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16/05/2024 | FRANCE | N°23/00157

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, Expropriations 3, 16 mai 2024, 23/00157


Décision du 16 Mai 2024
Minute n° 24/00118


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY

JURIDICTION DE L’EXPROPRIATION
DE LA SEINE-SAINT-DENIS

JUGEMENT FIXANT INDEMNITÉS

du 16 Mai 2024

:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:

Rôle n° RG 23/00157 - N° Portalis DB3S-W-B7H-X4BF

Le juge de l’expropriation du département de la SEINE-SAINT-DENIS


DEMANDEUR :


ETABLISSEMENT PUBLIC FONCIER D’ILE DE FRANCE (EPFIF)
[Adresse 8]
[Localité 16]
représentée par Maître Michaël MOUSSAULT de la SELAS DS AVOCATS,

avocats au barreau de PARIS
DÉFENDEUR :
Madame [I], [C] [S]
[Adresse 2]
[Localité 28]
représentée par Maître Franck LEVY, avocat au barreau de...

Décision du 16 Mai 2024
Minute n° 24/00118

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY

JURIDICTION DE L’EXPROPRIATION
DE LA SEINE-SAINT-DENIS

JUGEMENT FIXANT INDEMNITÉS

du 16 Mai 2024

:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:

Rôle n° RG 23/00157 - N° Portalis DB3S-W-B7H-X4BF

Le juge de l’expropriation du département de la SEINE-SAINT-DENIS

DEMANDEUR :

ETABLISSEMENT PUBLIC FONCIER D’ILE DE FRANCE (EPFIF)
[Adresse 8]
[Localité 16]
représentée par Maître Michaël MOUSSAULT de la SELAS DS AVOCATS, avocats au barreau de PARIS
DÉFENDEUR :
Madame [I], [C] [S]
[Adresse 2]
[Localité 28]
représentée par Maître Franck LEVY, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS
INTERVENANT :
DIRECTION DEPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES - POLE D’EVALUATION DOMANIALE représentée par Messieurs [Z] [R] et [B] [J], commissaires du Gouvernement
[Adresse 14]
[Localité 19]

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Rémy BLONDEL, Juge, désigné par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la cour d’appel de Paris

Cécile PUECH, Greffière présente lors de la mise à disposition

PROCÉDURE :

Date de la visite des lieux : 09 novembre 2023
Date de la première évocation et des débats : 18 janvier 2024 ; 14 mars 2024 ; 28 mars 2024
Date de la mise à disposition : 16 Mai 2024

EXPOSE DU LITIGE

Madame [I] [C] [S] était propriétaire des lots n°791, 991 et 2324 rattachés au bâtiment 4 de la copropriété du [Adresse 27], situé [Adresse 2] à [Localité 28], sur les parcelles cadastrées section AS n° [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 12] et [Cadastre 13] et AT n° [Cadastre 17] et [Cadastre 18].

Le lot n° 791 est un appartement de type F3, d’une superficie de 56 m². Le lot n° 991est une cave. Le lot n° 2324 est un emplacement de stationnement portant le n°377. Pour une description plus précise des lieux, il conviendra de se reporter au procès-verbal du 9 novembre 2023, annexé à la présente décision.

Par décret n° 2015-99 du 28 janvier 2015, l’opération de requalification des copropriétés dégradées du quartier dit du [Adresse 22], comprenant les copropriétés du [Adresse 27] et de l’[Adresse 32], a été déclarée d’intérêt national et sa mise en oeuvre a été confiée à l’Etablissement public foncier d’Ile-de-France (EPFIF).

Aux termes d’un arrêté préfectoral n° 2019-2388 en date du 6 septembre 2019, l’acquisition des immeubles nécessaires à la réalisation du projet ZAC du “[Adresse 22]” sur la commune de [Localité 28] a été déclarée d’utilité publique au bénéfice de l’EPFIF.

Par un arrêté préfectoral n° 2023-0389, en date du 21 février 2023, les parcelles situées à l’intérieur de la DUP ont été déclarées cessibles au profit de l’EPFIF.

Une ordonnance d’expropriation, emportant transfert de propriété, a été rendue le 29 juin 2023 au profit de l’EPFIF, par le juge de l’expropriation du tribunal judiciaire de Bobigny.

L’EPFIF a notifié son Mémoire valant offres d’indemnisation à Madame [I] [C] [S] par acte de commissaire de justice en date du 27 mars 2023, remis à étude.

Par une requête reçue le 26 juin 2023 par le greffe, accompagnée du Mémoire valant offres, l’EPFIF a saisi la juridiction de l’expropriation du tribunal judiciaire de BOBIGNY aux fins de fixation de la valeur des biens de Madame [I] [C] [S].

L’EPFIF a notifié à Madame [I] [C] [S] la saisine de la juridiction de l’expropriation par acte de commissaire de justice en date du 3 juillet 2023, remis à étude.

Par une ordonnance rendue le 11 septembre 2023, le juge de l’expropriation a fixé le transport sur les lieux et l’audition des parties au 9 novembre 2023, ainsi que l’audience au 18 janvier 2024.

L’EPFIF a notifié cette décision à Madame [I] [C] [S] par acte de commissaire de justice en date du 3 octobre 2023, remis à étude.

Dans ses dernières écritures intitulées Mémoire récapitulatif et en réplique reçues le 14 mars 2024 par le greffe de la juridiction, faisant suite à son Mémoire valant offres, l’EPFIF demande
à la juridiction de l’expropriation du tribunal judiciaire de BOBIGNY de :

- rejeter l’ensemble des prétentions des expropriés ;

- fixer le montant de l’indemnité à revenir au défendeur pour dépossession des lots n°791, 991et 2324 ainsi que les 195/183.000° des parties communes générales intégrées de l’immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 28], comme suit :

.1ère hypothèse : en cas d’acceptation d’un relogement
*montant total de l’indemnité de dépossession de 49.956 €, décomposée de la manière suivante ;
$gt;une indemnité principale de 44.506 €, correspondant à la valeur de l’appartement, cave et parties communes intégrées après abattement pour relogement de 15% [(56m² x 935 €)x0,85] ;
$gt;une indemnité de remploi de 5.450,60 € ;

.2ème hypothèse : en cas de non acceptation d’un relogement
*montant total de l’indemnité de dépossession de 58.596 €, décomposée de la manière suivante ;
$gt;une indemnité principale de 52.360 €, correspondant à la valeur de l’appartement, cave et parties communes intégrées (56m² x 935 €) ;
$gt;une indemnité de remploi de 6.236 €.

Dans ses dernières écritures intitulées Mémoire en réplique et récapitulatif reçues le 28 mars 2024 par le greffe, faisant suite à ses écritures intitulées Mémoire reçues le 11 janvier 2024, Madame [I] [C] [S] sollicite du juge de l’expropriation de :

- rejeter le mémoire récapitulatif et en réplique de l’EPFIF du 13 mars 2024 ;

- fixer l’indemnité au titre de la dépossession des lots n°791 ( appartement), n°991 (cave) et n°2324 ( emplacement de stationnement associé) du bâtiment 4 de la copropriété sis [Adresse 2] à [Localité 28], à la somme de 70.069 €, en valeur libre, se décomposant de la manière suivante :
.une indemnité principale de 62.790 €, correspondant à 1.121,15 € x 56 m² ;
.une indemnité de remploi de 7.279 €.

En outre, Madame [I] [C] [S] demande au juge de :
- condamner l’EPFIF à la somme de 5.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
- condamner l’EPFIF aux dépens de l’instance.

Dans ses écritures intitulées Conclusions du commissaire du Gouvernement datées du 3 octobre 2023 et produites avant transport, le commissaire du Gouvernement propose, de manière alternative :

- la valorisation du logement (lot n°791) avec cave (lot n°991) et emplacement de stationnement ( lot n°2324) intégrés, en situation libre, pour un montant total de l’indemnité de dépossession de 58.596 €, décomposée comme suit :
.une indemnité principale de 52.360 €, correspondant à 935 € x 56 m² ;
.une indemnité de remploi de 6.236 €

- la valorisation du logement (lot n°791) avec cave (lot n°991) et emplacement de stationnement ( lot n°2324) intégrés, en situation occupée, pour un montant total de l’indemnité de dépossession de 50.280 €, décomposée comme suit :
.une indemnité principale de 44.800 €, correspondant à 800 € x 56 m² ;
.une indemnité de remploi de 5.480 €

En vertu de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait référence aux écritures transmises pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.

L'audience, initialement prévue le 18 janvier 2024, a été renvoyée au 14 mars 2024 puis au 28 mars 2024. A cette dernière date, les parties comparantes ont développé les éléments de leurs mémoires, en application des dispositions du 1er alinéa de l’article R.311-20 du code de l’expropriation.

L'affaire a été mise en délibéré au 16 mai 2024.

EXPOSE DES MOTIFS

Sur la demande de rejet du mémoire récapitulatif et en réplique de l’autorité expropriante en date du 13 mars 2014

L’article 15 du code de procédure civile dispose : “Les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense.”.

Madame [S] entend soulever le rejet du mémoire récapitulatif et en réplique de l’EPFIF reçu le 13 mars 2024 à 16h22, au motif de sa tardiveté au regard de l’audience du 14 mars 2024.

En l’espèce, s’il n’est pas contesté que le mémoire récapitulatif de l’EPFIF a été adressé le 13 mars 2024 pour une audience prévue le 14 mars 2024 à 9h, Madame [S] a cependant pu bénéficier d’un renvoi à l’audience du 28 mars 2024 pour répondre à ce mémoire.

Le principe du contradictoire ayant été respecté, il convient de rejeter la demande de Madame [S].

Sur la demande de rejet des photographies du mémoire récapitulatif et en réplique de l’EPFIF

L’article 9 du code de procédure civile dispose : “Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi nécessaires au succès de sa prétention.”

Madame [S] sollicite le rejet des photographies en pages 9 et 10 et des photographies source google maps en pages 20 à 23 du mémoire récapitulatif et en réplique de l’EPFIF au motif que ces photographies sont non datées et ne permettent pas de considérer que les les termes de comparaison choisis par l’expropriée ne sont pas adaptés au regard de ces photographies.

En l’espèce, si les photographies ne sont pas datées, rien n’indique qu’elles aient été prises en violation de la loi, conformément aux dispositions de l’article 9 précité. Pour autant, le juge de l’expropriation conserve un pouvoir d’appréciation quant à leur force probante au regard des termes de comparaison communiqués par les parties.

En conséquence, la demande de Madame [S] est rejetée.

Sur la demande de fixation de l’indemnité de dépossession

Aux termes des articles L.311-5 et L. 321-1 du code de l’expropriation, à défaut d’accord des parties sur le montant des indemnités, celles-ci sont fixées par le juge de l'expropriation et couvrent l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l’expropriation.

Selon l'article L 321-3 du code de l'expropriation le jugement distingue, dans la somme allouée à chaque intéressé, l'indemnité principale et, le cas échéant, les indemnités accessoires en précisant les bases sur lesquelles ces diverses indemnités sont allouées.

L’indemnité réparatrice allouée à l’exproprié doit lui permettre de se retrouver en même et semblable état et de se procurer un bien identique, similaire ou équivalent à celui dont il est dépossédé par l’opération d’expropriation, soit un bien présentant les mêmes caractéristiques (lieu, année de construction, composition, état d’entretien…) sous réserve, de fait, des biens disponibles sur le marché immobilier.

Plus précisément, le préjudice matériel subi du fait de l’opération d’expropriation est généralement équivalent à la valeur vénale du bien dont l’exproprié est privé. Celle-ci n’est pas nécessairement égale au coût de remplacement du bien, et ce principalement lorsque aucun bien similaire à celui dont l’exproprié est dépossédé n’est offert sur le marché immobilier local ou n’est susceptible d’être acquis par un particulier.

Sur les éléments préalables à la détermination des indemnités

Sur les dates à retenir

Le juge de l’expropriation doit déterminer les dates suivantes et les prendre en considération lors de l’évaluation de la valeur vénale du bien exproprié :

* Date pour apprécier la consistance des biens : selon les dispositions de l’article L.322-1 du code de l’expropriation, le juge fixe le montant des indemnités d’après la consistance des biens à la date de l’ordonnance portant transfert de propriété. Lorsque l’ordonnance d’expropriation n’est pas intervenue au jour du jugement de première instance, la consistance des biens s’apprécie à la date du dit jugement. La consistance d’un bien correspond principalement aux éléments qui le composent et à ses caractéristiques (état d’entretien, de très mauvais à très bon ; situation d’occupation, libre ou occupé ; ...) ;

* Date de référence pour déterminer les règles d’urbanisme et l’usage effectif des biens : elle se situe, en principe, un an avant l'ouverture de l'enquête publique préalable à la déclaration d’utilité publique, conformément à l’article L.322-2 du code de l’expropriation ; toutefois, aux termes des articles L.213-6 et L.213-4 du code de l’urbanisme, lorsqu'un bien est soumis au droit de préemption urbain et n’est pas situé dans une Zone d’aménagement différée (ZAD), cette date de référence se situe à la date à laquelle est devenue opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public, approuvant, modifiant ou révisant le plan local d’urbanisme, et délimitant la zone dans laquelle est situé le bien ;

En application des articles L 213-6 et L 213-4 du code de l’urbanisme, l’acte qui se borne à modifier le périmètre d’une zone d’un PLU sans affecter ses caractéristiques ne peut être pris comme date de référence au sens des dispositions de l’article L 213-4 du code de l’urbanisme (3ème civ. 13 juin 2019 pourvoi n°18-18.445).

* Date pour apprécier la valeur des biens : selon le 1er alinéa de l’article L.322-2 du code de l’expropriation, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance, soit à la date du jugement en fixation des indemnités.

En l’espèce, les biens de Madame [I] [C] [S] doivent être évalués selon :

- leur consistance au 29 juin 2023, date de l’ordonnance d’expropriation ;

- les possibilités offertes par les règles d’urbanisme définies par le plan local d’urbanisme (PLU) approuvé le 10 juillet 2012 et modifié le 08 avril 2016.

Bien qu’une autre modification du PLU soit intervenue le 13 novembre 2018, celle-ci n’a pas modifié les caractéristiques de la zone où se situe l’ensemble immobilier, de sorte qu’elle ne peut être retenue comme date de référence.

En conséquence, la date de référence est celle de la dernière modification du PLU délimitant la zone dans laquelle est situé l'ensemble immobilier dont il s'agit, à savoir la modification numéro un du 8 avril 2016.

Les parcelles sont situées en zone UR1 du PLU, correspondant au renouvellement urbain du centre-ville ;

- les valeurs d’échange à la date du présent jugement.

Sur la consistance de l’ensemble immobilier et du bien de la partie expropriée

Sur les copropriétés du [Adresse 27] et de l’[Adresse 32]

La commune de [Localité 28] est constituée de plusieurs quartiers de grands ensembles édifiés dans les années 1960, selon un plan qui prévoyait une desserte par l’autoroute A 87. Cette voie expresse n’ayant pas été réalisée, la commune était enclavée, n’étant desservie ni par les voies routières majeures de la région parisienne ni par les lignes de RER et de métro. Les bus étaient les seuls transports en commun.

Depuis décembre 2019, une nouvelle branche de la ligne T 4 du tramway est en service. Elle relie [Localité 34] à [Localité 35] et dessert [Localité 28]. Elle offre une correspondance avec le RER E à [Localité 23]. La création d’une gare de la future ligne 16, métro express, par la SGP et le GPA est en cours de réalisation.

La copropriété du [Adresse 27] a été édifiée en 1966 et est composée de 10 bâtiments, soit 873 logements.

L’EPFIF et le commissaire du Gouvernement exposent les conclusions d’une étude concernant les copropriétés contiguës du [Adresse 27] et de l’[Adresse 32] réalisée par la commune de [Localité 28] en 2014. Celles-ci mettent en évidence un contexte social difficile en termes de niveau de vie (60 % des ménages ayant un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté et 85% des ménages ayant des revenus inférieurs au PLAI), de taux de chômage (29 %), d’occupation des logements (près de 20 % l’étant par plus d’un ménage et par plus de 4 personnes), de rotation importante tant en ce qui concerne les propriétaires que les locataires.

Le commissaire du Gouvernement précise que les copropriétés du [Adresse 27] et de l’[Adresse 32] ont fait l’objet :

- d’un plan de sauvegarde signé le 19 janvier 2010 entre l’Etat, le Département 93 et la commune de [Localité 28], qui avait pour objectif de résorber les impayés de charges, de réaliser des travaux urgents et des mises aux normes, de lutter contre les marchands de sommeil, d’individualiser les réseaux de fluides des différents bâtiments, de réaliser des travaux de rénovation énergétique ; il a pris fin en 2015 ;

- d’une opération de requalification des copropriétés dégradées du quartier dit du [Adresse 22], selon un décret n° 2015-99 en date du 28 janvier 2015 déclarant ladite opération d’intérêt national ; la mise en oeuvre de l’opération a été confiée à l’EPFIF ;

- d’un nouveau plan de sauvegarde pour une durée de cinq ans, institué par l’arrêté préfectoral n° 2017-2398 du 11 septembre 2017.

Il ajoute que la copropriété fait l’objet d’une administration judiciaire, en raison d’un important arriéré de charges.

Sur le bâtiment 4 de la copropriété du [Adresse 27]

Les biens à évaluer sont situés dans le bâtiment B4, faisant partie de la copropriété du [Adresse 27].

Il s’agit d’un immeuble à usage d’habitation, composé :
- d’un sous-sol à usage de caves ;
- d’un rez-de-chaussée ;
- de 10 étages.

Il comprend 175 logements, dont 8 F2, 122 F3 et 45 F4, accessibles par 4 entrées et cages d’escalier nommées A, B, C et D.

Sur les biens expropriés

Il s’agit :

- du lot n°791 : un appartement de type F3, situé au 1er étage de l’escalier B, d’une superficie de 56 m², superficie non contestée par les parties :

. il est composé d’une entrée et d’un couloir qui desservent une cuisine, un WC et une salle de bain ainsi qu’une pièce de vie et deux chambres, l’une d’entre elles étant accessible à partir de la pièce de vie ;

. il est dans un état d’entretien qualifié de :
*moyen par l’EPFIF, entité expropriante ;
*moyen par l’exproprié ;
*moyen par le commissaire du Gouvernement ;
*moyen par le juge de l’expropriation au regard des constatations effectuées le 9 novembre 2023.

- du lot n°991, une cave ; elle n’a pas été visitée pour des raisons de sécurité ;

- du lot n°2324, un emplacement de stationnement extérieur rattaché au bâtiment 4 de la copropriété du [Adresse 27]. Les places de parking sont situées à l’avant du bâtiment ainsi qu’à l’arrière dans une cour dite [Adresse 25], entourée des bâtiments 2, 3, 4 et 5. La surface au sol, goudronnée est à l’état d’usage.

En outre, l’EPFIF précise qu’il a réalisé, dans le cadre de la procédure d’extrême urgence qu’il a mise en oeuvre, des travaux conséquents au niveau des parties communes et des parties privatives afin de sécuriser les biens et assurer un habitat décent aux occupants. L’entité expropriante explique qu’à titre principal, sur le fondement de l’article L322-2 du Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique et, à titre subsidiaire, sur le fondement de l’article 1303 du code civil concernant l’enrichissement injustifié, lesdits travaux ne doivent pas être pris en compte dans le calcul de l’indemnité de dépossession revenant aux expropriés.

Madame [I] [C] [S] estime que l’EPFIF n’apporte aucune preuve pour se fonder sur l’enrichissement sans cause. La démontration de cet enrichissement est absente. Par ailleurs, au regard de la jurisprudence constante de la chambre de l’expropriation du tribunal judiciaire de Bobigny, les augmentations des valeurs du mètre carré dans le cadre des expropriations ne sont pas justifiées en droit et en fait par les travaux de l’EPFIF. Au surplus, il convient de rappeler que l’EPFIF est possesseur du bien de Madame [S] depuis le 11 avril 2023, selon l’arrêté n°2023-0650. En sa qualité de possesseur, il incombe alors à l’EPFIF de réaliser l’ensemble des travaux afin de garantir la jouissance du bien de Madame [S]. Il s’agit donc d’une mise en conformité du logement avec la réglementation. Les travaux ont été effectués dans le cadre d’une gestion du bien en bon père de famille.

Le commissaire du Gouvernement ne présente pas d’observation quant à ces moyens.

L’article L 322-2 alinéa 4 du code de l’expropriation dispose que quelle que soit la nature des biens, il ne peut être tenu compte, même lorsqu'ils sont constatés par des actes de vente, des changements de valeur subis depuis cette date de référence, s'ils ont été provoqués par l'annonce des travaux ou opérations dont la déclaration d'utilité publique est demandée, par la perspective de modifications des règles d'utilisation des sols ou par la réalisation dans les trois années précédant l'enquête publique de travaux publics dans l'agglomération où est situé l'immeuble.

En l’espèce, l’enquête publique s’est déroulée du 22 novembre 2021 au 17 décembre 2021 d’après l’arrêté préfectoral n° 2021-2884 du 21 octobre 2021 prescrivant l’ouverture d’une enquête parcellaire complémentaire portant sur des biens à acquérir en vue de la réalisation du projet d’aménagement de la ZAC du “[Adresse 22]” portant sur les bâtiments 1 et 4 de la copropriété de l’[Adresse 32] sur la commune de [Localité 28].
Par ailleurs, l’EPFIF indique que l’appartement a fait l’objet de travaux à la suite de la prise de possession anticipée sans, toutefois, verser aux débats aucun document permettant d’établir la consistance, le montant et la date exacte de réalisation des travaux.
Enfin, selon l’arrêté n°2023-0650 du 11 avril 2023, le Préfet de Seine-Saint-Denis a autorisé la prise de possession anticipée des biens de l’immeuble B4, lequel concerne les biens expropriés de Madame [I] [C] [S].

Dès lors, étant donné que la réalisation des travaux s’est effectuée après la prise de possession anticipée des biens du bâtiment 4, soit après le 11 avril 2023, les travaux n’ont donc pas été réalisés dans les trois années précédant l’enquête publique qui s’est déroulée du 22 novembre 2021 au 17 décembre 2021.

Par conséquent, l’article L 322-2 alinéa 4 du code de l’expropriation n’est pas applicable.

Conformément à l’article 1303 du code civil, en dehors des cas de gestion d’affaire et de paiement de l’indu, celui qui bénéficie d’un enrichissement injustifié au détriment d’autrui doit, à celui qui s’en trouve appauvri, une indemnité égale à la moindre des deux valeurs de l’enrichissement et de l’appauvrissement.

En outre, aux termes de l’article 1303-1 du même code, l’enrichissement est injustifié lorsqu’il ne procède ni de l’accomplissement d’une obligation par l’appauvri ni de son intention libérale.

En l’espèce, les travaux de sécurisation et de rénovation invoqués par l’EPFIF relèvent de ses obligations légales en sa qualité de possesseur et de propriétaire des biens à la suite d’une part, de sa prise de possession anticipée du bâtiment B4 selon arrêté n°2023-0650 du Préfet de Seine Saint Denis en date du 11 avril 2023 et d’autre part, du transfert de propriété selon ordonnance d’expropriation portant transfert de propriété du 29 juin 2023.

Dans ces conditions, l’appauvrissement de l’EPFIF, si tant est qu’il soit avéré, ce qui n’est pas le cas en l’absence de production de tout document, est justifié et par suite il ne peut y avoir enrichissement sans cause de Madame [I] [C] [S] au titre de ces travaux.

Sur la situation locative

L’EPFIF évalue les biens, de manière alternative, en fonction de la renonciation de Madame [I] [C] [S] à son droit au relogement ou de leur acceptation d’une offre de relogement.

Le commissaire du Gouvernement évalue les biens, de manière alternative, en fonction de l’état d’occupation des biens, selon une valorisation en situation libre ou en situation occupée.

Madame [I] [C] [S] fait valoir au visa des articles L 441-1 et R 441-1du code de la construction et de l’habitation, L 423-1 et R 423-9 du code de l’expropriation et de l’avis rendu le 16 novembre 2023 par la Cour de Cassation, que le propriétaire-occupant n’est pas dans la même situation qu’un propriétaire bailleur et que le bien occupé par son propriétaire ne souffre d’aucun des facteurs de moins-value, de sorte que leur bien doit être évalué en valeur libre.

Conformément aux dispositions de l’article L.322-1 du code de l’expropriation, les biens sont évalués selon leur consistance au jour de l’ordonnance d’expropriation, soit le 29 juin 2023.

En l’espèce, lors du transport judiciaire sur les lieux en date du 9 novembre 2023, l’appartement était occupé par son propriétaire, Madame [I] [C] [S].

Dans ses conditions, il convient de considérer que l’appartement est occupé par son propriétaire-occupant et de l’évaluer en valeur libre.

Par conséquent, les biens seront comparés à des cessions de biens libres, soit d’une même consistance.

Sur la méthode d'évaluation

Aux termes de leurs mémoires respectifs, les parties s’accordent sur l’utilisation de la méthode d’évaluation par comparaison, cave et parking intégrés.

Cette méthode, adaptée aux circonstances de l’espèce et consistant à comparer les biens à évaluer à des cessions de biens équivalents qui ont eu lieu dans la période récente sur le marché immobilier local, sera adoptée.

L’évaluation se fera millièmes de copropriété associés aux biens à évaluer intégrés.
Sur l’indemnité principale

L’indemnité principale de dépossession correspond à la valeur vénale de l’appartement, de la cave et de l’emplacement de stationnement extérieur ainsi qu’aux tantièmes des parties communes de la copropriété associés à ces lots.

La motivation de ce jugement fait référence aux termes de comparaison produits par les parties. Il est rappelé que les termes de comparaison ont été numérotés et qu’ils sont présentés sous forme de tableaux (eux-mêmes numérotés), annexés à la décision.

La valeur des biens dont Madame [I] [C] [S] sont dépossédés sera déterminée par comparaison entre, d’une part, la consistance des biens présentés à titre de termes de comparaison et leurs valeurs d’échange et, d’autre part, les caractéristiques des biens à évaluer.

Sur les termes de référence proposés par les parties

- Termes de comparaison produits par l’EPFIF (tableaux 1, 2, 3, 4, 5 et 6 annexés)
(DEM signifie EPFIF)

En application de l’article L 322-8 du code de l’expropriation, sous réserve de l'article L 322-9, le juge tient compte, des accords intervenus entre l'expropriant et les divers titulaires de droits à l'intérieur du périmètre des opérations faisant l'objet d'une déclaration d'utilité publique et les prend pour base lorsqu'ils ont été conclus avec au moins la moitié des propriétaires intéressés et portent sur les deux tiers au moins des superficies concernées ou lorsqu'ils ont été conclus avec les deux tiers au moins des propriétaires et portent sur la moitié au moins des superficies concernées.

En l’espèce, l’EPFIF ne produit aucun document permettant d’établir que des accords seraient intervenus avec au moins la moitié des propriétaires intéressés et portant sur les deux tiers au moins des superficies concernées ou avec les deux tiers au moins des propriétaires et portant sur la moitié au moins des superficies concernées.

Dès lors, les dispositions de l’article L 322-8 du code de l’expropriation ne s’appliquent pas. Les cessions de biens situées dans la copropriété du [Adresse 27] produites à titre de termes de comparaison ne seront pas prises pour base de la détermination de la valeur des lots n° 791, 991 et 2324 mais seront prises en compte au même titre que les autres termes de comparaison versés aux débats.

L’EPFIF produit aux débats 111 termes de comparaison correspondant à :

- des ventes réalisées entre 2017 et 2022 d’appartements comprenant principalement comme accessoires une cave et un parking et situés dans les bâtiments B3, B4 et B10 de la copropriété du [Adresse 27] à [Localité 28], comme les biens à évaluer, en :
.mauvais état (DEM n° 1 à 7 - tableau 1 ; DEM n°110 et 111 - tableau 6) ;
.état moyen (DEM n° 8 à 21 - tableau 2 ; DEM n°89 à 109 - tableau 6) ;
.bon état (DEM n° 22 à 29 - tableau 3 ; DEM n°64 à 88 - tableau 6 ) ;
.très bon état (DEM n° 30 et 31 - tableau 4 ; DEM n°61 à 63 - tableau 6),

étant précisé que les termes DEM n° 26, 28 et 29, 43, 45, 47, 56, 62, 65, 67, 70, 78, 84, 85, 86, 87, 89, 90, 91, 93, 97, 98, 99, 101, 102, 103, 104, 105, 106 et 109 n’ont pas d’emplacement de stationnement et que le terme DEM n° 3 n’a pas de cave ;

L’établissement public est l’unique acquéreur des cessions qu’il présente à titre de termes de comparaison.

L’EPFIF, en l’espèce, offre une valeur de 935 €/m², le logement appartenant à la partie défenderesse étant un F3, libre et dans un état d’entretien qualifié de moyen par l’entité expropriante.

Madame [I] [C] [S] soutient que le juge de l’expropriation n’a pas à prendre en compte des références lorsqu’elles reflètent un marché captif. Or, la parcelle cadastrée du [Adresse 27] constitue un marché captif au regard du faible taux de vente de gré à gré et au contraire du nombre d’expropriation. De plus, face à l’impossibilité pour tout propriétaire du [Adresse 27] de vendre son bien au prix du marché immbolier, ledit propriétaire se trouve dans le cadre d’un marché captif. En conséquence, il est proposé d’écarter l’ensemble des termes de comparaison de l’EPFIF.

Le Commissaire du Gouvernement ne présente aucune observations à l’égard des termes proposés par l’EPFIF.

En l'espèce, pour déterminer la valeur des biens de Madame [I] [C] [S] :

Parmi les 111 références citées par l'EPFIF, ne sont pas retenus :

- les termes de comparaison DEM n° 3, 4, 5, 8, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 22, 23, 24, 30, 34, 40, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52, 53, 54, 55, 56, 57, 61, 62, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75, 89, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 97, 98, 99, 100, 101, 102, 103, 104, 110 et 111 parce qu'ils ont été échangés, ou leurs valeurs ont été fixées alors que les biens étaient occupés et qu'ils ont été en conséquence, moins valorisés que ne devront l'être les biens à évaluer, qui sont libres toute d'occupation ;

- les termes de comparaison DEM n°1, 2, 9, 10, 26 et 60 parce qu’ils ne présentent pas de références de publication suffisamment précises ;

- les termes de comparaisons DEM n° 36, 37, 58 et 59, parce qu’il n’est ni indiqué, ni justifié de ce que les biens en question étaient libres de toute occupation ou au contraire occupés ;

En revanche, parmi les 111 références citées par l’EPFIF, les termes de comparaison suivants sont retenus, car ils portent sur des biens similaires à ceux à évaluer : DEM n° 6, 7, 18, 19, 20, 21, 25, 27, 28, 29, 31, 32, 33, 35, 38, 39, 41, 42, 43, 44, 45, 63, 76, 77, 78, 79, 80, 81, 82, 83, 84, 85, 86, 87, 88, 105, 106, 107, 108 et 109 .

Ces termes sont donc retenus selon les moyennes suivantes :
- 600 €/m² en valeur libre (moyenne des termes DEM n°6 et 7) pour un mauvais état d’entretien
- 850 €/m² en valeur libre ( moyenne des termes DEM n°18, 19, 20, 21, 41, 45,105, 106, 107, 108 et 109) pour un état d’entretien moyen ;
- 1.050 €/m² en valeur libre ( moyenne des termes DEM n°25, 27, 28, 29, 32, 33, 38, 39,43, 44, 76, 77, 78, 79, 80, 81, 82, 83, 84, 85, 86, 87 et 88 ) pour un bon état d’entretien ;
- 1.250 €/m² en valeur libre ( moyenne des termes DEM n°31, 35, 42 et 63) pour un très bon état d’entretien ;

- Termes de comparaison cités par le commissaire du Gouvernement (tableaux 7, 8, 9, 10, 11, et 12 annexés)
(CG signifie commissaire du Gouvernement)

Le commissaire du Gouvernement cite 66 termes de comparaison, précisant avoir affiné sa recherche à la période allant de 2020 à 2022 et l’avoir étendue aux bâtiments, 3, 4, 11 et 12 des copropriétés du [Adresse 27] et de l’[Adresse 32], de même type que le bâtiment B4 (R+10 ou R+11) :

- 28 termes de comparaison (tableau 7) correspondant à des ventes réalisées en 2020 et 2021, situés :

.soit dans le bâtiment 4, comme les biens à évaluer ;
. soit dans les bâtiments 3, 11 et 12 de la même copropriété du [Adresse 27] et de la copropriété voisine de l’[Adresse 32] à [Localité 28] ;

étant précisé que ces quatre bâtiments ont une configuration identique et que l’EPFIF est l’unique acquéreur des cessions présentées ;

- 30 termes de comparaison (tableaux 8, 9, 10 et 11) correspondant à des ventes d’appartements et de leurs accessoires (cellier, cave, emplacement de stationnement) situés dans des copropriétés proches de celles du [Adresse 27] et de l’[Adresse 32], dans le périmètre de la ZAC dite du [Adresse 22], à savoir La Résidence [Adresse 38], la Résidence [Adresse 36], La Résidence [Adresse 33] et la Résidence [Adresse 39] ;

- 8 termes de comparaison correspondant à des cessions de parkings extérieurs sur les copropriétés du [Adresse 27] et de l’[Adresse 32] (tableau 12).

Le commissaire du Gouvernement fait également état des valeurs retenues par le juge de l’expropriation du tribunal judiciaire de Bobigny dans les jugements de 2021-2022 relatifs à la procédure d’expropriation du bâtiment 10 de la copropriété de l’[Adresse 32] de la façon suivante:

Etat

Mauvais

Mauvais-Moyen

Moyen

Moyen-Bon

Bon

Très bon
Libre

660 €/m²

825 €/m²

935 €/m²

1.050 €/m²

1.260 €/m²

1.375 €/m²
Occupé

560 €/m²

715 €/m²

800 €/m²

880 €/m²

1.000 €/m²

1.170 €/m²

Il fait remarquer que :

- les copropriétés voisines ne sont pas dans un état comparable à celui des copropriétés du [Adresse 27] et de l’[Adresse 32], qui se trouvent dans un état de dégradation bien plus prononcé ; il estime que ces copropriétés sont aujourd’hui dans une situation financière stable et pérenne grâce aux travaux de rénovation, de suivi et d’accompagnement mis en place ; il précise, en conséquence, ne pas retenir ces termes pour la détermination de la valeur du logement en cause;

- les dernières cessions amiables dans les copropriétés du [Adresse 27] et de l’[Adresse 32] font apparaître un prix en augmentation de 10 %, augmentation également retenue par le juge de l’expropriation dans ses décisions rendues en 2021 et 2022.

Le commissaire du Gouvernement, reprenant cette majoration de 10 % observée dans les évaluations récentes, propose les valeurs suivantes :

Appartement
avec cave et parking
Mauvais état d’entretien
Etat d’entretien moyen
Bon état d’entretien
Très bon état d’entretien
Valeur libre
660 €/m²
935 €/m²
1.155 €/m²
1.375 €/m²
Valeur occupée
560 €/m²
800 €/m²
985 €/m²
1.165 /m²

Le commissaire du Gouvernement propose de retenir :
- une valeur libre de 935 €/m² ou une valeur occupée de 800 €/m², le logement appartenant à la partie défenderesse étant un F3 de 56 m², avec cave et emplacement de stationnement intégrés et dans un état d’entretien qu’il qualifie de moyen après transport.

L’EPFIF ne présente pas d’observations quant aux termes de comparaison produits par le Commissaire du Gouvernement.

Madame [I] [C] [S] explique que le commissaire de Gouvernement ne produit pas les données de 2022 sur le [Adresse 27] et cela a une incidence sur l’appréciation de la valeur du mètre carré. Aussi, le commissaire du Gouvernement a réalisé une synthèse des prix au mètre carré, fondée sur le système amiable au forfait de l’EPFIF. Ce système d’acquisition altère et dénature la méthode d’évaluation par comparaison.

En l’espèce, pour déterminer la valeur des biens de Madame [I] [C] [S] les termes sont analysés en fonction de leur localisation :

En ce qui concerne les termes de comparaison consistant en des ventes d’appartement avec cave et emplacement de stationnement dans les copropriétés du [Adresse 27] et de l’[Adresse 32] (tableau 7)

Parmi les 28 références citées par le commissaire du Gouvernement concernant des ventes de F3 et F4 dans les bâtiments 3, 4, 11 et 12 du [Adresse 27] et de l’[Adresse 32], les 20 termes de comparaison suivants ne sont pas retenus parce qu’ils ont été échangés alors que les biens étaient occupés et qu’ils ont été, en conséquence, moins valorisés que ne devront l’être les biens à évaluer, libre d’occupation (CG n° 1, 3, 4, 7, 8, 9, 10, 12, 13, 15, 16, 18, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27 et 28).

Parmi les 28 références citées par le commissaire du Gouvernement concernant des ventes de F3 et F4 dans les bâtiments 3, 4, 11 et 12 du [Adresse 27] et de l’[Adresse 32], les 8 termes de comparaison suivants sont retenus pour servir la comparaison avec les biens à évaluer car ils correspondent à la vente d’appartements similaires à celui à évaluer (CG n° 2, 5, 6, 11, 14, 17, 19 et 20).

Il convient de préciser que les termes CG n° 2, 5, 6, 11 sont également proposés par l’EPFIF (DEM n° 25, 27, 7 et 18 ).

En ce qui concerne les termes de comparaison consistant en des ventes d’appartements, avec accessoires, situés dans les copropriétés voisines de celles du [Adresse 27] et de l’[Adresse 32] (tableaux 8, 9, 10, et 11)

Le commissaire du Gouvernement verse aussi aux débats 30 termes de comparaison correspondant à des cessions d’appartement avec accessoires (cave ou cellier, voire emplacement de stationnement), situés à [Localité 28] dans des copropriétés voisines de celles de l’[Adresse 32] et du [Adresse 27].

Ces 30 références sont exposées comme suit selon les caractéristiques exposées par le commissaire du Gouvernement et les valeurs moyennes calculées par la juridiction :

Résidences
à
[Localité 28]
Année de construction
et
caractéristiques de l’immeuble

Caractéristiques des biens
***

Termes étudiés
valeur unitaire
moyenne
libre
*
valeur unitaire
moyenne
occupée
**
[Adresse 38]
[Adresse 24]
1958
288 logements
5 immeubles de
4 étages chacun
appartement
cellier
parking
CG n° 29 à 39

2.077 €/m²

1.766 €/m²

[Adresse 36]
[Adresse 20] et [Adresse 24]
1958
192 logements
4 immeubles de
4 étages chacun
appartement
cellier

CG n° 40 à 48

1.825 €/m²

1.551 €/m²

[Adresse 33]
[Adresse 26]
1961
380 logements
4 immeuble de
4 étages chacun
appartement
cave

CG n° 49 à 57
2.043 €/m²
1.737 €/m²
[Adresse 39]
[Adresse 4]
1963
168 logements
1 immeuble de
10 étages
appartement
cave
parking
CG n° 58
2.089 €/m²
1.776 €/m²
Moyenne générale
1.991 €/m²
1.692 €/m²
Moyenne des logements avec parking
2.078 €/m²
1.766 €/m²
Moyenne des logements sans parking
1.934 €/m²
1.644 €/m²
* En l’absence de précision, il convient de considérer que les valeurs exposées par le commissaire du Gouvernement s’entendent libres de toute occupation, s’agissant de biens d’habitation.

** Dans le cadre de la présente procédure d’expropriation, l’EPFIF offre une valeur de 15 % inférieure lorsque les appartements sont occupés par un tiers (locataire), étant précisé qu’il s’agit du quantum de l’abattement affecté à la valeur libre de manière constante par la présente juridiction, pour tenir compte de la moins-value sur le marché immobilier générée par une situation d’occupation titrée.

*** Dans le cadre de cette étude, et en l’absence de précision quant à l’état d’entretien des appartements cédés, il y a lieu de considérer qu’il s’agit d’appartements dans des états d’entretien de moyen à bon ; il apparaît en effet au regard des termes de comparaison consistant en des ventes d’appartement au [Adresse 27] produits par le commissaire du Gouvernement que les logements vendus en mauvais état et en très bon état sont rares.

Il convient de préciser :

- qu’aucun terme de comparaison n’est produit en ce qui concerne la résidence des [Adresse 37], située [Adresse 15], pourtant également située à proximité de la présente copropriété, faute de cession récente ;

- que seul un terme de comparaison est produit en ce qui concerne la résidence [Adresse 39] (terme CG n°58) ; cette unique vente ne peut donc être considérée comme représentative de la valeur des logements de cette résidence.

Ces 30 termes de comparaison, bien que situés dans des copropriétés autres que celle du [Adresse 27] ou de l’[Adresse 32], correspondent à la vente de biens d’une composition similaire à celle des biens à évaluer.

Toutefois, les quatre résidences [Adresse 38], [Adresse 36], [Adresse 33] et [Adresse 39], bien que situées également dans le périmètre de l’ORCOD et de la ZAC du [Adresse 22], présentent un meilleur état d’entretien que le bâtiment 4 du [Adresse 27] ; il est à cet égard observé :

- que, selon les conclusions du commissaire du Gouvernement, si les copropriétés de trois de ces résidences ([Adresse 38], [Adresse 36] et [Adresse 39]) sont soumises à un plan de sauvegarde, à l’instar des copropriétés du [Adresse 27] et de l’[Adresse 32], ce n’est pas le cas de la résidence [Adresse 33], qui fait l’objet d’un Programme Opérationnel de Prévention et d’Accompagnement des Copropriétés visant un soutien des copropriétaires pour prévenir des dégradations ; il n’est pas fait état pour ces quatre copropriétés de problématiques financières comparables à celles évoquées pour les copropriétés du [Adresse 27] et de l’[Adresse 32] ;

- que ces résidences présentent un meilleur état d’entretien que le bâtiment 4 de la copropriété du [Adresse 27], comme il est possible de le constater sur les photographies produites par le commissaire du Gouvernement.

Il est, en outre, relevé que ces résidences appartiennent à des copropriétés de plus petites dimensions (comptant entre 168 et 380 logements) que celle du [Adresse 27] (qui compte 873 logements), alors que l’importance du nombre de copropriétaires du [Adresse 27] est identifiée comme facteur majeur de difficulté ; il est aussi souligné que ces résidences sont, à l’exception de la résidence [Adresse 39], composées de bâtiments de plus petites tailles, ne présentant que quatre étages, étant observé que le commissaire du Gouvernement ne retient, pour son évaluation, que les ventes portant sur des grands bâtiments des copropriétés du [Adresse 27] et de l’[Adresse 32], à l’exclusion de celles portant sur les petits bâtiments de ces copropriétés.

À l’inverse, le bâtiment 4 de la copropriété du [Adresse 27], placée sous administration provisoire depuis 2005, a fait l’objet :

- de deux plans de sauvegarde successifs, en 2010 et 2017, qui n’ont pas permis le nécessaire redressement de la copropriété et la réhabilitation des bâtiments ;

- d’un arrêté municipal en date du 3 septembre 2018 portant sur les équipements communs de la copropriété du [Adresse 27] ;

- d’un décret du 29 juillet 2021, en cours de mise en oeuvre, déclarant l’extrême urgence de la procédure d’expropriation, laquelle suppose des risques sérieux pour la sécurité des occupants, selon les termes du 2ème alinéa de l’article L.522-1 du code de l’expropriation ;

- de la pose d’un filet de protection au niveau des pignons, comme remarqué par les personnes présentes lors du transport, étant précisé que les pignons du bâtiment 18, édifié dans le cadre du même programme de construction, se sont écartés des murs des façades et que l’immeuble a fait l’objet d’une évacuation de tous ses occupants en urgence avant d’être démoli.
Dans ces conditions, il est avéré que le bâtiment dans lequel sont situés les biens à évaluer est dans un mauvais état d’entretien, ce qui constitue nécessairement un facteur majeur de dépréciation par rapport aux termes de comparaison situés dans des copropriétés voisines, d’une meilleure consistance.

Par conséquent, au regard de l’ensemble de ces éléments, aucun des termes des références portant sur les appartements situés dans les Résidences [Adresse 36], [Adresse 33], [Adresse 38] et [Adresse 39], ne sera retenu.

En ce qui concerne les termes de comparaison consistant à des cessions de parkings extérieurs sur les copropriétés du [Adresse 27] et de l’[Adresse 32] (tableau 12)

Les 8 termes de comparaison concernant uniquement des cessions d’emplacement de stationnement sur les copropriétés du [Adresse 27] et de l’[Adresse 32] ne sont pas retenus, car la consistance et les caractéristiques des biens ne sont pas équivalentes.

Ainsi, les termes du commissaire du Gouvernement sont donc retenus selon les moyennes suivantes :

- 600 €/m² en valeur libre (moyenne des termes CG n°6 et 20) pour un mauvais état d’entretien
- 850 €/m² en valeur libre ( moyenne des termes CG n°11 et 14) pour un état d’entretien moyen
- 1.050 €/m² en valeur libre ( moyenne des termes CG n° 2, 5, 17 et 19) pour un bon état d’entretien ;

- Termes de comparaison versés par Madame [I] [C] [S]
(DEF = Défendeur à la présente procédure)

Madame [I] [C] [S] mentionne :

- des jugements rendus en 2022 et 2023 par le juge de l’expropriation prenant en compte des cessions réalisées dans les copropriétés voisines, sans verser les jugements aux débats.

- la réalisation d’une étude des prix pratiqués sur les copropriétés voisines de l’[Adresse 32] et du [Adresse 27] par le commissaire du gouvernement.

Elle fait également état :

- des moyennes des cessions réalisées sur les copropriétes voisines de l’[Adresse 32] et du [Adresse 27] dans le cadre des jugements rendus sur le B10 par le juge de l’expropriation du tribunal judiciaire de Bobigny.

Résidences autres que celles du [Adresse 27] et de l’[Adresse 32], également situées à
[Localité 28]
Année de
construction
et
composition
des biens
Nombre de logements

et

Caractéristiques de l’immeuble

Valeurs moyennes des appartements F3 et F4 retenus
valeur
unitaire
moyenne

euros/m² en valeur libre
*
valeur
unitaire

euros/m² en valeur occupée
**
[Adresse 38]
[Adresse 24]
1958
Appartement
Cellier
parking

288

5 barres d’immeuble de 4 étages chacun
F3
CG n° 66,68,69,71,73,74 et 75 : 1.711 €/m²

F4
DEM n°72 : 1.371 €/ m²

1.668, 62 €/m²

1.418, 32 €/m²

[Adresse 36]
[Adresse 20] et [Adresse 24]
1958
appartement
cellier

192

4 barres d’immeuble de 4 étages chacun

F3
CG n° 76,77,81 et 82 : 1.737,5 €/m²

F4
DEM n°80 : 2.186 €/ m²

1.827,20 €/m²

1.553,20 €/m²

[Adresse 33]
[Adresse 26]
1961
appartement
cave
192

4 barres d’immeuble de 4 étages chacun

F4
CG n° 85 et 89 : 1.6615,5 €/m²

F3
CG n°83, 84, 86, 87 et 88 : 1.781, 20 €/ m²
1.733, 85 €/m²
1.473, 77 €/m²
[Adresse 39]
[Adresse 4]
1963
Appartement
Cellier
parking
168
1 barre d’immeuble de 10 étages
F4
CG n° 94 : 1.119 €/m²

F3
CG n°90, 91, 92 et 93 : 1.284 €/ m²
1.251 €/m²
1.063, 35 €/m²
[Adresse 31]
[Adresse 21] et allées [Adresse 29] et [Adresse 30]
1975
appartement
cave
parking
131
4 bâtiments dont 2 en forme de L de 6 à 8 étages disposant de 3 accès
F4
CG n° 100 : 1.561 €/m²

F3/4
CG n°95, 96, 97, 98 et 99 : 1.784,6 €/ m²
1.747,33 €/m²
1.485,23 €/m²
* En l’absence de précision, il convient de considérer que les valeurs exposées par le commissaire du Gouvernement s’entendent libres de toute occupation, s’agissant de biens d’habitation.

** Dans le cadre de la présente procédure d’expropriation, l’EPFIF offre une valeur de 15 % inférieure lorsque les appartements sont occupés par un tiers (locataire), étant précisé qu’il s’agit du quantum de l’abattement affecté à la valeur libre de manière constante par la présente juridiction, pour tenir compte de la moins-value sur le marché immobilier générée par une situation d’occupation titrée.

- des moyennes des cessions réalisées sur les copropriétes voisines de l’[Adresse 32] et du [Adresse 27] dans le cadre des jugements rendus sur le B3 par le juge de l’expropriation du tribunal judiciaire de Bobigny.

Résidences
à
[Localité 28]
Année de construction
et
caractéristiques de l’immeuble

Caractéristiques des biens
***

Termes étudiés
valeur unitaire
moyenne
libre
*
valeur unitaire
moyenne
occupée
**
[Adresse 38]
[Adresse 24]
1958
288 logements
5 immeubles de
4 étages chacun
appartement
cellier
parking
CG n° 29 à 39

2.077 €/m²

1.766 €/m²

[Adresse 36]
[Adresse 20] et [Adresse 24]
1958
192 logements
4 immeubles de
4 étages chacun
appartement
cellier

CG n° 40 à 48

1.825 €/m²

1.551 €/m²

[Adresse 33]
[Adresse 26]
1961
380 logements
4 immeuble de
4 étages chacun
appartement
cave

CG n° 49 à 57
2.043 €/m²
1.737 €/m²
[Adresse 39]
[Adresse 4]
1963
168 logements
1 immeuble de
10 étages
appartement
cave
parking
CG n° 58
2.089 €/m²
1.776 €/m²
Moyenne générale
1.991 €/m²
1.692 €/m²
Moyenne des logements avec parking
2.078 €/m²
1.766 €/m²
Moyenne des logements sans parking
1.934 €/m²
1.644 €/m²
* En l’absence de précision, il convient de considérer que les valeurs exposées par le commissaire du Gouvernement s’entendent libres de toute occupation, s’agissant de biens d’habitation.

** Dans le cadre de la présente procédure d’expropriation, l’EPFIF offre une valeur de 15 % inférieure lorsque les appartements sont occupés par un tiers (locataire), étant précisé qu’il s’agit du quantum de l’abattement affecté à la valeur libre de manière constante par la présente juridiction, pour tenir compte de la moins-value sur le marché immobilier générée par une situation d’occupation titrée.

- des valeurs retenues par le juge de l’expropriation du tribunal judiciaire de Bobigny dans les jugements relatifs à la procédure d’expropriation du B10 de la copropriété du [Adresse 27] de la façon suivante :

Etat

Mauvais

Mauvais-Moyen

Moyen

Moyen-Bon

Bon

Très bon
Libre

660 €/m²

825 €/m²

935 €/m²

1.050 €/m²

1.260 €/m²

1.375 €/m²
Occupé

560 €/m²

715 €/m²

800 €/m²

880 €/m²

1.000 €/m²

1.170 €/m²

- des valeurs retenues par le juge de l’expropriation du tribunal judiciaire de Bobigny dans les jugements relatifs à la procédure d’expropriation du B3 de la copropriété du [Adresse 27] de la façon suivante :

Etat

Mauvais

Mauvais-Moyen

Moyen

Moyen-Bon

Bon

Très bon
Libre

700 €/m²

865 €/m²

975 €/m²

1.090€/m²

1.195 €/m²

1.415 €/m²

Madame [I] [C] [S] propose, de manière :
- minimale la somme de 1.023,75 €/m² pour un appartement en état moyen en application de l’augmentation du mètre carré entre le B10 et le B3 de 5%
- maximale la somme de 1.218,75 €/m² en application de l’augmentation du mètre carré sur la résidence [Adresse 38] de 25% ;
- médiane la somme de 1.121.15 €/m² en application de l’augmentation du mètre carré sur la résidence [Adresse 38] de 15% ;

Ainsi, Madame [I] [C] [S] retient la somme 1121.15 € / m² comme valeur unitaire.

Le Commissaire du Gouvernement n’a fait valoir aucune critique sur ces termes.

L’EPFIF fait valoir au visa des articles R 311-12 et R 311-22 du code de l’expropriation que Madame [I] [C] [S] ne produit pas les actes de vente cités, ni les références de publication.
Il souligne en outre que les valeurs unitaires qui ressortent de la base PATRIM ne peuvent être prises en compte en l’état car le prix de vente comprend également les indemnités accessoires, notamment les frais de remploi.
Il soutient également en versant des photographies aux débats que :
- les termes de comparaison relatifs aux bâtiment R+10 situés [Adresse 1], [Adresse 3], [Adresse 5] à [Localité 28], ne peuvent être pris en compte faute de justifier du prix hors frais de remploi et hors frais accessoires ;
- les termes de comparaisons relatifs aux bâtiments situés [Adresse 6] et [Adresse 7] à [Localité 28] ne peuvent être retenus, car ils concernent des bâtiments R+4 donc des appartements qui sont mieux valorisés que ceux situés dans des bâtiments R+10 ;
- les termes de comparaison relatifs à des biens situés dans des copropriétés voisines de celle du [Adresse 27] ne peuvent être pris en compte, car ils sont relatifs à des biens situés dans des copropriétés en meilleur état que le [Adresse 27].

En l’espèce, pour déterminer la valeur des biens de Madame [I] [C] [S] les termes sont analysés en fonction de leur localisation :

Madame [I] [C] [S] ne verse aucun terme de comparaison. Elle s’appuie uniquement sur les valeurs retenues par la chambre de l’expropriation du tribunal judiciaire de BOBIGNY dans le cadre des jugements rendus et relatifs à la procédure d’expropriation de la copropriété du [Adresse 27].

sur le calcul de l’indemnité principale

Au regard des développements précédents, les termes de comparaison produits par les parties et retenus par la juridiction pour déterminer la valeur des biens, sont les suivants :

Parties
Mauvais
état
état mauvais
à moyen
état moyen
état moyen à bon
Bon état
Très bon état
EPFIF
Cessions en valeur libre - Bâtiments 3, 4 et 10 de la Copropriété du [Adresse 27]
600 €/m²,
moyenne des termes DEM n° 6 et 7

850 €/m²,
moyenne des termes DEM n° 18, 19, 20, 21, 41, 45, 105, 106, 107, 108 et 109

1.050 €/m²,
moyenne des termes DEM n°25, 27, 28, 29, 32, 33, 38, 39, 43, 44, 76, 77, 78, 79, 80, 81, 82, 83, 84, 85, 86, 87 et 88
1.250 €/m²,
valeur du terme DEM n° 31, 35, 42 et 63

Cessions en valeur libre - Copropriétés du [Adresse 27] et de l’[Adresse 32]
CG
600 €/m²
moyenne des termes CG n°6 et 20

850 €/m²
moyenne des termes CG n°11 et 14

1.050€/m²
moyenne des termes CG n°2, 5, 17 et 19
/

En l’espèce, pour évaluer les biens expropriés, il sera tenu compte :

- des valeurs offertes par l’EPFIF et proposées par le commissaire du Gouvernement, supérieures, selon l’état d’entretien de l’appartement, aux valeurs mises en évidence par les termes de comparaison, à savoir :

.pour le commissaire du Gouvernement :

Appartement
avec cave et parking
Mauvais état d’entretien
Etat d’entretien moyen
Bon état d’entretien
Très bon état d’entretien
Valeur libre
660 €/m²
935 €/m²
1.155 €/m²
1.375 €/m²
Valeur occupée
560 €/m²
800 €/m²
985 €/m²
1.165 /m²

.pour l’EPFIF :

*935 €/m² en valeur libre l’appartement de type F3 avec cave et emplacement de stationnement intégrés ; l’état d’entretien de l’appartement étant qualifié de moyen par l’expropriant lors du transport ;

- des valeurs fixées en 2021 et 2022 par la présente juridiction lors de la fixation des indemnités de biens composés d’un appartement, d’une cave et d’un emplacement de stationnement et situés dans les bâtiments 3, 4 et 10 de la copropriété, telles qu’exposées par le commissaire du Gouvernement, à savoir:

Etat
Mauvais
Mauvais-Moyen
Moyen
Moyen-Bon
Bon
Très bon
Libre

660 €/m²

825 €/m²

935 €/m²

1.050 €/m²

1.260 €/m²

1.375 €/m²
Occupé

560 €/m²

715 €/m²

800 €/m²

880 €/m²

1.000 €/m²

1.170 €/m²

Ainsi, dans le cadre de l’opération d’expropriation du bâtiment 4 de la copropriété du [Adresse 27], pour l’évaluation des appartements de type F3 ou F4 libres de toute occupation, il convient de retenir les valeurs suivantes, selon l’état d’entretien de l’appartement :
- 660 €/m², lorsque l’appartement est dans un mauvais état d’entretien ;
- 825 €/m², lorsque l’appartement est dans un état d’entretien de mauvais à moyen ;
- 935 €/m², lorsque l’appartement est dans un état d’entretien moyen ;
- 1.050 €/m², lorsque l’appartement est dans un état d’entretien de moyen à bon ;
- 1.260 €/m², lorsque l’appartement est dans un bon état d’entretien ;
- 1.375 €/m² et plus, lorsque l’appartement est dans un très bon état d’entretien et bien équipé.

Au regard, d’une part, des valeurs déterminées ci-dessus et, d’autre part, des caractéristiques des biens à évaluer, notamment de leur état d’entretien qui est qualifié de moyen après visite des lieux, il convient de fixer la valeur du mètre carré pour l’évaluation de l’appartement (lot n°791), de la cave (lot n°991) et de l’emplacement de stationnement ( lot n°2324) appartenant à Madame [I] [C] [S] à 935 €/m.²

Par conséquent, l’indemnité de dépossession est évaluée à la somme de 52.360 € (935 €/m² x 56 m²), en valeur libre, pour l’appartement de type F3 (lot n°791) avec cave (lot n°991) et emplacement de stationnement ( lot n°2324) intégrés.

Sur l’abattement pour relogement

L’opération d’expropriation réalise, dans la présente hypothèse d’un propriétaire occupant lui-même son bien, à la fois une dépossession du bien immobilier lui appartenant et une privation de son lieu de résidence.

L’entité expropriante doit au propriétaire exproprié occupant lui-même son bien :

- des indemnités en réparation du préjudice de dépossession couvrant l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l’expropriation, en application des dispositions de l’article L.321-1 du code de l’expropriation ;

- en sus, deux propositions de relogement :

. l’article L.423-1 du code de l’expropriation institue un droit de priorité, notamment en qualité de locataire dans un local soumis à la législation sur les habitations à loyer modéré ou dans un local dont le loyer n’excède pas celui d’un local construit en application de la législation relative aux habitations à loyer modéré de même consistance (...) ;

. l’article L.314-2 du code de l’urbanisme organise les modalités de ce droit au relogement, obligeant l’entité expropriante à faire à chaque occupant au moins deux propositions portant sur des locaux satisfaisant à la fois aux normes d’habitation définies par application du troisième alinéa de l’article L.322-1 du code de la construction et de l’habitation et aux conditions prévues à l’article 13 bis de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 (...).

Le propriétaire-occupant exproprié a le choix d’accepter l’une de ces offres ou de renoncer à être relogé par l’expropriant.

L’article R.423-9 du code de l’expropriation permet au juge de tenir compte d’un relogement du propriétaire-occupant par l’expropriant, lors de la fixation des indemnités de dépossession, dans les termes suivants : Il ne peut être offert un local de relogement à un propriétaire exproprié qui occupe tout ou partie de son immeuble que si cette offre a été acceptée par ce propriétaire avant la fixation des indemnités d’expropriation, afin de permettre au juge et, le cas échéant, à la cour d’appel, de tenir compte de ce relogement lors de la fixation des indemnités d’expropriation.

- Sur la nature du droit au relogement

Aux termes d’un avis rendu le 16 novembre 2023 (pourvoi n°23-70.011), la 3ème chambre civile de la Cour de Cassation a retenu que :
“1. Le propriétaire-occupant, qui accepte d'être relogé, bénéficie d'une réparation en nature d'une partie du préjudice résultant de l'expropriation, devant être prise en compte lors de la fixation des indemnités, en application de l'article R. 423-9 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.

2. Le relogement du propriétaire-occupant ne constitue pas une moins-value affectant la valeur vénale du bien exproprié et sa situation n'est pas assimilable à celle du propriétaire dont le bien est occupé par un locataire.

3. La prise en compte du relogement lors de la fixation des indemnités, déterminée au regard de l'avantage procuré à l'exproprié et non du coût de ce relogement pour l'expropriant, ne donne pas naissance à une créance de l'expropriant sur l'exproprié.

4. Les modalités de prise en compte de ce relogement lors de la fixation des indemnités relèvent du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond.”.

En l’espèce, lors du transport sur les lieux, il a été constaté que Madame [I] [C] [S] occupe elle-même l’appartement de type F3 correspondant au lot n°791.

Aux termes de leurs dernières écritures, Madame [I] [C] [S] ne précise pas si elle entend renoncer à son droit à relogement ou accepter l’une des offres de l’expropriant.

Dans ces conditions, il y a lieu de procéder à une évaluation de l’indemnité principale de dépossession sous une forme alternative, en valeur libre sans abattement pour relogement et en valeur libre avec abattement pour relogement selon que Madame [I] [C] [S] renonce ou accepte une offre de relogement par l’expropriant.

- sur le calcul de l’abattement pour relogement

L’EPFIF estime qu’il convient d’appliquer un abattement pour relogement de 15 % sur le montant total des indemnités à revenir à Madame [I] [C] [S] dans le cas où elle accepte une offre de relogement.

Madame [I] [C] [S] propose d’évaluer le montant de la déduction à valoir sur l’indemnité principale en tenant compte des coûts générés par la recherche d’un logement. Elle considère que les frais générés par la mise en oeuvre effective du relogement, dans l’hypothèse où le défendeur accepte l’une des propositions de relogement et où l’EPFIF conduit le processus à son terme, sont évalués à 560 €, correspondant à ( 10€ x 56 m²).

Il a été précédemment établi que la valeur vénale de l’appartement de Madame [I] [C] [S] est évaluée à la somme de 52.360 € tenant compte notamment de l’état moyen d’entretien du bien.

En premier lieu, calculer l’abattement pour relogement en pourcentage de la valeur vénale du bien exproprié, est contraire à l’avis de la Cour de Cassation du 16 novembre 2023 selon lequel l’occupation du bien par la propriétaire expropriée ne constitue pas une moins value sur la valeur vénale du bien, mais la réparation en nature d’une partie du préjudice subi, à savoir non pas la perte patrimoniale, mais la privation du lieu de résidence.

Calculer l’abattement pour relogement en pourcentage de la valeur vénale du bien revient à continuer d’appliquer un abattement pour occupation alors que la Cour de Cassation l’a expressément exclu en expliquant que “(...) le relogement du propriétaire-occupant ne constitue pas une moins-value affectant la valeur vénale du bien exproprié, dans la mesure où sur le marché libre, le bien occupé par son propriétaire ne subit pas de moins-value en raison de cette occupation, dès lors qu’il sera libéré à l’occasion du transfert de propriété. La situation de ce propriétaire n’est donc pas assimilable à celle du propriétaire dont le bien est occupé par un locataire.”.

En second lieu, calculer l’abattement pour relogerment en pourcentage de cette valeur vénale, laquelle a notamment été déterminée au regard de l’état d’entretien du bien, serait inéquitable à l’égard de Madame [I] [C] [S] sanctionnée de s’être comportée en propriétaire diligent tandis que des propriétaires négligents se verraient appliquer un abattement dont le montant serait moindre.

Ainsi, conformément à l’avis de la Cour de Cassation du 16 novembre 2023, il y a lieu de déterminer l’abattement pour relogement en prenant compte comme base de calcul , non la valeur vénale du bien, mais l’avantage procuré à l’exproprié, c’est-à-dire le fait d’être déchargé de l’aléa de la recherche d’un nouveau domicile et la possibilité de jouir d’un bien décent, aux normes, adapté à ses besoins personnels et familiaux ainsi qu’à ses moyens financiers et géographiqement à proximité de ses centres d’intérêts.

À cet égard, il y a lieu de souligner que l’avantage procuré à l’exproprié est d’autant plus important que sa famille est nombreuse et composée d’un ou plusieurs membres présentant des besoins particuliers, les logements de grandes surfaces à loyer modéré et adaptés aux personnes à mobilité réduite étant les plus difficiles à obtenir.

En l’espèce, ni l’EPFIF, ni Madame [I] [C] [S] n’ont fait parvenir d’élément quant à la composition de leur famille et à leurs besoins de manière générale relativement à leur logement, de sorte qu’il y a lieu de considérer qu’un relogement dans un appartement de taille et de situation équivalente à celui dont elle est privée est de nature à répondre à ses besoins.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, l’avantage procuré à Madame [I] [C] [S] en cas d’acceptation d’une offre de relogement par l’EPFIF, peut être évalué à la somme de 2.000 €, soit l’équivalent de deux mois de loyer pour un appartement similaire à celui dont elle est privée, étant précisé qu’il est généralement sollicité deux mois de loyers à titre de dépôt de garantie.

Par conséquent, l’indemnité principale de dépossession est évaluée :

- à la somme de 52.360 € en valeur libre dans l’hypothèse où Madame [I] [C] [S] renoncerait à son droit au relogement ;

- à la somme de 50.360 € en valeur libre après application d’un abattement pour relogement de 2.000 €, dans l’hypothèse où Madame [I] [C] [S] accepterait l’une des offres de relogement de l’expropriant.

Sur l’indemnité de remploi

Aux termes de l'article R.322-5 du code de l'expropriation, l'indemnité de remploi est calculée compte tenu des frais de tous ordres normalement exposés pour l'acquisition de biens de même nature moyennant un prix égal au montant de l’indemnité principale. Sont également pris en compte dans le calcul du montant de l’indemnité les avantages fiscaux dont les expropriés sont appelés à bénéficier lors de l’acquisition de biens de remplacement.

En l’espèce, ils ont pour base le montant de l’indemnité principale, à savoir :

- Dans l’hypothèse où Madame [I] [C] [S] renoncerait à son droit au relogement, la somme de 52.360 € en valeur libre.
et ils sont liquidés comme suit :
20% sur 5.000 € = 1.000 €
15% sur 10.000 € = 1.500 €
10% sur 49.860 € = 4.986 €
Total : 7.486 €

- dans l’hypothèse où Madame [I] [C] [S] accepterait l’une des offres de relogement de l’EPFIF, la somme de 50.360 € en valeur libre.
et ils sont liquidés comme suit :
20% sur 5.000 € = 1.000 €
15% sur 10.000 € = 1.500 €
10% sur 47.860 € = 4.786 €
Total : 7.286 €

Par conséquent, l’indemnité de remploi est fixée, de manière alternative, à la somme de 7.486 € en cas de renonciation au droit au logement ou la somme de 7.286 € en cas d’acceptation d’une des offres de relogement de l’EPFIF.

Sur l’indemnité totale de dépossession

L’indemnité totale de dépossession foncière, est fixée :

- dans l’hypothèse où Madame [I] [C] [S] renoncerait à son droit au relogement, à la somme de 59.846 € en valeur libre, se décomposant comme suit :
*52.360 €, au titre de l’indemnité principale ;
*7.486 €, au titre de l’indemnité de remploi ;

- dans l’hypothèse où Madame [I] [C] [S] accepterait l’une des offres de relogement de l’EPFIF, à la somme de 57.646 € en valeur libre, se décomposant comme suit
*50.360 €, au titre de l’indemnité principale après un abattement pour relogement de 2.000€ ;
*7.286 €, au titre de l’indemnité de remploi ;

Sur les demandes accessoires

Sur les dépens

Conformément aux dispositions de l’article L 312-1 du code de l’expropriation, l’entité expropriante supporte seule les dépens de première instance.

Par conséquent, l’EPFIF, en qualité de partie expropriante, sera condamnée aux dépens de la première instance.

Sur les frais irrépétibles

Aux termes de l’article 700 1° du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations. Néanmoins, s'il alloue une somme au titre du 2° du présent article, celle-ci ne peut être inférieure à la part contributive de l'Etat.

En l'espèce, l’équité commande de condamner l’EPFIF, partie tenue aux dépens, à verser à Madame [I] [C] [S] la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le juge de l’expropriation, statuant publiquement par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et par mise à disposition au greffe,

ANNEXE à la présente décision le procès-verbal de transport du 9 novembre 2023 ;

- les termes de comparaison produits par l’Etablissement Public Foncier d’Ile-de-France (tableaux 1, 2, 3, 4, 5 et 6) ;

- les termes de comparaison versés par le commissaire du Gouvernement (tableaux 7, 8, 9, 10, 11 et 12) ;

Dans l’hypothèse où Madame [I] [C] [S] renoncerait à leur droit à relogement :

FIXE l’indemnité due par l’Etablissement Public Foncier d’Île-de-France à Madame [I] [C] [S] au titre de la dépossession des lots n°791 (appartement), n°991 (cave) et n°2324 (emplacement de stationnement) du bâtiment 4 de la copropriété du [Adresse 2] à [Localité 28] à la somme de 59.846 € (cinquante-neuf mille huit cent quanrante-six euros), en valeur libre, se décomposant comme suit :
- 52.360 €, au titre de l’indemnité principale ;
- 7.486 €, au titre de l’indemnité de remploi ;

Dans l’hypothèse où Madame [I] [C] [S] accepterait l’une des offres de relogement de l’EPFIF :

FIXE l’indemnité due par l’Etablissement Public Foncier d’Île-de-France à Madame [I] [C] [S] au titre de la dépossession des lots n°791 (appartement), n°991 (cave) et n°2324 (emplacement de stationnement) du bâtiment 4 de la copropriété du [Adresse 2] à [Localité 28] à la somme de 57.646 € (cinquante- sept mille six cent quarante-six euros), en valeur libre, se décomposant comme suit :
-50.360 €, au titre de l’indemnité principale après abattement pour relogement d’un montant de 2.000 € ;
-7.286 €, au titre de l’indemnité de remploi ;

En toute hypothèse :

CONDAMNE l’Etablissement Public Foncier d’Île-de-France aux dépens ;

CONDAMNE l’Etablissement Public Foncier d’Île-de-France à payer à Madame [I] [C] [S] la somme de 3.000 € (trois mille euros) en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

Cécile PUECH

Greffier
Rémy BLONDEL

Juge


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : Expropriations 3
Numéro d'arrêt : 23/00157
Date de la décision : 16/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 22/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-16;23.00157 ?
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