TRIBUNAL JUDICIAIRE
de BOBIGNY
JUGEMENT CONTENTIEUX DU 17 JUILLET 2024
Chambre 21
AFFAIRE: N° RG 22/07619 - N° Portalis DB3S-W-B7G-WSJK
N° de MINUTE : 24/00372
Madame [F] [S] agissant tant en son nom personnel qu’es qualité d’ayant droit de sa mère Madame [W] [M] née le [Date naissance 5] 1960 à [Localité 24] (76) et décédée le [Date décès 19] 2016 à [Localité 25] (93)
née le [Date naissance 4] 1988 à [Localité 25]
[Adresse 15]
[Localité 17]
représentée par Me Isabelle GUILLOU, avocat postulant au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 143et par Me François JEGU de la SELARL JVL & Associés, avocat plaidant au barreau de ROUEN,
Madame [H] [M]
née en 1937 au MAROC
[Adresse 9]
[Localité 24]
représentée par Me Isabelle GUILLOU, avocat postulant au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 143et par Me François JEGU de la SELARL JVL & Associés, avocat plaidant au barreau de ROUEN,
Madame [T] [M]
née le [Date naissance 5] 1954 au MAROC
[Adresse 3]
[Localité 21]
représentée par Me Isabelle GUILLOU, avocat postulant au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 143et par Me François JEGU de la SELARL JVL & Associés, avocat plaidant au barreau de ROUEN,
Madame [G] [M]
née le [Date naissance 8] 1958 à [Localité 24]
[Adresse 12]
[Localité 18]
représentée par Me Isabelle GUILLOU, avocat postulant au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 143et par Me François JEGU de la SELARL JVL & Associés, avocat plaidant au barreau de ROUEN,
Monsieur [L] [M]
né le [Date naissance 6] 1962 à [Localité 27]
[Adresse 13]
[Localité 16]
représentée par Me Isabelle GUILLOU, avocat postulant au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 143et par Me François JEGU de la SELARL JVL & Associés, avocat plaidant au barreau de ROUEN,
Madame [K] [M]
née le [Date naissance 10] 1966 à [Localité 27]
[Adresse 2]
[Localité 23]
représentée par Me Isabelle GUILLOU, avocat postulant au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 143et par Me François JEGU de la SELARL JVL & Associés, avocat plaidant au barreau de ROUEN,
Madame [R] [M]
née le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 27]
[Adresse 14]
[Localité 24]
représentée par Me Isabelle GUILLOU, avocat postulant au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 143et par Me François JEGU de la SELARL JVL & Associés, avocat plaidant au barreau de ROUEN,
DEMANDEURS
C/
Association CAP’SANTE
[Adresse 11]
[Localité 20]
représentée par Me Angélique WENGER de l’AARPI WENGER-FRANÇAIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R123
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE BOBIGNY
[Adresse 7]
[Localité 22]
Non représentée
DEFENDEURS
_______________
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Monsieur Maximin SANSON, Vice-Président, statuant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l’article 812 du code de procédure civile, assisté aux débats de Madame Maryse BOYER, greffière.
DÉBATS
Audience publique du 15 Mai 2024.
JUGEMENT
Rendu publiquement, par mise au disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort, par Monsieur Maximin SANSON, Vice-Président, assisté de Monsieur Maxime-Aurelien JOURDE, greffier.
****************
EXPOSE DU LITIGE
Madame [W] [M] est née le [Date naissance 5] 1960. Elle a mené une carrière dans la restauration et a été maître d'hôtel jusqu'en 1993.
Madame [W] [M] a été placée en invalidité, aux dires de ses proches, pour dépression et maladie cancéreuse depuis l'an 2000.
Elle a été placée sous curatelle à compter de 2012.
L'analyse de ses antécédents médico-chirurgicaux permet de retenir :
- Des troubles somatiques :
* Cancer du sein gauche en 1998 traité par chirurgie, avec reconstruction prothétique en 2000,
* Nodules mammaires droits traités par chirurgie,
* Episodes d'anémie en 2003/2004, traités par transfusions sanguines,
* Capsulite rétractile de l'épaule gauche
* Douleurs diffuses depuis 2010 avec première prescription de TOPALGIC 50 ou TRAMADOL, plus ou moins contrôlées par posologies variables au cours des années,
* Episode de surinfection bronchique en Janvier 2000 avec hospitalisation à l'hôpital [28] de [Localité 26],
* Notion d'hysterectomie pour cancer de l'endomètre (ou fibrome, selon les comptes rendus disponibles),
- Des troubles psychiatriques :
* Syndrome dépressif depuis au moins 2008, marqué par plusieurs tentatives de suicide à compter de 1989, plusieurs hospitalisations en milieu psychiatrique (2008, 2012, 2013, 2014, 2015) avec hospitalisation à la demande d'un tiers en Juillet 2011,
* Troubles de la personnalité avec diagnostic de bipolarité en 2014, hypochondrie et incurie sociale,
* Troubles du sommeil,
* Une hospitalisation en Juin 2015 pour sevrage alcoolique.
Il a été également noté par l’expert désigné ultérieurement l’existence d’un tabagisme non sevré avec une consommation cumulée estimée à 30 Paquets Années, et une consommation alcoolique excessive.
Le suivi médical de Madame [W] [M] a pour sa part été assuré par le Docteur [D] d'avril 1989 au 09 septembre 2015, par le Dr [C] d'août 2012 au 7 décembre 2015, par l'Etablissement de santé de [29] de 2003 au 1er décembre 2016. L'association CAP’SANTE a pour sa part assuré la prise en charge infirmière du mois de juillet 2013 au décès.
Le traitement connu au moment des faits associait DEROXAT 20, ATHYMIL 10, RISPERDAL 2mg (selon ordonnance du Docteur [I] du CMP [29] du 01/02/2016).
Le Docteur [C] avait prescrit depuis le 7 décembre 2015 du TOPALGIC 100LP, du DAFALGAN 1000, de l’AMLODIPINE 5, du RANIPRIL 2,5 mg, du KARDEGIC 75, de l’ESOMEPRAZOLE 20mg, de l’acide folique 5mg et de la vitamine B12 1000.
Enfin, une ordonnance du 21 janvier 2016 du Docteur [Y] du CMP [29] a prescrit le passage d'une Infirmière diplômée d'état tous les jours pour assurer le traitement.
Le 08 février 2016, à 14h30, Madame [W] [M] a été retrouvée décédée à son domicile par les pompiers, les soeurs de Madame [W] [M] ayant alerté ces derniers en raison de l’absence de nouvelles de leur soeur depuis 5 jours.
Devant cette découverte, la Police de Montreuil a été saisie par le Procureur de la République du Tribunal de Bobigny d’une enquête en recherche des causes de la mort, étant précisé que la police n’a relevé aucune trace d’effraction dans l’appartement de Madame [W] [M] et que l'examen externe du corps de Madame [W] [M] n’a révélé aucune trace de lutte.
Toujours dans le cadre de cette enquête, ont été trouvés :
- un classeur de suivi médical dont la dernière mention relative au passage d’une infirmière date du 02 février 2016, avec l’indication suivante : “n'a dormi que deux heures cette nuit, semainier complété” ;
- une ordonnance prescrivant RISPERDAL 20, PROZAC 20, RIVOTRIL2,5 ;
- un pilulier hebdomadaire contenant des médicaments pour tous les jours de la semaine ;
- des boites vides de médicaments dans une poubelle : TRAMADOL 100, ESOMEPRAZOLE 20, RISPERDOME 2, FLUOXETINE 20, PAROXETINE 20, RAMIPRIL 2,5, AMLODIPINE 5 ;
- des boites pleines des mêmes médicaments ainsi qu'une boîte de DAFALGAN 500.
Une autopsie avec analyse toxicologique a été conduite le 10 février 2016 à l'institut médico-légal de [Localité 26], dont la conclusion de l'autopsie “a permis d'attribuer le décès aux conséquences d'une détresse respiratoire aigüe marquée par une cyanose corporelle diffuse. Aucune lésion traumatique n'a été mise en évidence. Ce décès est donc de cause toxique en première hypothèse et nécessitera une confirmation par l'analyse des prélèvements effectués”.
L'analyse toxicologique a permis de doser dans le sang cardiaque:
- Alcool éthylique : recherche négative ;
- carboxyhémoglobine : recherche négative ;
- cyanures : recherche négative ;
- lithium : recherche négative ;
- tramadol : 3,12µg/ml (concentration thérapeutique : 0,10 - 0,80 // Concentration toxique : 1 - 2) ;
- paracétamol : 2,5 µg/ml (concentration thérapeutique ; 2,5 - 25) ;
- fluoxetine : 0,18 µg/ml (concentration thérapeutique : 0,1 - 0,5) ;
- pas d’autre substance médicamenteuse ou stupéfiante identifiable en chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse, en chromatographie liquide ;
- absence de substances volatiles identifiables par CPG - head space à détection par ionisation de flamme ;
- conclusion : “la forte concentration en tramadol dans le sang peut être à l’origine d’une intoxication potentiellement mortelle”.
Le 3 septembre 2019, les proches de Madame [W] [M] ont saisi le tribunal administratif de MONTREUIL aux fins d’ordonner une expertise médicale. Par ordonnance en date du 13 mai 2020, le Docteur [P] a été désigné en qualité d’expert et il a remis un pré-rapport le 10 novembre 2020 avant de remettre son rapport définitif le 7 janvier 2021.
Par exploit en date du 12 juillet 2022, Madame [S] née [M] [F], agissant tant en son nom personnel qu’ès qualité d’ayant-droit de sa mère Madame [W] [M], Madame [H] [M], Madame [T] [M], Madame [G] [M], Madame [L] [M], Madame [K] [M] et Madame [R] [M] ont fait assigner l’Association CAP’SANTE et la CPAM de Bobigny aux fins d’indemnisation en raison des fautes commises par l’Association CAP’SANTE.
L’Association CAP’SANTE a constitué avocat et a répliqué, tandis que le CPAM de Bobigny n’a pas constitué avocat.
Dans le dernier état de leurs demandes, les Consorts [M] sollicitent du tribunal de :
- juger que les soins prodigués par l’Association CAP’SANTE n’ont pas été conformes aux règles de l’art et dire que sa responsabilité est engagée ;
- en conséquence, condamner l’Association CAP’SANTE à payer à :
- Madame [S] née [M] [F] agissant ès qualité d’ayant-droit de sa mère Madame [W] [M], la somme de 40.000 € au titre du pretium doloris, celle de 150 € au titre du DFT et celle de 5.864,02 € au titre des frais d’obsèques ;
- Madame [S] née [M] [F] agissant en son nom personnel la somme de 30.000 € au titre de son préjudice moral et de 20.000 € au titre de son préjudice d’accompagnement ;
- Madame [G] [M] la somme de 222,13 € au titre des frais divers, de 20.000 € au titre de son préjudice moral et de 30.000 € au titre de son préjudice d’accompagnement ;
- Madame [R] [M] la somme de 20.000 € au titre de son préjudice moral et la somme de 30.000 € au titre de son préjudice d’accompagnement ;
- Madame [H] [M], la somme de 25.000 € au titre de son préjudice moral ;
- Madame [K] [M], la somme de 10.000 € au titre de son préjudice moral ;
- Madame [L] [M], la somme de 10.000 € au titre de son préjudice moral ;
- dire que l’ensemble des condamnations sera affublé d’un pourcentage de perte de chance qui ne saurait être inférieur à 80 % ;
- condamner l’Association CAP’SANTE à leur payer la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du CPC, outre les dépens dont distraction au profit de Maître GUILLOU ;
- dire n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire.
Au soutien de leurs prétentions, les Consorts [M] exposent que les devoirs de l’Association CAP’SANTE consistaient en un passage quotidien (sauf samedi, dimanche et jours fériés), en des soins d’hygiène et en des prises des constantes avec constitution d’un pilulier. Les demandeurs font valoir que la forte concentration de TRAMADOL dans le sang est à l’origine d’une intoxication potentiellement mortelle et qu’il s’agit de la seule piste d’orientation diagnostic dégagée par l’expert.
Les Consorts [M] poursuivent en faisant observer que la prise de TRAMADOL n’était pas à visée autolytique rapide, immédiate et soudaine, mais qu’il s’agissait d’une prise dans un temps plus long, destinée en réalité à soulager une patiente qui ne comprenait pas pourquoi ce médicament ne parvenait pas à calmer ses douleurs comme à son habitude, Madame [W] [M] ne sachant pas que le DEROXAT qu’elle prenait également depuis peu atténuait l’effet du TRAMADOL, et ce alors que cette difficulté d’interaction entre les deux molécules était connue des infirmiers de CAP’SANTE.
Les Consorts [M] reprochent également à l’Association CAP’SANTE la carence de surveillance des prescriptions délivrées à Madame [W] [M], sa négligence dans les passages infirmiers et sa carence dans les archivages des feuilles de tournées et de transmissions.
Les Consorts [M] en déduisent que l’Association CAP’SANTE est à l’origine d’une perte de chance de survie de Madame [W] [M] qu’ils évaluent au minimum à 80 %. Enfin, les Consorts [M] contestent tout manque d’implication de leur part auprès de Madame [W] [M].
Dans le dernier état de ses demandes, l’Association CAP’SANTE sollicite du tribunal de :
- juger que sa responsabilité ne peut être engagée, en l’absence de tout lien causal direct et certain entre sa prise en charge et le décès de Madame [M] ;
- débouter les Consorts [M] de leurs demandes ;
- condamner les Consorts [M] à lui verser la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du CPC, outre les dépens dont distraction au profit de Maître WENGER.
Au soutien de ses prétentions, l’Association CAP’SANTE expose que la responsabilité des professionnels de santé est une responsabilité pour faute et que c’est à celui qui recherche cette responsabilité qu’il appartient de démontrer l’existence de fautes et d’un lien causal avec le préjudice allégué. La concluante fait valoir que, si l’expert a trouvé des manquements qui lui étaient imputables, il n’a pas établi de lien entre ces manquements et le décès de Madame [W] [M]. En effet, l’Association CAP’SANTE rappelle que les fautes dégagées par l’expert portent sur des carences en matière de traçabilité des passages infirmiers la semaine ayant précédé le décès, le non-respect de la procédure de signalement en cas de non-réponse du patient le 5 février 2016 et une surveillance et des soins non-conformes, sans cependant que ces manquements soient liés au plan causal avec le surdosage médicamenteux de la patiente. En effet, la date exacte du décès de Madame [W] [M] est inconnue et a parfaitement pu intervenir durant le week-end, soit à un moment où aucune visite de la patiente n’était prévue. De plus, en l’absence d’étude du cerveau de la défunte, l’expert n’a pas pu exclure une cause neurologique à type accident vasculaire cérébral. Enfin, l’expert a noté que l’hypothèse la plus probable du surdosage de TRAMADOL était une origine volontaire, Madame [W] [M] ayant déjà tenté de se suicider à plusieurs reprises par le passé.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 9 janvier 2024 et les plaidoiries ont été fixées à la date du 15 mai 2024.
Le 15 mai 2024, l’affaire a été plaidée et, à l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré au 17 juillet 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la question de la responsabilité
L'article L1142-1 du code de la santé publique énonce que :
I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute.
Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère.
II. - Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire.
Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret.
L'article L1142-1-1 du même code énonce que, sans préjudice des dispositions du septième alinéa de l'article L. 1142-17, ouvrent droit à réparation au titre de la solidarité nationale :
1° Les dommages résultant d'infections nosocomiales dans les établissements, services ou organismes mentionnés au premier alinéa du I de l'article L. 1142-1 correspondant à un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à 25 % déterminé par référence au barème mentionné au II du même article, ainsi que les décès provoqués par ces infections nosocomiales ;
2° Les dommages résultant de l'intervention, en cas de circonstances exceptionnelles, d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme en dehors du champ de son activité de prévention, de diagnostic ou de soins.
L'article D1142-1 du même code énonce que le pourcentage mentionné au dernier alinéa de l'article L. 1142-1 est fixé à 24 %.
Présente également le caractère de gravité mentionné au II de l'article L. 1142-1 un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ayant entraîné, pendant une durée au moins égale à six mois consécutifs ou à six mois non consécutifs sur une période de douze mois, un arrêt temporaire des activités professionnelles ou des gênes temporaires constitutives d'un déficit fonctionnel temporaire supérieur ou égal à un taux de 50 %.
A titre exceptionnel, le caractère de gravité peut être reconnu :
1° Lorsque la victime est déclarée définitivement inapte à exercer l'activité professionnelle qu'elle exerçait avant la survenue de l'accident médical, de l'affection iatrogène ou de l'infection nosocomiale ;
2° Ou lorsque l'accident médical, l'affection iatrogène ou l'infection nosocomiale occasionne des troubles particulièrement graves, y compris d'ordre économique, dans ses conditions d'existence.
Dans le cas d’espèce, et bien que Madame [W] [M] ait fait l’objet d’une autopsie et d’une expertise médicale post mortem, seule la cause immédiate du décès est connue, à savoir une “détresse respiratoire aigüe marquée par une cyanose corporelle diffuse”. Quant à la véritable cause, le médecin légiste n’a pu qu’émettre une hypothèse liée à l’absence de lésion traumatique visible ainsi qu’à l’absence de cause cardiaque, vasculaire ou pneumologique, cette hypothèse étant une cause “toxique” qui “nécessitera une confirmation par l’analyse des prélèvements effectués”. Or, si l’analyse de ces prélèvements a bien manifesté la présence dans le sang de Madame [W] [M] d’une dose toxique de TRAMADOL, l’expert médical désigné a posteriori a conclu au fait qu’il ne lui était pas permis d’éliminer une cause neurologique, en l’absence d’examen du cerveau de Madame [W] [M]. En conséquence, et même si l’expert médical a lui aussi retenu le caractère probablement létal du surdosage de TRAMADOL, il ne s’agit selon lui que d’une probabilité élevée, en lien avec le fait que le taux sanguin présenté par Madame [W] [M] lorsque son corps a été retrouvé correspondait à 10 fois la dose thérapeutique habituelle et à près de 4 fois la valeur haute de la fourchette thérapeutique.
Le tribunal retient donc que la cause du décès peut être ou bien un surdosage de TRAMADOL ou bien une cause neurologique de type AVC, bien que la première hypothèse soit la plus probable, au vu de la surdose massive de TRAMADOL retrouvée dans le sang de Madame [W] [M].
En ce qui concerne à présent l’origine de cette surdose, l’expert a là encore présenté une double hypothèse : soit une prise en excès de TRAMADOL par Madame [W] [M] avec la volonté délibérée de se suicider, soit un problème d’interaction médicamenteuse en raison de l’association du TRAMADOL avec du DEROXAT, ce dernier pouvant atténuer l’effet du TRAMADOL et inciter une personne en souffrance à augmenter la dose de TRAMADOL pour retrouver l’effet antalgique de cette substance. Cependant, l’expert a conclu au fait que cette seconde hypothèse lui semblait très peu probable car le taux de TRAMADOL retrouvé dans le sang de Madame [W] [M] présentait un tel excès qu’il ne pouvait pas selon lui s’agir d’une démarche involontaire : en effet, pour aboutir au taux qui a été retrouvé, il aurait fallu que Madame [W] [M] multiplie par dix la dose prescrite de TRAMADOL, ingérant ainsi 20 comprimés, soit les deux tiers d’une boîte. Or, une telle “surconsommation n’aurait pu qu’être remarquée et aurait trouvé sa limite dans la nécessité de trouver en pharmacie ce médicament à des quantités sans rapport avec la prescription médicale”. Par conséquent, l’hypothèse privilégiée par l’expert est celle d’un suicide, le passé de Madame [W] [M] favorisant cette hypothèse puisqu’elle avait déjà tenté à plusieurs reprises de se suicider. Il n’es reste pas moins que l’hypothèse d’un surdosage à des fins antalgiques, en lien avec l’interaction thérapeutique entre le TRAMADOL et le DEROXAT, n’est pas formellement exclue par l’expert. Le tribunal fait siennes ces conclusions.
Le dommage étant ainsi connu - avec les limitations qui viennent d’être rappelées par le tribunal - il convient à présent d’étudier les fautes pouvant éventuellement être reprochées à l’Association CAP’SANTE. En effet, l’expert reproche trois fautes à cette dernière : d’une part, un contrôle infirmier du suivi du traitement qui n’est pas démontré et qui ne permet pas de s’assurer que les prises médicamenteuses étaient vérifiées, d’autre part, une carence dans l’archivage des feuilles de tournées et des fiches de transmission ciblées remplies par les personnels infirmiers lors de leurs visites à domicile qui ne permet pas de s’assurer que celles-ci ont été assurées avec régularité et enfin l’absence de suivi d’une procédure de signalement en cas de non-réponse de la patiente, ce qui a ôté toute chance à Madame [W] [M] d’être secourue, si du moins elle pouvait encore l’être.
Avant d’examiner le lien causal éventuel entre ces fautes et le dommage, le tribunal indique que l’expert a également cherché s’il existait d’autres responsabilités potentielles. Il reproche ainsi à l’établissement de santé [29] d’avoir prescrit du DEROXAT à Madame [W] [M], et ce alors que la prise de TRAMADOL par la patiente était connue et que l’association des deux molécules est déconseillée, cette interaction négative étant indiquée dans le VIDAL. En revanche, aucune autre faute n’a été retrouvée par l’expert dans le suivi de Madame [W] [M], que ce soit par l’établissement [29], par le Docteur [C], par le Docteur [D] ou encore par le laboratoire SANOFI, fabricant du générique du TRAMADOL qu’est le TOPALGIC.
S’agissant, donc, de cette question du lien causal, il convient de rechercher si les fautes identifiées par l’expert dans la conduite de l’Association CAP’SANTE - et non contestées d’ailleurs par celle-ci - peuvent avoir participé au résultat dommageable constitué par le décès de Madame [W] [M], étant rappelé que ce décès peut avoir trois causes, la cause la plus probable étant un suicide par surdose de TRAMADOL, tandis que les deux autres hypothèses beaucoup moins probables sont celle d’une surdose accidentelle en raison de l’interaction entre le TRAMADOL et le DEROXAT d’une part et celle d’un accident neurologique de type AVC d’autre part.
Sur ce, le tribunal juge que les liens éventuels entre les fautes décrites plus haut et les trois hypothèses de dommages sont de deux ordres : d’une part, une fréquence de visite inférieure à ce qui était prévu a pu diminuer les chances de survie de Madame [W] [M] face à une absorption médicamenteuse à des fins de suicide ou à un accident neurologique de type AVC ; d’autre part, un mauvais suivi de la prise de médicament par Madame [W] [M] a pu diminuer ses chances de survie en cas d’interaction négative entre le TRAMADOL et le DEROXAT, en n’empêchant pas Madame [W] [M] d’augmenter la dose de TRAMADOL pour en retrouver l’effet antalgique.
Quel que soit le cas de figure, il ne peut à l’évidence s’agir que d’une perte de chance. C’est d’ailleurs ainsi que les consorts formulent leurs demandes.
S’agissant donc de la question de la fréquence des visites, le contrat prévoyait une visite quotidienne, hors jour férié, samedi et dimanche. En ce qui concerne la semaine d’intérêt, les infirmiers de l’Association CAP’SANTE auraient donc dû visiter Madame [W] [M] chaque jour du 1er au 5 février pour ne revenir que le [Date décès 19], les 6 et 7 février 2016 étant des jours sans visite, s’agissant d’un samedi et d’un dimanche. Selon l’expertise, la feuille récapitulative des tournées démontre que Madame [W] [M] a été vue le 1er et le 3 février 2016. Pour les 2 et 4 février 2016, les infirmiers MM. [A] et [Z] seraient passés, mais l’Association CAP’SANTE n’a pas pu produire la feuille de tournée ou la fiche de transmissions. S’agissant enfin du vendredi 5 février 2016, l’infirmier Monsieur [X] indique être passé mais n’avoir pas pu voir Madame [W] [M] : personne n’aurait ainsi répondu lorsqu’il a sonné à la porte puis lorsqu’il a appelé sur le téléphone fixe et sur le portable de sa patiente. Face à cette absence de réaction, l’expert a noté que “selon le protocole de fonctionnement de CAP SANTE, toute absence devait être signalée à l’infirmière de coordination. Il ne semble pas que cette procédure a été appliquée”. Enfin, la fiche des transmissions ciblées du lundi [Date décès 19] 2016 indique : “pas de nouvelles de mme [M] depuis mercredi”, soit le 3 février 2016, le tribunal faisant observer que cette annotation est radicalement incompatible avec le fait que l’infirmier [Z] affirme avoir vu Madame [W] [M] le jeudi 4 février 2016 (bien que le tribunal rappelle que ce passage n’est qu’allégué par l’Association CAP’SANTE, faute pour celle-ci de produire la feuille des tournées).
Ces carences probatoires - nombreuses pour une période de temps aussi courte - et ces contradictions entre les documents disponibles et les déclarations de l’Association CAP’SANTE font dire à l’expert : “nous avons noté que le pilulier était décrit comme complet par la police. Nous pouvons estimer que le décès de Mme [M] pourrait être survenu à compter du 4/02/2016 après-midi si les passages infirmiers des 3 ou 4/02 ont été effectifs, ou les 3 ou 4/02 selon la réalité des passages pour lesquels nous n’avons pas de preuve formelle” (expertise, page 10).
Par conséquent, sur la période au cours de laquelle le décès de Madame [W] [M] a pu survenir, soit entre le 4 février (le tribunal ne retient pas le 3 février comme date possible de décès car la feuille de tournées est bien remplie pour cette date) et le week end du 6-7 février 2016, Madame [W] [M] aurait dû être vue le 4 et le 5 février. S’agissant du 4 février, l’Association CAP’SANTE échoue à démontrer qu’elle a vu Madame [W] [M]. S’agissant du 5 février, l’Association CAP’SANTE ne conteste pas ne pas avoir vu Madame [W] [M] mais déclare avoir trouvé porte close : or, la procédure en pareil cas n’a pas été suivie et ce alors que le respect de cette procédure aurait pu conduire à l’intervention des pompiers, ce qui aurait éventuellement pu permettre le secours de Madame [W] [M].
Il résulte de ce qui précède que l’Association CAP’SANTE a fait perdre une chance de survie à Madame [W] [M] dans la double hypothèse où celle-ci aurait absorbé volontairement un excès de TRAMADOL ou aurait été victime d’un AVC, ce qui correspond à deux des trois hypothèses esquissées par l’expert.
S’agissant à présent de la question du suivi des médicaments pris par Madame [W] [M], l’expert reproche à l’Association CAP’SANTE de n’avoir gardé aucune trace documentaire du contrôle infirmier du traitement médical suivi par Madame [W] [M] : si la directrice de l’Association CAP’SANTE a déclaré que les infirmiers envoyés à domicile avaient pour mission de vérifier les prises médicameteuses, le tribunal note que l’expert juge que “les explications fournies n’ont pas emporté notre conviction”. Or, le fait de ne pas parvenir à démontrer que ce contrôle infirmier du traitement médical a été assuré a fait perdre à Madame [W] [M] une chance de survivre à un surdosage de TRAMADOL, surdosage qu’elle aurait pratiqué afin retrouver le pouvoir antalgique du TRAMADOL, et ce alors que son interaction avec le DEROXAT l’aurait fait diminuer.
A présent que le tribunal a jugé qu’il existait des fautes imputables à l’Association CAP’SANTE et que ces fautes ont causé une perte de chance d’éviter le décès de Madame [W] [M], il reste à apprécier l’intensité de cette perte de chance. Or, le taux d’au moins 80 % sollicité en demande n’est pas compatible avec les constats qui viennent d’être faits par le tribunal. En effet, l’hypothèse la plus probable retenue par l’expert est celle d’un suicide de Madame [W] [M] et la perte de chance de survie doit être appréciée à cette aune d’une action volontaire de la victime. De plus, et même en se plaçant dans les sous-hypothèses moins probables d’un surdosage accidentel ou d’un AVC, la perte de chance ne peut qu’être assez limitée puisque le temps de survie d’une personne victime d’un AVC ou d’un surdosage massif de TRAMADOL n’aurait laissé que peu de chance à un passage, même quotidien, d’infirmier.
Au total, le tribunal juge que les fautes imputables à l’Association CAP’SANTE sont en relation avec une perte de chance de survie de Madame [W] [M] de 10 %.
Les postes de préjudice qui restent à calculer seront donc mis à la charge de l’Association CAP’SANTE, mais dans la limite de 10 % de leur valeur.
Sur les postes de préjudice
En concentrant sa défense sur la non-reconnaissance de sa responsabilité, l’Association CAP’SANTE a fait le choix de ne pas discuter de la valeur des postes de préjudice, même à titre subsidiaire. Le tribunal ne dispose donc que des évaluations de ces postes faites en demande.
Sur les préjudices de Madame [W] [M]
Sur la question du pretium doloris
Une somme de 40.000 € est sollicitée, pour ce poste évalué par les demandeurs à 6/7.
L’Association CAP’SANTE n’a pas formulé d’observation.
Sur ce, le tribunal observe que cette évaluation des souffrances endurées à 6/7 est une pure initiative des demandeurs, lesquels n’appuient par leur demande sur la moindre source médicale, qui viendrait accréditer le fait que le décès probablement causé par un excès d’opiacé constituerait une mort douloureuse. De plus, et toujours s’agissant de cette hypothèse la plus probable d’un suicide, le tribunal ne peut pas retenir le poste des souffrances endurées puisqu’il s’agit là d’un choix délibéré de la victime.
Le tribunal n’indemnise donc que la perte de chance de ne pas souffrir en lien avec les deux sous-hypothèses qui ne concernent pas le suicide, ce qui ne peut que conduire à réévaluer à la baisse la valeur de ce poste. Il en sera fait une juste appréciation en le fixant à la somme de 10.000 € (puisque les deux sous-hypothèses sont jugées faiblement probables) et l’application du coefficient de perte de chance ramène ce poste à la valeur de 1.000 €.
Sur la question du déficit fonctionnel temporaire (DFT)
Il est sollicité la somme de 30 € de déficit fonctionnel temporaire total entre le 3 février 2016 et le [Date décès 19] 2016.
L’Association CAP’SANTE ne formule pas d’observation.
Sur ce, le tribunal ne peut pas accorder le moindre jour de déficit fonctionnel temporaire, qu’il soit partiel ou total, puisque chacun est dans l’ignorance quant à savoir ce qui s’est passé durant la période de temps allant du 3 février 2016 au [Date décès 19] 2016. Tout au plus est-il permis de dire que, le 3 février 2016, Madame [W] [M] ne subissait aucun déficit fonctionnel temporaire et que, le [Date décès 19] 2016, son décès a été constaté. Dans cet intervalle, et au vu du taux de TRAMADOL dans le sang, il est très peu probable qu’il y ait eu une période notable de DFT. L’expert n’a d’ailleurs pas retenu ce poste de préjudice.
En conséquence, faute pour les demandeurs de démontrer la réalité de ce préjudice, leur demande est rejetée.
Sur les préjudices des consorts [M]
Sur la question des frais divers des proches
Les demandeurs sollicitent à ce titre le remboursement de factures payées en lieu et place de Madame [W] [M], empêchée par son décès, pour un total de 222,13 € correspondant à 26,26 € de gaz, 97,11 € de loyer EFFIDIS, et de 98,76 € de factures EDF.
L’Association CAP’SANTE ne formule pas d’observations.
Sur ce, le tribunal observe que les factures établies au nom de Madame [W] [M] sont bien produites aux débats.
Il convient donc de faire droit à la demande, mais dans la limite de 10 %, soit 22,21 €.
Sur la question des frais d’obsèques
Il est sollicité la somme de 5.864,02 € à ce titre.
Aucune observation n’est faite de la part de la défenderesse.
Sur ce, le tribunal observe que la facture correspondante est produite. Il convient de faire droit à la demande, mais dans la limite de 10 %, soit la somme de 586,40 €.
Sur les postes de préjudice de Madame [F] [S], fille de la défunte
Il est tout d’abord demandé 30.000 € au titre du préjudice moral lié à la perte prématurée de sa mère.
L’Association CAP’SANTE ne formule pas d’observation.
Sur ce, le tribunal observe que le référentiel des juridictions judiciaires portant le nom du Conseiller ‘[N]’ dans sa version 2023, que le tribunal applique sauf dans les cas où il mettrait en échec le principe de la réparation intégrale, indique une fourchette comprise entre 11.000 € et 15.000 € pour l’enfant majeur vivant hors du foyer du parent décédé. Dans le cas d’espèce, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en retenant une somme de 15.000 €, soit 1.500 € après application du taux de perte de chance.
Sur la question du préjudice d’accompagnement
La demanderesse sollicite à ce titre la somme de 20.000 €, l’expert ayant retenu ce poste de préjudice en l’évaluant à 6/7.
Si l’Association CAP’SANTE n’a pas formulé d’observation, le tribunal rappelle que ce préjudice suppose une communauté de vie effective, selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation. Dans le cas d’espèce, Madame [W] [M] vivait seule. De plus, ce préjudice indemnise l’accompagnement entre le moment de l’accident qui conduira au décès (ou de la maladie qui produira le même effet) et le décès. Ici, cette phase, dont la durée n’est d’ailleurs pas connue, n’a fait l’objet d’aucun accompagnement.
La demande sera donc rejetée.
Sur les postes de préjudice de Madame [G] [M] et de Madame [R] [M], soeurs de la défunte
Les deux soeurs de Madame [W] [M] se disant les plus proches réclament 20.000 € chacune pour leur préjudice d’affection, et 30.000 € chacune pour le préjudice d’accompagnement.
Sur ce, la même décision de rejet s’impose pour le préjudice d’accompagnement, tandis que le référentiel ‘[N]’ retient une fourchette entre 6.000 € et 9.000 € pour le préjudice d’affection. Il sera fait une appréciation exacte de ce dernier en l’évaluant à 9.000 € pour chacune de ces soeurs. L’Association CAP’SANTE devra donc les indemniser à hauteur de 10 %, soit 900 € par soeur.
Sur les postes de préjudice de la mère de la défunte et de ses autres frères et soeurs
En ce qui concerne leur préjudice moral, Madame [H] [M], mère de la défunte, sollicite la somme de 25.000 €, tandis que les soeurs et le frère autres que les deux se disant les plus proches de la victime, sollicitent la somme de 10.000 € par personne.
Sur ce, le référentiel ‘[N]’ attribue une fourchette comprise entre 20.000 € et 30.000 € pour le parent d’un enfant, et la même fourchette déjà évoquée comprise entre 6.000 € et 9.000 € pour les soeurs et le frère. Il sera fait une juste appréciation de ces préjudices en retenant la somme de 25.000 € pour la mère de Madame [W] [M], et une somme de 7.500 € par personne pour les soeurs et le frère, soit 2.500 € pour la mère et 750 € par personne après application du coefficient réducteur lié à la perte de chance.
Au total, les postes de préjudice des demandeurs se présentent donc comme suit :
Postes de préjudice
Madame [W] [M]
Consorts [M]
Mme [F] [S]
Madame [G] [M]
Madame [R] [M]
Mme [H] [M]
Mme [T] [M]
Mme [K] [M]
M [L] [M]
Souffrances endurées
1.000 €
DFT
Rejet
Frais divers
22,21 €
Frais d’obsèques
586,40 €
préjudice moral
1.500 €
900 €
900€
2.500 €
750 €
750 €
750 €
Préjudice d’accompagnement
Rejet
Total
1.000 €
586,40 €
1.500 €
922,21 €
900 €
2.500 €
750 €
750 €
750 €
En conséquence, il convient de condamner l’Association CAP’SANTE à payer les sommes suivantes :
- à Madame [S] née [M] [F], agissant tant en son nom personnel qu’ès qualité d’ayant-droit de sa mère Madame [W] [M], la somme de 3.086,40 € ;
- à Madame [G] [M], la somme de 922,21 € ;
- à Madame [R] [M], la somme de 900 € ;
- à Madame [H] [M], la somme de 2.500 € ;
- à Madame [T] [M], la somme de 750 € ;
- à Madame [K] [M], la somme de 750 € ;
- à Monsieur [L] [M], la somme de 750 €.
L’Association CAP’SANTE, partie succombante, sera condamnée à payer l’intégralité des dépens des demandeurs, dont distraction au profit de Maître GUILLOU.
L’Association CAP’SANTE sera également condamnée à payer aux demandeurs la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Enfin, il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire, eu égard à l’ancienneté des faits.
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, en premier ressort, par jugement réputé contradictoire, susceptible d’appel ;
JUGE l’Association CAP’SANTE responsable à hauteur de 10 % des préjudices subis par Madame [S] née [M] [F], agissant tant en son nom personnel qu’ès qualité d’ayant-droit de sa mère Madame [W] [M], Madame [H] [M], Madame [T] [M], Madame [G] [M], Madame [L] [M], Madame [K] [M] et par Madame [R] [M] ;
CONDAMNE l’Association CAP’SANTE à payer les sommes suivantes :
- à Madame [S] née [M] [F], agissant tant en son nom personnel qu’ès qualité d’ayant-droit de sa mère Madame [W] [M], la somme de 3.086,40 € ;
- à Madame [G] [M], la somme de 922,21 € ;
- à Madame [R] [M], la somme de 900 € ;
- à Madame [H] [M], la somme de 2.500 € ;
- à Madame [T] [M], la somme de 750 € ;
- à Madame [K] [M], la somme de 750 € ;
- à Monsieur [L] [M], la somme de 750 €.
CONDAMNE l’Association CAP’SANTE aux dépens, dont distraction au profit de Maître GUILLOU ;
CONDAMNE l’Association CAP’SANTE à payer aux demandeurs la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
DIT n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire, eu égard à l’ancienneté des faits.
La minute a été signée par Monsieur Maximin SANSON, Vice-président et Monsieur Maxime-Aurélien JOURDE, greffier.
LE GREFFIER LE PRESIDENT