TRIBUNAL JUDICIAIRE
de BOBIGNY
JUGEMENT CONTENTIEUX DU 14 MAI 2024
Chambre 7/Section 3
AFFAIRE: N° RG 23/12072 - N° Portalis DB3S-W-B7H-YSDI
N° de MINUTE : 24/00300
Madame [S] [W]
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Ketty DALMAS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1510
DEMANDEUR
C/
Monsieur [M] [I]
[Adresse 2]
[Localité 3]
défaillant
DEFENDEUR
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Madame Marjolaine GUIBERT, Vice-Présidente, statuant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l article 812 du code de procédure civile, assistée aux débats de Madame Corinne BARBIEUX, faisant fonction de greffier.
DÉBATS
Audience publique du 02 Avril 2024.
JUGEMENT
Rendu publiquement, par mise au disposition au greffe, par jugement Réputé contradictoire et en premier ressort, par Madame Marjolaine GUIBERT, Vice-Présidente, assistée de Madame Corinne BARBIEUX, faisant fonction de greffier.
EXPOSE DU LITIGE
Par acte de commissaire de justice du 19 décembre 2023, Mme [S] [W] a fait assigner M. [M] [I] devant le tribunal judiciaire de Bobigny aux fins d’obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 19 007,64 euros au titre du remboursement du solde des prêts consentis, 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral subi, 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens, avec application de l’article 699 du Code de procédure civile et exécution provisoire.
M. [M] [I], valablement assigné par acte extrajudiciaire converti en procès verbal de recherches infructueuses, n’a pas constitué avocat.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions de Mme [S] [W], il est expressément renvoyé à l’assignation de la demanderesse dans les conditions de l’article 455 du Code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 mars 2024.
A l’issue de l’audience des plaidoiries du 2 avril 20024, le jugement a été mis en délibéré au 14 mai 2024.
MOTIVATION
Sur la demande principale
Aux termes de l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
En application de l’article 1892 du code civil, le prêt de consommation est un contrat par lequel l’une des parties livre à l’autre une certaine quantité de choses qui se consomment par l’usage, à la charge pour cette dernière de lui en rendre autant de même espèce et qualité.
Consenti entre particuliers, ce prêt est un contrat réel qui suppose la remise d’une chose. De jurisprudence constante, l’absence d’intention libérale de celui qui agit en restitution ne suffit pas à elle seule à établir l’obligation de restitution de la somme versée. Celui qui a remis les fonds doit donc rapporter, en complément de la preuve du versement, la preuve par tous moyens admissibles qu’il a prêté comme il l’affirme.
En application de l’article 1326 du code civil, l’acte juridique par lequel une seule partie s’engage envers une autre à lui payer une somme d’argent doit être constaté dans un titre qui comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement ainsi que la mention, écrite par lui-même, de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres.
Si Mme [S] [W] ne justifie pas en l’espèce d’une reconnaissance de dette établie par M. [M] [I], avec qui elle a entretenu une relation amoureuse pendant plusieurs mois, elle produit de nombreuses pièces démontrant qu’elle lui a prêté diverses sommes d’argent.
Pour prouver les versements effectués au profit de M. [M] [I], elle verse aux débats les relevés du compte qu’elle a ouvert dans les livres de la société BNP Paribas du 17 juin 2020 au 17 août 2020, du 17 novembre 2020 au 17 décembre 2020 et du 17 mars 2021 au 17 avril 2021 démontrant qu’elle a versé à son profit les sommes de :
- 1 000 euros le 30 juin 2020 ;
- 4 000 euros le 13 juillet 2020 ;
- 14 000 euros le 20 juillet 2020 ;
- 2 202,64 euros par chèque n° 5814969 ;
- 800 euros le 1er décembre 2020 ;
Pour démontrer l’obligation de restitution pesant sur M. [M] [I], elle produit divers messages échangés entre les parties, et notamment :
- Le courrier non daté qu’il adresse à l’avocate de Mme [W] intitulé “proposition à l’amiable”, par lequel il propose de transiger et de rembourser la somme de 14 000 euros au moyen de paiements mensuels de 200 euros ;
- Les échanges de mails du 5 novembre 2021 par lesquels Mme [W] lui indique ne pas comprendre son souhait d’obtenir une lettre d’engagement, dès lors qu’il sait exactement ce qu’il lui doit, “à savoir 21 800 euros (auquel on retire les 300 euros que tu as envoyé)”, et une longue réponse de M. [I] aux termes de laquelle il ne conteste pas ce montant mais maintient sa demande de lettre d’engagement ;
- Des échanges de SMS entre Mme [W] et M. [I] dans lesquels Mme [W] maintient ses demandes de remboursement mensuels, ce dernier lui rappelle qu’ils n’ont pas signé de reconnaissance de dette, ce à quoi Mme [W] lui répond qu’il sait malgré tout qu’il lui doit cet argent et indique ne pas comprendre pourquoi il complique les choses, M. [I] ajoutant qu’il ne complique pas mais qu’il ne pourra plus la rembourser à un moment, sans, là encore, contester le principe du remboursement des sommes payées par Mme [W].
Par sa pièce n° 14, elle reconnaît que M. [M] [I] lui a d’ores-et-déjà remboursé la somme totale de 3 000 euros par virements de 300 euros entre le mois de septembre 2021 et le mois d’août 2022.
Ces éléments cumulés constituent un faisceau d’indices démontrant l’obligation de remboursement de M. [M] [I], la seule difficulté restant, en l’absence de reconnaissance de dette en bonne et due forme, la question du montant de la dette totale à rembourser.
Au-delà de la proposition transactionnelle de M. [I] à 14 000 euros, la seule pièce par laquelle Mme [W] démontre le montant total des prêts consentis est l’échange de mails du 5 novembre 2021 évoquant le prêt de la somme globale de 21 800 euros, que M. [I] n’a pas contesté dans ses quatre réponses successives du même jour.
Dans ces conditions, il doit être considéré comme démontré que Mme [W] lui a prêté la somme totale de 21 800 euros, comme elle le déclarait dans son courriel du 5 novembre 2021, de laquelle il convient de retirer les 3 000 euros d’ores et déjà remboursés par M. [M] [I] , soit un solde restant dû de 18 800 euros.
M. [M] [I] ne justifie d’aucun moyen permettant de contester son obligation au paiement, et ne justifie pas d’autres remboursements que ceux listés par Mme [S] [W].
Dans ces conditions, M. [M] [I] est condamné à payer à Mme [S] [W] en deniers ou quittances valables la somme de 18 800 euros en remboursement des prêts consentis au cours de l’année 2020.
Sur la demande de dommages et intérêts
Mme [S] [W] sollicite également la condamnation de M. [M] [I] à lui payer la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice moral.
Aux termes de l’article 1240 du Code civil, tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Mme [S] [W] verse aux débats des échanges de SMS entre les parties démontrant la particulière mauvaise volonté de M. [M] [I] pour la rembourser, ce qui lui a nécessairement causé d’importants tracas qu’il est légitime de réparer en le condamnant à lui payer la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice moral.
Sur les frais du procès et l’exécution provisoire
Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
M. [M] [I] est condamné aux dépens, lesquels seront recouvrés dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.
En application de l'article 700 du code de procédure civile, dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.
M. [M] [I] est condamné à payer à Mme [S] [W] la somme de 3 000 euros au titre de ses frais irrépétibles.
La présente instance ayant été introduite après le 1er janvier 2020, il convient de faire application de l’article 514 du code de procédure civile, lequel dispose que les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire.
Les demandes plus amples, non justifiées, sont rejetées.
PAR CES MOTIFS,
Le Tribunal, statuant après débats en audience publique, par jugement réputé contradictoire rendu en premier ressort par mise à disposition au greffe,
Condamne M. [M] [I] à payer à Mme [S] [W] en deniers ou quittances valables la somme de 18 800 euros en remboursement des prêts consentis au cours de l’année 2020 ;
Condamne M. [M] [I] à payer à Mme [S] [W] la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral causé ;
Condamne M. [M] [I] aux dépens, avec recouvrement dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile ;
Condamne M. [M] [I] à payer à Mme [S] [W] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rappelle que l’exécution de l’entier jugement est de droit ;
Rejette comme non justifiées les demandes plus amples.
Le présent jugement ayant été signé par le président et le greffier
Le GreffierLe Président
Corinne BARBIEUXMarjolaine GUIBERT