Décision du 12 Juin 2024
Minute n° 24/0147
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY
JURIDICTION DE L’EXPROPRIATION
DE LA SEINE-SAINT-DENIS
JUGEMENT FIXANT INDEMNITÉS
du 12 Juin 2024
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Rôle n° RG 23/00162 - N° Portalis DB3S-W-B7H-X4CP
Le juge de l’expropriation du département de la SEINE-SAINT-DENIS
DEMANDEUR :
ETABLISSEMENT PUBLIC FONCIER D’ILE DE FRANCE (EPFIF)
[Adresse 4]
représentée par Maître Michaël MOUSSAULT de la SELAS DS AVOCATS, avocats au barreau de PARIS
DÉFENDEUR :
Monsieur [J] [N]
[Adresse 2]
représenté par Maître Christine AYDIN, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS
INTERVENANT :
DIRECTION DEPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES - POLE D’EVALUATION DOMANIALE représentée par Messieurs [W] [S] et [Y] [K], commissaires du Gouvernement
[Adresse 6]
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Charlotte THIBAUD, Vice-Présidente, désignée par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la cour d’appel de Paris
Cécile PUECH, Greffier présente lors de la mise à disposition
PROCÉDURE :
Date de la visite des lieux : 15 novembre 2023
Date de la première évocation et des débats : 24 janvier 2024 ; 06 mars 2024 ; 30 avril 2024
Date de mise à disposition : 12 juin 2024
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [J] [N] était propriétaire des lots n°819, 961, 871 et 1039 dans le bâtiment 4 de la copropriété du [14], situés [Adresse 3]).
La copropriété du [14] est édifiée sur les parcelles cadastrées section [Cadastre 9], [Cadastre 5], 62, 63, 64 et [Cadastre 10].
Les lots n° 819 et 871sont deux appartements de type F3, d’une superficie de 56 m² chacun et les lots n°961 et 1039 sont deux caves. Pour une description plus précise des lieux, il conviendra de se reporter au procès-verbal du 15 novembre 2023, annexé à la présente décision.
Par décret n° 2015-99 du 28 janvier 2015, l’Opération de Requalification des COpropriétés Dégradées du quartier dit du Bas [Localité 15] (ORCOD), comprenant les copropriétés du [14] et de l’Etoile du [14], a été déclarée d’Intérêt National (ORCOD IN) et sa mise en oeuvre a été confiée à l’Etablissement public foncier d’Ile-de-France (EPFIF).
La copropriété du [14] est située dans le périmètre de la ZAC dite du Bas [Localité 15] qui a fait l’objet d’une déclaration d’utilité publique (DUP) par arrêté préfectoral n° 2019-2388, en date du 6 septembre 2019.
Par un arrêté préfectoral n° 2023-0389, en date du 21 février 2023, les lots situés dans le bâtiment 4 de la copropriété du [14] ont été déclarés cessibles au profit de l’EPFIF.
Une ordonnance d’expropriation, emportant transfert de propriété, a été rendue le 29 juin 2023 au profit de l’EPFIF.
L’EPFIF a notifié son Mémoire valant offres d’indemnisation à [R] [N] par acte d’huissier en date du 18 avril 2023, délivré selon les modalités des articles 656 et 658 du code de procédure civile.
Par une requête reçue le 26 juin 2023 par le greffe, accompagnée du Mémoire valant offres, l’EPFIF a saisi la juridiction de l’expropriation du tribunal judiciaire de Bobigny aux fins de fixation de la valeur des biens de Monsieur [N].
En l’absence d’accord entre les parties, et conformément aux dispositions de l’article R.311-9 du code de l’expropriation, la réception de la requête par la juridiction est postérieure d’au moins un mois à la date de réception par Monsieur [N] des offres de l’EPFIF.
L’EPFIF a notifié à Monsieur [N] la saisine de la juridiction de l’expropriation par acte d’huissier en date du 29 juin 2023, délivré selon les modalités des articles 656 et 658 du code de procédure civile.
Par une ordonnance rendue le 15 septembre 2023, le juge de l’expropriation a fixé le transport sur les lieux et l’audition des parties au 15 novembre 2023, ainsi que l’audience au 24 janvier 2024.
L’EPFIF a notifié cette décision à Monsieur [N] par acte d’huissier en date du 09 octobre 2023, délivré selon les modalités de l’articles 655 du code de procédure civile. La date de réception par l’exproprié lui a laissé :
- un délai de six semaines au moins entre la date de réception du mémoire de l’EPFIF et celle du transport, conformément aux dispositions de l’article R.311-14 du code de l’expropriation ;
- et un délai au moins égal à quinze jours entre la date de la notification de l’ordonnance de transport sur les lieux et la date de la visite elle-même, conformément aux dispositions de l’article R.311-15, 4ème alinéa, du code de l’expropriation.
Monsieur [N] était absent, mais représenté par Maître Christine AYDIN lors du transport sur les lieux du 15 novembre 2023.
Dans ses dernières écritures datées du 5 mars 2024 et reçues le même jour, l’EPFIF demande au tribunal de fixer la valeur des biens de Monsieur [N] à un montant de 72.411,76 € en valeur occupée, de la manière suivante :
S’agissant des lots n°819 et 961,
- Indemnité principale : 27.896 €, valeur de l’appartement cave et parties communes générales intégrées après abattement de 15 % pour occupation (56 m² x 660 €) x 0,85 -3520 € ;
- Indemnité de remploi : 3.789,60 € ;
- Perte de revenus locatifs : 4.540,56 €.
S’agissant des lots n°871 et 1039,
- Indemnité principale : 27.896 €, valeur de l’appartement cave et parties communes générales intégrées après abattement de 15 % pour occupation (56 m² x 660 €) x 0,85 - 3520 € ;
- Indemnité de remploi : 3.789,60 € ;
- Perte de revenus locatifs : 4.500 €.
Aux termes de son dernier mémoire reçu le 30 avril 2024, Monsieur [N] demande au juge de l’expropriation de :
“A TITRE PRINCIPAL
Indemnité principale 201.600 €
Indemnité de remploi 20 160 €
Perte de revenus locatifs 19 800 €
Préjudice de déménagement 20 000 €
Préjudice moral 20 000 €
Article 700 du CPC 3 000 €
Dépens à la charge de l’expropriant.”
Dans ses dernières écritures, datées du 11octobre 2023 et reçues le 14 novembre 2023, produites avant transport sur les lieux, le commissaire du Gouvernement évalue la valeur des biens de Monsieur [N] à un montant de 55.076 € en valeur libre ou à un montant de 46.760 € en valeur occupée pour chacun des lots n°819 et 871, de la manière suivante:
S’agissant du lot n°819,
En valeur libre
- Indemnité principale : 49.160 €, valeur de l’appartement cave et parties communes intégrés (56m² x 935 €) - 3200 € pour absence de parking ;
- Indemnité de remploi : 5.916 € ;
En valeur occupée
- Indemnité principale : 41.600 €, valeur de l’appartement cave et parties communes intégrés (56m² x 800 €) - 3200 € pour absence de parking ;
- Indemnité de remploi : 5.160. € ;
- Perte de revenus locatifs : évaluée à 6 mois de loyers HT et hors charges sous réserve de la production d’un bail en cours de validité à la date de l’ordonnance d’expropriation ainsi que les trois dernières quittances de loyers ;
S’agissant du lot n°871,
En valeur libre
- Indemnité principale : 49.160 €, valeur de l’appartement cave et parties communes intégrés (56m² x 935 €) - 3200 € pour absence de parking ;
- Indemnité de remploi : 5.916 € ;
En valeur occupée
- Indemnité principale : 41.600 €, valeur de l’appartement cave et parties communes intégrés (56m² x 800 €) - 3200 € pour absence de parking ;
- Indemnité de remploi : 5.160. € ;
- Perte de revenus locatifs : évaluée à 6 mois de loyers HT et hors charges sous réserve de la production d’un bail en cours de validité à la date de l’ordonnance d’expropriation ainsi que les trois dernières quittances de loyers ;
En vertu de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait référence aux écritures transmises pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.
À l’audience du 24 janvier 2024, l’affaire a été renvoyée, conformément au calendrier de procédure contradictoirement arrêté entre les parties, à l’audience du 06 mars 2024, puis à l’audience du 30 avril 2024.
À cette dernière audience, les parties comparantes ont développé les éléments de leurs mémoires, en application des dispositions de l’article R.311-20, 1er alinéa, du code de l’expropriation.
L’affaire a été mise en délibéré au 12 juin 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande de fixation de l’indemnité de dépossession
Aux termes des articles L.311-5 et L. 321-1 du code de l’expropriation, à défaut d’accord des parties sur le montant des indemnités, celles-ci sont fixées par le juge de l'expropriation et couvrent l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l’expropriation.
Selon l'article L 321-3 du code de l' expropriation le jugement distingue, dans la somme allouée à chaque intéressé, l'indemnité principale et, le cas échéant, les indemnités accessoires en précisant les bases sur lesquelles ces diverses indemnités sont allouées.
L’indemnité réparatrice allouée à l’exproprié doit lui permettre de se retrouver en même et semblable état et de se procurer un bien identique, similaire ou équivalent à celui dont il est dépossédé par l’opération d’expropriation, soit un bien présentant les mêmes caractéristiques (lieu, année de construction, composition, état d’entretien…) sous réserve, de fait, des biens disponibles sur le marché immobilier.
Plus précisément, le préjudice matériel subi du fait de l’opération d’expropriation est généralement équivalent à la valeur vénale du bien dont l’exproprié est privé. Celle-ci n’est pas nécessairement égale au coût de remplacement du bien, et ce principalement lorsque aucun bien similaire à celui dont l’exproprié est dépossédé n’est offert sur le marché immobilier local ou n’est susceptible d’être acquis par un particulier.
Sur les éléments préalables à la détermination des indemnités
Sur les dates à retenir
Le juge de l’expropriation doit déterminer les dates suivantes et les prendre en considération lors de l’évaluation de la valeur vénale du bien exproprié :
* Date pour apprécier la consistance des biens : selon les dispositions de l’article L.322-1 du code de l’expropriation, le juge fixe le montant des indemnités d’après la consistance des biens à la date de l’ordonnance portant transfert de propriété. Lorsque l’ordonnance d’expropriation n’est pas intervenue au jour du jugement de première instance, la consistance des biens s’apprécie à la date du dit jugement. La consistance d’un bien correspond principalement aux éléments qui le composent et à ses caractéristiques (état d’entretien, de très mauvais à très bon ; situation d’occupation, libre ou occupé ; ...) ;
* Date de référence pour déterminer les règles d’urbanisme et l’usage effectif des biens : elle se situe, en principe, un an avant l'ouverture de l'enquête publique préalable à la déclaration d’utilité publique, conformément à l’article L.322-2 du code de l’expropriation ; toutefois, aux termes des articles L.213-6 et L.213-4 du code de l’urbanisme, lorsqu'un bien est soumis au droit de préemption urbain et n’est pas situé dans une Zone d’aménagement différée (ZAD), cette date de référence se situe à la date à laquelle est devenue opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public, approuvant, modifiant ou révisant le plan local d’urbanisme, et délimitant la zone dans laquelle est situé le bien ;
En application des articles L 213-6 et L 213-4 du code de l’urbanisme, l’acte qui se borne à modifier le périmètre d’une zone d’un PLU sans affecter ses caractéristiques ne peut être pris comme date de référence au sens des dispositions de l’article L 213-4 du code de l’urbanisme (3ème civ. 13 juin 2019 pourvoi n°18-18.445).
* Date pour apprécier la valeur des biens : selon le 1er alinéa de l’article L.322-2 du code de l’expropriation, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance, soit à la date du jugement en fixation des indemnités.
En l’espèce, les lots n°819, 961, 871 et 1039 doivent être évalués selon :
- leur consistance au 29 juin 2023, date de l’ordonnance d’expropriation ;
- les possibilités offertes par les règles d’urbanisme définies par le plan local d’urbanisme (PLU) approuvé le 10 juillet 2012 et modifié le 08 avril 2016.
Bien qu’une autre modification du PLU soit intervenue le 13 novembre 2018, celle-ci n’a pas modifié les caractéristiques de la zone où se situe l’ensemble immobilier, de sorte qu’elle ne peut être retenue comme date de référence.
En conséquence, la date de référence est celle de la dernière modification du PLU délimitant la zone dans laquelle est situé l'ensemble immobilier dont s'agit, à savoir la modification numéro un du 8 avril 2016.
Les parcelles sont situées en zone UR1 du PLU, correspondant au renouvellement urbain du centre-ville ;
- les valeurs d’échange à la date du présent jugement.
Sur la consistance de l’ensemble immobilier et des biens de la partie défenderesse
Pour une description précise, il conviendra de se reporter au procès-verbal de transport sur les lieux, composé d’une présentation générale et d’un descriptif des biens à évaluer, annexé au présent jugement.
- Sur les copropriétés du [14] et de l’Etoile du [14]
La commune de [Localité 16] est constituée de plusieurs quartiers de grands ensembles édifiés dans les années 1960, selon un plan qui prévoyait une desserte par l’autoroute A 87. Cette voie express n’ayant pas été réalisée, la commune était enclavée n’étant desservie ni par les voies routières majeures de la région parisienne ni par les lignes de RER et de métro. Les bus étaient les seuls transports en commun.
Depuis décembre 2019, une nouvelle branche de la ligne T4 du tramway est en service. Elle relie [Localité 19] à [Localité 20] et dessert [Localité 16]. Elle offre une correspondance avec le RER E à [Localité 11]. La création d’une gare de la future ligne 16, métro express, par la SGP et le GPA est en cours de réalisation.
Les copropriétés du [14] et de l’Etoile du [14] sont géographiquement imbriquées, aucune clôture ne sépare la première de la seconde, la numérotation des bâtiments englobe les deux copropriétés et n’est pas propre à chacune d’elle. La copropriété du [14] est composée de 10 bâtiments, comprenant 873 logements, et celle de l’Etoile du [14] de 8 bâtiments, comprenant 556 logements, étant précisé que l’un des bâtiments (B 18) a d’ores et déjà fait l’objet d’une démolition.
L’EPFIF et le commissaire du Gouvernement exposent les conclusions d’une étude concernant les copropriétés contiguës du [14] et de l’Etoile du [14] réalisée par la commune de [Localité 16] en 2014. Celles-ci mettent en évidence un contexte social difficile en termes de niveau de vie (60 % des ménages ayant un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté), de taux de chômage (29 %), d’occupation des logements (près de 20 % l’étant par plus d’un ménage et par plus de 4 personnes), de rotation importante tant en ce qui concerne les propriétaires que les locataires.
Le commissaire du Gouvernement indique que les copropriétés du [14] et de l’Etoile du [14] sont parmi les copropriétés clichoises les plus en difficultés au plan social et précise qu’elles ont fait l’objet :
- d’un plan de sauvegarde signé le 19 janvier 2010 entre l’Etat, le Département 93 et la commune de [Localité 16] ; il avait pour objectif de résorber les impayés de charges, de réaliser des travaux urgents et des mises aux normes, de lutter contre les marchands de sommeil, d’individualiser les réseaux de fluides des différents bâtiments, de réaliser des travaux de rénovation énergétique ; il a pris fin en 2015 ;
- d’une opération de requalification des copropriétés dégradées du quartier dit du Bas [Localité 15], selon un décret n° 2015-99 en date du 28 janvier 2015 déclarant ladite opération d’intérêt national (ORCOD IN) ; la mise en oeuvre de l’opération a été confiée à l’EPFIF ;
- d’un nouveau plan de sauvegarde pour une durée de cinq ans, institué par l’arrêté préfectoral n° 2017-2399 du 11 septembre 2017.
L’expropriant et le commissaire du Gouvernement ajoutent que la copropriété fait l’objet d’une administration judiciaire, en raison d’un important arriéré de charges et ils font état du décret n°2021-1005 du 29 juillet 2021, pris sur le fondement de l’article L. 522-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, autorisant l’expropriant à prendre possession de manière anticipée des immeubles situés dans le périmètre de l’ORCOD.
- Sur le bâtiment 4 de la copropriété du [14]
Les biens à évaluer sont situés dans le bâtiment B4, faisant partie de la copropriété du [14].
Il s’agit d’un immeuble à usage d’habitation, composé :
- d’un sous-sol à usage de caves ;
- d’un rez-de-chaussée ;
- de 10 étages.
Il comprend 175 logements, dont 8 F2, 122 F3 et 45 F4, accessibles par 4 entrées et cages d’escalier nommées A, B, C et D.
- Sur les biens expropriés
Il s’agit :
- du lot n°819 : un appartement de type F3, situé au 8ème étage, de l’escalier B, d’une superficie de 56 m², superficie non contestée par les parties :
. De manière générale, les appartements de type F3 dans le bâtiment 4 sont composés d’une entrée et d’un couloir qui desservent une cuisine, un WC et une salle de bain ainsi qu’une pièce de vie et deux chambres, l’une d’entre elles étant accessible à partir de la pièce de vie ;
. il est dans un état d’entretien qualifié de :
. mauvais par l’EPFIF, entité expropriante ;
. bon par l’expropriée ;
. moyen par le commissaire du Gouvernement ;
- du lot n°871 : un appartement de type F3, situé au 10ème étage de l’escalier C, d’une superficie de 56 m², superficie non contestée par les parties, qui n’a pu être visité, faute de personne présente pour ouvrir l’appartement.
- des lots n° 961 et 1039, deux caves ; elles n’ont pas été visitées pour des raisons de sécurité ;
L’EPFIF fait valoir à titre principal au visa de l’article L322-2 dernier alinéa du code de l’expropriation et à titre subsidiaire au visa de l’article 1303 du code civil, qu’ayant fait réaliser d’importants travaux de rénovation aussi bien des parties communes que des parties privatives, depuis sa prise de possession anticipée, et en particulier la mise en conformité de l’installations électrique des appartements appartenant à Monsieur [N], l’état d’entretien de ces appartements ne peut être qualifié que de mauvais.
Aux termes de l’article L 322-2 alinéa 4 du code de l’expropriation, quelle que soit la nature des biens, il ne peut être tenu compte, même lorsqu'ils sont constatés par des actes de vente, des changements de valeur subis depuis cette date de référence, s'ils ont été provoqués par l'annonce des travaux ou opérations dont la déclaration d'utilité publique est demandée, par la perspective de modifications des règles d'utilisation des sols ou par la réalisation dans les trois années précédant l'enquête publique de travaux publics dans l'agglomération où est situé l'immeuble.
En l’occurrence, l’EPFIF ne verse aux débats aucun document permettant d’établir la consistance, le montant et la date de réalisation des travaux qu’elle évoque, toutefois elle indique dans son dernier mémoire qu’ils ont été effectués après sa prise de possession anticipée du bâtiment B4 selon arrêté n°2023-0650 du Préfet de Seine [Localité 23] en date du 11 avril 2023.
Dès lors, ces travaux n’ont pas été réalisés dans les trois années précédant l’enquête publique, laquelle s’agissant du bâtiment B4 a été prescrite par un arrêté n°2021-2884 du 21 octobre 2021 et s’est déroulée du 22 novembre 2021 au 17 décembre 2021 et par voie de conséquence, l’alinéa 4 de l’article L 322-2 du code de l’expropriation n’est pas applicable en l’espèce.
Selon l’article 1303 du code civil, en dehors des cas de gestion d’affaire et de paiement de l’indu, celui qui bénéficie d’un enrichissement injustifié au détriment d’autrui doit, à celui qui s’en trouve appauvri, une indemnité égale à la moindre des deux valeurs de l’enrichissement et de l’appauvrissement.
Aux termes de l’article 1303-1 du même code, l’enrichissement est injustifié lorsqu’il ne procède ni de l’accomplissement d’une obligation par l’appauvri ni de son intention libérale.
En l’espèce, les travaux de sécurisation et de rénovation invoqués par l’EPFIF relèvent de ses obligations légales en sa qualité de possesseur et de propriétaire des biens à la suite d’une part, de sa prise de possession anticipée du bâtiment B4 selon arrêté n°2023-0650 du Préfet de Seine Saint Denis en date du 11 avril 2023 et d’autre part, du transfert de propriété selon ordonnance d’expropriation portant transfert de propriété du 29 juin 2023.
Dans ces conditions, l’appauvrissement de l’EPFIF, si tant est qu’il soit avéré, ce qui n’est pas le cas en l’absence de production de tout document, est justifié et par suite il ne peut y avoir enrichissement sans cause de Monsieur [N] au titre de ces travaux.
En conséquence, conformément aux constatations effectuées aux termes du procès-verbal de transport sur les lieux du 15 novembre 2023, l’état d’entretien du lot n°871 ne peut être qualifié que de moyen faute d’avoir pu être visité et celui du lot n°819 ne peut être qualifié que de mauvais à moyen notamment au regard du très mauvais état de la salle de bain présentant de nombreuses moisissures sur les murs et au plafond ainsi que des traces d’un important dégât des eaux dans l’une des chambres.
Sur la situation locative
L’EPFIF considère, dans ses dernières écritures, que l’appartement, au jour de l’ordonnance d’expropriation, était occupé par un tiers et évalue les biens en valeur occupée.
Le commissaire du Gouvernement, qui a rédigé ses conclusions postérieurement au transport sur les lieux, évalue les biens selon une alternative en valeur libre et en valeur occupée.
Monsieur [N] explique et justifie que ses biens sont loués par la production de deux contrats de baux d’habiation ainsi que de trois quittance de loyers que les deux appartements sont loués, celui correspondant au lot n°871 à Monsieur [A] [Z] selon bail conclu le 22 avril 2017 et celui correspondant au lot n°819 à Monsieur [C] [D] [X] et Madame [H] [V] [G] selon bail conclu le 10 décembre 2016.
Les biens sont évalués selon leur consistance au jour de l’ordonnance d’expropriation, soit le 29 juin 2023. Lors de la visite des lieux le 15 novembre 2023, le lot n°819, seul à avoir pu être visité était occupé par un tiers. Aucune des parties ne faisant état d’une modification de l’état d’occupation des appartements entre ces deux dates, les biens sont évalués en valeur occupée.
Ainsi, les biens seront comparés à des cessions de biens occupés.
Sur la méthode d'évaluation
Aux termes de leurs mémoires respectifs, les parties s’accordent sur l’utilisation de la méthode d’évaluation par comparaison, caves intégrées.
Cette méthode, adaptée aux circonstances de l’espèce et consistant à comparer les biens à évaluer à des cessions de biens équivalents qui ont eu lieu dans la période récente sur le marché immobilier local, sera adoptée.
L’évaluation se fera millièmes de copropriété associés aux biens à évaluer intégrés.
Pour déterminer les indemnités de dépossession revenant à Monsieur [N] au titre de l’expropriation de deux appartements (lots n°819 et 871) et de deux caves (lots n°961 et 1039), le commissaire du Gouvernement se réfère majoritairement à des termes de comparaison comprenant un appartement, une cave et un emplacement de stationnement et soustrait à la valeur retenue une somme de 3.200 €, correspondant à la valeur d’un emplacement de stationnement.
Néanmoins, il résulte des éléments versés au dossier et en particulier des termes de référence cités par l’EPFIF et le Commissaire du Gouvernement que :
- les termes de comparaison versés par l’EPFIF correspondent à des cessions amiables de biens situés dans les copropriétés du [14] et de l’Etoile du [14] dont le prix de vente exposé inclus, majoritairement, la valeur d’une cave et d’un emplacement de stationnement à celle de l’appartement ;
Toutefois, il convient d’observer que les termes DEM n° 56, 62, 65, 67, 70, 89, 90, 91 93, 97, 98, 99, 101, 102, 103 et 104 consistant en des cessions d’appartement avec cave mais sans emplacement de stationnement, ont des valeurs d’échange identiques à celles des autres termes de comparaison consistant en des ventes d’appartement comprenant une cave et une place de parking, à situation d’occupation égale.
- le commissaire du Gouvernement récapitule les valeurs déterminées en 2022 par la présente juridiction lors de la fixation des indemnités de biens, cave et parking intégrés, situés dans le bâtiment 10 de la copropriété de l’Etoile du [14] ;
- l’ensemble des termes de comparaison produits par le commissaire du Gouvernement correspondant à des cessions de biens similaires situés dans des copropriétés autres que celles du [14] et de l’Etoile du [14], laisse apparaître une valeur supérieure des biens cédés composés d’un appartement, d’une cave et d’un parking par rapport à ceux qui ne disposent pas d’emplacement de stationnement ; ainsi :
Résidences
Parking/sans parking
Valeur unitaire moyenne
[24]
parking
2.077 €/m²
Notre Dame des Anges
sans parking
1.825 €/m²
[18]
sans parking
2.043 €/m²
[25]
parking
2.089 €/m²
Il est ainsi suffisamment démontré que la vente d’un emplacement de stationnement comme accessoire d’un appartement est un facteur de plus-value et à l’inverse, l’absence d’emplacement de stationnement est un facteur de moins-value dont il conviendra de tenir compte, le cas échéant, lors de la détermination de la valeur unitaire des biens à évaluer, dépourvus d’emplacement de stationnement.
En revanche, il n’apparaît pas justifié de déterminer la valeur du bien en soustrayant à la valeur retenue pour l’appartement, cave intégrée, la valeur d’un emplacement de stationnement, étant observé qu’au regard des termes de comparaison portant sur les copropriétés voisines, cette méthode ne reflète pas la pratique sur le marché immobilier.
Par ailleurs, les termes de comparaison concernant les copropriétés du [14] et de l’étoile du [14], produits tant par l’EPFIF que par le Commissaire du Gouvernement, ne font pas apparaître une différence de valeur significative selon qu’il s’agit d’un appartement de 3 ou 4 pièces, de sorte qu’une même valeur sera déterminée au mètre carré aussi bien pour un logement de 3 pièces que de 4 pièces.
Sur l’indemnité principale
L’indemnité principale de dépossession correspond à la valeur vénale de l’appartement, de la cave et de l’emplacement de stationnement extérieur ainsi qu’aux tantièmes des parties communes de la copropriété associés à ces lots.
La valeur des biens dont Monsieur [N] est dépossédé sera déterminée par comparaison entre, d’une part, la consistance des biens présentés à titre de termes de comparaison et leurs valeurs d’échange et, d’autre part, les caractéristiques des biens à évaluer.
Sur les termes de référence proposés par les parties
- Termes de comparaison cités par l’EPFIF (tableaux 1, 2, 3, 4, 5 et 6 annexés) (DEM signifie EPFIF)
En application de l’article L 322-8 du code de l’expropriation, sous réserve de l'article L 322-9, le juge tient compte, des accords intervenus entre l'expropriant et les divers titulaires de droits à l'intérieur du périmètre des opérations faisant l'objet d'une déclaration d'utilité publique et les prend pour base lorsqu'ils ont été conclus avec au moins la moitié des propriétaires intéressés et portent sur les deux tiers au moins des superficies concernées ou lorsqu'ils ont été conclus avec les deux tiers au moins des propriétaires et portent sur la moitié au moins des superficies concernées.
En l’occurrence, l’EPFIF ne produit aucun document permettant d’établir que des accords seraient intervenus avec au moins la moitié des propriétaires intéressés et portant sur les deux tiers au moins des superficies concernées ou avec les deux tiers au moins des propriétaires et portant sur la moitié au moins des superficies concernées.
Dès lors, les dispositions de l’article L 322-8 du code de l’expropriation ne s’appliquent pas en l’espèce et par voie de conséquence, les cessions de biens situées dans la copropriété du [14] produites à titre de termes de comparaison ne seront pas prises pour base de la détermination de la valeur des lots n°819, 961, 871 et 1039, mais seront prises en compte au même titre que les autres termes de comparaison versés aux débats.
L’EPFIF produit aux débats 111 termes de comparaison correspondant à :
- des ventes réalisées entre 2017 et 2022 d’appartements comprenant principalement comme accessoires une cave et un parking et situés dans les bâtiments B3, B4 et B10 de la copropriété du [14] à [Localité 16], comme les biens à évaluer, en :
mauvais état (DEM n° 1 à 7 - tableau 1 ; DEM n°110 et 111 - tableau 6),
état moyen (DEM n° 8 à 21 - tableau 2 ; DEM n°89 à 109 - tableau 6),
bon état (DEM n° 22 à 29 - tableau 3 ; DEM n°64 à 88 - tableau 6 ),
très bon état (DEM n° 30 et 31 - tableau 4 ; DEM n°61 à 63 - tableau 6),
étant précisé que les termes DEM n° 26, 28 et 29, 43, 45, 47, 56, 62, 65, 67, 70, 78, 84, 85, 86, 87, 89, 90, 91, 93, 97, 98, 99, 101, 102, 103, 104, 105, 106 et 109 n’ont pas d’emplacement de stationnement et que le terme DEM n° 3 n’a pas de cave ;
L’établissement public est l’unique acquéreur des cessions qu’il présente à titre de termes de comparaison.
L’EPFIF, en l’espèce, offre une valeur de 1375 €/m² en valeur libre, le logement appartenant aux défendeurs étant un F4, occupé et dans un état d’entretien qualifié de très bon par l’entité expropriante.
Monsieur [N] ne formule en soi aucune critique sur les termes de référence proposés par l’EPFIF, se contentant d’indiquer que le prix offert est trop bas et sans rapport avec les prix pratiqués par d’autres acquéreurs que l’EPFIF.
En l’espèce, pour déterminer la valeur des biens de Monsieur [N] :
Parmi les 111 références citées par l’EPFIF, ne sont pas retenus :
- les termes de comparaison DEM n° 6, 7, 18, 19, 20, 21, 25, 26, 27, 28, 29, 31, 32, 33, 35, 38, 39, 41, 42, 43, 44, 45, 60, 63, 76, 77, 78, 79, 80, 81, 82, 83, 84, 85, 86, 87, 88, 105, 106, 107, 108, 109, parce qu’ils ont été échangés, ou leurs valeurs ont été fixées, alors que les biens étaient libres de toute occupation et qu’ils ont été, en conséquence, plus valorisés que ne devront l’être les biens à évaluer, occupés par un tiers ;
- les termes de comparaison DEM n°1, 2, 8, 9, 10 et 30, parce qu’ils ne présentent pas de références de publication suffisamment précises ;
- les termes de comparaisons DEM 36, 37, 58 et 59, parce qu’il n’est ni indiqué, ni justifié de ce que les biens en question étaient libres de toute occupation ou au contraire occupés ;
En revanche, parmi les 111 références citées par l’EPFIF, les 59 termes de comparaison suivants sont retenus, car ils portent sur des biens similaires à ceux à évaluer : DEM n°3, 4, 5, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 22, 23, 24, 34, 40, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52, 53, 54, 55, 56, 57, 61, 62, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75, 89, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 97, 98, 99, 100, 101, 102, 103, 104, 110 et 111.
Ces 59 termes sont donc retenus selon les moyennes suivantes :
Etat d’entretien
Terme de référence
Valeur moyenne occupée
Mauvais état d’entretien
Cessions
510 €/m²,
moyenne des termes DEM n° 3, 4, 5 40, 110 et 111
Etat d’entretien mauvais à moyen
Cessions
/
Etat d’entretien moyen
Cessions
723 €/m²,
moyenne des termes DEM n°11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 34, 46, 49, 50, 53, 55, 89, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 97, 98, 99, 100, 101, 102, 103, 104
Etat d’entretien moyen à bon
Cessions
/
Bon état d’entretien
Cessions
893 €/m²,
moyenne des termes DEM n° 22, 23, 24, 47, 48, 51, 52, 54, 56, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75
Très bon état d’entretien
Cessions
1063€/m²,
valeur du terme DEM n° 57, 61 et 62
- Termes de comparaison cités par le commissaire du Gouvernement (tableaux 7, 8, 9, 10, 11, et 12 annexés) (CG signifie commissaire du Gouvernement)
Le commissaire du Gouvernement cite 66 termes de comparaison, précisant avoir affiné sa recherche à la période allant de 2020 à 2022 et l’avoir étendue aux bâtiments, 3, 4, 11 et 12 des copropriétés du [14] et de l’Etoile du [14], de même type que le bâtiment B4 (R+10 ou R+11).
- 28 termes de comparaison (tableau 7) correspondant à des ventes réalisées entre 2020 et 2022, comprenant trois lots, soit un appartement, une cave et un emplacement de stationnement selon les observations non contestées du commissaire du Gouvernement, situés :
. soit dans le bâtiment 4, comme les biens à évaluer ;
. soit dans les bâtiments 3, 11 et 12 de la même copropriété du [14] et de la copropriété voisine de l’Étoile du [14] à [Localité 16] ;
étant précisé que ces quatre bâtiments ont une configuration identique et que l’EPFIF est l’unique acquéreur des cessions présentées ;
- 30 termes de comparaison (tableaux 8, 9, 10 et 11) correspondant à des ventes d’appartements (et de leurs accessoires : cellier, cave, emplacement de stationnement) situés dans des copropriétés proches de celles du [14] et de l’Etoile du [14], dans le périmètre de la ZAC dite du Bas-[Localité 15], à savoir La Résidence [24], la Résidence [21], La Résidence [18] et la Résidence [25] ;
- 8 termes de comparaison correspondant à des cessions de parkings extérieurs sur les copropriétés du [14] et de l’Etoile du [14] (tableau 12).
Le commissaire du Gouvernement fait également état des valeurs retenues par le juge de l’expropriation du tribunal judiciaire de Bobigny dans les jugements de 2021-2022 relatifs à la procédure d’expropriation du bâtiment 10 de la copropriété de l’Etoile du [14] de la façon suivante:
Etat
Mauvais
Mauvais-Moyen
Moyen
Moyen-Bon
Bon
Très bon
Libre
660 €/m²
825 €/m²
935 €/m²
1.050 €/m²
1.260 €/m²
1.375 €/m²
Occupé
560 €/m²
715 €/m²
800 €/m²
880 €/m²
1.000 €/m²
1.170 €/m²
Il fait remarquer que :
- les copropriétés voisines ne sont pas dans un état comparable à celui des copropriétés du [14] et de l’Etoile du [14], qui se trouvent dans un état de dégradation bien plus prononcé ; il estime que ces copropriétés sont aujourd’hui dans une situation financière stable et pérenne grâce aux travaux de rénovation, de suivi et d’accompagnement mis en place ; il précise, en conséquence, ne pas retenir ces termes pour la détermination de la valeur du logement en cause;
- les dernières cessions amiables dans les copropriétés du [14] et de l’Etoile du [14] font apparaître un prix en augmentation de 10 %, augmentation également retenue par le juge de l’expropriation dans ses décisions rendues en 2021 et 2022.
Le commissaire du Gouvernement, reprenant cette majoration de 10 % observée dans les évaluations récentes, propose les valeurs suivantes :
Appartement
avec cave et parking
Mauvais état d’entretien
Etat d’entretien moyen
Bon état d’entretien
Très bon état d’entretien
Valeur libre
660 €/m²
935 €/m²
1.155 €/m²
1.375 €/m²
Valeur occupée
560 €/m²
800 €/m²
985 €/m²
1.165 /m²
Le commissaire du Gouvernement retient en l’espèce, une valeur de 1165 €/m², le logement appartenant à la partie défenderesse étant un F3, occupé par un tiers, avec cave et emplacement de stationnement et dans un état d’entretien qu’il qualifie de très bon après transport.
L’EPFIF ne présente pas d’observations quant aux termes de comparaison produits par le Commissaire du Gouvernement.
Monsieur [N] ne formule aucune critique sur les termes de comparaison cités par le Commissaire du Gouvernement.
En l’espèce, pour déterminer la valeur des biens de Monsieur [N] les termes sont analysés en fonction de leur localisation :
En ce qui concerne les termes de comparaison consistant en des ventes d’appartement avec cave et emplacement de stationnement dans les copropriétés du [14] et de l’Etoile du [14] (tableau 7)
Parmi les 28 références citées par le commissaire du Gouvernement concernant des ventes de F3 et F4 dans les bâtiments 3, 4, 11 et 12 du [14] et de l’Etoile du [14], les 8 termes de comparaison suivants ne sont pas retenus parce qu’ils ont été échangés alors que les biens étaient libres de toute occupation et qu’ils ont été, en conséquence, plus valorisés que ne devront l’être les biens à évaluer, occupés par un tiers ; il s’agit des 8 appartements F3 et F4 vendus libres (CG n° 2, 5, 6, 11, 14, 17, 19 et 20).
Parmi les 28 références citées par le commissaire du Gouvernement concernant des ventes de F3 et F4 dans les bâtiments 3, 4, 11 et 12 du [14] et de l’Etoile du [14], les 20 termes de comparaison suivants sont retenus pour servir la comparaison avec les biens à évaluer car ils correspondent à la vente d’appartements relativement similaires à celui à évaluer ; il s’agit des 20 appartements F3 et F4 vendus occupés par un tiers (CG n° 1, 3, 4, 7, 8, 9, 10, 12, 13, 15, 16, 18, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27 et 28).
Il convient de préciser que les termes CG n° 1, 3, 8, 9, 12, 13 sont également proposés par l’EPFIF (DEM n° 30, 8, 4, 10, 11, 96).
En ce qui concerne les termes de comparaison consistant en des ventes d’appartements, avec accessoires, situés dans les copropriétés voisines de celles du [14] et de l’Etoile du [14] (tableaux 7, 8, 9, 10, et 11)
Le commissaire du Gouvernement verse aussi aux débats 30 termes de comparaison correspondant à des cessions d’appartement avec accessoires (cave ou cellier, voire emplacement de stationnement), situés à [Localité 16] dans des copropriétés voisines de celles de l’Etoile du [14] et du [14].
Ces 30 références sont exposées comme suit selon les caractéristiques exposées par le commissaire du Gouvernement et les valeurs moyennes calculées par la juridiction :
1Résidences
à
Clichy-sous-Bois
Année de construction
et
caractéristiques de l’immeuble
Caractéristiques des biens
***
Termes étudiés
valeur unitaire
moyenne
libre
*
valeur unitaire
moyenne
occupée
**
[24]
[Adresse 12]
1958
288 logements
5 immeubles de
4 étages chacun
appartement
cellier
parking
CG n° 29 à 39
2.077 €/m²
1.766 €/m²
Notre Dame des Anges
[Adresse 8]
1958
192 logements
4 immeubles de
4 étages chacun
appartement
cellier
CG n° 40 à 48
1.825 €/m²
1.551 €/m²
[18]
[Adresse 13]
1961
380 logements
4 immeuble de
4 étages chacun
appartement
cave
CG n° 49 à 57
2.043 €/m²
1.737 €/m²
[25]
[Adresse 1]
1963
168 logements
1 immeuble de
10 étages
appartement
cave
parking
CG n° 58
2.089 €/m²
1.776 €/m²
Moyenne générale
1.991 €/m²
1.692 €/m²
Moyenne des logements avec parking
2.078 €/m²
1.766 €/m²
Moyenne des logements sans parking
1.934 €/m²
1.644 €/m²
* En l’absence de précision, il convient de considérer que les valeurs exposées par le commissaire du Gouvernement s’entendent libres de toute occupation, s’agissant de biens d’habitation.
** Dans le cadre de la présente procédure d’expropriation, l’EPFIF offre une valeur de 15 % inférieure lorsque les appartements sont occupés par un tiers (locataire), étant précisé qu’il s’agit du quantum de l’abattement affecté à la valeur libre de manière constante par la présente juridiction, pour tenir compte de la moins-value sur le marché immobilier générée par une situation d’occupation titrée.
*** Dans le cadre de cette étude, et en l’absence de précision quant à l’état d’entretien des appartements cédés, il y a lieu de considérer qu’il s’agit d’appartements dans des états d’entretien de moyen à bon ; il apparaît en effet au regard des termes de comparaison consistant en des ventes d’appartement au [14] produits par le commissaire du Gouvernement que les logements vendus en mauvais état et en très bon état sont rares.
Il convient de préciser :
- qu’aucun terme de comparaison n’est produit en ce qui concerne la résidence des [22], située [Adresse 7], pourtant également située à proximité de la présente copropriété, faute de cession récente ;
- que seul un terme de comparaison est produit en ce qui concerne la résidence [25] (terme CG n°58) ; cette unique vente ne peut donc être considérée comme représentative de la valeur des logements de cette résidence.
Ces 30 termes de comparaison, bien que situés dans des copropriétés autres que celle du [14] ou de l’Etoile du [14], correspondent à la vente de biens d’une composition similaire à celle des biens à évaluer.
Toutefois, les quatre résidences [24], Notre Dame des Anges, [18] et [25], bien que situées également dans le périmètre de l’ORCOD et de la ZAC du Bas [Localité 15], présentent un meilleur état d’entretien que le bâtiment 4 du [14] ; il est à cet égard observé :
- que, selon les conclusions du commissaire du Gouvernement, si les copropriétés de trois de ces résidences ([24], Notre Dame et [25]) sont soumises à un plan de sauvegarde, à l’instar des copropriétés du [14] et de l’Etoile du [14], ce n’est pas le cas de la résidence [18], qui fait l’objet d’un Programme Opérationnel de Prévention et d’Accompagnement des Copropriétés visant un soutien des copropriétaires pour prévenir des dégradations ; il n’est pas fait état pour ces quatre copropriétés de problématiques financières comparables à celles évoquées pour les copropriétés du [14] et de l’Etoile du [14] ;
- que ces résidences présentent un meilleur état d’entretien que le bâtiment 4 de la copropriété du [14], comme il est possible de le constater sur les photographies produites par le commissaire du Gouvernement.
Il est, en outre, relevé que ces résidences appartiennent à des copropriétés de plus petites dimensions (comptant entre 168 et 380 logements) que celle du [14] (qui compte 873 logements), alors que l’importance du nombre de copropriétaires du [14] est identifiée comme facteur majeur de difficulté ; il est aussi souligné que ces résidences sont, à l’exception de la résidence [25], composées de bâtiments de plus petites tailles, ne présentant que quatre étages, étant observé que le commissaire du Gouvernement ne retient, pour son évaluation, que les ventes portant sur des grands bâtiments des copropriétés du [14] et de l’Etoile du [14], à l’exclusion de celles portant sur les petits bâtiments de ces copropriétés.
À l’inverse, le bâtiment 4 de la copropriété du [14], placée sous administration provisoire depuis 2005, a fait l’objet :
- de deux plans de sauvegarde successifs, en 2010 et 2017, qui n’ont pas permis le nécessaire redressement de la copropriété et la réhabilitation des bâtiments ;
- d’un arrêté municipal en date du 3 septembre 2018 portant sur les équipements communs de la copropriété du [14] ;
- d’un décret du 29 juillet 2021, en cours de mise en oeuvre, déclarant l’extrême urgence de la procédure d’expropriation, laquelle suppose des risques sérieux pour la sécurité des occupants, selon les termes du 2ème alinéa de l’article L.522-1 du code de l’expropriation ;
- de la pose d’un filet de protection au niveau des pignons, comme remarqué par les personnes présentes lors du transport, étant précisé que les pignons du bâtiment 18, édifié dans le cadre du même programme de construction, se sont écartés des murs des façades et que l’immeuble a fait l’objet d’une évacuation de tous ses occupants en urgence avant d’être démoli.
Par ailleurs, il est précisé dans le procès-verbal de transport annexé au présent jugement que les façades sont dans un état médiocre et que les parties communes intérieures sont dans un état d’entretien qualifié de correct à moyen-mauvais.
Dans ces conditions, il est avéré que le bâtiment dans lequel sont situés les biens à évaluer est dans un mauvais état d’entretien, ce qui constitue nécessairement un facteur majeur de dépréciation par rapport aux termes de comparaison situés dans des copropriétés voisines, d’une meilleure consistance.
Au regard de l’ensemble de ces éléments, aucun des termes des références portant sur les appartements situés dans les Résidences Notre-Dame-des-Anges, [18], [24] et [25], ne sera retenu.
- Termes de comparaison versés par Monsieur [N]
(DEF = Défendeur à la présente procédure)
Monsieur [N] se prévaut des ventes suivantes :
- le 28 février 2022 au sein de la Résidence [24] un F3 de 54,46 m² moyennant la somme de 2295 €/m² ;
- le 10 février 2022 au sein de la Résidence la [26], un F3 de 54,96 m² moyennant la somme de 2002 €/m² ;
- le 06 juillet 2021, au sein de la Résidence [18], un F3 de 51,96 m² moyennant la somme de 2117 €/m².
Il ajoute qu’”aucune des dernières ventes a été à moins de 1 500 euros du m², et en faisant la moyenne des 5 dernière ventes sur 5 appartements différents du même niveaux que ceux de Monsieur [N] le m² avoisine les 1800 euros”.
Monsieur [N] fait également état de ce que sur le site leboncoin, sur les 54 appartements mis en vente sur la commune de [Localité 16], aucun n’est en dessous de 120 000 € et sur le site seloger.com sur 233 annonces le premier prix est de 95 000 € pour 39 m² soit 2436 €/m².
Or, Monsieur [N] ne produit ni les actes de vente ni les références de publication des ventes dont il se prévaut, de sorte qu’elles ne peuvent être retenues comme terme de comparaison.
En outre, les références à des annonces publiées sur des sites internet, qui ne sont d’ailleurs pas produites aux débats, dès lors qu’elles ne constituent pas des ventes effectivement réalisées ne peuvent être retenues comme termes de comparaison.
Dès lors, Monsieur [N] ne produit aucun terme de comparaison.
Sur le calcul de l’indemnité principale
Au regard des développements précédents, les termes de comparaison produits par les parties et retenus par la juridiction pour déterminer la valeur des présents biens, occupés, sont les suivants :
Parties
Mauvais
état
état mauvais
à moyen
état moyen
état moyen à bon
Bon état
Très bon état
EPFIF
Cessions - Bâtiments 3, 4 et 10 de la Copropriété du [14]
510 €/m²,
moyenne des termes DEM n° 3, 4, 5, 40, 110 et 111
723 €/m²,
moyenne des termes DEM n° 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 34, 46, 49, 50, 53, 55, 89, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 97, 98, 99, 100, 101, 102, 103, 104
893 €/m²,
moyenne des termes DEM n° 22, 23, 24, 47, 48, 51, 52, 54, 56, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75
1.063 €/m²,
valeur des termes DEM n° 57, 61 et 62
Cessions - Copropriétés du [14] et de l’Etoile du [14]
CG
510 €/m²
moyenne des termes CG n°4 et 8
723 €/m²
moyenne des termes CG n° 3, 7, 9, 12, 15, 18, 21, 25, 26 et 27
893 €/m²
moyenne des termes CG n°10, 16, 22 et 28
1063 €/m²
valeur des termes CG n°1, 23, 24
En l’espèce, pour évaluer les biens expropriés, il sera tenu compte :
- des valeurs offertes par l’EPFIF et proposées par le commissaire du Gouvernement, supérieures, selon l’état d’entretien de l’appartement, aux valeurs mises en évidence par les termes de comparaison, à savoir :
- pour le commissaire du Gouvernement :
Appartement
avec cave et parking
Mauvais état d’entretien
Etat d’entretien moyen
Bon état d’entretien
Très bon état d’entretien
Valeur libre
660 €/m²
935 €/m²
1.155 €/m²
1.375 €/m²
Valeur occupée
560 €/m²
800 €/m²
985 €/m²
1.165 /m²
- pour l’EPFIF : 660 €/m² en valeur libre, pour l’appartement avec la cave, leur état d’entretien étant qualifié de mauvais, et avant application d’un abattement de 15 % pour occupation ;
- des valeurs fixées en 2021 et 2022 par la présente juridiction lors de la fixation des indemnités de biens composés d’un appartement, d’une cave et d’un emplacement de stationnement et situés dans les bâtiments 3, 4 et 10 de la copropriété, telles qu’exposées par le commissaire du Gouvernement, à savoir:
Etat
Mauvais
Mauvais-Moyen
Moyen
Moyen-Bon
Bon
Très bon
Libre
660 €/m²
825 €/m²
935 €/m²
1.050 €/m²
1.260 €/m²
1.375 €/m²
Occupé
560 €/m²
715 €/m²
800 €/m²
880 €/m²
1.000 €/m²
1.170 €/m²
- d’une moins-value liée à l’absence d’un emplacement de stationnement ;
Ainsi, dans le cadre de l’opération d’expropriation du bâtiment 4 de la copropriété du [14], pour l’évaluation des appartements de type F3 ou F4 occupés par un tiers, il convient de retenir les valeurs suivantes, selon l’état d’entretien de l’appartement :
- 545 €/m², lorsque l’appartement est dans un mauvais état d’entretien ;
- 700 €/m², lorsque l’appartement est dans un état d’entretien de mauvais à moyen ;
- 785 €/m², lorsque l’appartement est dans un état d’entretien moyen ;
- 865 €/m², lorsque l’appartement est dans un état d’entretien de moyen à bon ;
- 985 €/m², lorsque l’appartement est dans un bon état d’entretien ;
- 1155 €/m² et plus, lorsque l’appartement est dans un très bon état d’entretien et bien équipé.
L’occupation des biens étant déjà prise en compte, il n’y a pas lieu d’appliquer un abattement supplémentaire de 15 %.
Il y a également lieu de souligner que le fait que Monsieur [N] soit à jour dans le paiement de ses charges de copropriété est indifférent pour l’évaluatoin de la valeur vénale de ses biens.
Au regard, d’une part, des valeurs déterminées ci-dessus et, d’autre part, des caractéristiques des biens à évaluer, notamment de leur état d’entretien qui est qualifié de moyen voire mauvais pour le lot n°819 après la visite des lieux et de moyen pour le lot n°871 qui n’a pu être visité, il convient de fixer la valeur du mètre carré pour l’évaluation des biens de Monsieur [N] à la somme de 700 €/m² s’agissant du lot n°819 et à la somme de 785 €/m² s’agissant du lot n°871.
En conséquence, l’indemnité principale de dépossession est évaluée :
- s’agissant des lots n°819 et 961 à la somme de 39.200 € (700 €/m² x 56 m²) en valeur occupée
- s’agissant des lots n°871 et 1039 à la somme de 43.960 € (785 €/m² x 56 m²) en valeur occupée
Sur l’indemnité de remploi
Aux termes de l'article R.322-5 du code de l'expropriation, l'indemnité de remploi est calculée compte tenu des frais de tous ordres normalement exposés pour l'acquisition de biens de même nature moyennant un prix égal au montant de l’indemnité principale. Sont également pris en compte dans le calcul du montant de l’indemnité les avantages fiscaux dont les expropriés sont appelés à bénéficier lors de l’acquisition de biens de remplacement.
En l’espèce, ils ont pour base le montant de l’indemnité principale, à savoir 39.200 € s’agissant des lots n°819 et 961 et 43.960 € s’asgissant des lots n°871 et 1039.
Ils sont liquidés comme suit :
- s’agissant des lots n°819 et 961
20% sur 5.000 € = 1.000 €
15% sur 10.000 € = 1.500 €
10% sur 24.200 € = 2.420 €
Total : 4.920 €
- s’agissant des lots n°871 et 1039
20% sur 5.000 € = 1.000 €
15% sur 10.000 € = 1.500 €
10% sur 28.960 € = 2.896 €
Total : 5.396 €
Sur l’indemnité pour perte de revenus locatifs
Monsieur [N] sollicite de ce chef la somme de 19 800 € correspondant à 12 mois de loyer hors charge pour les deux appartements.
L’EPFIF, comme le Commissaire du Gouvernement, considère que le préjudice subi par Monsieur [N] est équivalent à 6 mois de loyers hors charge en vue de réparer le préjudice subi du fait de la perte de revenus locatifs.
Il est constant que la perte de revenus locatifs générée par une expropriation fait l'objet d'une indemnisation destinée à compenser la perte de loyers ou d’indemnité d’occupation prévisible entre le moment où le propriétaire ne perçoit plus les revenus de ses biens du fait de l’opération d’expropriation et celui où il est à nouveau en situation de percevoir des revenus locatifs, après acquisition d'un bien équivalent et recherche de nouveaux locataires.
En l’espèce, il ressort des pièces versées aux débats que le bien appartenant à Monsieur [N] sont donnés à bail, le lot n°819 selon un loyer mensuel hors charge de € et le lot n°871 selon un loyer mensuel hors charge de €. Le transport sur les lieux a permis de corroborer cette situation d’occupation, les personnes présentes ayant constaté que l’appartement correspondant au lot n°819 est occupé, comme consigné sur le procès-verbal de visite. Aucune des parties ne conteste que le lot n°871 est toujours occupé.
S’agissant de deux F3 en copropriété, et dans la mesure où Monsieur [N] ne démontre pas que ses biens présentent des spécificités telles qu'un délai supérieur à 6 mois lui sera nécessaire pour acquérir un bien équivalent et rechercher un locataire, le préjudice résultant de la perte de revenus locatifs peut être raisonnablement évalué à six mois de loyers hors charges, soit à la somme de 4.500 € correspondant à 750 €/mois x 6 mois pour le lot n°871 ainsi qu’à la somme de 4.540,56 € correspondant à 756,76 €/mois x 6 mois pour le lot n°819.
Sur les frais de déménagement
Monsieur [N] sollicite de ce chef la somme de 20.000 €, sans produire de justificatifs.
L’EPFIF sollicite le rejet de cette demande au motif que Monsieur [N] n’est pas un propriétaire occupant mais un propriétaire bailleur.
En l’espèce, aux termes de ses propres déclarations Monsieur [N] n’occupe pas le lot n°895 et il ressort des pièces versées aux débats en particulier les baux d’habitation que les appartements sont loués non meublés, de sorte qu’aucune indemnité de déménagement n’est due à Monsieur [N].
En conséquence, Monsieur [N] sera débouté de sa demande à ce titre.
Sur l’indemnité pour préjudice moral
Saisie au titre de la prise en considération du préjudice moral au titre de la question prioritaire de constitutionnalité, la Cour de cassation a décidé de renvoyer celle-ci au Conseil constitutionnel (3ème civ, 21 octobre 2010 pourvoi n°10-40038).
Pour ce dernier, aucune exigence constitutionnelle n'impose que la collectivité expropriante soit tenue de réparer la douleur morale éprouvée par le propriétaire à raison de la perte des biens expropriés ; que par suite, l'exclusion de la réparation du préjudice moral ne méconnaît pas la règle du caractère juste de l'indemnisation de l' expropriation pour cause d'utilité publique (21 janvier 2011 N°2010-87 QPC).
En application de l’article L 321-1 du code de l’expropriation précité, seul le préjudice matériel, à l’exclusion du préjudice moral, causé par l’expropriation est indemnisable.
Ainsi, Monsieur [N] n’est pas fondé à réclamer réparation du préjudice moral subi du fait de la procédure d’expropriation.
En conséquence, il sera débouté de sa demande à ce titre.
Sur l’indemnité totale de dépossession
L’indemnité totale de dépossession foncière, est égale à la somme de 102.516,56 €, soit :
- s’agissant des lots n°819 et 961
- 39.200 €, au titre de l’indemnité principale ;
- 4.920 €, au titre de l’indemnité de remploi ;
- 4.540,56 €, au titre de la perte de revenus locatifs ;
- s’agissant des lots n°871 et 1039
- 43.960 €, au titre de l’indemnité principale ;
- 5.396 €, au titre de l’indemnité de remploi ;
- 4.500 €, au titre de la perte de revenus locatifs.
Sur les demandes accessoires
Sur les dépens
Conformément aux dispositions de l’article L 312-1 du code de l’expropriation, l’EPFIF sera condamnée aux dépens.
Sur les frais irrépétibles
Aux termes de l’article 700 1° du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations. Néanmoins, s'il alloue une somme au titre du 2° du présent article, celle-ci ne peut être inférieure à la part contributive de l'Etat.
En l'espèce, l’équité commande de condamner l’EPFIF, partie tenue aux dépens, à verser à Monsieur [N] la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le juge de l’expropriation, statuant publiquement par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et par mise à disposition au greffe,
ANNEXE à la présente décision le procès-verbal de transport du 15 novembre 2023 ;
- les termes de comparaison produits par l’Etablissement Public Foncier d’Ile-de-France (tableaux 1, 2, 3, 4, 5 et 6) ;
- les termes de comparaison versés par le commissaire du Gouvernement (tableaux 7, 8, 9, 10, 11 et 12) ;
FIXE l’indemnité due par l’Etablissement Public Foncier d’Île-de-France à Monsieur [J] [N] au titre de la dépossession des lots n°819 et 961 (appartements) et 871 et 1039 (caves) du bâtiment 4 de la copropriété du [14] [Adresse 3] à [Localité 17] à la somme de 102.516,56 € (cent-deux mille cinq cent seize euros et cinquante-six centimes), en valeur occupée, se décomposant comme suit :
- s’agissant des lots n°819 et 961,
- 39.200 €, au titre de l’indemnité principale ;
- 4.920 €, au titre de l’indemnité de remploi ;
- 4.540,56 €, au titre de la perte de revenus locatifs ;
- s’agissant des lots n°871 et 1039,
- 43.960 €, au titre de l’indemnité principale ;
- 5.396 €, au titre de l’indemnité de remploi ;
- 4.500 €, au titre de la perte de revenus locatifs ;
DÉBOUTE Monsieur [J] [N] de sa demande d’indemnité au titre des frais de déménagement ;
DÉBOUTE Monsieur [J] [N] de sa demande d’indemnité au titre de son préjudice moral ;
CONDAMNE l’Etablissement Public Foncier d’Île-de-France aux dépens ;
CONDAMNE l’Etablissement Public Foncier d’Île-de-France à payer à Monsieur [J] [N] la somme de 3000 € (trois mille euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Cécile PUECH
Greffier
Charlotte THIBAUD
Vice-Présidente