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30/04/2024 | FRANCE | N°23/00230

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, Expropriations 2, 30 avril 2024, 23/00230


Décision du 30 Avril 2024
Minute n° 24/93


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY

JURIDICTION DE L’EXPROPRIATION
DE LA SEINE-SAINT-DENIS

JUGEMENT FIXANT INDEMNITÉS

du 30 Avril 2024

:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:

Rôle N° RG 23/00230 - N° Portalis DB3S-W-B7H-YF22

Le juge de l’expropriation du département de la SEINE-SAINT-DENIS


DEMANDEUR :


ÉTABLISSEMENT PUBLIC FONCIER D’ÎLE DE FRANCE
[Adresse 4]
[Adresse 4]
représentée par Maître Michaël MOUSSAULT de la SELAS DS AVOCATS, avocats

au barreau de PARIS
DÉFENDEUR :
Madame [S] [V] veuve [K]
[Adresse 1]
représentée par Maître Abdoulaye CISSE, avocat au barreau de SEINE-SAINT-D...

Décision du 30 Avril 2024
Minute n° 24/93

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY

JURIDICTION DE L’EXPROPRIATION
DE LA SEINE-SAINT-DENIS

JUGEMENT FIXANT INDEMNITÉS

du 30 Avril 2024

:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:

Rôle N° RG 23/00230 - N° Portalis DB3S-W-B7H-YF22

Le juge de l’expropriation du département de la SEINE-SAINT-DENIS

DEMANDEUR :

ÉTABLISSEMENT PUBLIC FONCIER D’ÎLE DE FRANCE
[Adresse 4]
[Adresse 4]
représentée par Maître Michaël MOUSSAULT de la SELAS DS AVOCATS, avocats au barreau de PARIS
DÉFENDEUR :
Madame [S] [V] veuve [K]
[Adresse 1]
représentée par Maître Abdoulaye CISSE, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS

Monsieur [I], [Z] [K]
[Adresse 1]
défaillant

Madame [L], [U] [K]
[Adresse 1]
défaillante
INTERVENANT :
DIRECTION DÉPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES - PÔLE D’ÉVALUATION DOMANIALE
[Adresse 7]
[Adresse 7]
représentée par Messieurs [F] [T] et [R] [J], commissaires du Gouvernement
COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Charlotte THIBAUD, Vice-Présidente, désignée par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la cour d’appel de Paris

Maxime-Aurélien JOURDE, Greffier des services judiciaires, présent lors de la mise à disposition

PROCÉDURE :

Date de la visite des lieux : 09 janvier 2024
Date des débats : 05 mars 2024 ; 12 mars 2024
Date de mise à disposition : 30 avril 2024

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [S] [V] épouse [K], Monsieur [I] [K] et Madame [L] [K] étaient propriétaires des lots n° 895 et 1095 dans le bâtiment 4 de la copropriété du [Adresse 16], situé [Adresse 2].

La copropriété du [Adresse 16] est édifiée sur les parcelles cadastrées section [Cadastre 10], [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 11].

Le lot n° 895 est un appartement de type F4, d’une superficie de 65 m². Le lot n°1095 est une cave. Pour une description plus précise des lieux, il conviendra de se reporter au procès-verbal du 09 janvier 2024, annexé à la présente décision.

Par décret n° 2015-99 du 28 janvier 2015, l’Opération de Requalification des COpropriétés Dégradées du quartier dit du [Localité 12] (ORCOD), comprenant les copropriétés du [Adresse 16] et de [Adresse 19], a été déclarée d’Intérêt National (ORCOD IN) et sa mise en oeuvre a été confiée à l’Etablissement public foncier d’Ile-de-France (EPFIF).

La copropriété du [Adresse 16] est située dans le périmètre de la ZAC dite du [Localité 12] qui a fait l’objet d’une déclaration d’utilité publique (DUP) par arrêté préfectoral n° 2019-2388, en date du 6 septembre 2019.

Par un arrêté préfectoral n° 2023-0389, en date du 21 février 2023, les lots situés dans le bâtiment 4 de la copropriété du [Adresse 16] ont été déclarés cessibles au profit de l’EPFIF.

Une ordonnance d’expropriation, emportant transfert de propriété, a été rendue le 29 juin 2023 au profit de l’EPFIF.

L’EPFIF a notifié son Mémoire valant offres d’indemnisation aux consorts [K] par actes d’huissier en date du 02 juin 2023, délivrés selon les modalités des articles 656 et 658 du code de procédure civile.

Par une requête reçue le 28 septembre 2023 par le greffe, accompagnée du Mémoire valant offres, l’EPFIF a saisi la juridiction de l’expropriation du tribunal judiciaire de Bobigny aux fins de fixation de la valeur des biens des consorts [K].

En l’absence d’accord entre les parties, et conformément aux dispositions de l’article R.311-9 du code de l’expropriation, la réception de la requête par la juridiction est postérieure d’au moins un mois à la date de réception par les consorts [K] des offres de l’EPFIF.

L’EPFIF a notifié aux consorts [K] la saisine de la juridiction de l’expropriation par actes d’huissier en date du 09 et du 16 octobre 2023 juillet 2023, délivrés selon les modalités des articles 656 et 658 du code de procédure civile s’agissant de Mesdames [K] et selon les modalités de l’article 659 du code de procédure civile s’agissant de Monsieur [K].

Par une ordonnance rendue le 09 novembre 2023, le juge de l’expropriation a fixé le transport sur les lieux et l’audition des parties au 09 janvier 2024, ainsi que l’audience au 05 mars 2024.

L’EPFIF a notifié cette décision aux consorts [K] par actes d’huissier en date du 21 et 23 novembre 2023, délivrés selon les modalités des articles 656 et 658 du code de procédure civile s’agissant de Mesdames [K] et selon les modalités de l’article 659 du code de procédure civile. La date de réception par les parties expropriées leur ont laissé :
- un délai de six semaines au moins entre la date de réception du mémoire de l’EPFIF et celle du transport, conformément aux dispositions de l’article R.311-14 du code de l’expropriation ;

- et un délai au moins égal à quinze jours entre la date de la notification de l’ordonnance de transport sur les lieux et la date de la visite elle-même, conformément aux dispositions de l’article R.311-15, 4ème alinéa, du code de l’expropriation.

Les consorts [K] étaient absents et non représentés lors du transport sur les lieux du 09 janvier 2024.

L’EPFIF a produit deux mémoirres :
- un mémoire valant offre en date du 22 mai 2023, reçu le 28 septembre 2023 ;
- un mémoire récapitulatif et en réplique en date du 11 mars 2024, reçu le 11 mars 2024.

Dans ses dernières écritures, l’EPFIF demande au tribunal de fixer la valeur des biens des consorts [K] à un montant de 29.217,20 € en valeur occupée, de la manière suivante :

- Indemnité principale : 25.652 €, valeur de l’appartement cave et parties communes générales intégrées après abattement de 15 % pour occupation et de 20 % pour insalubrité (65 m² x 660€/m²) x 0.85 x 0,80 ;
- Indemnité de remploi : 3.565,20 €.

Dans ses dernières écritures, datées du 11 décembre 2023, produites avant le transport sur les lieux, le commissaire du Gouvernement évalue la valeur des biens des consorts [K] à un montant de 44.670 € en valeur libre ou à un montant de 37.520 € en valeur occupée, de la manière suivante

En valeur libre
- Indemnité principale : 39.700 €, valeur de l’appartement, cave et parties commune intégrées (65m² x 660 €) - 3200 €;
- Indemnité de remploi : 4.970 € ;

En valeur occupée
- Indemnité principale : 33.200 €, valeur de l’appartement cave et parties communes intégrées (65m² x 560 €) ;
- Indemnité de remploi : 4.320 € ;

Aux termes de leur mémoire en défense reçu le 08 mars 2024, les consorts [K] demandent au juge de l’expropriation de :
“FIXER à la somme de 91 788,50 euros l’indemnité de dépossession due par l’Établissement Public Foncier d’Île-de-France dans le cadre de l’expropriation des lots 895 et 1095, de la copropriété sis [Adresse 2], se décomposant comme suit :
- L’indemnité principale : 82 535 €,
- L’indemnité de remploi : 9 253, 50 euros,

DIRE ET JUGER que l’Établissement Public Foncier d’Île-de-France doit verser à Madame [V] la somme de 2000 € au titre de frais de déménagement

En toute hypothèse :

CONDAMNER l’EPFIF à verser à Madame [V] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

CONDAMNER l’EPFIF aux dépens de l’instance.”

En vertu de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait référence aux écritures transmises pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.

À l’audience du 05 mars 2024, l’affaire a été renvoyée, à la demande des consorts [K], à l’audience du 12 mars 2024.

À cette audience, les parties comparantes ont développé les éléments de leurs mémoires, en application des dispositions de l’article R.311-20, 1er alinéa, du code de l’expropriation.

L'affaire a été mise en délibéré au 30 avril 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de fixation de l’indemnité de dépossession

Aux termes des articles L.311-5 et L. 321-1 du code de l’expropriation, à défaut d’accord des parties sur le montant des indemnités, celles-ci sont fixées par le juge de l'expropriation et couvrent l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l’expropriation.

Selon l'article L. 321-3 du code de l' expropriation le jugement distingue, dans la somme allouée à chaque intéressé, l'indemnité principale et, le cas échéant, les indemnités accessoires en précisant les bases sur lesquelles ces diverses indemnités sont allouées.

L’indemnité réparatrice allouée à l’exproprié doit lui permettre de se retrouver en même et semblable état et de se procurer un bien identique, similaire ou équivalent à celui dont il est dépossédé par l’opération d’expropriation, soit un bien présentant les mêmes caractéristiques (lieu, année de construction, composition, état d’entretien…) sous réserve, de fait, des biens disponibles sur le marché immobilier.

Plus précisément, le préjudice matériel subi du fait de l’opération d’expropriation est généralement équivalent à la valeur vénale du bien dont l’exproprié est privé. Celle-ci n’est pas nécessairement égale au coût de remplacement du bien, et ce principalement lorsque aucun bien similaire à celui dont l’exproprié est dépossédé n’est offert sur le marché immobilier local ou n’est susceptible d’être acquis par un particulier.

Sur les éléments préalables à la détermination des indemnités

Sur les dates à retenir

Le juge de l’expropriation doit déterminer les dates suivantes et les prendre en considération lors de l’évaluation de la valeur vénale du bien exproprié :

* Date pour apprécier la consistance des biens : selon les dispositions de l’article L.322-1 du code de l’expropriation, le juge fixe le montant des indemnités d’après la consistance des biens à la date de l’ordonnance portant transfert de propriété. Lorsque l’ordonnance d’expropriation n’est pas intervenue au jour du jugement de première instance, la consistance des biens s’apprécie à la date du dit jugement. La consistance d’un bien correspond principalement aux éléments qui le composent et à ses caractéristiques (état d’entretien, de très mauvais à très bon ; situation d’occupation, libre ou occupé ; ...) ;

* Date de référence pour déterminer les règles d’urbanisme et l’usage effectif des biens : elle se situe, en principe, un an avant l'ouverture de l'enquête publique préalable à la déclaration d’utilité publique, conformément à l’article L.322-2 du code de l’expropriation ; toutefois, aux termes des articles L.213-6 et L.213-4 du code de l’urbanisme, lorsqu'un bien est soumis au droit de préemption urbain et n’est pas situé dans une Zone d’aménagement différée (ZAD), cette date de référence se situe à la date à laquelle est devenue opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public, approuvant, modifiant ou révisant le plan local d’urbanisme, et délimitant la zone dans laquelle est situé le bien ;

En application des articles L. 213-6 et L. 213-4 du code de l’urbanisme, l’acte qui se borne à modifier le périmètre d’une zone d’un PLU sans affecter ses caractéristiques ne peut être pris comme date de référence au sens des dispositions de l’article L. 213-4 du code de l’urbanisme (3ème civ. 13 juin 2019 pourvoi n°18-18.445).

* Date pour apprécier la valeur des biens : selon le 1er alinéa de l’article L.322-2 du code de l’expropriation, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance, soit à la date du jugement en fixation des indemnités.

En l’espèce, les lots n° 895 et 1095 doivent être évalués selon :

- leur consistance au 29 juin 2023, date de l’ordonnance d’expropriation ;

- les possibilités offertes par les règles d’urbanisme définies par le plan local d’urbanisme (PLU) approuvé le 10 juillet 2012 et modifié le 08 avril 2016.

Bien qu’une autre modification du PLU soit intervenue le 13 novembre 2018, celle-ci n’a pas modifié les caractéristiques de la zone où se situe l’ensemble immobilier, de sorte qu’elle ne peut être retenue comme date de référence.

En conséquence, la date de référence est celle de la dernière modification du PLU délimitant la zone dans laquelle est situé l'ensemble immobilier dont s'agit, à savoir la modification numéro un du 8 avril 2016.

Les parcelles sont situées en zone UR1 du PLU, correspondant au renouvellement urbain du centre-ville ;

- les valeurs d’échange à la date du présent jugement.

Sur la consistance de l’ensemble immobilier et des biens de la partie défenderesse

Pour une description précise, il conviendra de se reporter au procès-verbal de transport sur les lieux, composé d’une présentation générale et d’un descriptif des biens à évaluer, annexé au présent jugement.

- Sur les copropriétés du [Adresse 16] et de [Adresse 19]

La commune de [Localité 17] est constituée de plusieurs quartiers de grands ensembles édifiés dans les années 1960, selon un plan qui prévoyait une desserte par l’autoroute A 87. Cette voie express n’ayant pas été réalisée, la commune était enclavée n’étant desservie ni par les voies routières majeures de la région parisienne ni par les lignes de RER et de métro. Les bus étaient les seuls transports en commun.

Depuis décembre 2019, une nouvelle branche de la ligne T4 du tramway est en service. Elle relie [Localité 21] à [Localité 22] et dessert [Localité 17]. Elle offre une correspondance avec le RER E à [Localité 13]. La création d’une gare de la future ligne 16, métro express, par la SGP et le GPA est en cours de réalisation.

Les copropriétés du [Adresse 16] et de [Adresse 19] sont géographiquement imbriquées, aucune clôture ne sépare la première de la seconde, la numérotation des bâtiments englobe les deux copropriétés et n’est pas propre à chacune d’elle. La copropriété du [Adresse 16] est composée de 10 bâtiments, comprenant 873 logements, et celle de [Adresse 19] de 8 bâtiments, comprenant 556 logements, étant précisé que l’un des bâtiments (B 18) a d’ores et déjà fait l’objet d’une démolition.

L’EPFIF et le commissaire du Gouvernement exposent les conclusions d’une étude concernant les copropriétés contiguës du [Adresse 16] et de [Adresse 19] réalisée par la commune de [Localité 17] en 2014. Celles-ci mettent en évidence un contexte social difficile en termes de niveau de vie (60 % des ménages ayant un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté), de taux de chômage (29 %), d’occupation des logements (près de 20 % l’étant par plus d’un ménage et par plus de 4 personnes), de rotation importante tant en ce qui concerne les propriétaires que les locataires.

Le commissaire du Gouvernement indique que les copropriétés du [Adresse 16] et de [Adresse 19] sont parmi les copropriétés clichoises les plus en difficultés au plan social et précise qu’elles ont fait l’objet :

- d’un plan de sauvegarde signé le 19 janvier 2010 entre l’Etat, le Département 93 et la commune de [Localité 17] ; il avait pour objectif de résorber les impayés de charges, de réaliser des travaux urgents et des mises aux normes, de lutter contre les marchands de sommeil, d’individualiser les réseaux de fluides des différents bâtiments, de réaliser des travaux de rénovation énergétique ; il a pris fin en 2015 ;

- d’une opération de requalification des copropriétés dégradées du quartier dit du [Localité 12], selon un décret n° 2015-99 en date du 28 janvier 2015 déclarant ladite opération d’intérêt national (ORCOD IN) ; la mise en oeuvre de l’opération a été confiée à l’EPFIF ;

- d’un nouveau plan de sauvegarde pour une durée de cinq ans, institué par l’arrêté préfectoral n° 2017-2399 du 11 septembre 2017.

L’expropriant et le commissaire du Gouvernement ajoutent que la copropriété fait l’objet d’une administration judiciaire, en raison d’un important arriéré de charges et ils font état du décret n°2021-1005 du 29 juillet 2021, pris sur le fondement de l’article L. 522-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, autorisant l’expropriant à prendre possession de manière anticipée des immeubles situés dans le périmètre de l’ORCOD.

- Sur le bâtiment 4 de la copropriété du [Adresse 16]

Les biens à évaluer sont situés dans le bâtiment B4, faisant partie de la copropriété du [Adresse 16].

Il s’agit d’un immeuble à usage d’habitation, composé :
- d’un sous-sol à usage de caves ;
- d’un rez-de-chaussée ;
- de 10 étages.

Il comprend 175 logements, dont 8 F2, 122 F3 et 45 F4, accessibles par 4 entrées et cages d’escalier nommées A, B, C et D.

- Sur les biens expropriés

Il s’agit :

- du lot n° 895 : un appartement de type F4, situé au 4ème étage de l’escalier D, d’une superficie de 65 m², superficie non contestée par les parties :

. l’appartement n’a pas pu être visité, l’occupant, s’il y en a un, ne répondant pas et en l’absence de toute personne pouvant permettre d’y accéder ;

. il est dans un état d’entretien qualifié de :
. mauvais par l’EPFIF, entité expropriante ;
. moyen par les expropriés ;
. mauvais par le commissaire du Gouvernement ;
. mauvais par le juge de l’expropriation au regard de l’absence de visite des lieux le 09 janvier 2024 et des constatations effectuées aux termes du procès-verbal de constat d’huissier du 30 mai 2023.

- du lot n° 1095, une cave ; elle n’a pas été visitée pour des raisons de sécurité ;

Sur la situation locative

L’EPFIF considère, dans ses dernières écritures, que l’appartement est occupé par un tiers et évalue les biens en valeur occupée.

Le commissaire du Gouvernement, qui a rédigé ses conclusions antérieurement au transport sur les lieux, évalue les biens selon une alternative en fonction de l’état d’occupation des biens, en valeur libre et en valeur occupée.
Les consorts [K] indiquent que “l’appartement n’est pas occupé par son propriétaire”, de sorte qu’il devrait être évalué en valeur libre.

Les biens sont évalués selon leur consistance au jour de l’ordonnance d’expropriation, soit le 29 juin 2023. Lors de la visite des lieux le 09 janvier 2024, il n’a pas été possible de vérifier la situtaion d’occupation de l’appartement, toutefois il résulte du procès-verbal de constat d’huissier en date du 30 mai 2023, que l’appartement était occupé.

Ainsi, les biens seront comparés à des cessions de biens occupés.

Sur la méthode d'évaluation

Aux termes de leurs mémoires respectifs, les parties s’accordent sur l’utilisation de la méthode d’évaluation par comparaison, cave et parties communes intégrées.

Cette méthode, adaptée aux circonstances de l’espèce et consistant à comparer les biens à évaluer à des cessions de biens équivalents qui ont eu lieu dans la période récente sur le marché immobilier local, sera adoptée.

L’évaluation se fera millièmes de copropriété associés aux biens à évaluer intégrés.

Pour déterminer les indemnités de dépossession revenant aux consorts [K] au titre de l’expropriation d’un appartement (lot n°895) et d’une cave (lot n°1095), le commissaire du Gouvernement se réfère majoritairement à des termes de comparaison comprenant un appartement, une cave et un emplacement de stationnement et soustrait à la valeur retenue une somme de 3.200 €, correspondant à la valeur d’un emplacement de stationnement.

Néanmoins, il résulte des éléments versés au dossier et en particulier des termes de référence cités par l’EPFIF et le commissaire du Gouvernement que :

- les termes de comparaison versés par l’EPFIF correspondent à des cessions amiables de biens situés dans les copropriétés du [Adresse 16] et de [Adresse 19] dont le prix de vente exposé inclus, majoritairement, la valeur d’une cave et d’un emplacement de stationnement à celle de l’appartement ;

Toutefois, il convient d’observer que les termes DEM n° 56, 62, 65, 67, 70, 89, 90, 91 93, 97, 98, 99, 101, 102, 103 et 104 consistant en des cessions d’appartement avec cave mais sans emplacement de stationnement, ont des valeurs d’échange identiques à celles des autres termes de comparaison consistant en des ventes d’appartement comprenant une cave et une place de parking, à situation d’occupation égale.

- le commissaire du Gouvernement récapitule les valeurs déterminées en 2022 par la présente juridiction lors de la fixation des indemnités de biens, cave et parking intégrés, situés dans le bâtiment 10 de la copropriété de [Adresse 19] ;

- l’ensemble des termes de comparaison produits par le commissaire du Gouvernement correspondant à des cessions de biens similaires situés dans des copropriétés autres que celles du [Adresse 16] et de [Adresse 19], laisse apparaître une valeur supérieure des biens cédés composés d’un appartement, d’une cave et d’un parking par rapport à ceux qui ne disposent pas d’emplacement de stationnement ; ainsi :

Résidences
Parking/sans parking
Valeur unitaire moyenne
[Adresse 24]
parking
2.077 €/m²
[Adresse 23]
sans parking
1.825 €/m²
[Adresse 20]
sans parking
2.043 €/m²
[Adresse 25]
parking
2.089 €/m²
Il est ainsi suffisamment démontré que la vente d’un emplacement de stationnement comme accessoire d’un appartement est un facteur de plus-value et à l’inverse, l’absence d’emplacement de stationnement est un facteur de moins-value dont il conviendra de tenir compte, le cas échéant, lors de la détermination de la valeur unitaire des biens à évaluer, dépourvus d’emplacement de stationnement.

En revanche, il n’apparaît pas justifié de déterminer la valeur du bien en soustrayant à la valeur retenue pour l’appartement, cave intégrée, la valeur d’un emplacement de stationnement, étant observé qu’au regard des termes de comparaison portant sur les copropriétés voisines, cette méthode ne reflète pas la pratique sur le marché immobilier.

Par ailleurs, les termes de comparaison concernant les copropriétés du [Adresse 16] et de [Adresse 19], produits tant par l’EPFIF que par le Commissaire du Gouvernement, ne font pas apparaître une différence de valeur significative selon qu’il s’agit d’un appartement de 3 ou 4 pièces.

Dans ces conditions, une même valeur sera déterminée au mètre carré aussi bien pour un logement de 3 pièces que de 4 pièces.

Sur l’indemnité principale

L’indemnité principale de dépossession correspond à la valeur vénale de l’appartement, de la cave et de l’emplacement de stationnement extérieur ainsi qu’aux tantièmes des parties communes de la copropriété associés à ces lots.

La valeur des biens dont les consorts [K] sont dépossédés sera déterminée par comparaison entre, d’une part, la consistance des biens présentés à titre de termes de comparaison et leurs valeurs d’échange et, d’autre part, les caractéristiques des biens à évaluer.

Sur les termes de référence proposés par les parties

- Termes de comparaison cités par l’EPFIF (tableaux 1, 2, 3, 4, 5 et 6 annexés) (DEM signifie EPFIF)

En application de l’article L 322-8 du code de l’expropriation, sous réserve de l'article L 322-9, le juge tient compte, des accords intervenus entre l'expropriant et les divers titulaires de droits à l'intérieur du périmètre des opérations faisant l'objet d'une déclaration d'utilité publique et les prend pour base lorsqu'ils ont été conclus avec au moins la moitié des propriétaires intéressés et portent sur les deux tiers au moins des superficies concernées ou lorsqu'ils ont été conclus avec les deux tiers au moins des propriétaires et portent sur la moitié au moins des superficies concernées.

En l’occurrence, l’EPFIF ne produit aucun document permettant d’établir que des accords seraient intervenus avec au moins la moitié des propriétaires intéressés et portant sur les deux tiers au moins des superficies concernées ou avec les deux tiers au moins des propriétaires et portant sur la moitié au moins des superficies concernées.

Dès lors, les dispositions de l’article L. 322-8 du code de l’expropriation ne s’appliquent pas en l’espèce et par voie de conséquence, les cessions de biens situées dans la copropriété du [Adresse 16] produites à titre de termes de comparaison ne seront pas prises pour base de la détermination de la valeur des lots n°895 et 1095, mais seront prises en compte au même titre que les autres termes de comparaison versés aux débats.

L’EPFIF produit aux débats 111 termes de comparaison correspondant à :

- des ventes réalisées entre 2017 et 2022 d’appartements comprenant principalement comme accessoires une cave et un parking et situés dans les bâtiments B3, B4 et B10 de la copropriété du [Adresse 16] à [Localité 17], comme les biens à évaluer, en :

mauvais état (DEM n° 1 à 7 - tableau 1 ; DEM n°110 et 111 - tableau 6),
état moyen (DEM n° 8 à 21 - tableau 2 ; DEM n°89 à 109 - tableau 6),
bon état (DEM n° 22 à 29 - tableau 3 ; DEM n°64 à 88 - tableau 6 ),
très bon état (DEM n° 30 et 31 - tableau 4 ; DEM n°61 à 63 - tableau 6),

étant précisé que les termes DEM n° 26, 28 et 29, 43, 45, 47, 56, 62, 65, 67, 70, 78, 84, 85, 86, 87, 89, 90, 91, 93, 97, 98, 99, 101, 102, 103, 104, 105, 106 et 109 n’ont pas d’emplacement de stationnement et que le terme DEM n° 3 n’a pas de cave ;

L’établissement public est l’unique acquéreur des cessions qu’il présente à titre de termes de comparaison.

L’EPFIF, en l’espèce, offre une valeur de 660 €/m², le logement appartenant à la partie défenderesse étant un F4, occupé et dans un état d’entretien qualifié de mauvais par l’entité expropriante.

Les consorts [K] critiquent les termes de comparaison proposés par l’EPFIF en ce qu’ils ne sont pas représentatifs des prix réellement pratiqués, car provenant d’un marché captif où seul l’EPFIF est acquéreur, appliquant un prix forfaitaire selon des critères opaques et qui n’a pas évolué de puis plusieurs années.

En l’espèce, pour déterminer la valeur des biens des consorts [K] :

Parmi les 111 références citées par l’EPFIF, ne sont pas retenus :

- les termes de comparaison DEM n° 6, 7, 18, 19, 20, 21, 25, 26, 27, 28, 29, 31, 32, 33, 35, 38, 39, 41, 42, 43, 44, 45, 60, 63, 76, 77, 78, 79, 80, 81, 82, 83, 84, 85, 86, 87, 88, 105, 106, 107, 108, 109, parce qu’ils ont été échangés, ou leurs valeurs ont été fixées, alors que les biens étaient libres de toute occupation et qu’ils ont été, en conséquence, plus valorisés que ne devront l’être les biens à évaluer, occupés par un tiers ;

- les termes de comparaison DEM n°1, 2, 8, 9, 10 et 30, parce qu’ils ne présentent pas de références de publication suffisamment précises ;

- les termes de comparaisons DEM 36, 37, 58 et 59, parce qu’il n’est ni indiqué, ni justifié de ce que les biens en question étaient libres de toute occupation ou au contraire occupés ;

En revanche, parmi les 111 références citées par l’EPFIF, les 59 termes de comparaison suivants sont retenus, car ils portent sur des biens relativement similaires à ceux à évaluer et qu’ils datent de moins de 5 ans : DEM n°3, 4, 5, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 22, 23, 24, 34, 40, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52, 53, 54, 55, 56, 57, 61, 62, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75, 89, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 97, 98, 99, 100, 101, 102, 103, 104, 110 et 111.

Ces 59 termes sont donc retenus selon les moyennes suivantes :

Etat d’entretien
Terme de référence
Valeur moyenne occupée
Mauvais état d’entretien
Cessions
510 €/m²,
moyenne des termes DEM n° 3, 4, 5 40, 110 et 111
Etat d’entretien mauvais à moyen
Cessions
/
Etat d’entretien moyen

Cessions
723 €/m²,
moyenne des termes DEM n°11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 34, 46, 49, 50, 53, 55, 89, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 97, 98, 99, 100, 101, 102, 103, 104
Etat d’entretien moyen à bon
Cessions
/
Bon état d’entretien

Cessions
893 €/m²,
moyenne des termes DEM n° 22, 23, 24, 47, 48, 51, 52, 54, 56, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75
Très bon état d’entretien
Cessions
1063€/m²,
valeur du terme DEM n° 57, 61 et 62

- Termes de comparaison cités par le commissaire du Gouvernement (tableaux 7, 8, 9, 10, 11, et 12 annexés) (CG signifie commissaire du Gouvernement)

Le commissaire du Gouvernement cite 66 termes de comparaison, précisant avoir affiné sa recherche à la période allant de 2020 à 2022 et l’avoir étendue aux bâtiments, 3, 4, 11 et 12 des copropriétés du [Adresse 16] et de [Adresse 19], de même type que le bâtiment B4 (R+10 ou R+11).

- 28 termes de comparaison (tableau 7) correspondant à des ventes réalisées entre 2020 et 2022, comprenant trois lots, soit un appartement, une cave et un emplacement de stationnement selon les observations non contestées du commissaire du Gouvernement, situés :

. soit dans le bâtiment 4, comme les biens à évaluer ;
. soit dans les bâtiments 3, 11 et 12 de la même copropriété du [Adresse 16] et de la copropriété voisine de [Adresse 19] à [Localité 17] ;

étant précisé que ces quatre bâtiments ont une configuration identique et que l’EPFIF est l’unique acquéreur des cessions présentées ;

- 30 termes de comparaison (tableaux 8, 9, 10 et 11) correspondant à des ventes d’appartements (et de leurs accessoires : cellier, cave, emplacement de stationnement) situés dans des copropriétés proches de celles du [Adresse 16] et de [Adresse 19], dans le périmètre de la ZAC dite du [Localité 12], à savoir La Résidence [Adresse 24], la Résidence [Adresse 23], La Résidence [Adresse 20] et la Résidence [Adresse 25] ;

- 8 termes de comparaison correspondant à des cessions de parkings extérieurs sur les copropriétés du [Adresse 16] et de [Adresse 19] (tableau 12).

Le commissaire du Gouvernement fait également état des valeurs retenues par le juge de l’expropriation du tribunal judiciaire de Bobigny dans les jugements de 2021-2022 relatifs à la procédure d’expropriation du bâtiment 10 de la copropriété de [Adresse 19] de la façon suivante:

Etat

Mauvais

Mauvais-Moyen

Moyen

Moyen-Bon

Bon

Très bon
Libre

660 €/m²

825 €/m²

935 €/m²

1.050 €/m²

1.260 €/m²

1.375 €/m²
Occupé

560 €/m²

715 €/m²

800 €/m²

880 €/m²

1.000 €/m²

1.170 €/m²

Il fait remarquer que :

- les copropriétés voisines ne sont pas dans un état comparable à celui des copropriétés du [Adresse 16] et de [Adresse 19], qui se trouvent dans un état de dégradation bien plus prononcé ; il estime que ces copropriétés sont aujourd’hui dans une situation financière stable et pérenne grâce aux travaux de rénovation, de suivi et d’accompagnement mis en place ; il précise, en conséquence, ne pas retenir ces termes pour la détermination de la valeur du logement en cause;

- les dernières cessions amiables dans les copropriétés du [Adresse 16] et de [Adresse 19] font apparaître un prix en augmentation de 10 %, augmentation également retenue par le juge de l’expropriation dans ses décisions rendues en 2021 et 2022.

Le commissaire du Gouvernement, reprenant cette majoration de 10 % observée dans les évaluations récentes, propose les valeurs suivantes :

Appartement
avec cave et parking
Mauvais état d’entretien
Etat d’entretien moyen
Bon état d’entretien
Très bon état d’entretien
Valeur libre
660 €/m²
935 €/m²
1.155 €/m²
1.375 €/m²
Valeur occupée
560 €/m²
800 €/m²
985 €/m²
1.165 /m²

Le commissaire du Gouvernement retient en l’espèce, une valeur de 560 €/m², le logement appartenant à la partie défenderesse étant un F4, occupé par un tiers, avec cave et dans un état d’entretien qu’il qualifie de mauvais avant transport.

L’EPFIF ne présente pas d’observations quant aux termes de comparaison produits par le Commissaire du Gouvernement.

Les consorts [K] ne formulent aucune critique à l’encontre des termes de comparaison proposés par le Commissaire du Gouvernement.
En l’espèce, pour déterminer la valeur des biens des consorts [K] les termes sont analysés en fonction de leur localisation :

En ce qui concerne les termes de comparaison consistant en des ventes d’appartement avec cave et emplacement de stationnement dans les copropriétés du [Adresse 16] et de [Adresse 19] (tableau 7)

Parmi les 28 références citées par le commissaire du Gouvernement concernant des ventes de F3 et F4 dans les bâtiments 3, 4, 11 et 12 du [Adresse 16] et de [Adresse 19], les 8 termes de comparaison suivants ne sont pas retenus parce qu’ils ont été échangés alors que les biens étaient libres de toute occupation et qu’ils ont été, en conséquence, plus valorisés que ne devront l’être les biens à évaluer, occupés par un tiers ; il s’agit des 8 appartements F3 et F4 vendus libres (CG n° 2, 5, 6, 11, 14, 17, 19 et 20).

Parmi les 28 références citées par le commissaire du Gouvernement concernant des ventes de F3 et F4 dans les bâtiments 3, 4, 11 et 12 du [Adresse 16] et de [Adresse 19], les 20 termes de comparaison suivants sont retenus pour servir la comparaison avec les biens à évaluer car ils correspondent à la vente d’appartements relativement similaires à celui à évaluer ; il s’agit des 20 appartements F3 et F4 vendus occupés par un tiers (CG n° 1, 3, 4, 7, 8, 9, 10, 12, 13, 15, 16, 18, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27 et 28).

Il convient de préciser que les termes CG n° 1, 3, 8, 9, 12, 13 sont également proposés par l’EPFIF (DEM n° 30, 8, 4, 10, 11, 96).

En ce qui concerne les termes de comparaison consistant en des ventes d’appartements, avec accessoires, situés dans les copropriétés voisines de celles du [Adresse 16] et de [Adresse 19] (tableaux 7, 8, 9, 10, et 11)

Le commissaire du Gouvernement verse aussi aux débats 30 termes de comparaison correspondant à des cessions d’appartement avec accessoires (cave ou cellier, voire emplacement de stationnement), situés à [Localité 17] dans des copropriétés voisines de celles de [Adresse 19] et du [Adresse 16].

Ces 30 références sont exposées comme suit selon les caractéristiques exposées par le commissaire du Gouvernement et les valeurs moyennes calculées par la juridiction :

Résidences
à
[Localité 17]
Année de construction
et
caractéristiques de l’immeuble

Caractéristiques des biens
***

Termes étudiés
valeur unitaire
moyenne
libre
*
valeur unitaire
moyenne
occupée
**
[Adresse 24]
[Adresse 14]
1958
288 logements
5 immeubles de
4 étages chacun
appartement
cellier
parking
CG n° 29 à 39

2.077 €/m²

1.766 €/m²

[Adresse 23]
[Adresse 9]
1958
192 logements
4 immeubles de
4 étages chacun
appartement
cellier

CG n° 40 à 48

1.825 €/m²

1.551 €/m²

[Adresse 20]
[Adresse 15]
1961
380 logements
4 immeuble de
4 étages chacun
appartement
cave

CG n° 49 à 57
2.043 €/m²
1.737 €/m²
[Adresse 25]
[Adresse 3]
1963
168 logements
1 immeuble de
10 étages
appartement
cave
parking
CG n° 58
2.089 €/m²
1.776 €/m²
Moyenne générale
1.991 €/m²
1.692 €/m²
Moyenne des logements avec parking
2.078 €/m²
1.766 €/m²
Moyenne des logements sans parking
1.934 €/m²
1.644 €/m²

* En l’absence de précision, il convient de considérer que les valeurs exposées par le commissaire du Gouvernement s’entendent libres de toute occupation, s’agissant de biens d’habitation.

** Dans le cadre de la présente procédure d’expropriation, l’EPFIF offre une valeur de 15 % inférieure lorsque les appartements sont occupés par un tiers (locataire), étant précisé qu’il s’agit du quantum de l’abattement affecté à la valeur libre de manière constante par la présente juridiction, pour tenir compte de la moins-value sur le marché immobilier générée par une situation d’occupation titrée.

*** Dans le cadre de cette étude, et en l’absence de précision quant à l’état d’entretien des appartements cédés, il y a lieu de considérer qu’il s’agit d’appartements dans des états d’entretien de moyen à bon ; il apparaît en effet au regard des termes de comparaison consistant en des ventes d’appartement au [Adresse 16] produits par le commissaire du Gouvernement que les logements vendus en mauvais état et en très bon état sont rares.

Il convient de préciser :

- qu’aucun terme de comparaison n’est produit en ce qui concerne la résidence [Adresse 18], située [Adresse 8], pourtant également située à proximité de la présente copropriété, faute de cession récente ;

- que seul un terme de comparaison est produit en ce qui concerne la résidence [Adresse 25] (terme CG n°58) ; cette unique vente ne peut donc être considérée comme représentative de la valeur des logements de cette résidence.

Ces 30 termes de comparaison, bien que situés dans des copropriétés autres que celle du [Adresse 16] ou de [Adresse 19], correspondent à la vente de biens d’une composition similaire à celle des biens à évaluer.

Toutefois, les quatre résidences [Adresse 24], [Adresse 23], [Adresse 20] et [Adresse 25], bien que situées également dans le périmètre de l’ORCOD et de la ZAC du [Localité 12], présentent un meilleur état d’entretien que le bâtiment 4 du [Adresse 16] ; il est à cet égard observé :

- que, selon les conclusions du commissaire du Gouvernement, si les copropriétés de trois de ces résidences ([Adresse 24], [Adresse 23] et [Adresse 25]) sont soumises à un plan de sauvegarde, à l’instar des copropriétés du [Adresse 16] et de [Adresse 19], ce n’est pas le cas de la résidence [Adresse 20], qui fait l’objet d’un Programme Opérationnel de Prévention et d’Accompagnement des Copropriétés visant un soutien des copropriétaires pour prévenir des dégradations ; il n’est pas fait état pour ces quatre copropriétés de problématiques financières comparables à celles évoquées pour les copropriétés du [Adresse 16] et de [Adresse 19] ;

- que ces résidences présentent un meilleur état d’entretien que le bâtiment 4 de la copropriété du [Adresse 16], comme il est possible de le constater sur les photographies produites par le commissaire du Gouvernement.

Il est, en outre, relevé que ces résidences appartiennent à des copropriétés de plus petites dimensions (comptant entre 168 et 380 logements) que celle du [Adresse 16] (qui compte 873 logements), alors que l’importance du nombre de copropriétaires du [Adresse 16] est identifiée comme facteur majeur de difficulté ; il est aussi souligné que ces résidences sont, à l’exception de la résidence [Adresse 25], composées de bâtiments de plus petites tailles, ne présentant que quatre étages, étant observé que le commissaire du Gouvernement ne retient, pour son évaluation, que les ventes portant sur des grands bâtiments des copropriétés du [Adresse 16] et de [Adresse 19], à l’exclusion de celles portant sur les petits bâtiments de ces copropriétés.

À l’inverse, le bâtiment 4 de la copropriété du [Adresse 16], placée sous administration provisoire depuis 2005, a fait l’objet :

- de deux plans de sauvegarde successifs, en 2010 et 2017, qui n’ont pas permis le nécessaire redressement de la copropriété et la réhabilitation des bâtiments ;

- d’un arrêté municipal en date du 3 septembre 2018 portant sur les équipements communs de la copropriété du [Adresse 16] ;

- d’un décret du 29 juillet 2021, en cours de mise en oeuvre, déclarant l’extrême urgence de la procédure d’expropriation, laquelle suppose des risques sérieux pour la sécurité des occupants, selon les termes du 2ème alinéa de l’article L.522-1 du code de l’expropriation ;

- de la pose d’un filet de protection au niveau des pignons, comme remarqué par les personnes présentes lors du transport, étant précisé que les pignons du bâtiment 18, édifié dans le cadre du même programme de construction, se sont écartés des murs des façades et que l’immeuble a fait l’objet d’une évacuation de tous ses occupants en urgence avant d’être démoli.

Par ailleurs, il est précisé dans le procès-verbal de transport annexé au présent jugement que les façades sont dans un état médiocre.

Dans ces conditions, il est avéré que le bâtiment dans lequel sont situés les biens à évaluer est dans un mauvais état d’entretien, ce qui constitue nécessairement un facteur majeur de dépréciation par rapport aux termes de comparaison situés dans des copropriétés voisines, d’une meilleure consistance.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, aucun des termes des références portant sur les appartements situés dans les Résidences [Adresse 23], [Adresse 20], [Adresse 24] et [Adresse 25], ne sera retenu.

- Termes de comparaison versés par les consorts [K]
(DEF = Défendeur à la présente procédure)

Les consorts [K] ne produisent aucun terme de comparaison.

Sur le calcul de l’indemnité principale

Au regard des développements précédents, les termes de comparaison produits par les parties et retenus par la juridiction pour déterminer la valeur des présents biens, occupés, sont les suivants :

Parties
Mauvais
état
état mauvais
à moyen
état moyen
état moyen à bon
Bon état
Très bon état
EPFIF
Cessions - Bâtiments 3, 4 et 10 de la Copropriété du [Adresse 16]
510 €/m²,
moyenne des termes DEM n° 3, 4, 5, 40, 110 et 111

723 €/m²,
moyenne des termes DEM n° 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 34, 46, 49, 50, 53, 55, 89, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 97, 98, 99, 100, 101, 102, 103, 104

893 €/m²,
moyenne des termes DEM n° 22, 23, 24, 47, 48, 51, 52, 54, 56, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75
1.063 €/m²,
valeur des termes DEM n° 57, 61 et 62

Cessions - Copropriétés du [Adresse 16] et de [Adresse 19]
CG
510 €/m²
moyenne des termes CG n°4 et 8

723 €/m²
moyenne des termes CG n° 3, 7, 9, 12, 15, 18, 21, 25, 26 et 27

893 €/m²
moyenne des termes CG n°10, 16, 22 et 28
1063 €/m²
valeur des termes CG n°1, 23, 24

En l’espèce, pour évaluer les biens expropriés, il sera tenu compte :

- des valeurs offertes par l’EPFIF et proposées par le commissaire du Gouvernement, supérieures, selon l’état d’entretien de l’appartement, aux valeurs mises en évidence par les termes de comparaison, à savoir :

- pour le commissaire du Gouvernement :

Appartement
avec cave et parking
Mauvais état d’entretien
Etat d’entretien moyen
Bon état d’entretien
Très bon état d’entretien
Valeur libre
660 €/m²
935 €/m²
1.155 €/m²
1.375 €/m²
Valeur occupée
560 €/m²
800 €/m²
985 €/m²
1.165 /m²

- pour l’EPFIF : 660 €/m² en valeur libre, pour l’appartement avec la cave, leur état d’entretien étant qualifié de mauvais, et avant application d’un abattement de 15 % pour occupation et d’un abattement de 20 % pour insalubrité ;

- des valeurs fixées en 2021 et 2022 par la présente juridiction lors de la fixation des indemnités de biens composés d’un appartement, d’une cave et d’un emplacement de stationnement et situés dans les bâtiments 3, 4 et 10 de la copropriété, telles qu’exposées par le commissaire du Gouvernement, à savoir:

Etat
Mauvais
Mauvais-Moyen
Moyen
Moyen-Bon
Bon
Très bon
Libre

660 €/m²

825 €/m²

935 €/m²

1.050 €/m²

1.260 €/m²

1.375 €/m²
Occupé

560 €/m²

715 €/m²

800 €/m²

880 €/m²

1.000 €/m²

1.170 €/m²

- d’une moins value liée à l’absence d’un emplacement de stationnement ;

Ainsi, dans le cadre de l’opération d’expropriation du bâtiment 4 de la copropriété du [Adresse 16], pour l’évaluation des appartements de type F3 ou F4 occupés par un tiers, il convient de retenir les valeurs suivantes, selon l’état d’entretien de l’appartement :
- 545 euros/m², lorsque l’appartement est dans un mauvais état d’entretien ;
- 810 euros/m², lorsque l’appartement est dans un état d’entretien de mauvais à moyen ;
- 920 euros/m², lorsque l’appartement est dans un état d’entretien moyen ;
- 1.035 euros/m², lorsque l’appartement est dans un état d’entretien de moyen à bon ;
- 1.140 euros/m², lorsque l’appartement est dans un bon état d’entretien ;
- 1.360 euros/m² et plus, lorsque l’appartement est dans un très bon état d’entretien et bien équipé.

L’occupation des biens étant déjà prise en compte, il n’y a pas lieu d’appliquer un abattement supplémentaire de 15 %.

De la même manière, l’état du bien étant d’ores et déjà qualifié de mauvais, l’existence d’un arrêté d’insalubrité datant du 7 octobre 2010, soit plus de treize ans et dont les autorités publiques n’ont pas entendu assurer l’effectivité, puisqu’il n’est pas démontré qu’il ait donné lieu à aucune suite, ne peut entraîner l’application d’un abattement supplémentaire de 20% pour insalubrité.

Au regard, d’une part, des valeurs déterminées ci-dessus et, d’autre part, des caractéristiques des biens à évaluer, notamment de leur état d’entretien qui est qualifié de mauvais, il convient de fixer la valeur du mètre carré pour l’évaluation des biens des consorts [K] à la somme de 35.425 € (545 €/m² x 65 m²).

En conséquence, l’indemnité principale de dépossession est évaluée à la somme de 35.425 € en valeur occupée.

Sur l’indemnité de remploi

Aux termes de l'article R.322-5 du code de l'expropriation, l'indemnité de remploi est calculée compte tenu des frais de tous ordres normalement exposés pour l'acquisition de biens de même nature moyennant un prix égal au montant de l’indemnité principale. Sont également pris en compte dans le calcul du montant de l’indemnité les avantages fiscaux dont les expropriés sont appelés à bénéficier lors de l’acquisition de biens de remplacement.

En l’espèce, ils ont pour base le montant de l’indemnité principale, à savoir 35.425 €.

Ils sont liquidés comme suit :

20% sur 5.000 € = 1.000 €
15% sur 10.000 € = 1.500 €
10% sur 20.425 € = 2.042,50€
Total : 4.542,50 €

Sur les frais de déménagement

Les consorts [K] sollicitent de ce chef la somme de 2000 €, sans produire de justificatifs.

L’EPFIF sollicite le rejet de cette demande au motif que les consorts [K] ne sont pas des propriétaires occupant mais des propriétaires bailleurs.

En l’espèce, aux termes de leurs propres déclarations les consorts [K] n’occupent pas le lot n°895 et il ressort du procès-verbal de constat d’huissier en date du 30 mai 2023, que l’appartement est occupé par d’autres personnes, de sorte qu’aucune indemnité de déménagement ne leur est due.

En conséquence, les consorts [K] seront déboutés de leur demande à ce titre.

Sur l’indemnité totale de dépossession

L’indemnité totale de dépossession foncière, est égale à la somme de 39.967,50 €, soit :
- 35.425 €, au titre de l’indemnité principale ;
- 4.542,50 €, au titre de l’indemnité de remploi.

Sur les demandes accessoires

Sur les dépens

Conformément aux dispositions de l’article L. 312-1 du code de l’expropriation, l’EPFIF sera condamnée aux dépens.

Sur les frais irrépétibles

Aux termes de l’article 700 1° du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

En l'espèce, l’équité commande de condamner l’EPFIF, partie tenue aux dépens, à verser aux consorts [K] la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS

Le juge de l’expropriation, statuant publiquement par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et par mise à disposition au greffe,

ANNEXE à la présente décision le procès-verbal de transport du 09 janvier 2024 ;

- les termes de comparaison produits par l’Etablissement Public Foncier d’Ile-de-France (tableaux 1, 2, 3, 4, 5 et 6) ;

- les termes de comparaison versés par le commissaire du Gouvernement (tableaux 7, 8, 9, 10, 11 et 12) ;

FIXE l’indemnité due par l’Etablissement Public Foncier d’Île-de-France à Madame [S] [V] épouse [K], Monsieur [I] [K] et Madame [L] [K] au titre de la dépossession des lots n°895 (appartement), 1095 (cave) du bâtiment 4 de la copropriété du [Adresse 16] [Adresse 2] à la somme de 39.967,50 € (trente-neuf-mille neuf-cent-soixante-sept euros et cinquante centimes), en valeur occupée, se décomposant comme suit :
- 35.425 €, au titre de l’indemnité principale ;
- 4.542,50 €, au titre de l’indemnité de remploi ;

DÉBOUTE Madame [S] [V] épouse [K], Monsieur [I] [K] et Madame [L] [K] de leur demande au titre des frais de déménagement ;

CONDAMNE l’Etablissement Public Foncier d’Île-de-France aux dépens ;

CONDAMNE l’Etablissement Public Foncier d’Île-de-France à payer à Madame [S] [V] épouse [K], Monsieur [I] [K] et Madame [L] [K] la somme de 3000 € (trois mille euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Maxime-Aurélien JOURDE

Greffier
Charlotte THIBAUD

Vice-Présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : Expropriations 2
Numéro d'arrêt : 23/00230
Date de la décision : 30/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-30;23.00230 ?
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