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23/04/2024 | FRANCE | N°23/00050

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, Expropriations 2, 23 avril 2024, 23/00050


Décision du 23 avril 2024
Minute n° 24/67


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY

JURIDICTION DE L’EXPROPRIATION
DE LA SEINE-SAINT-DENIS

JUGEMENT FIXANT INDEMNITÉS

du 23 avril 2024

:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:

Rôle N° RG 23/00050 - N° Portalis DB3S-W-B7H-XMY4

Le juge de l’expropriation du département de la SEINE-SAINT-DENIS


DEMANDEUR :


ETABLISSEMENT PUBLIC FONCIER D’ILE DE FRANCE
[Adresse 12], [Localité 17]
représentée par Maître Miguel BARATA de l’AARPI BARATA CHARBONNEL, avoc

ats au barreau de PARIS
DÉFENDEUR :
M. [O] [G]
[Adresse 1], [Localité 21]
réprésenté par Maître Gilles CAILLET, SELARL HELIANS, avocat au ba...

Décision du 23 avril 2024
Minute n° 24/67

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY

JURIDICTION DE L’EXPROPRIATION
DE LA SEINE-SAINT-DENIS

JUGEMENT FIXANT INDEMNITÉS

du 23 avril 2024

:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:

Rôle N° RG 23/00050 - N° Portalis DB3S-W-B7H-XMY4

Le juge de l’expropriation du département de la SEINE-SAINT-DENIS

DEMANDEUR :

ETABLISSEMENT PUBLIC FONCIER D’ILE DE FRANCE
[Adresse 12], [Localité 17]
représentée par Maître Miguel BARATA de l’AARPI BARATA CHARBONNEL, avocats au barreau de PARIS
DÉFENDEUR :
M. [O] [G]
[Adresse 1], [Localité 21]
réprésenté par Maître Gilles CAILLET, SELARL HELIANS, avocat au barreau de PARIS
INTERVENANT :
DIRECTION DEPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES - POLE D’EVALUATION DOMANIALE
[Adresse 16]
[Localité 20]
représentée par Mesdames [P] [S] et [M] [Y], commissaires du Gouvernement

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Charlotte THIBAUD, Vice-Présidente, désignée par ordonnance de monsieur le Premier Président de la cour d’appel de Paris

Maxime-Aurélien JOURDE, Greffier des services judiciaires, présent lors de la mise à disposition

PROCÉDURE :

Date de la visite des lieux : 17 octobre 2023
Date de la première évocation et des débats : 05 décembre 2023 ; 06 février 2024
Date de mise à disposition : 23 avril 2024
EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [G] [O] était propriétaire des lots n°165 et 174 dans le bâtiment 5 au sein des immeubles en copropriété situé [Adresse 5] à [Localité 23] (93), sur la parcelle cadastrée section AX n°[Cadastre 15], d’une superficie de 2078 m².

L’utilité publique de l’acquisition de la parcelle cadastrée section AX n° [Cadastre 15] et la cessibilité des lots de la copropriété au profit de l’établissement Public Foncier île de France (ci-après dénommé l’EPFIF) ont été déclarées par arrêté préfectoral n° 2021-2270 en date du 08 octobre 2021, pris en application des dispositions des articles L.511-1 et suivants du code de l’expropriation, dans le cadre d’une opération d’expropriation concernant des immeubles insalubres ou menaçant ruine.

Les lots n°165 et 174, appartenant au défendeur consistaient en un appartement d’une surface de 23 m² et une cave. Pour une description plus précise des lieux, il conviendra de se reporter au procès-verbal du 17 octobre 2023, annexé à la présente décision. Toutefois, le jour du transport, les lieux étaient murés et les biens de Monsieur [O] n’ont pas pu être visités.

Une ordonnance d’expropriation, emportant transfert de propriété, a été rendue le 07 juillet 2022 au profit de l’EPFIF.

L’EPFIF a notifié par lettre recommandée ses offres d’indemnisation à Monsieur [O], avec accusé de réception daté du 04 août 2022. La société expropriante précise qu’aucun accord n’est intervenu dans le délai d’un mois prévu à l’article R.311-9 du code de l’expropriation.

Par un Mémoire valant offre daté du 1er août 2022 et reçus le 24 février 2023 par le greffe, l’EPFIF a saisi la juridiction de l’expropriation du tribunal judiciaire de Bobigny aux fins de fixation de la valeur du bien de Monsieur [O].

Le Mémoire valant offre, postérieur d’au moins un mois à la notification des offres, a été notifié à Monsieur [O] par lettre recommandée avec accusé de réception daté du 23 février 2023, soit simultanément à la saisine de la juridiction

Par une ordonnance rendue le 17 août 2023, le juge de l’expropriation a fixé le transport sur les lieux et l’audition des parties au 17 octobre 2023. L’EPFIF a notifié cette décision à Monsieur [O] et au commissaire du Gouvernement par lettres recommandées avec accusé de réception en date du 31 août 2023. La date de réception par Monsieur [O] lui a laissé :

- un délai de six semaines entre la date de réception du mémoire de l’entité expropriante et celle du transport, conformément aux dispositions de l’article R.311-14 ;

- et un délai au moins égal à quinze jours entre la date de la notification de l’ordonnance de transport sur les lieux et la date de la visite elle-même, conformément aux dispositions de l’article R.311-15, 4ème alinéa.

Monsieur [O] était présent et assisté de Maître Gilles CAILLET lors du transport sur les lieux du 17 octobre 2023.

L’EPFIF a déposé deux mémoires :
- un mémoire valant offre daté du 1er août 2022 et reçu le 24 février 2023 ;
- un mémoire récapitulatif et en réplique daté du 1er février 2024 et reçu le 06 février 2024.

Dans son dernier mémoire, L’EPFIF demande au juge de l’expropriation de :
“- DECLARER les dispositions de l’article L 511-6 du code de l’expropriation conformes à l’article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales ;

- DECLARER que la méthode d’évaluation par récupération foncière est applicable, en tout état de cause, compte tenu d’obligations administratives de démolition exécutoires ;

- FIXER l’indemnité à revenir à Monsieur [G] [O] consécutivement à l’expropriation des lots n°165 (appartement) et n°174 (cave) situés dans le bâtiment 5 de l’immeubles en copropriété situé [Adresse 5] à [Localité 23], parcelle cadastrée section AX n°[Cadastre 15], d’une superficie de 2078 m², comme suit :

Indemnité principale :
valeur du terrain libre : 2078 m² x 400 € = 831.200 €
coût de démolition : 848.160 €
valeur du terrain après déduction des frais de démolition : négative
valeur du terrain pour 1/10.000ème de parties communes générales : 0 €
nombre de tantièmes affectés à l’appartement : 92/10 000ème
valeur de la cave : 900 €
soit :
0€ x 92 tantièmes = 0 €
cave = 900 €
total indemnité principale : 900 €
Indemnité de remploi : 180 €
TOTAL INDEMNITÉ DE DÉPOSSESSION : 1.080 €

- DONNER ACTE à l’EPFIF du maintien de son offre d’indemnisation initiale contenue dans son mémoire de saisine, au besoin fixer l’indemnité comme suit à savoir :
indemnité principale totale : 6.615,04 €
indemnité de remploi : 1.242,26 €
soit une indemnité de dépossession totale de 7.857,30 €.

A TITRE SUBSIDIAIRE

- ORDONNER une experties aux fins de détermination du coût total représenté par l’ensemble des opérations à mener aux fins de réalisaiton de l’obligation de démolition de l’ensemble immobilier objet des présentes :

- DÉSIGNER tel expert qu’il plaira avec pour mission de :
déterminer et préciser les spécificités du site situé [Adresse 5] à [Localité 23], parcelle cadastrée section AX [Cadastre 15], ainsi que son environnement immédiat ;
se faire remettre tout document utile à l’accomplissement de sa mission ;
déterminer l’ensemble des coûts nécessités et impliqués par l’ensemble des opérations à engager aux fins de démolition de l’ensemble immobilier situé au [Adresse 5] à [Localité 23] ;

EN TOUT ETAT DE CAUSE

- REJETER les prétentions de la défense ;

- LAISSER les dépens à la charge de l’EPFIF”.

Monsieur [O] a déposé deux mémoires :
- un mémoire en fixation des indemnités d’expropriation daté du 27 novembre 2023, reçu le 30 novembre 2023 ;
- un mémoire récapitulatif daté du 2 février 2024, reçu le 07 février 2024.

Dans son dernier mémoire, Monsieur [O], demande au juge de l’expropriation de :
“- FIXER à 82 174 € le montant de l’indemnité principale due par l’Etablissement Public Foncier d’Ile de France à Monsieur [G] [O] en contrepartie de l’expropriation des lots de copropriété n°165 et 174 situés dans l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 23] parcelle cadastrée AX n°[Cadastre 15] ;

- FIXER à 9 217,44 € le montant de l’indemnité de remploi due par l’Etablissement Public Foncier d’Ile de France à Monsieur [G] [O] en contrepartie de l’expropriation des lots de copropriété n°165 et 174 situés dans l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 23] parcelle cadastrée AX n°[Cadastre 15] ;

- FIXER à 5 000 € le montant de l’indemnité pour prise de possession anticipée due par l’Etablissement Public Foncier d’Ile de France à Monsieur [G] [O] en contrepartie de l’expropriation des lots de copropriété n°165 et 174 situés dans l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 23] parcelle cadastrée AX n°[Cadastre 15] ;

- REJETER l’ensemble des demandes de l’Etablissement Public Foncier d’Ile de France ;

- ECARTER toutes conclusions contraires notamment celles de l’Etablissement Public Foncier d’Ile de France et du commissaire du Gouvernement ;

- CONDAMNER l’Etablissement Public Foncier d’Ile de France à verser à Monsieur [J] [V] une somme de 5000 € au titre des frais irrépétibles (article 700 du code de procédure civile)”

Par conclusions reçues le 05 octobre 2023 et par conclusions complémentaires reçues le 26 janvier 2024, le commissaire du Gouvernement considérant que Monsieur [O] occupait son bien au moins deux ans avant la déclaration d’utilité publique, et par application de la méthode par comparaison, propose une indemnité de dépossession de 68.490,50 €, soit :
- indemnité principale : 61.355 €, correspondant à :
. lot n° 165 : 59.455 € (23 m² x 2585 €/m²) ;
. lot n° 174 : 1900 € indemnité forfaitaire par cave ;
- indemnité de remploi : 7.135,50 €.

En vertu de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait référence aux écritures transmises pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.

À l’audience du 05 décembre 2023, l’affaire a été renvoyée à l’audience du 06 février 2024 pour permettre au commissaire du Gouvernement ainsi qu’à l’EPFIF de répondre au mémoire de Monsieur [O].

Le 18 décembre 2023, le juge de l’expropriation a invité les parties à se prononcer sur la compatibilité des dispositions de l’article L 511-6 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique avec celles de l’article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales et a sollicité la production de pièces complémentaires.

A l’audience du 06 février 2024, les parties comparantes ont développé les éléments de leurs mémoires, en application des dispositions de l’article R.311-20, 1er alinéa, du Code de l’expropriation.

L’affaire a été mise en délibéré au 23 avril 2024.

Le 08 février 2024, le juge de l’expropriation a sollicité, par voie de note en délibéré pour le 28 février 2024 au plus tard, que l’EPFIF précise le montant auquel elle entend voir fixer l’indemnité de dépossession.

Par note en délibéré en date du 28 février 2024, reçue le 05 mars 2024, l’EPFIF indique modifier le dispositif de son dernier mémoire comme suit :
“REMPLACER LE SEUL PASSAGE CI-DESSOUS :

“DONNER ACTE à l’EPFIF du maintien de son offre d’indemnisation initiale contenue dans son mémoire de saisine ;”

PAR LE PASSAGE SUIVANT :

A TITRE SUBSIDIAIRE,

DONNER ACTE à l’EPFIF du maintien de son offre d’indemnisation initiale contenue dans son mémoire de saisine ;

EN CONSEQUENCE,

FIXER l’indemnité comme suit :

La suite du passage remplacé, notamment les montants d’indemnité mentionnés, demeure inchangée.”

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande de fixation de l’indemnité de dépossession

En application de l’article L 511-1 1° du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, peut être poursuivie, dans les conditions prévues aux articles L. 511-2 à L. 511-9, au profit de l'Etat, d'une société de construction dans laquelle l'Etat détient la majorité du capital, d'une collectivité territoriale, d'un organisme y ayant vocation ou d'un concessionnaire d'une opération d'aménagement mentionné à l’article L 300-4 du code de l’urbanisme, l'expropriation des immeubles ayant fait l'objet d'un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l'insalubrité pris en application de l'article L. 511-11 du code de la construction et de l'habitation et ayant prescrit la démolition ou l'interdiction définitive d'habiter.
Aux termes de l’article L. 511-6 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique , Pour le calcul de l’indemnité due aux propriétaires, la valeur des biens est appréciée, compte tenu du caractère impropre à l’habitation des locaux et installations expropriés, à la valeur du terrain nu, déduction faite des frais entraînés par leur démolition, sauf lorsque les propriétaires occupaient eux-mêmes les immeubles déclarés insalubres ou frappés d’un arrêté de péril au moins deux ans avant la notification de la décision prévue à l’article L. 511-2 ou lorsque les immeubles ne sont ni insalubres, ni impropres à l’habitation, ni frappés d’un arrêté de péril.»

Sur les éléments préalables à la détermination des indemnités

Le montant des indemnités est fixé d’après la consistance des biens à la date de l’ordonnance d’expropriation portant transfert de propriété, en application des dispositions de l’article L.322-1 du code de l’expropriation.

Conformément à l’article L 322-2 alinéa 1er du code de l’expropriation, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance.

Selon les dispositions de l’article L.213-6 du code de l’urbanisme, la date de référence à prendre en compte en matière d’expropriation est la date à laquelle est devenu opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public, approuvant ou modifiant le plan local d’urbanisme (PLU) ou le plan d’occupation des sols (POS) et définissant la zone dans laquelle est situé le bien.

En l’espèce, les lots n°165 et 174 doivent être évalués à la date du présent jugement et selon :
- leur consistance au 07 juillet 2022, date de l’ordonnance d’expropriation ;
- les possibilités offertes par le règlement d’urbanisme définies par le plan local d’urbanisme (PLU) approuvé le 19 novembre 2015 et modifié en dernier lieu le 09 juin 2020.
Selon les écritures non contestées du commissaire du Gouvernement la parcelle est située en zone UCc du PLU, soit un secteur urbain à vocation mixte et à dominante d’habitat collectifs.

S’agissant de la consistance du bien

Il s’agit d’un ensemble immobilier composé de six immeubles de même architecture, de quatre étages chacun, disposés en enfilade ; le premier immeuble donne directement sur la rue des deux communes, les cinq autres immeubles sont accessibles par une allée bétonnée close par un portail en fer, en état d’usage.

Les façades sont recouvertes de petites briques de couleur claires ; elles sont recouvertes de graffiti à divers endroits ;

Les huisseries du rez-de-chaussée de chaque bâtiment sont murées, les fenêtres dans les étages sont munies de volets en accordéons qui sont fermés.

Pour chaque bâtiment, l’une des façades latérales ainsi qu’une partie des façades principales et arrières sont cerclées sur 3 niveaux (des pièces d’étais métalliques posées en longueur sur les façades sont visibles renforcées par des étais en bois)

La parcelle sur laquelle est édifiée la copropriété, d'une contenance de 2078 m², est de forme rectangulaire, plane et close par un muret.

Les appartements et les caves n’ont pas pu être visités, car les bâtiments ont été murés et évacués par la commune de [Localité 23] le 23 novembre 2018, en raison de désordres structurels affectant la solidité des six bâtiments de la copropriété.

S'agissant de l'environnement, ce bien est limitrophe de la commune de [Localité 21], il est situé à 19 kilomètres de [Localité 22], desservis par plusieurs lignes de bus, le RER A et le RER E, à proximité de l’A86 et de l’A1 ainsi que du centre-ville de [Localité 23] disposant de commerces et d’équipements publiques (mairie, écoles, crèches)

Les caractéristiques du bien permettent de dégager :

- des facteurs de plus-value :
La tranquillité et le caractère résidentiel du quartier bien desservi par plusieurs transports en commun ainsi que sa proximité du centre-ville de [Localité 23] comprenant de nombreux commerces, équipements publics et administrations (mairie).

- des facteurs de moins-value :
La copropriété fait l’objet d’un arrêté de péril et d’un arrêté de mise en sécurité avec interdiction définitive d’habiter et d’utiliser les six immeubles.

Il convient de se reporter au procès-verbal de transport sur les lieux, annexé à la présente décision.

S’agissant de la méthode d’évaluation

En application de l’article L 511-6 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, pour le calcul de l'indemnité due aux propriétaires, la valeur des biens est appréciée, compte tenu du caractère impropre à l'habitation des locaux et installations expropriés, à la valeur du terrain nu, déduction faite des frais entraînés par leur démolition, sauf lorsque les propriétaires occupaient eux-mêmes les immeubles déclarés insalubres ou frappés d'un arrêté de péril au moins deux ans avant la notification de la décision prévue à l'article L. 511-2 ou lorsque les immeubles ne sont ni insalubres, ni impropres à l'habitation, ni frappés d'un arrêté de péril.

En l’occurrence, faisant suite à un arrêté de péril ordinaire du 12 avril 2018 et à un arrêté de péril imminent du 20 novembre 2018, le maire de [Localité 23] a pris le 22 juillet 2021 un arrêté de mise en sécurité avec interdiction définitive d’habiter et d’utiliser les six immeubles de la copropriété située [Adresse 5] à [Localité 23], les bâtiments étant affectés de désordres structurels portant atteinte à leur solidité.

Par un arrêté préfectoral en date du 08 octobre 2021, l’acquisition de la parcelle cadastrée section AX n°[Cadastre 15] au profit de l’EPFIF, a été déclarée d’utilité publique et les lots dépendant de la copropriété située [Adresse 5] à [Localité 23] ont été déclarés cessibles, sur le fondement des dispositions des articles L. 511-1 et suivants du code de l’expropriation, situés dans le Livre cinquième Procédures spéciales, titre premier Expropriation des immeubles insalubres ou menaçant ruine.

Toutefois, Monsieur [O] fait valoir à titre principal, que l’article L 511-6 du code de l’expropriation en ce qu’il impose le recours à la méthode d’évaluation par récupération foncière est, au regard des dispositions de l’article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales, inconventionnel, à titre subsidiaire qu’il occupait personnellement le bien exproprié de sorte que la méthode par comparaison doit s’appliquer.

L’EPFIF considère que la méthode par récupération foncière telle qu’imposée par l’article L.511-6 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique n’est pas inconventionnelle et que Monsieur [O] n’occupait pas personnellement le bien.

Bien que Monsieur [O] soulève d’abord l’inconvetionnalité des dispositions de l’article L 511-6 du code de l’expropriation avant de se prévaloir de l’exception prévue à ce même article, il critique l’utilisation obligatoire de la méthode d’évaluatoin par récupération foncière, de sorte qu’il y a d’abord lieu d’examiner si Monsieur [O] peut revendiquer l’application de la méthode par comparaison avant d’envisager l’inconventionnalité de l’article L 511-6 du code de l’expropriation.

L’article L 511-6 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique prévoit l’application de la méthode d’évaluation par comparaison, lorsque les propriétaires occupaient eux-mêmes les immeubles déclarés insalubres ou frappés d'un arrêté de péril au moins deux ans avant la notification de la décision prévue à l'article L. 511-2 .

Ainsi, le bien doit être occupé personnellement par le propriétaire, mais il peut l’être à titre de résidence principale comme de résidence secondaire.

De la même manière le texte prévoit une occupation au moins deux ans avant la notification de la déclaration d’utilité publique et non que l’occupation doit être continue pendant deux ans ou qu’elle doit dater de deux ans.

En l’espèce, aucune des parties ne conteste que la déclaration d’utilité publique prise par arrêté n°2021-2270 en date du 08 octobre 2021 a été notifiée le 25 octobre 2021.

Par ailleurs, Monsieur [O] justifie de ce qu’il occupait lui-même le bien exproprié au moins deux ans avant cette notification, notamment par la production de l’avis de renouvellement du contrat d’assurance habitation en qualité de propriétaire occupant émis le 15 mars 2017 par la sa société PACIFICA-CREDIT AGRICOLE ASSURANCES à son nom et à l’adresse [Adresse 5] à [Localité 23], d’une facture émise par EDF le 21 janvier 2016 à son nom et à l’adresse [Adresse 5] à [Localité 23] et par un avis d’imposition de la taxe d’habitation pour l’année 2015 concernant le bien exproprié, à son nom et à l’adresse [Adresse 5] à [Localité 23].

Le fait que l’arrêté de péril du 12 avril 2018 mentionne une autre adresse pour Monsieur [O], ne démontre pas qu’il n’était pas propriétaire-occupant, dans la mesure où il justifie qu’à cette date, profitant d’un voyage à l’étranger plusieurs individus ont squatté son appartement, l’obligeant, le temps des démarches judiciaires d’expulsion, à se reloger temporairement chez son beau-frère. Cette circonstance, indépendante de sa volonté, ne saurait lui faire perdre le statut de propriétaire-occupant.

Dès lors, l’évaluation du bien appartenant à Monsieur [O] se fera selon la méthode par comparaison, qui consiste à comparer les biens à évaluer à des cessions de biens équivalents qui ont eu lieu dans la période récente sur le marché immobilier local, cave et partie commune intégrées.

S’agissant des surfaces

Selon le commissaire du Gouvernement, les surfaces sont de :

. 2078 m², s’agissant du terrain ;
. 3000 m² de surface développée pondérée hors oeuvre (SDPHO), s’agissant du bâti ; et les millièmes de :
. 23 m², s’agissant du lot n°165,

Aucune des parties ne les contestent, de sorte qu’elles seront retenues pour l’évaluation du bien.

S’agissant de la situation locative

En l’espèce, il a été constaté lors du transport sur les lieux que les biens sont libres d’occupation, ce qui n’est pas contesté.

Ils seront par conséquent évalués en valeur libre d’occupation et comparés à des biens cédés libres.

Sur l’indemnité principale

L’indemnité principale de dépossession correspond à la valeur vénale de l’appartement et de la cave ainsi qu’aux tantièmes des parties communes de la copropriété associés à ces lots.

La valeur des biens dont Monsieur [O] est dépossédé sera déterminée par comparaison entre, d’une part, la consistance des biens présentés à titre de termes de comparaison et leurs valeurs d’échange et, d’autre part, les caractéristiques des biens à évaluer.

Pour déterminer les indemnités de dépossession revenant à Monsieur [O] au titre de l’expropriation d’un appartement (lot n°165) et d’une cave (lot n°174), le commissaire du Gouvernement se réfère à des termes de comparaison comprenant uniquement un appartement et ajoute à la valeur retenue une somme de 1900€, correspondant à la valeur d’une cave.

Or, les termes de comparaison concernant produits tant par l’EPFIF que par Monsieur [O], ne font pas apparaître de différence de valeur significative selon qu’il s’agit d’un appartement avec cave ou sans cave.

Il est ainsi suffisamment démontré que la vente d’une cave comme accessoire d’un appartement n’est ni un facteur de plus-value, ni un facteur de moins-value, de sorte qu’il n’apparaît pas justifié de déterminer la valeur du bien en ajoutant à la valeur retenue pour l’appartement, la valeur d’une cave.

sur les termes de référence proposés par les parties

- termes de comparaison produits par l’EPFIF
(DEM signifie demandeur à la procédure et désigne en l’espèce l’EPFIF)

L’EPFIF qui n’a envisagé que l’utilisation de la méthode d’évaluation par récupération foncière ne produit que des termes de comparaison relatifs à des terrains, biens non comparables à un appartement, de sorte qu’ils ne seront pas retenus.

- termes de comparaison cités par le commissaire du Gouvernement
(CG signifie commissaire du Gouvernement)

Aux termes de ses dernières conclusions reçues le 26 janvier 2024, s’agissant de l’appartement, le Commissaire du Gouvernement propose les termes de comparaison suivants :

Date de mutation
Ref.
Cadastrales
Adresse
Situ-ation
Surface
Carrez
Prix
total
Prix/m²
CG n°1
30/03/2023
9304P01
2023P08333
49//C/49//116
[Adresse 6]
[Localité 21]
libre
29,14 m²
141 000 €
4838,71€
Observations : Vte part/SC lot de copropriété n°16 dans un bâtiment unique, au 1er étage un studio avec entrée, coin cuisine, coin nuit, salle d’eau et wc. Situé à 650 mètres
CG
n°2
21/10/2020
9304P04
2020P04953
49//C/48//3
[Adresse 7] [Localité 21]
libre
19,95 m²
112 000 €
5614,04 €
Observations : Vte part/part. Lot de copropriété n°3 dans le bâtiment A au 1er étage, un studio avec salle d’eau, wc et cuisine, situé à 550 mètres.
CG
n°3
06/10/2020
9304P04
2020P04596
49//B/513//4
[Adresse 8] [Localité 21]
libre
11,49 m²
64 800 €
5639,69 €
Observations : Vte part/part lot de copropriété n°4, bâtiment A au 1er étage un studio divisé en une pièce, une cuisine, une salle d’eau et wc indépendants, situé à 300 mètres
CG
n°4
21/01/2021
9304P04
2021P00616
49//A/634//3-2
[Adresse 18]
[Localité 21]
libre
22,42 m²
108 000 €
4817,13 €
Observations : Vte part/part. Dans un immeuble en copropriété 2 lots réunis (lot 2 et 3) formant un appartement d’une pièce avec coin cuisine, salle d’eau et wc, situé à 500 mètres
CG
n°5
09/06/2022
9304P01
2022P16148
49//C/2718//7
[Adresse 10]
[Localité 21]
libre
28,31 m²
150 000 €
5298,48 €
Observations : Vte part/part lot de copropriété n°7, dans le bâtiment A, un appartement comprenant entrée, cuisine, salle de séjour, salle d’eau avec wc, escalier privatif donnant accès au 1er étage, situé à 350 mètres.
CG
n°6

DEM n°4
07/02/2022
9304P01
2022P04858
64//BI/14//45
[Adresse 2]
[Localité 23]
libre
28,53 m²
138 000 €
4837,01 €
Observations : Vte part/part dans le bâtiment C lot n°45 au 1er étage, un logement comprenant un couloir d’entrée, escalier, salle à manger-cuisine, chambre, salle de bain avec wc, situé à 1 km.
CG
n°7
DEM n°3
27/10/2020
9304P05
2020P03873
67//AX/64//136-127
[Adresse 5]
[Localité 23]
libre
23 m²
33890 €
1473,47 €
Observations : Rejeté car vente par EPFIF, marché captif donc non représentatif

La moyenne des six premiers termes de comparaison est de 5174,18 €/m² arrondi à 5175 €/m².

Après application d’un abattement de 50% en raison du caractère particulièrement dégradé de la copropriété et de l’appartement non habitable en l’état, le commissaire du Gouvernement retien un montant de 2587,50 € arrondi à 2585 €/m² (51 75€ x 0.50), soit la somme de 59 455 € pour le lot n°51 (2 585 € x 23 m²).

L’EPFIF n’a fait valoir aucune critique sur ces termes de comparaison.

Monsieur [O] ne formule aucune critique à l’égard des termes de comparaison proposés par le commissaire du Gouvernement.

En l’espèce, pour être comparé avec le présent bien ;

- les termes n° CG 1 à 5 ne seront pas retenus, car ils sont situés dans une autre commune que celle de [Localité 23] ;

- les termes n°CG 6 et 7 seront retenus selon une valeur moyenne de 3 155,24 €/m² arrondi à 3155 €/m², car ils sont relatifs à des ventes de biens situés dans la même commune, dans le même quartier voire dans la même copropriété et d’une surface équivalente à celle du bien en question.

Étant observé que le terme CG n°7 doit être privilégié, car il correspond à une vente au sein de la même copropriété où se situe le bien à évaluer.

- termes de comparaison versés par Monsieur [O]
(DEF signifie défendeur à la présente procédure et désigne Monsieur [O])

Monsieur [O] produit les termes de comparaison suivants :

Date de vente
et référence
Adresse
Surfaces
Prix
Prix/m²
DEF n°1
14/04/22
9304P01
2022P12380
[Adresse 13]
[Localité 23]
18 m²
80 000 €
4 444 €
DEF n°2
25/04/23
9304P01
2023P11337
[Adresse 13]
[Localité 23]
21m²
90 500 €
4 310 €
DEF n°3
09/03/23
9304P01
2023P06414
[Adresse 14]
[Localité 23]
22m²
110 000 €
5000 €
DEF n°4
31/08/22
9304P01
2022P25468
[Adresse 11]
[Localité 23]
28m²
152 000 €
5429 €
DEF n°5
20/04/21
9304P05
2021P011771
[Adresse 3]
[Localité 23]
27m²
135 000 €
5000 €
DEF n°6
25/06/21
9304P01
2021P07230
[Adresse 19]
[Localité 23]
22m²
93 000 €
4 227 €
DEF n°7
14/11/22
9304P01
2022P33079
[Adresse 19]
[Localité 23]
22m²
135 000 €
6 136 €
DEF n°8
07/03/23
9304P01
2023P06956
[Adresse 19]
[Localité 23]
22m²
144 000 €
6 545 €
DEF n°9
15/03/23
9304P01
2023P06421
[Adresse 19]
[Localité 23]
22m²
105 000 €
4 773 €
DEF n°10
15/03/23
9304P01
2023P11878
[Adresse 19]
[Localité 23]
22m²
120 000 €
5 455 €
DEF n°11
07/02/22
9304P01
2022P04858
[Adresse 2]
[Localité 23]
30m²
138 000 €
4 600 €
DEF n°12
18/03/22
9304P01
2022P08627
[Adresse 2]
[Localité 23]
30m²
140 000 €
4 667 €
DEF n°13
12/03/20
9304P05
2020P01133
[Adresse 9]
[Localité 23]
13m²
69 000 €
5 308 €
DEF n°14
04/09/19
9304P05
2019P03739
[Adresse 9]
[Localité 23]
13m²
67 000 €
5 154 €
DEF n°15
19/09/19
9304P05
2019P04062
[Adresse 11]
[Localité 23]
15m²
78 000 €
5 200 €
DEF n°16
16/07/19
9304P05
2019P03137
[Adresse 4]
[Localité 23]
24m²
130 000 €
5 417 €

La valeur moyenne de ces 16 termes de comparaison est de 5.104,06 € arrondi à 5.104 €/m²

Après un abattement de 30 % pour tenir compte de la mise sous péril des parties communes de la copropriété, Monsieur [O] sollicite une valeur inférieure soit 3.572,8 €/m².

L’EPFIF ne critique pas les termes ainsi proposés.

Le commissaire du Gouvernement, écarte :
- les termes DEF n°14, 15 et 16 comme étant trop anciens ;
- les termes DEF n°1, 2, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10 et 12, correspondant à des biens vendus soit avec une cave, soit avec un parking, dans un soucis d’équité à l’égard des copropriétaires non occupant pour lesquels le commissaire du Gouvernement a choisi de valoriser les caves au forfait.

En l’occurrence, pour être comparé avec le présent bien tous les termes proposés par Monsieur [O] seront retenus selon une valeur moyenne de 5104 €/m², dès lors qu’ils sont relatifs à des ventes de biens situés dans la même commune, d’une superficie relativement similaire et qu’aucun de ces termes ne date de plus de 5 ans.

Il convient par ailleurs de remarquer que le terme DEF n°11 est identique au terme CG n°6.

Sur la détermination de l’indemnité principale

Ainsi, après examen des termes de comparaison soumis par les parties, 18 références ont été jugées pertinentes et sont retenues :
- les termes du commissaire du Gouvernement n°6 et 7 selon une valeur moyenne de 3155 €/m² ; étant rappelé que le terme CG n°6 doit être privilégié selon une valeur de 1473,47 €/m² ;

- le termes de Monsieur [O] n° 1 à 16 selon une valeur moyenne de 5104€/m² ; étant rappelé que le terme DEF n°11 correspond au terme CG n°6.

La moyenne des références hors copropriété sis [Adresse 5] est la suivante :
(4837,01+4444+4310+5000+5429+5000+4227+6136+6545+4773+5455+5308+5154+5200+5417)/15 = 5460,134/m² arrondi à 5460 €/m²
Il convient d’appliquer une abattement de 70% tenant compte de l’état particulièrement dégradée de la copropriété, de son inhabitabilité et de ses finances obérées, qui justifie qu’une valeur inférieure à la moyenne dégagée soit retenue, soit la moyenne arrondie de 1638 €/m² (5460 € x 0.3).

Au regard, d’une part, de la valeur moyenne de 1638 €/m² et de la valeur privilégiée de 1473,47€/m², et, d’autre part, des caractéristiques des biens à évaluer, notamment sa bonne localisation et son état d’entretien qu’il convient de qualifier de moyen, l’appartement n’ayant pas pu être visité, l’EPFIF considérant qu’il est en mauvais état, Monsieur [O] qu’il est en bon état, sans qu’aucune des partie ne produise de document à l’appui de leurs affirmations, il convient de fixer la valeur du mètre carré pour l’évaluation des biens Monsieur [O] à la somme arrondie de 1556 €/m² (1638+1473,47)/2.

En conséquence, l’indemnité principale de dépossession s’agissant du lot n°165 (appartement) et du lot n°174 (cave) est évaluée à la somme de 35.788 € (1556 € x 23 m²) en valeur libre.

Sur l’indemnité de remploi

Aux termes de l'article R.322-5 du code de l'expropriation, l'indemnité de remploi est calculée compte tenu des frais de tous ordres normalement exposés pour l'acquisition de biens de même nature moyennant un prix égal au montant de l’indemnité principale. Sont également pris en compte dans le calcul du montant de l’indemnité les avantages fiscaux dont les expropriés sont appelés à bénéficier lors de l’acquisition de biens de remplacement.

En l’espèce, ils ont pour base le montant de l’indemnité principale, à savoir 35.788 € pour les lots n°165 et 174.

Ils sont liquidés comme suit :
20% sur 5.000 € = 1.000 €
15% sur 10.000 € = 1.500 €
10% sur 20.788 € = 2.078,80 €
Total : 4.578,80 €

Sur l’indemnité pour prise de possession anticipée

Au visa des articles L 511-2 du code de l’expropriation et 17 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, Monsieur [O] fait valoir que l’EPFIF a pris possession de son bien de manière anticipée sans lui verser d’indemnité provisionnelle et ce alros qu’il en avait demandé le versement. Il précise que la présente juridiction a déjà accordé 5000€ d’indemnité à ce titre.

L’EPFIF conteste avoir pris possession de manière anticipée des immeubles en copropriété situés [Adresse 5] à [Localité 23].

Aux termes de l’article L 511-2 alinéa 4 du code de l’expropriation, par dérogation aux règles générales du présent code, l'autorité compétente de l'Etat déclare d'utilité publique l'expropriation des immeubles, parties d'immeubles, installations et terrains, après avoir constaté, sauf dans les cas prévus au 2° de l'article L. 511-1, qu'ils ont été déclarés insalubres à titre irrémédiable en application de l'article L. 1331-25 ou de l'article L. 1331-28 du code de la santé publique, ou qu'ils ont fait l'objet d'un arrêté de péril assorti d'une ordonnance de démolition ou d'une interdiction définitive d'habiter pris en application de l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation.

Elle désigne la collectivité publique ou l'organisme au profit de qui l'expropriation est poursuivie. L'expropriant ainsi désigné est tenu à une obligation de relogement, y compris des propriétaires.

Par la même décision, elle déclare cessibles les immeubles bâtis, parties d'immeubles bâtis, installations et terrains concernés par l'expropriation, et fixe le montant de l'indemnité provisionnelle allouée aux propriétaires ainsi qu'aux titulaires de baux commerciaux. Cette indemnité ne peut être inférieure à l'évaluation de l'autorité administrative compétente pour l'effectuer.

Elle détermine également la date à laquelle il pourra être pris possession des immeubles bâtis, parties d'immeubles bâtis, installations et terrains expropriés après paiement ou, en cas d'obstacle au paiement, après consignation de l'indemnité provisionnelle. Cette date doit être postérieure d'au moins un mois à la publication de l'acte déclarant l'utilité publique. Toutefois, ce délai est porté à deux mois dans les cas prévus au 3° de l'article L. 511-1.

Enfin, elle fixe le montant de l'indemnité provisionnelle de déménagement pour le cas où celui-ci ne serait pas assuré par les soins de l'administration et, le cas échéant, le montant de l'indemnité de privation de jouissance.

Selon l’article L 321-1 du code de l’expropriation, les indemnités allouées couvrent l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé à l’exproprié.

En application de ces textes, le préjudice causé par une possession anticipée n’est une conséquence indemnisable que lorsqu’il constitue un préjudice matériel.

En l’espèce, Monsieur [O] n’explique ni ne justifie d’un préjudice matériel en lien avec la prise de possession anticipée de son bien par l’EPFIF.

En outre, les jugements rendus par le tribunal de céans sur lesquels il adosse sa revendication, ont trait à une procédure d’expropriation d’extrême urgence relevant des dispositions des articles L 521-1 et suivants du code de l’expropriation, ce qui n’est pas le cas de la présente procédure qui relève des dispositions de l’article L 511-1 à L 511-9 du même code.

Par ailleurs, si l’arrêté préfectoral n°2021-2770 du 08 octobre 2021 prévoit, conformément aux dispositions de l’article L 511-2 du code de l’expropriation, que L’EPFIF pourra prendre possession des biens déclarés cessibles après un délai d’un mois à compter de la date de publication du présent arrêté au bulletin d’information administratives des services de l’état, sous réserve du paiement ou de la consignation de l’indemnité provisionnelle et que L’EPFIF ne conteste pas, ne pas avoir versé et ne pas avoir consigné d’indemnité provisionnelle au profit de Monsieur [O], ce dernier ne rapporte pas la preuve de ce que l’EPFIF aurait pris possession de son bien.

À cet égard, le fait que lors du transport sur les lieux du 17 octobre 2023, le représentant de l’EPFIF ait indiqué que l’accès à la copropriété avait été permis à des ouvriers aux fins d’effectuer des sondages en vue de la démolition des bâtiments, n’est pas, à lui seul, suffisant pour établir une prise de possession anticipée.

En conséquence, Monsieur [O] sera débouté de sa demande d’indemnité pour prise de possession anticipée.

Sur l’indemnité totale de dépossession

L’indemnité totale de dépossession foncière est de 40.366,80 €, soit :
- 35.788 € au titre de l’indemnité principale ;
- 4.578,80 € au titre de l’indemnité de remploi.

Sur les demandes accessoires

Sur les dépens

Conformément aux dispositions de l’article L 312-1 du code de l’expropriation, l’EPFIF sera condamnée aux dépens.

Sur les frais irrépétibles

Aux termes de l’article 700 1° du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations. Néanmoins, s'il alloue une somme au titre du 2° du présent article, celle-ci ne peut être inférieure à la part contributive de l'Etat.

En l'espèce, l'équité commande de condamner l’EPFIF à payer à Monsieur [O] la somme de 3000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le juge de l’expropriation, statuant publiquement par jugement contradictoire, en premier ressort et par mise à disposition au greffe,

ANNEXE à la présente décision le procès-verbal de transport du 17 octobre 2023 ;

FIXE l’indemnité due par l’Etablissement Public Foncier d’Île-de-France à Monsieur [G] [O] au titre de la dépossession des lots n°165 (appartement) et 174 (cave) dans le bâtiment 5 au sein des immeubles en copropriété situés [Adresse 5] à [Localité 23] à la somme de 40.366,80 € (quarante mille trois cent soixante-six euros et quatre-vingt centimes), en valeur libre, se décomposant come suit :
- 35.788 € au titre de l’indemnité principale ;
- 4.578,80 € au titre de l’indemnité de remploi ;

CONDAMNE l’Etablissement Public Foncier d’Île-de-France aux dépens ;

CONDAMNE l’Etablissement Public Foncier d’Île-de-France à payer à Monsieur [G] [O] la somme de 3000 € (trois mille euros) en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Maxime-Aurélien JOURDE

Greffier
Charlotte THIBAUD

Vice-Présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : Expropriations 2
Numéro d'arrêt : 23/00050
Date de la décision : 23/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 29/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-23;23.00050 ?
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