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02/07/2024 | FRANCE | N°23/08222

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, Chambre 7/section 3, 02 juillet 2024, 23/08222


TRIBUNAL JUDICIAIRE
de BOBIGNY

JUGEMENT CONTENTIEUX DU 02 JUILLET 2024


Chambre 7/Section 3
AFFAIRE: N° RG 23/08222 - N° Portalis DB3S-W-B7H-X3K3
N° de MINUTE : 24/00424


Madame [S] [R]
[Adresse 2]
[Localité 3]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro C-93008-2024-000865 du 25/01/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de BOBIGNY)

représentée par Me Fariha FADOUL, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : PB 69

DEMANDEUR

C/

Madame [P] [N]
[Adresse 1]
[Localité 4]>
représentée par Me Dominique PERRAN-ARRINDELL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D2127

DEFENDEUR

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madam...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
de BOBIGNY

JUGEMENT CONTENTIEUX DU 02 JUILLET 2024

Chambre 7/Section 3
AFFAIRE: N° RG 23/08222 - N° Portalis DB3S-W-B7H-X3K3
N° de MINUTE : 24/00424

Madame [S] [R]
[Adresse 2]
[Localité 3]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro C-93008-2024-000865 du 25/01/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de BOBIGNY)

représentée par Me Fariha FADOUL, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : PB 69

DEMANDEUR

C/

Madame [P] [N]
[Adresse 1]
[Localité 4]

représentée par Me Dominique PERRAN-ARRINDELL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D2127

DEFENDEUR

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Marjolaine GUIBERT, Vice-Présidente, statuant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l article 812 du code de procédure civile, assistée aux débats de Madame Corinne BARBIEUX, faisant fonction de greffier.

DÉBATS

Audience publique du 21 Mai 2024.

JUGEMENT

Rendu publiquement, par mise au disposition au greffe, par jugement Contradictoire et en premier ressort, par Madame Marjolaine GUIBERT, Vice-Présidente, assistée de Madame Corinne BARBIEUX, faisant fonction de greffier.

EXPOSE DU LITIGE

Par acte extrajudiciaire du 26 juillet 2023, Mme [S] [R] a fait assigner Mme [P] [N] devant le tribunal judiciaire de Bobigny aux fins d’obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 33 000 euros au titre du remboursement du solde d’un prêt consenti le 10 mai 2007, 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 17 décembre 2023, Mme [S] [R] maintient ses demandes dans les termes de son assignation en y ajoutant la condamnation de la défenderesse aux intérêts au taux légal à compter de la date de mise en demeure.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 17 janvier 2024, Mme [P] [N] demande au tribunal de débouter Mme [R] de ses demandes, de déclarer la dette prescrite et de condamner Mme [R] à lui payer la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive. Si le tribunal devait reconnaître l’existence de la dette contestée, elle précise ne pouvoir être redevable de plus de la moitié de la dette, soit la somme de 16 500 euros, dès lors qu’elle n’a aucun caractère solidaire. En tout état de cause, elle demande la condamnation de Mme [R] à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures dans les conditions de l’article 455 du Ccde de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 14 mai 2024.

A l’issue de l’audience des plaidoiries du 21 mai 2024, le jugement a été mis en délibéré au 2 juillet 2024.

MOTIVATION

Sur la prescription

Se fondant sur l’article 2224 du code civil, Mme [N] excipe, par conclusions formées devant le tribunal, de la prescription de la demande de remboursement formée par Mme [R].

L’assignation a cependant été délivrée le 26 juillet 2023, soit postérieurement à l’entrée en vigueur de la réforme de la procédure civile.

Il résulte de l’article 789 du code de procédure civile que, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les fins de non-recevoir.
Les parties ne sont plus recevables à soulever ces fins de non-recevoir au cours de la même instance à moins qu'elles ne surviennent ou soient révélées postérieurement au dessaisissement du juge de la mise en état.

L’article 791 de ce même code précise que le juge de la mise en état ne peut être saisi que par des conclusions qui lui sont spécialement adressées distinctes des conclusions au sens de l’article 768.

Dès lors que la fin de non recevoir tirée de la prescription des demandes formées par Mme [R] n’a pas été soulevée par conclusions spécialement adressées au juge de la mise en état, Mme [N] est irrecevable à exciper de la prescription desdites demandes devant le tribunal.

Les demandes de Mme [R] sont donc déclarées recevables.

Sur la demande de remboursement

Aux termes de l’article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

En application de l’article 1892 du code civil, le prêt de consommation est un contrat par lequel l’une des parties livre à l’autre une certaine quantité de choses qui se consomment par l’usage, à la charge pour cette dernière de lui en rendre autant de même espèce et qualité.

Consenti entre particuliers, ce prêt est un contrat réel qui suppose la remise d’une chose. De jurisprudence constante, l’absence d’intention libérale de celui qui agit en restitution ne suffit pas à elle seule à établir l’obligation de restitution de la somme versée. Celui qui a remis les fonds doit donc rapporter, en complément de la preuve du versement, la preuve par tous moyens admissibles qu’il a prêté comme il l’affirme.

En application de l’article 1326 du code civil, l’acte juridique par lequel une seule partie s’engage envers une autre à lui payer une somme d’argent doit être constaté dans un titre qui comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement ainsi que la mention, écrite par lui-même, de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres.

Si, en principe, tout acte juridique portant sur une somme ou une valeur supérieure à 1 500 euros doit être prouvé par écrit en vertu de l’article 1359 du code civil, il est cependant possible de déroger aux exigences d’une preuve littérale dans les conditions décrites aux articles 1361 et 1362 du code civil.

Ainsi, en l’absence d’écrit, une partie peut se prévaloir d’un commencement de preuve par écrit dès lors qu’elle produit tout écrit qui, émanant de celui qui conteste un acte ou de celui qu’il représente, rend vraisemblable ce qui est allégué, et qui pourra être complété par des éléments extrinsèques tels que des témoignages ou des présomptions.

Mme [S] [R] se prévaut d’un prêt consenti à son fils et à sa belle fille le 10 mai 2007 sans pouvoir justifier d’une reconnaissance de dette établie par ces derniers.

Le lien de parenté existant entre Mme [S] [R] et M. [M] [R] (lien mère-fils) justifie l’impossibilité morale dans laquelle la demanderesse se trouvait en 2007 pour solliciter la signature d’un acte écrit reconnaissant un prêt.

Il lui revient cependant de démontrer l’existence d’un commencement de preuve par écrit, et de le compléter par tout moyen.

En l’espèce, Mme [S] [R] verse aux débats le jugement contentieux rendu par le tribunal judiciaire de Bobigny le 21 juillet 2022, aux termes duquel le juge chargé de la liquidation de la communauté a pu constater que “Mme [N] reconnaît devoir la moitié de la somme prêtée par Mme [S] [R], soit la somme de 16 500 euros (33 000 euros / 2)” (page 8/12 du jugement du 21 juillet 2022).

Mme [S] [R] complète ce commencement de preuve par la preuve du virement de 33 000 euros dont il est constant qu’il a crédité le compte commun de M. [M] [R] et de Mme [N].

Ces pièces démontrent que Mme [S] [R] a bien versé la somme de 33 000 euros au couple le 10 mai 2007, et Mme [S] [R] démontre, par le jugement du 21 juillet 2022, que Mme [N] se déclarait alors tenue d’une obligation de restitution envers Mme [R], à hauteur de la moitié de la somme versée, soit à hauteur de la somme de 16 500 euros.

Si Mme [S] [R] sollicite la condamnation de son ex belle-fille à lui régler l’intégralité du prêt consenti, soit la somme de 33 000 euros, en arguant de la solidarité ménagère issue de l’article 220 alinéa 1er du code civil, force est de constater qu’elle ne démontre pas l’affectation de la somme qu’elle a ainsi versée à son fils et à Mme [P] [N], et que son montant excède manfestement celui des dettes de nature ménagère.
Au surplus, Mme [S] [R] indique expressément dans ses dernières conclusions du 17 décembre 2023 que “ce prêt effectué par Madame [R] a été réalisé uniquement sur demande du couple dans le but de financer leurs différents biens immobiliers situés à [Localité 5], [Localité 7] et [Localité 6] acquis par le couple”, affectation qui exclut la solidarité ménagère.

Dans ces conditions, la solidarité ne peut être retenue, et le paiement de l’intégralité de la somme versée le 10 mai 2007 ne peut être valablement réclamé à Mme [P] [N]. Mme [S] [R] doit dès lors être déboutée de cette demande.

Il en résulte que Mme [P] [N] doit être condamnée à payer à Mme [S] [R] la somme de 16 500 euros en remboursement du prêt consenti le 10 mai 2007, à charge pour Mme [S] [R] de se retourner le cas échéant contre son fils pour solliciter le paiement de sa part.

Cette condamnation est assortie des intérêts au taux légal à compter de l’assignation du 26 juillet 2023, valant mise en demeure, jusqu’à complet paiement.

Sur la demande de dommages et intérêts

Aux termes de l’article 1240 du Code civil, tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

En l’absence de toute preuve d’un abus dans l’exercice de la présente action en justice, Mme [P] [N] est déboutée de sa demande de dommages et intérêts fondée sur une prétendue procédure abusive.

Sur les frais du procès

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

Mme [P] [N] est condamnée aux dépens.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.

Mme [P] [N] est condamnée à payer à Mme [S] [R] la somme de 2 500 euros au titre de ses frais irrépétibles.

Les demandes plus amples ou contraires, non justifiées, sont rejetées.

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal, statuant après débats en audience publique, par jugement contradictoire rendu en premier ressort par mise à disposition au greffe,

Déclare recevable la demande de remboursement formée par Mme [S] [R] ;

Condamne Mme [P] [N] à payer à Mme [S] [R] la somme de 16 500 euros en remboursement du contrat de prêt consenti le 10 mai 2007, outre les intérêts au taux légal à compter du 26 juillet 2023 et jusqu’à complet paiement ;

Déboute Mme [P] [N] de sa demande de dommages et intérêts ;

Condamne Mme [P] [N] aux dépens;

Condamne Mme [P] [N] à payer à Mme [S] [R] la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejette comme non justifiées les demandes plus amples ou contraires.

Le présent jugement ayant été signé par le président et le greffier

Le GreffierLe Président
Corinne BARBIEUXMarjolaine GUIBERT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : Chambre 7/section 3
Numéro d'arrêt : 23/08222
Date de la décision : 02/07/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-02;23.08222 ?
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