration résultant du rapport établi par l’expert, selon lequel :
- l’infection présentée par Monsieur [P] n’était pas en incubation ; qu’autrement dit, il n’était pas porteur du germe à son arrivée aux urgences de l’hôpital [25] ; que l’infection contractée par Monsieur [P] ne trouve donc pas son origine dans son état antérieur,
- l’infection a bien été contractée au cours de l’hospitalisation ; que si l’infection contractée trouve son origine dans une multiplicité de causes dont une infection nosocomiale, elle n’en demeure pas moins nosocomiale.
Les requérants soutiennent que le lien entre l’infection nosocomiale et le décès ne saurait donc être écarté par l’état immunodéprimé de Monsieur [P].
Ils concluent que dans ces conditions, au regard de ce faisceau d’indices précis et concordants, le caractère nosocomial de l’infection subie par Monsieur [P] est valablement établi.
L’ONIAM expose que, si au soutien de leurs demandes les Consorts [P] prétendent que l’infection n’était pas présente à l’admission à l’hôpital [24] et a bien été contractée en cours d’hospitalisation, il n’en demeure pas moins que cette infection trouve manifestement son origine dans l’état gravissime présenté par Monsieur [P] et l’évolution de celui-ci en dépit des soins prodigués.
L’ONIAM considère qu’il ressort en effet du rapport du Docteur [I] que si la cause du décès est à rechercher dans les phénomènes infectieux, ces derniers relèvent de l’évolution de la pathologie initiale.
Selon l’ONIAM, il est manifeste que l’origine des phénomènes infectieux est en rapport avec la pathologie initiale gravissime présentée par Monsieur [P] et soutient que, comme le rappelle l’expert, dans les formes graves des brûlures, comme c’est le cas en l’espèce, les infections sont inévitables.
L’ONIAM conclut qu’il ne saurait y avoir ainsi de droit à indemnisation au profit des consorts
[P] en l’absence de démonstration d’une infection nosocomiale et donc imputable de manière directe et certaine aux soins prodigués.
L’office ajoute que l’absence de lien entre l’infection et les actes pratiqués ou le séjour même au sein de l’établissement fait obstacle à la reconnaissance de la notion d’infection nosocomiale et la seule survenue de cette infection au temps et au lieu de l’hospitalisation ne suffit pas à lui conférer un caractère nosocomial dès lors qu’en l’espèce, l’infection est la conséquence des lésions initiales.
Il convient de rappeler que, doit être regardée, au sens des dispositions précitées du code de la santé publique, comme présentant un caractère nosocomial une infection qui survient au cours ou au décours de la prise en charge d'un patient et qui n'était ni présente, ni en incubation au début de celle-ci, sauf s'il est établi qu'elle a une autre origine que la prise en charge.
En l’espèce, le rapport d’expertise, qui n’est pas contesté par les parties, relève que le 25 janvier 2009, Monsieur [P] a ingéré des produits caustiques ayant nécessité l’intervention du SAMU 93 et son hospitalisation à l’hôpital [24].
A son arrivée, une intubation nasotrachéale a été réalisée.
Monsieur [P] présentaient des brûlures IIIB de l’œsophage et de l’estomac ayant nécessité une œsophagectomie, une gastrectomie, une œsophagectomie cervicale et une jéjunostomie.
Il a ensuite été transféré en réanimation chirurgicale dans les suites.
Monsieur [P] a présenté le 30 janvier 2009 une pneumopathie infectieuse à SAMS acquise sous ventilation mécanique et traité par antibiotiques notamment. Il a également présenté une infection à Klébsiella Oxytoca le 01 février 2009.
Il a été victime d’un choc septique le 11 février 2009, d’un choc cardiogénique (récupéré) le 14 février 2009 et est décédé le [Date décès 8] 2009 suite à une défaillance multiviscérale avec pneumopathie infectieuse poly bactérienne au premier plan.
L’expert indique que le décès de Monsieur [P] est bien en rapport avec le syndrome infectieux nosocomial pulmonaire qui n’a pu être maîtrisé.L’expert indique à de nombreuses reprises dans son rapport que la pneumopathie infectieuse à SAMS a été acquise sous ventilation mécanique, qu’il s’agit d’une infection nosocomiale, qu’il n’y a pas de syndrome infectieux à l’admission en réanimation.
Dès lors, il apparaît clairement que la pneumopathie infectieuse n’était ni présente ni en incubation au début de la prise en charge de Monsieur [P] et que cette infection est bien survenue au cours de la prise en charge de Monsieur [P] à l’hôpital [24].
Seule la preuve d’une origine autre que la prise en charge est de nature à écarter la qualification nosocomiale.
Or, en l’espèce, il est vrai que l’expert qui indique que l’insuffisance respiratoire et le syndrome de défaillance multiviscérale dont a été victime Monsieur [P] sont les conséquences d’une infection nosocomiale, précise toutefois que Monsieur [P] était un sujet à haut risques en raison d’une part de la gravité de ses lésions suite à l’accident (nécrose complète de l’estomac et de l’œsophage) et de son état de santé antérieur fragilisé (patient greffé rénal, immunodéprimé, cumulant des problèmes d’HTA, de maladie vasculaire, de BPCO).
Néanmoins, le seul fait que les lésions de Monsieur [P] étaient graves et que son état de santé était fragilisé, ne suffit pas à démonter que la pneumopathie infectieuse a une origine totalement étrangère à la prise en charge hospitalière de la victime, dès lors que le rapport d’expertise met clairement en évidence que cette infection a été acquise sous ventilation mécanique, et que l’expert explique que la ventilation mécanique est pourvoyeuse de ce type d’infection nosocomiale présentée par Monsieur [P].
Il sera relevé que les prédispositions pathologiques de la victime, comme la gravité de ses lésions, ne sont pas de nature à écarter tout lien entre les soins prodigués, et notamment la mise sous ventilation mécanique, et la survenue de l’infection.
Ainsi, l’ONIAM ne démontre pas que l’infection litigieuse est totalement étrangère à la prise en charge de Monsieur [P].
Au regard de l’ensemble de ces éléments, il apparaît que l’infection pulmonaire ayant conduit au décès de Monsieur [P] est survenue au cours de la prise en charge du patient à l’hôpital [24], que cette infection n'était ni présente, ni en incubation au début de la prise en charge et qu’il n’est aucunement établi que cette infection est totalement étrangère à la prise en charge médicale du patient.
Ainsi, le tribunal retient la qualification nosocomiale de l’infection.
Par conséquent, l’ONIAM sera tenu d’indemniser les victimes des préjudices subis en lien avec cette infection nosocomiale.
Sur la liquidation du préjudice des victimes
Il convient de rappeler qu’en application du principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime, il incombe au juge d'évaluer le préjudice à la date à laquelle il rend sa décision.
Le Docteur [I] a déposé son rapport, aux termes duquel il conclut à :
- DFTT imputable à l’infection impossible à fixer, le patient étant en réanimation,
- souffrances endurées : 5/7,
- Préjudice esthétique : 5/7,
- Pour la famille, un préjudice d’accompagnement.
Le rapport d’expertise constitue une base valable d'évaluation du préjudice corporel subi à déterminer au vu des diverses pièces justificatives produites, de l'âge de la victime, de son activité, afin d'assurer sa réparation intégrale.
Au vu des éléments médicaux produits et du rapport d’expertise médicale du Docteur [I], il convient d’indemniser de la façon suivante les préjudices des requérants :
I/ Sur les préjudices extra-patrimoniaux
1/ Sur les souffrances endurées par Monsieur [L] [P], victime directe
Toutes les souffrances tant physiques que morales ainsi que les troubles associés subies par la victime pendant la maladie traumatique sont indemnisables.
Les requérants font valoir la dégradation importante de l’état de santé de Monsieur [P] depuis la survenue du syndrome infectieux et jusqu’à son décès soit pendant 23 jours. Ils sollicitent une indemnisation à hauteur de 17500 euros.
L’ONIAM soutient que seules les souffrances en lien avec l’infection doivent être retenues. Il sollicite d’indemniser les requérants à hauteur de 11502 euros.
L'expert a retenu sur une échelle de 1 à 7 un degré de souffrances endurées 5, c’est-à-dire assez important.
L’expertise retient que la pneumopathie infectieuse a nécessité « une escalade thérapeutique » : antibiotiques, curarisation, manœuvres de positionnement pour recrutement et drainage, ré-intubations …L’infection pulmonaire a entraîné un choc septique, un choc cardio-circulatoire puis une défaillance multiviscérale et in fine le décès de Monsieur [P].La multiplicité des soins pratiqués et les multiples complications subies par Monsieur [P], sur une période de 24 jours, a généré pour cette victime des souffrances physiques et psychologiques qui justifient une indemnisation de 17500 euros.
2/ Sur le préjudice esthétique temporaire de Monsieur [L] [P], victime directe
L’altération de l’apparence physique, même temporaire, de la victime pendant la maladie traumatique est indemnisable.
Les demandeurs font valoir que, quand bien même Monsieur [P] était hospitalisé, il a nécessairement subi un préjudice esthétique temporaire dans la mesure où il a dû se présenter aux yeux de ses proches avec une altération très importante de son apparence. Ils sollicitent la somme de 3500 euros en réparation de ce préjudice.
L’ONIAM soutient que ce préjudice ne saurait être que temporaire ; que par ailleurs, ce préjudice n’est aucunement détaillé par l’expert ; que ce préjudice est manifestement en lien avec les soins prodigués pour le traitement des lésions initiales et notamment le placement en réanimation, l’intubation, l’alitement. En conséquence, l’ONIAM sollicite le rejet de cette demande et subsidiairement l’allocation d’une indemnité limitée à la somme de 1500 euros.
L'expert retient un préjudice esthétique de 5/7 pendant.
Contrairement à ce que soutient l’ONIAM, ce préjudice n’est pas uniquement en lien avec les lésions initiales mais l’est également avec les soins pratiqués suite à l’infection pulmonaire nosocomiale, comme développé précédemment.
Au regard de ces éléments, les requérants seront indemnisés à hauteur de 2000 euros en réparation de ce préjudice.
3/ Sur le préjudice d’angoisse de mort imminente éprouvé par Monsieur [L] [P], victime directe
Ce préjudice correspond à la souffrance extrême subie par la victime entre l’accident et son décès liée à la conscience de la gravité de son état et du caractère inéluctable de son décès, ainsi que des souffrances morales et psychologiques caractérisées par la perte d'espérance de vie ou l' angoisse de mort. Le préjudice d'angoisse de mort imminente ne peut exister que si la victime est consciente de son état.
Les requérants soutiennent qu’il résulte de l’expertise que Monsieur [P] qui n'est pas subitement décédé a également subi un préjudice né de la douleur morale causée par la conscience de sa mort imminente, distincte des souffrances endurées précitées. Ils sollicitent la somme de 28000 euros en réparation de ce préjudice.
L’ONIAM soutient que ce préjudice n’est pas démontré ; qu’aucun élément versé aux débats et notamment dans le rapport ne vient démontrer son existence ; que celui-ci n’était pas même allégué par les demandeurs dans le cadre de l’expertise. L’office sollicite de débouter les consorts [P] de cette demande.
En l’espèce, il ressort de l’expertise qu’au moment de la survenue de la pneumopathie infectieuse nosocomiale, Monsieur [P] était dans le service de réanimation chirurgicale de l’hôpital [24]. Au regard de ces éléments, il n’est pas établi par les demandeurs que Monsieur [P] était conscient de son état et de la mort imminente.
Par conséquent, cette demande sera rejetée.
4/ Sur le préjudice d’affection des victimes indirectes
Le préjudice d’affection est le préjudice moral éprouvé par les proches à la suite du décès de la victime directe. Le préjudice est d’autant plus important qu’il existait une communauté de vie avec la victime.
Il est sollicité une indemnisation à hauteur de 60000 euros pour Madame [R] [O] veuve [P], de 30000 euros chacun pour Monsieur [M] [P], Monsieur [J] [P] et Madame [K] [P], de 20000 euros chacun pour Monsieur [S] [P] et Madame [G] [P] et de 10000 euros chacun pour [A] [P] et [N] [P].
L’ONIAM relève qu’il n’est pas justifié de la présence au domicile de [M] et [J] [P] et propose une indemnisation : de 15000 euros pour Madame [O] veuve [P], de 4000 euros pour chacun des enfants hors foyer ([M], [J], [S] et [G] [P]), de 12000 euros pour Madame [K] [P] et de 2000 euros pour chacun des petits-enfants.
Il ressort des éléments du dossier qu’au jour du décès de Monsieur [L] [P], à l’age de 61 ans, Monsieur [P] et Madame [P] étaient mariés depuis 33 ans.
Leurs enfants étaient tous majeurs, [M] [P] (31 ans), [J] [P] (30 ans), [S] [P] (27 ans), [G] [P] (23 ans) et [K] [P] (18 ans). L’ONIAM ne conteste pas la présence au domicile familial d’[K] [P] mais conteste celle des autres enfants majeurs [M] [P] et [J] [P]. Faute pour ces derniers de démonter qu’ils résidaient au domicile de leurs parents au moment du décès de leur père, le tribunal ne retiendra pas la communauté de vie.
Au jour du décès de la victime, un petit enfant, [A] [P] était âgée de 11 mois. Un deuxième petit-enfant, [N] [P], est né le [Date naissance 11] 2010 soit après le décès de Monsieur [P]. Ainsi, les relations de ces enfants avec leur grand-père ont duré très peu dans le temps (11 mois au plus) pour [A] et ont été inexistantes pour [N].
Compte tenu de ces éléments, il convient d’allouer la somme de 30000 euros à Madame [R] [O] veuve [P], la somme de 20000 euros à Madame [K] [P], la somme de 12000 euros chacun à Monsieur [M] [P], Monsieur [J] [P], Monsieur [S] [P] et Madame [G] [P], la somme de 3500 euros pour [A] [P] et la somme de 3000 euros pour [N] [P].
5/ Sur le préjudice d’accompagnement des victimes indirectes
Le préjudice d'accompagnement indemnise le préjudice moral de la victime par ricochet dû au bouleversement dans ses conditions d'existence en raison de l'état de la victime directe jusqu'à son décès.
Les requérants sollicitent une indemnisation à hauteur de 400 euros chacun pour Madame [R] [O] veuve [P], Madame [K] [P], Monsieur [M] [P], Monsieur [J] [P], Monsieur [S] [P] et Madame [G] [P].
L’ONIAM propose une indemnisation n’excédant pas 500 euros pour chacun des demandeurs.
Compte tenu de ces éléments, il sera alloué la somme de 400 euros à chacun des demandeurs au titre du préjudice d’accompagnement.
6/ Sur le préjudice d’inquiétude et d’attente des victimes indirectes
Ce préjudice répare l'inquiétude éprouvée par les proches d'une personne qui apprennent que celle-ci se trouve ou s'est trouvée exposée, à l'occasion d'un événement, individuel ou collectif, à un péril de nature à porter atteinte à son intégrité corporelle. Il se réalise ainsi entre la découverte de l'événement par les proches et leur connaissance de son issue pour la personne exposée au péril.
Les requérants sollicitent les sommes de 10000 euros pour Madame [R] [O] veuve [P], la somme de 5000 euros chacun pour les enfants et la somme de 2000 euros chacun pour les petits-enfants.
L’ONIAM soutient que le préjudice d’attente et d’inquiétude invoqué par les requérants se confond avec le préjudice d’accompagnement et sollicite le rejet de cette demande.
Toutefois, contrairement à ce que soutient l’ONIAM, l'autonomie de ce préjudice est reconnue, en ce qu'il naît de la situation d'incertitude qui précède la mort (ou la survie) d'un proche. Ce préjudice est distinct du préjudice d'affection qui répond aux conséquences notamment affectives de la perte de l'être cher, et au préjudice d'accompagnement qui répond davantage à des considérations matérielles.
En l’espèce, l’expertise démontre un temps long durant lequel l’état de santé de Monsieur [P] s’est dégradé à compter de la survenue du syndrome infectieux.
Le préjudice d’attente et d’inquiétude de l’épouse et des enfants majeurs de la victime est justifié.
Néanmoins, s’agissant des deux petits enfants dont l’une, [A], n’était âgée que de 11 mois et l’autre, [N] n’était pas né, ce préjudice ne sera pas retenu.Par conséquent, il sera alloué la somme de 1500 euros à l’épouse et aux enfants majeurs en réparation de ce préjudice.
II/ Sur les préjudices patrimoniaux
1/ Sur les frais d’obsèques
Le décès de la victime peut entraîner, pour ses proches, des dépenses constitutives d’un préjudice indemnisable tel que les frais d’obsèques et de sépulture engagés par lesdits proches.
L’évaluation de ce préjudice est purement objective, sur facture.
Les requérants sollicitent la somme de 2300 euros.
L’ONIAM soutient que la créance des tiers payeurs est à ce jour inconnue de sorte qu’en l’absence de connaissance des sommes éventuellement perçues au titre des frais d’obsèques, il ne pourra qu’être sursis sur ce poste.
En l’espèce, Madame [P] transmet une facture d’obsèques à son nom d’un montant de 2300 euros datée du 10 mars 2009 et relative aux obsèques de son époux Monsieur [L] [P].
Madame [P] démontre suffisamment avoir payé cette somme, étant précisé que l’aide reçue par Madame [P] de la caisse d’allocations familiales consistant en une aide en cas de décès du soutien de famille, n’a pas été attribuée spécifiquement aux fins de règlement des frais d’obsèques.Compte tenu des éléments justificatifs produits, les demandeurs seront indemnisés à hauteur de 2300 euros pour ce chef de préjudice.
2/ Sur le préjudice économique des victimes indirectes
Le préjudice patrimonial des proches de la victime est notamment constitué par les pertes de revenus de la victime directe. Le décès d’une victime active engendre pour le conjoint survivant et les enfants un préjudice économique dont l’évaluation doit se faire in concreto.
Les demandeurs sollicitent les sommes de 476228,18 euros au bénéfice de Madame [O] veuve [P] et de 23255,60 euros au bénéfice de Madame [K] [P].
L’ONIAM fait valoir l’absence de perte de revenu et sollicite le rejet de cette demande.
Il convient de rechercher le revenu annuel global net imposable du ménage avant le décès survenu le [Date décès 8] 2009.
En l’espèce, si l’avis d’impôt 2009 sur les revenus 2008 fait apparaître un revenu annuel de 12899 euros pour Monsieur [L] [P], il est toutefois transmis :
- la déclaration fiscale de la Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse (CNAV) mentionnant une somme de 6801 euros versée à Monsieur [L] [P] au titre de la retraite du régime général en 2008,
- l’attestation du Régime Social des Indépendants (RSI) mentionnant une somme de 15660,50 euros versée à Monsieur [L] [P] au titre de sa retraite personnelle en 2008,
- l’attestation fiscale de l’institution de retraite complémentaire UGRR-ISICA mentionnant une somme de 848 euros au titre du premier trimestre 2009 versée à Monsieur [L] [P] au titre de sa retraite personnelle, soit 3392 euros par an,
Le tribunal retient, au vu de ces justificatifs, un revenu pour Monsieur [L] [P] de 25853,50 euros (6801+15660,50+3392=25853,50).
L’avis d’impôt 2009 sur les revenus 2008 fait apparaître un revenu annuel de 3589 euros pour Madame [R] [P].
Le tribunal retient un revenu annuel global net du ménage avant le décès de 29442,50 euros.
Il convient ensuite de déduire de ce revenu global la part de dépenses personnelles de la victime décédée.
En l’espèce, s’agissant d’un couple avec un enfant à charge, le tribunal retient des dépenses personnelles de la victime décédée de 22% soit la somme de 6477,35 euros (29442,50x22%= 6477,35 euros).
Il convient également de déduire du montant obtenu les revenus du conjoint survivant, revenus existant avant le décès et subsistant après le décès mais aussi les revenus consécutifs au décès.
En l’espèce, le tribunal relève un manque de transparence dès lors que Madame [P] ne transmet pas l’intégralité des avis d’impôt du foyer postérieurs au décès de son époux.
Elle transmet:
- les notifications des différents organismes de retraite (RSI, ARRCO et CNAV) mentionnant une pension de réversion de 455,05 euros net par mois versée par la CNAV, une pension de réversion de 404,37 euros net par trimestre versée par l’ARRCO (organisme de retraite complémentaire), une pension de réversion annuelle brute de 1256,12 euros versée par le RSI, soit un montant de 8334,20 euros par an.
- un bulletin de salaire d’octobre 2017 mentionnant un salaire mensuel net de 777,01 euros soit environ 9324,12 euros par ans.
Au vu de ces éléments parcellaires, le tribunal retient un revenu net annuel moyen de Madame [R] [P] de 17658,32 euros (8334, 20 + 9324,12 = 17658,32).
Il convient alors de calculer la perte annuelle du foyer qui se chiffre ici à la somme de 5306,83 euros (29442,50 – 6477,35 – 17758,32 = 5306,83).
Il convient ensuite de capitaliser la perte patrimoniale du foyer en multipliant la perte annuelle du foyer par le prix de l’euro de rente viagère, en prenant en compte l’âge et le sexe de celui des deux époux qui serait décédé en premier, soit en l’espèce Monsieur [P] puisque la différence d’âge entre les deux conjoints est de dix ans et que l’époux est le plus âgé et à une espérance de vie moindre.
Le barème de capitalisation retenu sera celui publié par la Gazette du Palais du 31 octobre 2022 avec un taux de 0%, ce taux étant plus approprié au regard des données économiques et monétaires actuelles (inflation forte en 2022 et 2023 et une croissance entre 1 et 2 % sur la période), soit pour un homme agé de 61 ans au jour du décès : 21.985.
Soit en l’espèce un préjudice économique global de la famille de 116670,65 euros (5306,83x21.985 = 116670,65).
Il convient ensuite de calculer le préjudice économique de l’enfant au regard de sa part de consommation dans la famille.
En l’espèce, en présence d’un conjoint survivant avec un enfant à charge, on peut proposer une répartition de 30% pour l’enfant et de 70% pour le conjoint survivant.
Le préjudice annuel de l’enfant est donc de : 5306,83X 30% = 1592,04 euros.
Le préjudice économique de cet enfant ne perdure que jusqu’à l’âge auquel il est devenu autonome, en l’espèce 23 ans selon les déclarations des requérants, il y a donc lieu de retenir que cet enfant est devenue autonome à 23 ans.
Il convient alors de capitaliser le préjudice annuel cet enfant en fonction du prix de l’euro de rente temporaire jusqu’à 23 ans soit, pour [K] [P] agée de 18 ans au jour du décès, le prix de l’euro de rente temporaire d’une fille de 18 ans jusqu’à 23 ans est de 6,995 (cf. table de capitalisation 2022 au taux de 0,00% : ligne « 18 ans » et colonne « 25 ans »), soit un préjudice économique de : 1592,04X 6,995 = 11136,38 euros.
Enfin, le préjudice économique de Madame [R] [P] correspond au préjudice économique global de la famille après déduction du préjudice économique de l’enfant soit : 116670,65– 11136,38= 105534,27 euros.
Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, il convient de réparer le préjudice économique de Madame [K] [P] par l’allocation de la somme de 11136,38 euros et celui de Madame [R] [P] par l’allocation de la somme de 105534,27 euros.
Sur les mesures accessoires
L’article 700 du code de procédure civile dispose que : « Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens et le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991. Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent. La somme allouée au titre du 2° ne peut être inférieure à la part contributive de l'Etat majorée de 50 % ».
En l’espèce, l’ONIAM succombant sera condamné à payer aux demandeurs la somme de 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
L'article 696 du code de procédure civile dispose que « La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. Les conditions dans lesquelles il peut être mis à la charge d'une partie qui bénéficie de l'aide juridictionnelle tout ou partie des dépens de l'instance sont fixées par les dispositions de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et du décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ».
En l’espèce, les dépens, en ce compris les frais d’expertise, sont mis à la charge de l’ONIAM qui succombe à l’instance.
Il convient de rappeler que la décision est de droit exécutoire à titre provisoire en application de l’article 514 du code de procédure civile.
Le présent jugement sera déclaré commun à la Sécurité Sociale des indépendants (URSSAF).
PAR CES MOTIFS
Karima BRAHIMI, Vice-présidente, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort, susceptible d'appel :
DIT que Monsieur [L] [P] a été victime d'une infection nosocomiale lors de sa prise en charge à l'hôpital [24] à [Localité 23] entre le 25 janvier 2009 et le [Date décès 8] 2009,
CONDAMNE l’ONIAM à payer à Madame [R] [O] veuve [P], Monsieur [M] [P], Monsieur [J] [P], Monsieur [S] [P], Madame [G] [Z] [P] et Madame [K] [P], victimes indirectes, les sommes dues au titre de l’indemnisation des divers préjudices subis et en lien avec le décès de Monsieur [L] [P], victime directe, survenu le [Date décès 8] 2009,
ALLOUE à Madame [R] [O] veuve [P], Monsieur [M] [P], Monsieur [J] [P], Monsieur [S] [P], Madame [G] [Z] [P] et Madame [K] [P], les sommes suivantes :
- 17500 euros en réparation du préjudice subi par Monsieur [L] [P] au titre des souffrances endurées,
- 2000 euros en réparation du préjudice esthétique subi par Monsieur [L] [P],
- 30000 euros en réparation du préjudice d’affection de Madame [R] [O] veuve [P],
- 12000 euros en réparation du préjudice d’affection de Monsieur [M] [P],
- 12000 euros en réparation du préjudice d’affection de Monsieur [J] [P],
- 12000 euros en réparation du préjudice d’affection de Monsieur [S] [P],
- 12000 euros en réparation du préjudice d’affection de Madame [G] [Z] [P],
- 20000 euros en réparation du préjudice d’affection de Madame [K] [P],
- 3500 euros en réparation du préjudice d’affection de l’enfant [A] [P],
- 3000 euros en réparation du préjudice d’affection de l’enfant [N] [P],
- 400 euros en réparation du préjudice d’accompagnement de Madame [R] [O] veuve [P],
- 400 euros en réparation du préjudice d’accompagnement de Monsieur [M] [P],
- 400 euros en réparation du préjudice d’accompagnement de Monsieur [J] [P],
- 400 euros en réparation du préjudice d’accompagnement de Monsieur [S] [P],
- 400 euros en réparation du préjudice d’accompagnement de Madame [G] [Z] [P],
- 400 euros en réparation du préjudice d’accompagnement de Madame [K] [P],
- 1500 euros en réparation du préjudice d’attente et d’inquiétude de Madame [R] [O] veuve [P],
- 1500 euros en réparation du préjudice d’attente et d’inquiétude de Monsieur [M] [P],
- 1500 euros en réparation du préjudice d’attente et d’inquiétude de Monsieur [J] [P],
- 1500 euros en réparation du préjudice d’attente et d’inquiétude de Monsieur [S] [P],
- 1500 euros en réparation du préjudice d’attente et d’inquiétude de Madame [G] [Z] [P],
- 1500 euros en réparation du préjudice d’attente et d’inquiétude de Madame [K] [P],
- 2300 euros au titre des frais d’obsèques,
- 105534,27 euros en réparation du préjudice économique de Madame [R] [O] veuve [P],
- 11136,38 euros en réparation du préjudice économique de Madame [K] [P],
DÉBOUTE les requérants de leur demande au titre du préjudice d’angoisse de mort imminente,
DÉBOUTE les requérants de leur demande au titre du préjudice d’attente et d’accompagnement au profit des enfants [A] [P] et [N] [P],
DÉCLARE le présent jugement commun à la Sécurité Sociale des indépendants (URSSAF)
CONDAMNE l’ONIAM à payer aux requérants la somme de 3000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
REJETTE toute autre demande,
RAPPELLE l’exécution provisoire de plein droit de la présente décision,
CONDAMNE l’ONIAM aux dépens, comprenant les frais d’expertise, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La minute a été signée par Madame Karima BRAHIMI, Vice-présidente et Monsieur Maxime-Aurélien JOURDE, greffier.
Fait à Bobigny le 24 juillet 2024.
Le greffier La Vice-présidente