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09/07/2024 | FRANCE | N°23/02226

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, Serv. contentieux social, 09 juillet 2024, 23/02226


Tribunal judiciaire de Bobigny
Service du contentieux social
Affaire : N° RG 23/02226 - N° Portalis DB3S-W-B7H-YTNP
Jugement du 09 JUILLET 2024

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BOBIGNY



JUGEMENT CONTENTIEUX DU 09 JUILLET 2024


Serv. contentieux social
Affaire : N° RG 23/02226 - N° Portalis DB3S-W-B7H-YTNP
N° de MINUTE : 24/01453

DEMANDEUR

Société [8]
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Me Zouhaire BOUAZIZ, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1407

DEFENDEUR

CPAM DE [Localité 12]
[Localité 4]r>représentée par Me Mylène BARRERE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D 2104

CPAM DU VAL D’OISE
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 7]
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Tribunal judiciaire de Bobigny
Service du contentieux social
Affaire : N° RG 23/02226 - N° Portalis DB3S-W-B7H-YTNP
Jugement du 09 JUILLET 2024

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BOBIGNY

JUGEMENT CONTENTIEUX DU 09 JUILLET 2024

Serv. contentieux social
Affaire : N° RG 23/02226 - N° Portalis DB3S-W-B7H-YTNP
N° de MINUTE : 24/01453

DEMANDEUR

Société [8]
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Me Zouhaire BOUAZIZ, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1407

DEFENDEUR

CPAM DE [Localité 12]
[Localité 4]
représentée par Me Mylène BARRERE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D 2104

CPAM DU VAL D’OISE
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 7]
représentée par Me Mylène BARRERE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D 2104

COMPOSITION DU TRIBUNAL

DÉBATS

Audience publique du 21 Mai 2024.

M. Cédric BRIEND, Président, assisté de Monsieur Denis TCHISSAMBOU, Greffier.

A défaut de conciliation à l’audience du 21 Mai 2024, l’affaire a été plaidée , le tribunal statuant à juge unique conformément à l’accord des parties présentes ou représentées.

:

JUGEMENT

Prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort, par Cédric BRIEND,Juge, assisté de Christelle AMICE, Greffier.

Transmis par RPVA à : Me Zouhaire BOUAZIZ, Me Mylène BARRERE

FAITS ET PROCEDURE

Mme [E] [M], salariée de la société [8], a déclaré avoir été victime d'un accident du travail le 27 août 2021.

La société [8] a établi une déclaration d'accident du travail le 31 août 2021 rédigée en ces termes :
“Activité de la victime lors de l’accident: La victime était à son poste de trieur
Nature de l’accident: En envoyant un carton sur le convoyeur ce dernier s’est mis en travers, la victime a voulu repositionner le carton et et ressentie une forte douleur dans le bas du dos à ce moment là. [...]
Siège des lésions: Lombaires côté droit
Nature des lésions: douleur au dos.”

Le certificat médical télétransmis le 27 août 2021 fait état des constatations suivantes: “D# Cruralgie” et prescrit un arrêt de travail jusqu’au 5 septembre 2021.

Par courrier du 20 septembre 2021, la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Val-d’Oise a notifié à la société [8] la prise en charge de cet accident au titre de la législation sur les risques professionnels.

Par courrier du 27 septembre 2022, la société [8] a saisi la commission médicale de recours amiable (CMRA) de la CPAM contestant la durée des arrêts de travail prescrits à Mme [M] imputée sur son compte employeur.

A défaut de réponse de la CMRA, par requête reçue le 5 décembre 2023 au greffe, la société [8] a saisi le service du contentieux social du tribunal judiciaire de Bobigny aux fins de contestation de la prise en charge de l’ensemble des arrêts de travail.

L'affaire a été appelée à l’audience du 13 juin 2023 et renvoyée à l’audience du 12 décembre 2023 date à laquelle les parties, présentes ou représentées, ont été entendues en leurs observations.

La société [8] représentée par son conseil, soutient sa requête et demande au tribunal :
- à titre principal, de lui déclarer inopposables l'ensemble des arrêts de travail indemnisés à Mme [M] ;
- à titre subsidiaire, lui déclarer inopposables les arrêts de travail prescrits à Mme [M] à compter du 8 septembre 2021 ainsi que les conséquences médicales et financières qui en découlent ;
- à titre infiniment subsidiaire, ordonner une expertise médicale pour établir si les arrêts de travail de Mme [M] ont pour origine exclusive l’accident déclaré le 8 septembre 2021.

Au soutien de ses demandes, elle fait valoir que le principe du contradictoire n’a pas été respecté et que la présomption d’imputabilité des arrêts de travail à l’accident du 8 septembre 2021 n’a pas vocation à s’appliquer en l’absence de transmission par la CPAM du certificat médical initial et des certificats médicaux de prolongation.

La CPAM représentée à l’audience de renvoi du 13 juin 2023 n’a pas comparu et ne s’est pas fait représenter.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, le tribunal, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions de celles-ci.

L’affaire a été mise en délibéré au 9 juillet 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’intervention volontaire de la CPAM du Val d’Oise et la mise hors de cause de la CPAM de [Localité 12]

En application des dispositions des articles 325 et suivants du code de procédure civile, une partie peut intervenir volontairement à la procédure pour élever une prétention.

En application des dispositions des articles 331 et suivants du même code, un tiers peut être mis en cause dans une procédure. A l’inverse, une partie peut solliciter sa mise hors de cause.

Les CPAM de [Localité 12] a sollicité sa mise hors de cause dans l’affaire en indiquant que la décision de de prise en charge émane de la CPAM du Val-d’Oise qui intervient volontairement à la présente instance.

Au regard de ces explications et en l’absence d’observations de la société demanderesse, il convient, d’une part, de prendre acte de l’intervention volontaire de la CPAM du Val-d’Oise, d’autre part, de mettre hors de cause la CPAM de [Localité 12].

Sur la demande d’inopposabilité des arrêts et soins

L’article L. 142-6 du code de la sécurité sociale dispose que: “pour les contestations de nature médicale, hors celles formées au titre du 8° de l'article L. 142-1, le praticien-conseil du contrôle médical du régime de sécurité sociale concerné transmet, sans que puisse lui être opposé l'article 226-13 du code pénal, à l'attention exclusive de l'autorité compétente pour examiner le recours préalable, lorsqu'il s'agit d'une autorité médicale, l'intégralité du rapport médical reprenant les constats résultant de l'examen clinique de l'assuré ainsi que ceux résultant des examens consultés par le praticien-conseil justifiant sa décision. A la demande de l'employeur, ce rapport est notifié au médecin qu'il mandate à cet effet. La victime de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle est informée de cette notification”.

L’article R. 142-8-3 du code de la sécurité sociale dispose que: “lorsque le recours préalable est formé par l'employeur, le secrétariat de la commission médicale de recours amiable notifie, dans un délai de dix jours à compter de l'introduction du recours, par tout moyen conférant date certaine, le rapport mentionné à l'article L. 142-6 accompagné de l'avis au médecin mandaté par l'employeur à cet effet. Le secrétariat informe l'assuré ou le bénéficiaire de cette notification.
(...)”.

Il résulte de la combinaison de ces textes que le délai imparti par l’article R. 142-8-3, alinéa 1 du code de la sécurité sociale pour la notification du rapport mentionné à l’article L. 142-6 du même code par le secrétariat de la commission au médecin mandaté par l’employeur, lorsque ce dernier a formé un recours préalable, qui n’est assorti d’aucune sanction, est indicatif de la célérité de la procédure. L’inobservation de ce délai n'entraîne pas de sanction puisque l'employeur peut porter son recours devant la juridiction de sécurité sociale et obtenir copie du rapport de l'article L. 142-6 à l'occasion de ce recours en application des articles L. 142-10 et R. 142-16-3 du même code.

En l’espèce, si le médecin conseil de la société [8], le Docteur [Z], n’a pas été destinataire du dossier médical de Mme [M] dans un délai de 10 jours à compter de l’introduction du recours devant la commission de recours amiable, le non respect de ce délai n’est pas sanctionné par l’inopposabilité des soins et arrêts prescrits à l’assuré.

Par conséquent, le moyen tiré du non respect du principe du contradictoire dans le cadre de la phase amiable sera rejeté.

Sur la demande d’expertise

Il résulte des articles L. 411-1 du code de la sécurité sociale et 1353 du code civil que la présomption d’imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, dès lors qu’un arrêt de travail a été initialement prescrit ou que le certificat médical initial d’accident du travail est assorti d’un arrêt de travail s’étend à toute la durée d’incapacité précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l’état de la victime et qu’il appartient à l’employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve contraire.

Selon l’article 146 du code de procédure civile, « Une mesure d'instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l'allègue ne dispose pas d'éléments suffisants pour le prouver.
En aucun cas une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve ».

La présomption d’imputabilité peut être combattue par le recours à une mesure d'expertise qui ne peut être ordonnée que si l'employeur qui la sollicite apporte au soutien de sa demande des éléments médicaux de nature à accréditer l'existence d'une cause distincte de l'accident professionnel et qui serait à l'origine exclusive des prescriptions litigieuses.

En l’espèce, le certificat médical initial d’accident du travail du 27 août 2021 est assorti d’un arrêt de travail. Aux termes de la déclaration du travail, il est fait état d’une “douleur au dos” et les constatations faites dans le certificat médical initial sont les suivantes: “D# Cruralgie”.

Si la présomption d’imputabilité au travail des lésions apparues à la suite de l’accident du travail a vocation à s’appliquer, il convient au stade juridictionnel de prévoir une communication à l’employeur du rapport mentionné à l’article L. 142-6 du code de la sécurité sociale pour lui permettre de discuter le cas échéant de la régularité de la prolongation de l’arrêt de travail.

En l’espèce, la CPAM ne verse aux débats que la déclaration d’accident du travail et le certificat médical initial et il n’est pas établi que le médecin conseil de l’employeur a été destinataire du rapport médical susvisé.

Dès lors, il sera fait droit à la demande d’expertise formulée par la société [8].

Sur l’avance des frais d’expertise

En application des dispositions de l’article 269 du code de procédure civile, il appartient au juge de déterminer la partie qui consignera la provision à valoir sur les frais d’expertise.

En l’espèce, la provision sur les frais de l'expertise sera avancée par la société [8] qui formule la demande de désignation d’un expert.

Sur les autres demandes, les dépens et l’exécution provisoire

L’exécution provisoire sera ordonnée en application de l’article R. 142-10-6 du code de la sécurité sociale.

Les autres demandes ainsi que les dépens seront réservés dans l’attente du dépôt du rapport d’expertise.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire, rendu en premier ressort, par mise à disposition au greffe;

Reçoit l’intervention volontaire de la caisse primaire d’assurance maladie du Val d’Oise ;

Met hors de cause la caisse primaire d’assurance maladie de Seine-Saint-Denis ;

Ordonne avant dire droit une expertise médicale judiciaire sur pièces ;

Désigne pour y procéder :

Docteur [L] [K] ,
demeurant [Adresse 3]
Tél: [XXXXXXXX01]
Courriel: [Courriel 9]

Dit que l’expert doit retourner sans délai au service du contentieux social du tribunal judiciaire de Bobigny le coupon réponse par lequel il déclare accepter ou non ladite mission ;

Donne mission à l’expert de :
Prendre connaissance du dossier médical de Mme [E] [M] conservé par le service médical de la caisse primaire d’assurance maladie du Val-d’Oise, et notamment le rapport médical du praticien-conseil ainsi que celui de la commission médicale de recours amiable, s'ils existent, ou encore ceux transmis par le médecin désigné par la SAS [8],Se faire communiquer et prendre connaissance de tous documents utiles à sa mission, et notamment le dossier médical de Mme [E] [M], même éventuellement détenus par des tiers, médecins, établissements hospitaliers, organismes sociaux,Entendre tous sachants et notamment, en tant que de besoin, les praticiens ayant soigné l’intéressé,Dire si tout ou partie des arrêts de travail et des soins prescrits à Mme [E] [M] au titre de l’accident du 27 août 2021 résulte d'un état pathologique préexistant évoluant pour son propre compte sans lien avec l'accident ou d'une cause postérieure totalement étrangère, auxquels se rattacheraient exclusivement les arrêts de travail postérieurs, et dans l’affirmative, en préciser la nature,En cas de réponse positive à la question précédente, déterminer les arrêts de travail et soins exclusivement imputables à cet état pathologique préexistant évoluant pour son propre compte sans lien avec l'accident ou à cette cause postérieure totalement étrangère,Faire toute observation utile et nécessaire à la résolution du litige.
Fixe à la somme de 800 euros (huit cents euros) le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l'expert qui devra être consignée entre les mains du régisseur d'avances et de recettes du tribunal judiciaire de Bobigny, au plus tard le 9 septembre 2024 par la SAS [8] ;

Dit que faute de consignation de la provision dans ce délai impératif, la désignation de l’expert sera caduque et privée de tout effet ;

Rappelle qu’en application de l’article R. 142-16-3 du code de la sécurité sociale, la caisse primaire d’assurance maladie doit transmettre au médecin expert par le biais du service médical l’ensemble des éléments ou informations à caractère secret au sens du premier alinéa de l’article L. 142-10 du même code ayant fondé sa décision ;

Dit qu’il appartient aux parties de communiquer à l’expert toutes pièces qu’il jugera utile à son expertise ;

Rappelle que l’expert doit aviser le praticien-conseil du service médical de la caisse primaire d’assurance maladie et le médecin mandaté par la SAS [8] de la date à laquelle il débutera ses opérations d’expertise ;

Dit que l'expert pourra s'adjoindre tout spécialiste de son choix pour remplir sa mission ;

Désigne le magistrat coordonnateur du service du contentieux social pour suivre les opérations d'expertise ;

Dit que l'expert devra de ses constatations et conclusions dresser un rapport qu’il adressera au greffe du service du contentieux social du présent tribunal dans le délai de quatre mois à compter du présent jugement et au plus tard le 9 octobre 2024 ;

Dit que le greffe transmettre copie du rapport au service du contrôle médical de la caisse primaire d'assurance maladie ainsi qu'au médecin désigné par l’la SAS [8] ;

Renvoie l’affaire à l’audience du mardi 26 novembre 2024 à 9 heures, salle d’audience G,
Service du Contentieux Social
[Adresse 10]
[Adresse 10]
[Localité 5]

Dit que la notification du présent jugement par lettre recommandée avec accusé de réception vaut convocation des parties à l’audience de renvoi ;

Dit que les parties devront s’adresser dès notification du rapport d’expertise leurs conclusions sur le fond et leurs pièces pour être en état de plaider à l’audience de renvoi précitée ;

Réserve les autres demandes et les dépens ;

Ordonne l’exécution provisoire ;

Rappelle que tout appel à l'encontre de la présente décision doit, à peine de forclusion, être interjeté dans le délai d'un mois à compter de sa notification,

Fait et mis à disposition au greffe, la minute étant signée par :

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

C.AMICE C. BRIEND


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : Serv. contentieux social
Numéro d'arrêt : 23/02226
Date de la décision : 09/07/2024
Sens de l'arrêt : Expertise

Origine de la décision
Date de l'import : 22/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-09;23.02226 ?
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