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04/07/2024 | FRANCE | N°23/04671

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, Chambre 7/section 1, 04 juillet 2024, 23/04671


TRIBUNAL JUDICIAIRE
de BOBIGNY

JUGEMENT CONTENTIEUX DU 04 JUILLET 2024

Chambre 7/Section 1
AFFAIRE: N° RG 23/04671 - N° Portalis DB3S-W-B7H-XUQY
N° de MINUTE : 24/00432

S.E.L.A.S. IMAGERIE MEDICALE DE [Localité 4]
Immatriculée au RCS de Valenciennes sous le n°328 349 105
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Joffrey OZIMEK,
avocat au barreau de PARIS,
vestiaire :

DEMANDEUR

C/

S.A.S.U. REX ROTARY
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Djazia TIOURTITE,
avocat au barreau de PARIS,
vesti

aire : R255

DEFENDEUR

COMPOSITION DU TRIBUNAL

M. Michaël MARTINEZ, Juge, statuant en qualité de juge unique, conformément aux disposit...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
de BOBIGNY

JUGEMENT CONTENTIEUX DU 04 JUILLET 2024

Chambre 7/Section 1
AFFAIRE: N° RG 23/04671 - N° Portalis DB3S-W-B7H-XUQY
N° de MINUTE : 24/00432

S.E.L.A.S. IMAGERIE MEDICALE DE [Localité 4]
Immatriculée au RCS de Valenciennes sous le n°328 349 105
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Joffrey OZIMEK,
avocat au barreau de PARIS,
vestiaire :

DEMANDEUR

C/

S.A.S.U. REX ROTARY
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Djazia TIOURTITE,
avocat au barreau de PARIS,
vestiaire : R255

DEFENDEUR

COMPOSITION DU TRIBUNAL

M. Michaël MARTINEZ, Juge, statuant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l article 812 du code de procédure civile, assisté aux débats de Madame Camille FLAMANT, greffier.

DÉBATS

Audience publique du 23 Mai 2024.

JUGEMENT

Rendu publiquement, par mise au disposition au greffe, par jugement Contradictoire et en premier ressort, par M. Michaël MARTINEZ, Juge, assisté de Madame Camille FLAMANT, greffier.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Selon bon de commande n° BC8846 du 27 juillet 2022, la SELAS Imagerie médicale de [Localité 4] a conclu avec la SASU Rex Rotary un contrat de location financière d’une durée de 21 trimestres pour un loyer trimestriel de 1 590 euros HT ayant pour objet du matériel informatique et d’impression.

Un avenant a été conclu le lendemain, ne modifiant pas les prestations essentielles des parties.

Le matériel objet du contrat a été livré à la société d’imagerie médicale.

N’ayant pu résilier un contrat précédemment conclu avec la société Siemens ayant le même objet que celui conclu le 27 juillet 2022, la société d’imagerie médicale, a indiqué à la société Rex Rotary, par courrier électronique du 30 novembre 2022, qu’elle ne pouvait pas travailler avec elle pour cause de double emploi et l’a invitée à venir reprendre son matériel.

Par courrier en réponse du 12 décembre 2022, la société Rex Rotary a rappelé à la société d’imagerie médical la teneur de son engagement contractuel et l’a mise en demeure de respecter ses obligations contractuelles.

Malgré plusieurs échanges, les parties ne sont pas parvenues à une solution amiable, ce qui a conduit la société Rex Rotary à facturer à la société d’imagerie médical la somme de 40 068 euros le 20 février 2023 en raison du refus de prendre livraison.

Par acte de commissaire de justice du 3 mai 2023, la SELAS Imagerie médicale de [Localité 4] a fait assigner la SASU Rex Rotary devant le tribunal judiciaire de Bobigny à titre principal en annulation du contrat pour dol et à titre subsidiaire en résolution du contrat pour inexécution contractuelle de la société Rex Rotary.

RÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions, notifiées par RPVA le 19 mars 2024, la SELAS Imagerie médicale demande au tribunal de :
A titre principal
- dire que le tribunal judiciaire de Bobigny est compétent,
- prononcer la nullité du bon de commande n° 8846,
A titre subsidiaire
- prononcer la résolution judiciaire du bon de commande n° 8846 à effet au 27 juillet 2022,
En tout état de cause
- ordonner la reprise du matériel objet du contrat,
- débouter la SASU Rex Rotary de ses demandes,
- condamner la SASU Rex Rotary à lui payer la somme de 15,50 euros au titre des frais d’opposition à prélèvement,
- condamner la SASU Rex Rotary à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SASU Rex Rotary aux dépens,
- ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir.

Dans ses dernières conclusions, notifiées par RPVA le 2 février 2024, la SASU Rex Rotary demande au tribunal de :
- débouter la SELAS Imagerie médicale de ses demandes,
- fixer la livraison du matériel à la date du 19 août 2022,
- condamner la SELAS Imagerie médicale à lui payer les sommes de
40 068 euros TTC au titre de la facture 23-869951 du 20 février 2023, avec intérêts au taux BCE majoré de 10 points à compter du 22 avril 2023,40 euros au titre de l’indemnité forfaitaire de recouvrement,5 008,50 euros à titre clause pénale,- condamner la SELAS Imagerie médicale à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la SELAS Imagerie médicale aux dépens,
- écarter l’exécution provisoire.

En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, le tribunal renvoie aux conclusions des parties pour l'exposé de leurs moyens.

L’ordonnance de clôture est datée du 25 avril 2024.

L’affaire a été examinée à l’audience publique du 23 mai 2024 et mise en délibéré au 4 juillet 2024.

MOTIVATION

1. SUR LA COMPÉTENCE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE

Outre que les parties ne sont pas recevables à soulever des exceptions de compétences devant le tribunal en vertu de l’article 789, 1° du code de procédure civile, le juge de la mise en état étant seul compétent pour en connaître, il y a lieu d’observer que la société Rex Rotary ne soulève pas l’incompétence du tribunal.

Dès lors il n’y a pas lieu de déclarer le tribunal judiciaire compétent.

2. SUR LES DEMANDES DE LA SOCIÉTÉ D’imagerie médicaleE

2.1. SUR LA DEMANDE D’ANNULATION DU CONTRAT

Aux termes de l’article 1112-1 du code civil, celle des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre doit l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.
Néanmoins, ce devoir d'information ne porte pas sur l’estimation de la valeur de la prestation.
Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.
Il incombe à celui qui prétend qu’une information lui était due de prouver que l’autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu’elle l’a fournie.
Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir.
Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d'information peut entraîner l'annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants.

Selon l’article 1130 du code civil, l’erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu’ils sont de telle nature que, sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes.
Leur caractère déterminant s’apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.

L’article 1137 du même code dispose quant à lui que le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manœuvres ou des mensonges. Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie.

En l’espèce, il ressort des pièces du dossier que :
- Mme [F] [C] s’est rendue au sein des locaux de la société d’imagerie médicalee le 27 avril 2022. Elle a notamment identifié la présence d’un matériel d’impression Atlanlink C8030 Xerox et a sollicité la communication du contrat en cours pour ce matériel (pièce n° 14 société imagerie) ;
- par courrier électronique du 2 mai 2022, la société d’imagerie médicalee a adressé à Mme [C] ledit contrat, conclu le 20 juin 2018 pour une durée de 48 mois (pièce n° 15 société imagerie),
- par courrier électronique du 10 mai 2022, Mme [C] a adressé un rapport d’audit du matériel informatique à la société d’imagerie médicalee ainsi qu’une proposition commerciale (pièce n° 1 société d’imagerie) ;
- le lendemain elle a adressé une proposition commerciale pour la téléphonie (pièce n° 2 société d’imagerie) ;
- par courrier électronique du 30 juin 2022, elle a adressé une nouvelle proposition commerciale relative au matériel informatique (pièce n° 3 société d’imagerie). Dans ce document elle a spécifiquement indiqué que la société d’imagerie médicalee disposait actuellement d’un système d’impression numérique C8030 avec un serveur XDP mis en place depuis juillet 2018 et que cette dernière avait besoin de partir sur un envirronement identique avec un coût inférieur ;
- le contrat de location financière a été conclu entre les parties le 27 juillet 2022 (pièce n° 4 société d’imagerie) ;
- par courrier du même jour, la société d’imagerie médicalee a notifié à la société Siemens, bailleur du système d’impression Xerox, la résiliation du contrat conclu le 20 juin 2018, à effet au 30 juillet 2018 (pièce n° 5 société d’imagerie) ;
- par courrier du 9 août 2022, la société Siemens a indiqué que la résiliation était parvenue au delà du délai de préavis et que le contrat avait été reconduit pour une nouvelle période de location de douze mois (pièce n° 6 société d’imagerie) ;
- le 17 août 2022, la société d’imagerie a transmis ce courrier a Mme [C] (pièce n° 7 société d’imagerie) ;
- par courrier électronique du 30 novembre 2022, la société d’imagerie médicalee a indiqué à la société Rex Rotary qu’elle ne pouvait pas travailler avec elle pour cause de double emploi et l’a invitée à venir reprendre son matériel (pièce n° 9 société d’imagerie).

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que la société d’imagerie médicale disposait d’un contrat en cours avec la société Siemens au moment où elle est entrée en pourparlers avec la société Rex Rotary. Cette dernière avait une parfaite connaissance de l’existence de ce contrat, de son contenu et de sa date d’échéance, une copie lui ayant été adressée dès le début du mois de mai 2022. Elle savait également que la société d’imagerie cherchait à remplacer son système d’impression par un système identique mais moins coûteux.

Par ailleurs, il ressort du courrier de résiliation du 27 juillet 2022, qui comporte des espaces à remplir qu’il n’a pas été préparé par les représentants de la société d’imagerie médicalee, mais que ce courrier leur a été remis pré-rédigé, pour être signé et envoyé à la société Simens. Ce courrier est daté du même jour que la signature par les parties du bon de commande n° BC8846.

Il en résulte que les parties avaient convenu que le contrat conclu avec la société Siemens serait résilié à l’occasion de la conclusion du nouveau contrat, la lettre de résiliation ayant été préparée par Mme [C].

Cette situation explique qu’à réception du courrier de la société Siemens, informant de la reconduction tacite du contrat pour une durée d’un an, la société d’imagerie l’a transmis à Mme [C] puis a indiqué qu’elle n’était pas en mesure d’honorer son engagement contractuel, disposant de deux systèmes d’impression.

Enfin, bien que la société d’imagerie médicalee connaissait l’existence et le contenu du contrat qu’elle avait conclu avec la société Siemens, la société Rex Rotary, spécialisée dans la location financière, ne pouvait ignorer que la résiliation dudit contrat devait observer un délai de préavis sous peine d’être reconduit tacitement et se devait d’en informer son cocontractant.

Ainsi, alors que la société Rex Rotary connaissait cette information dont l'importance était déterminante pour le consentement de la société d’imagerie médicalee, elle se devait de l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignorait cette information, pensant pouvoir résilier son contrat avec Siemens et avait fait confiance à son cocontractant qui lui avait préparé un courrier de résiliation envoyé à la société Siemens dès le jour de la conclusion du nouveau contrat.

Cette dissimulation, qui a permis à la société Rex Rotary d’obtenir l’engagement contractuel de la société d’imagerie médicalee, est constitutive d’un dol.

En conséquence, le bon de commande n° BC8846 du 27 juillet 2022, et son avenant du 28 juillet 2022, conclus entre la SELAS Imagerie médicale et la SASU Rex Rotary seront annulés.

Consécutivement, la SASU Rex Rotary devra reprendre le matériel objet du contrat se trouvant dans les locaux de la SELAS Imagerie médicale.

Elle sera également déboutée de ses demandes tendant à fixer la date de livraison au 19 août 2022 et de paiement.

2.2. SUR LA DEMANDE DE PAIEMENT AU TITRE DES FRAIS D’OPPOSITION

En application de l'article 1240 du code civil, le droit de demander la nullité d’un contrat sur le fondement de l'article 1130 du code civil n'exclut pas l’exercice, par la victime des manœuvres dolosives, d'une action en responsabilité délictuelle pour obtenir de leur auteur réparation du préjudice qu’elle a subi.

Le 20 février 2023, la société Rex Rotary a facturé la somme de 40 068 euros à la société d’imagerie médicale au titre du contrat de location financière. Cette dernière a fait opposition au paiement, ce qui lui a engendré des frais bancaires à hauteur de la somme de 15,50 euros (pièce n° 13 société Rex Rotary / n° 24 société imagerie).

En conséquence la société société Rex Rotary sera condamnée à payer à la société d’imagerie médicalee la somme de 15,50 euros.

3. SUR LES FRAIS DU PROCÈS ET L’EXÉCUTION PROVISOIRE

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

En application de l’article 700 1° du code de procédure civile, dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n'y a lieu à condamnation.

Partie perdante, la société Rex Rotary sera condamnée aux dépens.

Supportant les dépens, elle sera condamnée à payer à la société d’imagerie médicalee la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Consécutivement, elle sera déboutée de sa demande fondée sur le même texte.

Enfin, les articles 514 et 514-1 du code de procédure civile, disposent que les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que le juge en décide autrement s’il estime que cette exécution provisoire de droit est incompatible avec la nature de l’affaire. En l’occurrence, la nature de l’affaire n’implique pas de déroger au principe sans qu’il ne soit nécessaire de le rappeler dans le dispositif.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal judiciaire,

PRONONCE la nullité du bon de commande n° BC8846 du 27 juillet 2022 et son avenant du 28 juillet 2022, conclus entre la SELAS Imagerie médicale de [Localité 4] et la SASU Rex Rotary ;

ORDONNE à la SASU Rex Rotary de reprendre le matériel objet du contrat situé dans les locaux de la SELAS Imagerie médicale de [Localité 4], situés [Adresse 2] à [Localité 4], à savoir :
- 1 copieur numérique Ricoh IM C4500 A et ses accessoires,
- 1 écran Dell 24 pouces Ultrasharp U2422H,
- 1 serveur Dell précision 3660

DÉBOUTE la SASU Rex Rotary de sa demande tendant à fixer la livraison du matériel à la date du 19 août 2022 ;

DÉBOUTE la SASU Rex Rotary de ses demandes de paiement ;

CONDAMNE la SASU Rex Rotary à payer à la SELAS Imagerie médicale de [Localité 4] la somme de 15,50 euros au titre des frais d’opposition à prélèvement bancaire ;

CONDAMNE la SASU Rex Rotary aux dépens ;

CONDAMNE la SASU Rex Rotary à payer à la SELAS Imagerie médicale de [Localité 4] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE la SASU Rex Rotary de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

Le présent jugement ayant été signé par le président et le greffier.

Le Greffier Le Président
Camille FLAMANT Michaël MARTINEZ


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : Chambre 7/section 1
Numéro d'arrêt : 23/04671
Date de la décision : 04/07/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-04;23.04671 ?
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