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27/06/2024 | FRANCE | N°23/00223

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, Expropriations 3, 27 juin 2024, 23/00223


Décision du 27 Juin 2024
Minute n° 24/00173


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY

JURIDICTION DE L’EXPROPRIATION
DE LA SEINE-SAINT-DENIS

JUGEMENT FIXANT INDEMNITÉS

du 27 Juin 2024

:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:

Rôle n° RG 23/00223 - N° Portalis DB3S-W-B7H-YD4X

Le juge de l’expropriation du département de la SEINE-SAINT-DENIS


DEMANDEUR :


S.A. SOREQA (SOCIETE DE REQUALIFICATION DES QUARTIERS ANCIENS)
[Adresse 27]
[Localité 26]
représentée par Maître Florence BOURDON, avocat au ba

rreau de PARIS
DÉFENDEUR :
Monsieur [P] [Y]
[Adresse 38]
[Localité 30] ALGERIE
représenté par Maître Bruno TURBÉ, avocat au barreau de PARI...

Décision du 27 Juin 2024
Minute n° 24/00173

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY

JURIDICTION DE L’EXPROPRIATION
DE LA SEINE-SAINT-DENIS

JUGEMENT FIXANT INDEMNITÉS

du 27 Juin 2024

:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:

Rôle n° RG 23/00223 - N° Portalis DB3S-W-B7H-YD4X

Le juge de l’expropriation du département de la SEINE-SAINT-DENIS

DEMANDEUR :

S.A. SOREQA (SOCIETE DE REQUALIFICATION DES QUARTIERS ANCIENS)
[Adresse 27]
[Localité 26]
représentée par Maître Florence BOURDON, avocat au barreau de PARIS
DÉFENDEUR :
Monsieur [P] [Y]
[Adresse 38]
[Localité 30] ALGERIE
représenté par Maître Bruno TURBÉ, avocat au barreau de PARIS
INTERVENANT :
DIRECTION DEPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES - POLE D’EVALUATION DOMANIALE représentée par Monsieur [H] [Z], commissaire du Gouvernement
[Adresse 25]

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Rémy BLONDEL, Juge, désigné par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la cour d’appel de Paris

Cécile PUECH, Greffière présente lors de la mise à disposition

PROCÉDURE :

Date de la visite des lieux : 29 février 2024
Date de la première évocation et des débats: 16 mai 2024
Date de la mise à disposition : 27 Juin 2024

FAITS ET PROCEDURE

Monsieur [P] [Y] était propriétaire des lots n°3 et 36 situés sur la parcelle cadastrée Section AQ n°[Cadastre 23] sise [Adresse 29] à [Localité 34] correspondant à une boutique d’une superficie de 18,20 m² et deux caves.

Il s’agit d’une boutique d’alimentation générale. Pour une description plus précise des lieux, il conviendra de se reporter au procès-verbal du 29 février 2024, annexé à la présente décision.

Le bien est situé en centre ville de [Localité 34] dans un quartier mixte, composé d’immeubles d’habitation et de commerces.

Aux termes d’un arrêté préfectoral n°2023-1064 en date du 02 mai 2023, l’acquisition des immeubles nécessaires à la réalisation du projet de requalification du secteur Jaurès-Roux sur la commune de [Localité 34] a été déclarée d’utilité publique au bénéfice de la Société de requalification des quartiers anciens (ci-après dénommée la “SOREQA”).

Une ordonnance d'expropriation emportant transfert de propriété, a été rendue le 25 janvier 2024 au profit de la SOREQA par le juge de l'expropriation du tribunal judiciaire de Bobigny.

La SOREQA a notifié son offre indemnitaire à Monsieur [P] [Y] par acte de commissaire de justice en date du 13 juin 2023.

Aucun accord n'étant intervenu, la SOREQA a saisi la juridiction de l'expropriation du tribunal judiciaire de Bobigny le 04 septembre 2023 aux fins de fixer l'indemnité de dépossession de la manière suivante ;
- soit à la somme de 61.060 euros en valeur libre, décomposée comme suit :
- 54.600 euros au titre de l’indemnité principale ;
- 6.460 euros au titre de l’indemnité de remploi ;
- soit à la somme de 49.048 euros en valeur occupée, décomposée comme suit :
- 43.680 euros au titre de l’indemnité principale ;
- 5.368 euros au titre de l’indemnité de remploi.

La SOREQA a notifié à Monsieur [P] [Y] la saisine de la juridiction de l'expropriation par acte de commissaire de justice en date du 13 septembre 2023.

Par une ordonnance rendue le 09 novembre 2023, le juge de l'expropriation a fixé le transport judiciaire sur les lieux et l'audition des parties au 29 février 2024.

La SOREQA a notifié cette décision à Monsieur [P] [Y] par acte de commissaire de justice en date du 05 décembre 2023.

Maître Bruno TURBE représentait Monsieur [P] [Y], absent lors du transport judiciaire sur les lieux du bien exproprié au cours duquel la date d'audience a été fixée au 16 mai 2024.

Par un mémoire en réponse reçu par le greffe le 15 janvier 2024, l'exproprié a sollicité du juge de l'expropriation de fixer l’indemnité totale de dépossession à la somme de 141.976 euros, outre la somme de 6.000 euros au titre de la perte de revenus.

Par des conclusions rectificatives, reçues le 03 mai 2024, faisant suite à ses conclusions du 18 décembre 2023 et du 12 février 2024, le commissaire du Gouvernement a proposé une indemnité de dépossession de 93.100 euros, soit :
- 81.000 euros à titre d'indemnité principale ;
- 9.100 euros au titre du remploi ;
- 3.000 euros au titre de l’indemnité de perte de revenus locatifs.

Par un mémoire récapitulatif reçu par le greffe le 16 mai 2024, la SOREQA a modifié sa demande et a sollicité la fixation de l’indemnité totale de dépossession à la somme de 49.048 euros en valeur occupée, décomposée comme suit :
- 43.680 euros au titre de l’indemnité principale ;
- 5.368 euros au titre du remploi.

En vertu de l'article 455 du code de procédure civile, il est fait référence aux écritures transmises pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.

A l'audience du 16 mai 2024, les parties comparantes ont développé les éléments de leurs mémoires, en application des dispositions du 1er alinéa de l'article R.311-20 du Code de l'expropriation.

L'affaire a été mise en délibéré au 27 juin 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la fixation des indemnités

Aux termes de l'article 17 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, la propriété est un droit inviolable et sacré, dont nul ne peut être privé si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité.

Conformément aux articles L.311-5 et L. 321-1 du code de l'expropriation, à défaut d'accord sur le montant des indemnités, celles-ci sont fixées par le juge de l'expropriation et couvrent l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation.

L'indemnité réparatrice allouée à l'exproprié doit lui permettre de se retrouver en même et semblable état et de se procurer un bien identique, similaire ou équivalent à celui dont il est dépossédé par l'opération d'expropriation, soit un bien présentant les mêmes caractéristiques (lieu, année de construction, composition, état d'entretien…) sous réserve, de fait, des biens disponibles sur le marché immobilier.

Plus précisément, le préjudice matériel subi du fait de l'opération d'expropriation est généralement équivalent à la valeur vénale du bien dont l'exproprié est privé.

La valeur vénale correspond au prix le plus probable auquel pourrait se vendre ou s'acheter, à l'amiable, un immeuble ou un droit immobilier donné, dans un lieu et à un moment déterminés, compte tenu des conditions du marché.

La valeur vénale n'est pas nécessairement égale au coût de remplacement du bien, et ce principalement lorsqu'il n'y a pas de bien similaire à celui dont l'exproprié est dépossédé sur le marché immobilier local, susceptible d'être acquis par un particulier.

Sur les éléments préalables à la détermination des indemnités

Sur les dates à retenir

Le juge de l'expropriation doit déterminer les dates suivantes et les prendre en considération lors de l'évaluation de la valeur vénale du bien exproprié :

* Date pour apprécier la consistance des biens : selon les dispositions de l'article L.322-1 du code de l'expropriation, le juge fixe le montant des indemnités d'après la consistance des biens à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété. Lorsque l'ordonnance d'expropriation n'est pas intervenue au jour du jugement de première instance, la consistance des biens s'apprécie à la date du dit jugement. La consistance d'un bien correspond principalement aux éléments qui le composent et à ses caractéristiques (état d'entretien, de très mauvais à très bon ; situation d'occupation ; ...) ;

* Date de référence pour déterminer les règles d'urbanisme et l'usage effectif des biens : conformément aux dispositions des articles L.213-6 alinéa 1 et L.213-4 du code de l'urbanisme, elle se situe à la date à laquelle est devenue opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public, approuvant, révisant ou modifiant le plan d'occupation des sols, ou approuvant, révisant ou modifiant le plan local d'urbanisme et délimitant la zone dans laquelle est situé le bien. ;

* Date pour apprécier la valeur des biens : selon le 1er alinéa de l'article L.322-2 du code de l'expropriation, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance, soit à la date du jugement en fixation des indemnités.

En l'espèce, le bien de la partie expropriée doit être évalué selon :

- leur consistance au 25 janvier 2024, date de l'ordonnance d'expropriation ;

- les valeurs des biens à la date du présent jugement.

S'agissant de la date de référence, il n'est pas contesté que la parcelle doit être évaluée à la date du 29 mars 2022, date de modification du PLU.

A cette date, le bien est situé en zone UM.

Sur la consistance

La consistance d'un bien correspond principalement :

- aux éléments qui le composent ;
- et à ses caractéristiques, notamment son état d'entretien et sa situation d'occupation.

Pour la consistance du bien, il convient de se référer au procès-verbal du transport judiciaire sur les lieux en date du 29 février 2024, annexé à la présente décision, étant précisé que le bien est occupé dans le cadre d’un bail commercial.

Sur la méthode d'évaluation

Aux termes de leurs mémoires respectifs, les parties s’accordent sur l’utilisation de la méthode d’évaluation par comparaison.

Dans ces conditions, cette méthode consistant à comparer les biens à évaluer à des cessions de biens équivalents qui ont eu lieu dans la période récente sur le marché immobilier local sera adoptée.

Sur la surface

En l'espèce, il convient de retenir une surface de 18,20 m² pour le lot n°3. Cette surface n’est pas contestée par les parties.

L’exproprié sollicite la valorisation d’une cave de 9,30 m² et d’une cave de 51 m². Il fournit au juge de l’expropriation un dossier de diagnostic technique permettant de justifier de la surface des caves.

En conséquence, les superficies à retenir sont les suivantes :
- 18,20 m² pour la boutique (lot n°3) ;
- 9,3 m² pour la cave A (lot n°3) ;
- 51 m² pour la cave B (lot n°36).

Sur la situation locative

Lors du transport sur les lieux du 29 février 2024, il a été constaté que le bien était loué.

Le bien sera donc évalué comme tel, en valeur occupée.

Sur la détermination des indemnités

L'article R.311-22 du code de l'expropriation dispose que :

Le juge statue dans la limite des prétentions des parties, telles qu'elles résultent de leurs mémoires et des conclusions du commissaire du Gouvernement si celui-ci propose une évaluation inférieure à celle de l'expropriant.

Si le défendeur n'a pas notifié son mémoire en réponse au demandeur dans le délai de six semaines prévu à l'article R.311-11, il est réputé s'en tenir à ses offres, s'il s'agit de l'expropriant, et à sa réponse aux offres, s'il s'agit de l'exproprié.

Si l'exproprié s'est abstenu de répondre aux offres de l'administration et de produire un mémoire en réponse, le juge fixe l'indemnité d'après les éléments dont il dispose.

Sur l’indemnité principale

En l'espèce, le juge fixera l'indemnité en considération des termes de comparaison produits par la partie expropriante, par le commissaire du Gouvernement et par la partie expropriée, et à un montant compris entre :

- 43.680,00 euros, indemnités accessoires non comprises, selon l'offre de la SOREQA ;

Et

- 128.160,00 euros, indemnités accessoires non comprises, montant proposé par Monsieur [Y] ;

Etant précisé que le commissaire du Gouvernement évalue le bien exproprié à la somme de 81.000 euros, hors indemnités accessoires.

a)Sur les termes de comparaison de la SOREQA

Quatre termes de comparaison sont proposés par la SOREQA pour l’évaluation du bien :

Termes
Date de mutation
Références cadastrales
Adresse
Prix de vente

Surface

Prix unitaire
€/m²
DEM n°1
29/09/2022
1//AN/37//6
[Adresse 10]
[Localité 31]
110.000
40
2.750
DEM n°2
04/03/2020
1//AK/112//19
[Adresse 9]
[Localité 31]
80.000
46
1.739,13
DEM n°3
11/09/2020
27//AV/67//1
[Adresse 17]
[Localité 34]
175.000
55
3.181,82
DEM n°4
27/07/2022
27//AS/181//3
[Adresse 3]
[Localité 34]
95.000
30
3.166,67

La SOREQA retient une valeur moyenne de 3.000 euros/m² en valeur occupée avec un abattement de 20% compte tenu de l’occupation commerciale.

L’exproprié critique ces termes et fait valoir qu’il s’agit de locaux dont la surface est deux à trois fois supérieure à celle du local exproprié et se prévaut de l’effet “bonbonnière” dont bénéficient les petits locaux.

Le commissaire du Gouvernement retient les termes DEM n°3 et 4 car il s’agit de ventes de locaux commerciaux situés sur la commune de [Localité 34].

Il écarte le terme DEM n°1 car il s’agit d’un atelier et non d’un local commercial et le terme DEM n° 2 car il s’agit d’une vente à prix très bas.

Les termes de comparaison produits par la SOREQA ne sont pas accompagnés des références de publication permettant au juge de l’expropriation d’accéder à l’acte de vente et de vérifier les caractéristiques de la mutation.

Par ailleurs, les éléments de comparaison ne sont pas corroborés par la production des actes de cession.

Les termes de comparaison ne peuvent être retenus en l’état et seront par conséquent rejetés.

b)Sur les termes de comparaison de Monsieur [Y]

Huit termes de comparaison sont proposés par Monsieur [Y].

Termes
Date de mutation
Références de publication
Adresse
Prix de vente

Surface

Prix unitaire
€/m²
DEF n°1
03/02/2023
9304P01
2023P04539
[Adresse 4]
[Localité 31]
75.000
15
5.000
DEF n°2
30/03/2023
9304P01
2023P08061
[Adresse 4]
[Localité 31]
73.000
16
4.462,50
DEF n°3
31/05/2022
9304P01
2022P16443
[Adresse 24]
[Localité 31]
110.000
19
5.789,47
DEF n°4
17/09/2021
9304P01
2021P16433
[Adresse 8]
[Localité 34]
87.000
18
4.833,33
DEF n°5
27/04/2023
9304P01
2023P10502
[Adresse 8]
[Localité 34]
91.500
3.014
5.083,33
DEF n°6
10/03/2022
9304P01
2022P08825
[Adresse 14]
[Localité 34]
84.000
18
4.666,67
DEF n°7
18/01/2023
9304P01
2023P02356
[Adresse 14]
[Localité 34]
72.000
18
4.000
DEF n°8
17/06/2022
9304P01
2022P17803
[Adresse 16]
[Localité 34]
73.000
18
4.055,56

L’exproprié retient une valeur moyenne de 6.000 euros/m² et applique un abattement de 20% pour occupation commerciale.

La SOREQA considère que les termes doivent être écartés dès lors qu’il s’agit de ventes d’appartements et non de locaux commerciaux.
Le commissaire du Gouvernement écarte l’intégralité des termes de l’exproprié du fait qu’il s’agit de ventes d’appartements.

En l’espèce, le bien exproprié est composé d’un local commercial et de deux caves. Sa consistance n’est donc pas comparable avec celle d’un appartement.

Par conséquent, les termes soumis par l’exproprié seront rejetés.

c)Sur les termes de comparaison du commissaire du Gouvernement

Huit termes de comparaison sont proposés par le commissaire du Gouvernement pour l’évaluation du local commercial.

Termes
Date de mutation
Références de publication
Adresse
Prix de vente

Surface

Prix unitaire
€/m²
CG n°1
13/12/2021
2022P06636
[Adresse 11]
[Localité 31]
30.000
17,31
1.733
CG n°2
18/11/2022
2022P34222
[Adresse 12]
[Localité 31]
111.828
37
3.022
CG n°3
28/04/2021
2021P02860
[Adresse 18]
[Localité 31]
150.000
38,21
3.925
CG n°4
19/07/2021
2021P09475
[Adresse 28]
[Localité 31]
215.000
43,02
4.998
CG n°5
29/01/2021
2021P00992
[Adresse 1]
[Localité 31]
100.000
29,4
3.401
CG n°6
25/01/2021
2021P01476
[Adresse 20]
[Localité 33]
135.000
32,63
4.137
CG n°7
28/02/2022
2022P06452
[Adresse 5]
[Localité 35]
76.000
35
2.172
CG n°8
03/06/2022
2022P15603
[Adresse 19]
[Localité 32]
155.000
41
3.780

Les termes CG n°1 à 4 sont des biens occupés et ont une valeur moyenne de 3.419,5 euros/m² arrondie à 3.420 euros/m².

Les termes CG n°5 à 8 sont des biens libres et ont une valeur moyenne de 3.372,5 euros/m² arrondie à 3.373 euros/m².

Le commissaire du Gouvernement reprend deux termes de la SOREQA pour l’évaluation du local commercial.

Termes
Date de mutation
Références cadastrales
Adresse
Prix de vente

Surface

Prix unitaire
€/m²
DEM n°3
11/09/2020
27//AV/67//1
[Adresse 17]
[Localité 34]
175.000
55
3.181,82
DEM n°4
27/07/2022
27//AS/181//3
[Adresse 3]
[Localité 34]
95.000
30
3.166,67

Le commissaire du Gouvernement retient une valeur moyenne de 3.335 euros/m² et applique plusieurs coefficients de pondération en fonction de facteurs de plus et moins-value :
+25% pour tenir compte de la superficie plus petite que les termes de comparaison ; -10% pour tenir compte du fait que le bien est situé dans une copropriété dégradée ;-15% pour tenir compte du fait que le local est en état d’usage et mal conformé (tout en longueur) ;+17,5% pour tenir compte de la cave A de 9,3 m² (valorisée de la surface pondérée).
Le commissaire du Gouvernement obtient une valeur arrondie de 3.750 euros/m².

Huit termes de comparaison sont proposés par le commissaire du Gouvernement pour l’évaluation de la cave B.

Termes
Date de mutation
Références de publication
Adresse
Prix de vente

Surface

Prix unitaire
€/m²
CG n°9
12/11/2021
2021P25409
[Adresse 13]
[XXXXXXXX037]
40.000
67,07
596
CG n°10
07/03/2022
2022P08978
[Adresse 7]
[XXXXXXXX037]
25.900
56
462
CG n°11
05/05/2021
2021P03638
[Adresse 21]
[Localité 35]
10.000
27,02
370
CG n°12
27/10/2023
2023P25691
[Adresse 6]
[Localité 35]
4.500
16
281
CG n°13
08/03/2024
2024P06252
[Adresse 2]
[XXXXXXXX037]
13.000
12
1.083
CG n°14
16/12/2023
2023P32494
[Adresse 15]
[XXXXXXXX037]
10.000
12
833
CG n°15
01/12/2023
2023P05796
[Adresse 22]
[XXXXXXXX037]
4.000
12
333
CG n°16
07/03/2022
2022P08978
[Adresse 7]
[XXXXXXXX037]
25.900
56
462

La valeur moyenne de ces termes est de 565 euros/m². Le commissaire du Gouvernement ne retient que la moyenne des trois caves les plus grandes pour une valeur de 476 euros/m². Il applique plusieurs coefficients de pondération :
-35% pour tenir compte du fait qu’il s’agit de caves difficilement accessibles dans une copropriété dont les parties communes font l’objet d’un arrêté d’insalubrité ;-20% car il s’agit de termes de comparaison situés à [Localité 36].
Le commissaire du Gouvernement obtient une valeur moyenne de 250 euros/m².

***

S’agissant de l’évaluation du local commercial, il convient de retenir les références en valeur occupée, le bien étant loué. Les termes CG n°5 à 8 seront donc écartés.

Les termes DEM n°3 et 4 ont d’ores et déjà été écartés car ils ne sont pas accompagnés des références de publication. Ils ne seront donc pas pris en compte pour l’établissement de la valeur moyenne.

La moyenne des termes CG n°1 à 4 en valeur occupée est de 3.420 euros/m². Seules les références en valeur occupée sont retenues et il n’y a donc pas lieu de retenir un abattement pour occupation commerciale.

- S’agissant des facteurs de plus-value :

La superficie des termes de référence retenus est deux fois supérieure à celle du bien exproprié. Or, au regard de la valeur du marché, les locaux de plus petite taille se vendent plus cher au m² que les locaux de plus grande taille. L’application d’un coefficient de pondération de 25% est donc justifiée.

Les termes de référence retenus ne contiennent pas de cave. Afin de la valoriser, il convient d’appliquer le coefficient de pondération de 17,5% proposé par le commissaire du Gouvernement.

- S’agissant des facteurs de moins-value :

Les parties communes de la copropriété de l’ensemble immobiliser sis [Adresse 29] ont fait l’objet d’un arrêté d’insalubrité en date du 15 juin 2021. Le caractère extrêment dégradé des parties communes, qui a pu être constaté lors du transport sur les lieux du 29 février 2024, doit être pris en compte dans le calcul de la valeur vénale du bien exproprié. Il convient donc d’appliquer l’abattement de 10% proposé par le commissaire du Gouvernement.

Le commissaire du Gouvernement applique un abattement de 15% du fait que le bien serait en état d’usage et mal conformé car tout en longueur.
Il n’est cependant pas suffisamment démontré en quoi une configuration tout en longueur serait en soi un facteur de moins-value. L’état d’usage du bien ne justifie pas non plus l’application d’un abattement. Il n’y a donc pas lieu de retenir un abattement pour état d’usage et mauvaise configuration.

La moyenne retenue pour la valeur vénale du local commercial incluant la cave A est donc de :
3.420 €/m² x 1,25 x 1,175 x 0,90 = 4.520,81 arrondie à 4.521 euros/m².

***

S’agissant de l’évaluation de la cave B, il n’y a pas lieu de retenir les cessions de caves situées à [Localité 36] dès lors que la valeur du marché parisien est incomparable à celle de la Seine-Saint-Denis.

Les termes CG n°9,10 et 13 à 16 seront donc écartés tandis que les termes CG n°11 et 12 seront retenus. La moyenne des termes retenus est donc de 325,50 euros/m².

Les termes retenus n’étant pas situés à [Localité 36], il n’y a pas lieu d’appliquer l’abattement de 20% proposé par le commissaire du Gouvernement.

L’abattement du fait que les parties communes sont dans un état très dégradé est à appliquer sur la valeur moyenne au m² retenue pour la cave B. Il convient également de prendre en compte le fait que cette cave est assez difficile d’accès. L’abattement de 35% retenu par le commissaire du Gouvernement est donc justifié.

La moyenne retenue pour la valeur vénale de la cave B est donc de :
325,50 €/m² x 0,65 = 211,58 arrondie à 212 euros/m².

***
Ainsi l’indemnité de dépossession est fixée à la somme de 93.094,20 euros et est calculée comme suit :
- 4.521 €/m² x 18,20 m² = 82.282,20 euros pour la valeur du local commercial incluant la cave A ;
- 212€/ m² x 51 m² = 10.812 euros pour la valeur de la cave B.

Sur les indemnités accessoires

a)L'indemnité de remploi

Aux termes de l'article R.322-5 du code de l'expropriation, l'indemnité de remploi est calculée compte tenu des frais de tous ordres normalement exposés pour l'acquisition d'un bien de même nature moyennant un prix égal au montant de l'indemnité principale.

En l'espèce, ils ont pour base le montant de l'indemnité principale, à savoir 93.094,20 €.

Ils sont liquidés comme suit :

20 % jusqu'à 5 000 € = 1 000 €
15 % de 5.000 € à 15 000 € = 1 500 €
10 % sur 78.094,20 € = 7.809,42 €

Soit un total de 10.309,42 euros.

b) L’indemnité pour perte de loyers

Les indemnités allouées au titre de la perte de loyers couvrent l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation sur le fondement de l’article L321-1 du Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.

L'indemnité pour perte de loyers couvre une période d'un an, délai laissé à l'exproprié pour réinvestir l'indemnité allouée et retenu de façon constante par la jurisprudence. Cette période correspond au temps nécessaire pour procéder au rachat d’un bien équivalent et trouver un locataire.

L’exproprié a produit le contrat de bail et les dernières quittances de loyers de l’année 2023, il s’agit donc d’un préjudice certain et non éventuel.

Les quittances de loyers versée aux débats indique un loyer mensuel de 500 euros hors charges, soit un loyer annuel de 6.000 euros.

L’indemnité allouée pour la perte de loyers s’élève donc à la somme de 6.000 euros.

En conséquence, sur l'indemnité totale de dépossession :

Elle est égale à 109.403,62 euros, soit :
- 93.094,20 euros, indemnité principale ;
- 10.309,42 euros, indemnité de remploi ;
- 6.000 euros, indemnité de perte de loyers.

Sur les demandes accessoires

Sur les dépens

Aux termes de l'article L.312-1 du code de l'expropriation, l'expropriant supporte seul les dépens de première instance.

La SOREQA, devra par conséquent supporter les dépens de la présente instance.

Sur les frais irrépétibles

Aux termes de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens à payer à l'autre partie, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, la somme qu'il détermine en tenant compte de l'équité. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.

En l'espèce, l'équité commande de condamner la SOREQA, partie tenue aux dépens, à verser à Monsieur [Y] la somme de 3.000 euros.

PAR CES MOTIFS

Le juge de l'expropriation, statuant par jugement contradictoire, en premier ressort et par
mise à disposition au greffe ;

ANNEXE à la présente décision le procès-verbal du transport judiciaire sur les lieux expropriés du 29 février 2024 ;

FIXE à 109.403,62 € (cent neuf mille quatre cent trois euros et soixante-deux centimes), en valeur occupée l'indemnité totale de dépossession due par la SOREQA à Monsieur [P] [Y] pour dépossession des lots n°3 et 36 situés [Adresse 29] à [Localité 34] sur la parcelle cadastrée section AQ n°[Cadastre 23] ;

DIT que la somme de 109.403,62 € est ainsi composée :

- 93.094,20 euros, indemnité principale ;
- 10.309,42 euros, indemnité de remploi ;
- 6.000 euros, indemnité de perte de loyers.

CONDAMNE la SOREQA à payer à Monsieur [P] [Y] une somme de 3.000 € le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SOREQA au paiement des dépens de la présente procédure.

Cécile PUECH

Greffier
Rémy BLONDEL

Juge


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : Expropriations 3
Numéro d'arrêt : 23/00223
Date de la décision : 27/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-27;23.00223 ?
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