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26/03/2024 | FRANCE | N°23/00023

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, Chambre 24 / proxi jex, 26 mars 2024, 23/00023


TRIBUNAL DE PROXIMITÉ D’AULNAY-SOUS-BOIS
10 boulevard Hoche
93600 AULNAY-SOUS-BOIS

Téléphone : 01 48 66 09 08
Télécopie : 01 48 96 11 43
@ : saisierem.tprx-aulnay-sous-bois@justice.fr



N° RG 23/00023 - N° Portalis DB3S-W-B7H-YLQ4

Minute : 24/00002





S.A. IMMOBILERE 3 F
Représentant : Maître Jeanine HALIMI de la SELARL JEANINE HALIMI, avocats au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : PN 397


C/

Madame [E] [M] épouse [S]
Représentant : Me Victoria FERRERO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire :
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Copie exécutoire notifiée en LRAR le 26 mars 2024 à :

S.A. IMMOBILERE 3F
Mme [S]

Copie délivrée en Lettre simple le 26 mars 2024 à :

...

TRIBUNAL DE PROXIMITÉ D’AULNAY-SOUS-BOIS
10 boulevard Hoche
93600 AULNAY-SOUS-BOIS

Téléphone : 01 48 66 09 08
Télécopie : 01 48 96 11 43
@ : saisierem.tprx-aulnay-sous-bois@justice.fr

N° RG 23/00023 - N° Portalis DB3S-W-B7H-YLQ4

Minute : 24/00002

S.A. IMMOBILERE 3 F
Représentant : Maître Jeanine HALIMI de la SELARL JEANINE HALIMI, avocats au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : PN 397

C/

Madame [E] [M] épouse [S]
Représentant : Me Victoria FERRERO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire :

Copie exécutoire notifiée en LRAR le 26 mars 2024 à :

S.A. IMMOBILERE 3F
Mme [S]

Copie délivrée en Lettre simple le 26 mars 2024 à :

S.A. IMMOBILERE 3F
Mme [S]

Copie, dossier, délivrés le 26 mars 2024 à :

Maître HALIMI Jeanine
Maître FERRERO Victoria

AUDIENCE CIVILE
JUGE DE L’EXECUTION - SAISIE DES REMUNERATIONS

Jugement rendu et mis à disposition au greffe du tribunal de proximité en date du VINGT-SIX MARS DEUX MILLE VINGT-QUATRE ;

par Madame Mélissa BLANCHE, en qualité de juge placée au tribunal de proximité statuant en tant que juge de l’exécution, assistée de Monsieur Jean-Hugues JEROME, greffier ;

Après débats à l'audience publique du 06 Février 2024 tenue sous la présidence de Madame Mélissa BLANCHE, en qualité de juge placée au tribunal de proximité statuant en tant que juge de l’exécution, assistée de Monsieur Jean-Hugues JEROME, greffier ;

ENTRE DEMANDEUR A LA SAISIE DES REMUNERATIONS,
DEFENDEUR A LA CONTESTATION :

S.A. IMMOBILERE 3 F
159 Rue Nationale
75013 PARIS
représentée par Maître Jeanine HALIMI de la SELARL JEANINE HALIMI, avocats au barreau de HAUTS-DE-SEINE

D'UNE PART

ET DÉFENDEUR A LA SAISIE DES REMUNERATIONS, DEMANDEUR A LA CONTESTATION :

Madame [E] [M] épouse [S]
5 allée des Genévriers
93290 TREMBLAY-EN-FRANCE
comparante en personne assistée de Me Victoria FERRERO, avocat au barreau de PARIS

D'AUTRE PART

EXPOSE DU LITIGE
Par jugement du 10 août 2018 rendu par le tribunal d’instance d'Aulnay-sous-Bois, Monsieur [K] [S] et Madame [E] [M] épouse [S] ont été expulsés du logement situé 33 avenue Henri Vicquerel à Villepinte et ont été condamnés solidairement à payer à la SA d’HLM IMMOBILIERE 3F les sommes suivantes :
4.462,22 euros au titre des loyers, charges et indemnités d’occupation dus au 28 mai 2018, mois d’avril inclus,
une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer et des charges tels qu’ils auraient été dus en cas de poursuite du bail à compter du 1er mai 2018 et jusqu'à complète libération des lieux,
350 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
les dépens de l'instance comprenant le coût du commandement de payer.

Ce jugement a été signifié à étude à Monsieur [K] [S] et à Madame [E] [M] épouse [S] le 20 septembre 2018.

Par requête déposée le 16 septembre 2022, la SA d’HLM IMMOBILIERE 3F a saisi le juge de l'exécution siégeant au tribunal de proximité d'Aulnay-sous-Bois aux fins d'ordonner la saisie de la somme de 13.784,67 euros sur les rémunérations de Madame [E] [M] épouse [S] en vertu du titre exécutoire précité.

La convocation transmise par le greffe est revenue avec la mention « pli avisé et non réclamé » et la requérante a donc été invitée à faire citer la défenderesse.

Par acte de commissaire de justice délivré le 16 mars 2023, l'étude de commissaires de justice mandataire de la SA d’HLM IMMOBILIERE 3F a fait citer Madame [E] [M] épouse [S] aux fins de saisie de la somme de 13.840,09 euros se décomposant de la façon suivante :
Principal : 12.928,87 euros,
Frais : 971,22 euros,
Acomptes : - 60,00 euros.

Après plusieurs renvois, les parties ont été reçues à l'audience de conciliation du 7 novembre 2023, au cours de laquelle Madame [E] [M] épouse [S] a soulevé une contestation, conduisant les parties à signer un procès-verbal de non-conciliation et la juge de l'exécution à renvoyer l'affaire à l'audience de contestation du 6 février 2024.

A cette audience, Madame [E] [M] épouse [S], assistée de son conseil, dépose des conclusions visées par le greffe aux termes desquelles elle sollicite :
in limine litis, l’irrecevabilité de la demande de saisie des rémunérations,
à titre principal, le rejet de l’intégralité des demandes adverses,
à titre subsidiaire, des délais de paiement,
en tout état de cause, la somme de 1.800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Au soutien de ses prétentions, au visa des articles 656 du code de procédure civile et de l’article 111-2 du code des procédures civiles d’exécution, elle fait valoir que l’acte de signification du jugement de condamnation est nul car les diligences de l’huissier ont été insuffisantes. Elle fait valoir qu’à la date de la signification, elle n’habitait plus à cette adresse depuis deux ans. Elle rappelle que l’huissier de justice doit relater avec précision les diligences qu’il a accomplies pour rechercher le destinataire de l’acte.

Sur le fond, elle conteste les montants réclamés par la SA d’HLM IMMOBILIERE 3F. Elle allègue qu’elle a quitté l’appartement le 31 décembre 2016 en réglant l’intégralité des sommes dues au bailleur et que le concierge a ensuite fait sous-louer le logement. Elle estime que l’état des lieux de sortie réalisé en juin 2019 démontre que le logement était squatté depuis son départ compte tenu de son état de délabrement. Sur sa situation personnelle, elle indique qu’elle est concierge, qu’elle perçoit 1.500 euros par mois de revenus, que son mari ne travaille pas et qu’elle a six enfants.

La SA d’HLM IMMOBILIERE 3F, représentée par son conseil, maintient ses demandes. Elle fait valoir qu’aucun congé n’a été délivré par la locataire, de sorte que le jugement de condamnation n’a pas pu être signifié à une autre adresse. Elle ajoute que la débitrice n’apporte aucun élément à l’appui de ses affirmations et notamment sur la sous-location supposée de l’appartement. Elle rappelle également que la débitrice ne peut plus contester le fond de la décision au stade de l’exécution. Elle s’oppose à tout délai de paiement au vu du montant très important de la dette.

A l'issue de l'audience, la décision a été mise en délibéré au 26 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

En application de l'article R. 3252-1 du code du travail, le créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut faire procéder à la saisie des sommes dues à titre de rémunération par un employeur à son débiteur.

En vertu de l'article R. 3252-8 du code du travail, les contestations auxquelles donne lieu la saisie sont formées, instruites et jugées selon les règles de la procédure orale ordinaire devant le tribunal judiciaire.

Sur la recevabilité

Il convient de rappeler que, lorsque le débiteur soulève la nullité de l'acte de signification de la décision de justice fondant les poursuites, il s'agit procéduralement parlant d'un moyen de fond. La nullité de la signification d’un titre le prive de son caractère exécutoire et entraîne le rejet de la requête en saisie des rémunérations, et non pas l’irrecevabilité des demandes. Il y a donc lieu de déclarer la SA d’HLM IMMOBILIERE 3F recevable en ses demandes et d’examiner ensuite la contestation tirée de la régularité de la signification du jugement.

Sur la régularité de la signification du jugement

En application de l'article 503 du code de procédure civile, les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu'après leur avoir été notifiés, à moins que l'exécution n'en soit volontaire.

L'article 654 du code de procédure civile dispose que la signification doit être faite à personne.

L’article 655 du code de procédure civile dispose que si la signification à personne s’avère impossible, l’acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence.

L’huissier de justice doit relater dans l’acte les diligences qu’il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances caractérisant l’impossibilité d’une telle signification.

L’article 656 du code de procédure civile dispose que si personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l'acte et s'il résulte des vérifications faites par l'huissier de justice, dont il sera fait mention dans l'acte de signification, que le destinataire demeure bien à l'adresse indiquée, la signification est faite à domicile. Dans ce cas, l'huissier de justice laisse au domicile ou à la résidence de celui-ci un avis de passage conforme aux prescriptions du dernier alinéa de l'article 655. Cet avis mentionne, en outre, que la copie de l'acte doit être retirée dans le plus bref délai à l'étude de l'huissier de justice, contre récépissé ou émargement, par l'intéressé ou par toute personne spécialement mandatée.

Il est constant que les prescriptions des articles 654 à 656 du code de procédure civile sont observées à peine de nullité, en application de l'article 693 du code de procédure civile, et sous réserve de l'existence d'un grief.

Il en résulte que, la signification à personne étant la règle, l'huissier est tenu de mentionner, dans l'acte, non seulement les investigations concrètes qu'il a effectuées pour retrouver le destinataire mais également les circonstances concrètes et précises qui empêchent une telle signification. Il n’a pas à prouver ses diligences, les mentions qu’il porte faisant foi jusqu’à inscription de faux. Le procès-verbal de signification doit se suffire à lui-même pour établir la réalité des diligences de l'huissier.
En l'espèce, il ressort des pièces versées au dossier et des débats que Madame [E] [M] épouse [S] a quitté le logement situé 33 avenue Henri Becquerel à Villepinte pour résider au 7 rue des Saints Sauveurs à Fontenay aux Roses. Elle prétend avoir remis son congé entre les mains du concierge mais ne pas en avoir conservé de copie ; elle n’apporte cependant aucune preuve de ses allégations. Il n’est donc pas reproché à la société bailleresse d’avoir fait signifier le jugement de condamnation au 33 avenue Henri Becquerel à Villepinte.

En revanche, il convient d’examiner la validité de l’acte de signification du 20 septembre 2018 au regard des diligences de l’huissier de justice.

Le procès-verbal de signification à étude comporte les mentions suivantes :

« N’ayant pu, lors de mon passage, avoir de précisions suffisantes sur le lieu où rencontrer le destinataire de l’acte.
Le domicile étant certain ainsi qu’il résulte des vérifications suivantes :
Circonstances rendant impossible la signification à personne :
La personne présente confirme l’adresse mais refuse de recevoir le pli.
Le lieu de travail est inconnu. »

Il résulte de la lecture de ce procès-verbal que le commissaire de justice n’a pas répertorié d’investigations concrètes permettant de s’assurer que la destinataire demeurait bien à l’adresse indiquée. Le procès-verbal se borne à mentionner qu’une personne présente dans les lieux a confirmé l’adresse. Toutefois, cette personne n’a pas décliné son identité et n’a pas accepté le pli, de sorte que cet élément ne saurait suffire à établir la réalité du domicile. Le commissaire de justice ne mentionne pas que le nom de la destinataire apparaît sur la boite aux lettres, sur l’interphone ou sur la liste des résidents. Il n’indique pas non plus avoir interrogé les voisins ou le concierge. Il ne précise pas non plus avoir tenté de joindre la destinataire par téléphone par exemple.

Les diligences du commissaire de justice doivent donc être considérées comme insuffisantes au regard des exigences de l’article 656 du code de procédure civile.

L’absence de signalement par Madame [E] [M] épouse [S] de ses changements d’adresse ne saurait dispenser le commissaire de justice de procéder aux diligences qui lui sont imposées pour rechercher l’adresse du destinataire de l’acte afin de délivrer celui-ci à personne.

Les allégations de la défenderesse concernant le squat ou la sous-location de l’appartement après son départ, lesquelles ne reposent que sur une plainte pour usurpation d’identité déposée la veille de l’audience de contestation, n’ont pas à être examinées en ce qu’elles sont indifférentes à la solution du litige.

Dès lors, la signification du jugement rendu le 10 août 2018 par le tribunal d’instance d'Aulnay-sous-Bois est irrégulière.

En outre, l’absence de signification régulière du jugement a privé Madame [E] [M] épouse [S], qui résidait alors à une autre adresse, d’une chance de faire appel de la décision et de faire valoir ses droits, ce qui constitue un grief.

Par conséquent, il convient d’annuler l’acte de signification du jugement fondant les poursuites et de rejeter la requête en saisie des rémunérations.

Sur les demandes accessoires

La SA d’HLM IMMOLIERE 3F, qui succombe à l'instance, supportera les dépens, en application de l'article 696 du code de procédure civile.

Au regard de l’équité et de la situation économique respective des parties, il convient d’allouer à Madame [E] [M] épouse [S] la somme de 900 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'exécution provisoire de la présente décision est de droit en application de l’article 514 du code de procédure civile ; il n'y a pas lieu de l'écarter.

PAR CES MOTIFS

La juge de l'exécution, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire rendu en premier ressort,

DECLARE la SA d’HLM IMMOBILIERE 3F recevable en ses demandes ;

ANNULE l’acte de signification du 20 septembre 2018 à Madame [E] [M] épouse [S] du jugement rendu le 18 août 2018 par le tribunal d’instance d’Aulnay-sous-Bois ;

REJETTE la requête en saisie des rémunérations formée par la SA d’HLM IMMOBILIERE 3F à l’encontre de Madame [E] [M] épouse [S] ;

CONDAMNE la SA d’HLM IMMOBILIERE 3F à payer à Madame [E] [M] épouse [S] la somme de 900 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SA d’HLM IMMOBILIERE 3F aux dépens ;

RAPPELLE que le présent jugement bénéficie de l'exécution provisoire de droit ;

Ainsi jugé et prononcé le 26 mars 2024 à Aulnay-sous-Bois,

LE GREFFIER LA JUGE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : Chambre 24 / proxi jex
Numéro d'arrêt : 23/00023
Date de la décision : 26/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 01/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-26;23.00023 ?
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