TRIBUNAL JUDICIAIRE
de BOBIGNY
JUGEMENT CONTENTIEUX DU 04 JUILLET 2024
Chambre 7/Section 1
AFFAIRE: N° RG 23/03192 - N° Portalis DB3S-W-B7H-XOUX
N° de MINUTE : 24/00459
S.A.S. Société ECT
Immatriculée au RCS de Paris sous le n°392 244 935
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Martine LAUTREDOU,
avocat au barreau de PARIS,
vestiaire : C2565
DEMANDEUR
C/
S.A. AEROPORTS DE PARIS
Immatriculée au RCS de Bobigny sous le n°552 016 628
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Maître Alexandre DUVAL STALLA de la SELARL DUVAL-STALLA & ASSOCIES,
avocats au barreau de PARIS,
vestiaire : J128
DEFENDEUR
COMPOSITION DU TRIBUNAL
M. Michaël MARTINEZ, Juge, statuant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l article 812 du code de procédure civile, assisté aux débats de Madame Camille FLAMANT, greffier.
DÉBATS
Audience publique du 20 Juin 2024.
JUGEMENT
Rendu publiquement, par mise au disposition au greffe, par jugement Contradictoire et en premier ressort, par M. Michaël MARTINEZ, Juge, assisté de Madame Camille FLAMANT, greffier.
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Par acte sous seing privé du 1er février 2019 à effet au 1er avril 2019, la SA Aéroport de Paris, a donné à bail, soumis aux dispositions du code civil, à la SAS ECT, un local situé à [Localité 4], sur la plate-forme aéroportuaire, pour une durée de neuf années.
Se prévalant de l’inexécution par la bailleurs de ses obligations contractuelles, la SAS ECT a, par acte de commissaire de justice du 22 mars 2023, fait assigner la SA Aéroport de Paris en résiliation du bail et indemnisation de ses préjudices devant le tribunal judiciaire de Bobigny.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Dans ses dernières conclusions, notifiées par RPVA le 29 février 2024, la société ECT demande au tribunal de :
A titre principal
- déclarer son action recevable,
- prononcer la résiliation judiciaire du bail conclu le 1er avril 2019, aux torts exclusifs du bailleur,
- condamner la société Aéroport de Paris à lui payer la somme de 192 283,91 euros en indemnisation de son préjudice de jouissance,
A titre subsidiaire si le tribunal ne faisait pas droit à la demande de résiliation judiciaire,
- abaisser rétroactivement le loyer du bail de 25 % à compter de la prise à bail,
- condamner la société Aéroport de Paris à lui payer la somme de 192 283,91 euros,
En tout état de cause
- condamner la société Aéroport de Paris à lui payer la somme de 250 euros au titre du constat d’huissier,
- débouter la société Aéroport de Paris de sa demande relative au paiement de charges arriérées,
- débouter la société Aéroport de Paris de l’ensemble de ses demandes,
- condamner la société Aéroport de Paris à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Aéroport de Paris aux dépens.
Dans ses dernières conclusions, notifiées par RPVA le 18 avril 2024, la société Aéroport de Paris demande au tribunal de :
- débouter la société ECT de l’ensemble de toutes ses demandes,
- condamner la société ECT à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société ECTaux dépens, avec droit de recouvrement direcr au profit du Cabinet Duval-Stalla & Associés.
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, le tribunal renvoie aux conclusions des parties pour l'exposé de leurs moyens.
L’ordonnance de clôture est datée du 23 mai 2024.
L’affaire a été examinée à l’audience publique du 20 juin 2024 et mise en délibéré au 4 juillet 2024.
MOTIVATION
Selon l’article 16 du code de procédure civile, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu’il a relevés d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.
En vertu de l’article 48 du code de procédure civile, toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu’elle n’ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu’elle n’ait été spécifiée de façon très apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée.
Aux termes de l’article 76 alinéa 1er du code de procédure civile, sauf application de l’article 82-1, l’incompétence peut être prononcée d’office en cas de violation d’une règle de compétence d'attribution lorsque cette règle est d'ordre public ou lorsque le défendeur ne comparaît pas. Elle ne peut l’être qu’en ces cas.
En l’espèce, à l’issue de l’audience de mise en état du 1er juin 2023, le juge de la mise en état a invité les parties à faire valoir leurs observations sur la compétence du tribunal judiciaire et le cas échéant, celle du tribunal de commerce, en raison de la nature commerciale des deux sociétés et de la nature civile du bail les unissant.
L’affaire a été renvoyée à l’audience de mise en état du 22 juin 2023 à l’occasion de laquelle les parties ont indiqué que le contrat de bail contenait une clause d’attribution de compétence au profit du tribunal de grande instance de Bobigny.
Il est constant que le contrat de bail contient une clause d’attribution de compétence au profit du dudit tribunal, devenu tribunal judiciaire de Bobigny. Toutefois, en application de l’article 48 du code civil, les parties sont exclusivement autorisées à déroger aux règles régissant la compétence territoriale. En revanche, elles ne peuvent déroger aux règles relatives à la compétence matérielle, a fortiori lorsqu’elles sont d’ordre public.
Par ailleurs, dès lors que la compétence d’attribution du tribunal de commerce est d’ordre public, le tribunal peut prononcer d’office son incompétence, étant précisé que les parties ont été invitées à faire valoir leurs observations sur cette question, dans le respect du principe du contradictoire.
En outre, selon l’article L. 721-3, 1° et 2° du code de commerce, les tribunaux de commerce connaissent des contestations relatives aux engagements entre commerçants, entre artisans, entre établissements de crédit, entre sociétés de financement ou entre eux et de celles relatives aux sociétés commerciales.
Outre que les parties sont toutes deux des sociétés commerciales, le bail, de nature civile, a été conclu dans le cadre de l’activité commerciale des deux sociétés. En application de l’article L. 721-3, 1° et 2° du code de commerce, le tribunal judiciaire se déclarer donc incompétent au profit du tribunal de commerce de Bobigny (93000), la société Aéroport de Paris ayant son siège social à [Localité 4].
En application de l’article 82 du code de procédure civile, à défaut d’appel, le dossier de l'affaire sera transmis à cette juridiction, avec une copie de la présente décision.
Le présent jugement ne mettant pas un terme à l’instance, les dépens seront réservés.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal judiciaire,
SE DÉCLARE incompétent au profit du tribunal de commerce de Bobigny (93000), afin de statuer sur les demandes formulées par la SAS ECT à l’encontre de la SA Aéroport de Paris ;
DIT qu’à défaut d’appel, le dossier de l’affaire sera transmis à cette juridiction, avec une copie de la présente décision ;
RÉSERVE les dépens.
Le présent jugement ayant été signé par le président et le greffier.
Le Greffier Le Président
Camille FLAMANT Michaël MARTINEZ