La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/03/2024 | FRANCE | N°24/01517

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, Chambre 8/section 3, 14 mars 2024, 24/01517


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY
JUGE DE L'EXÉCUTION

JUGEMENT CONTENTIEUX DU
14 Mars 2024
MINUTE : 2024/247

N° RG 24/01517 - N° Portalis DB3S-W-B7I-Y2QX
Chambre 8/Section 3


Rendu par Madame COSNARD Julie, Juge chargé de l'exécution, statuant à Juge Unique.
Assistée de Madame HALIFA Zaia, Greffière,

DEMANDERESSE

Madame [K] [E] ép [N]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 3]

comparante, assistée par sa fille Madame [W] [N]

ET

DÉFENDEUR

Société SEQENS
[Adresse 4]
[Localité 2]

représ

entée par Me Benoit GUYOD, avocat au barreau de Paris

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS

Madame COSNARD, juge de l’exécution,
Assistée de Madame HAL...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY
JUGE DE L'EXÉCUTION

JUGEMENT CONTENTIEUX DU
14 Mars 2024
MINUTE : 2024/247

N° RG 24/01517 - N° Portalis DB3S-W-B7I-Y2QX
Chambre 8/Section 3

Rendu par Madame COSNARD Julie, Juge chargé de l'exécution, statuant à Juge Unique.
Assistée de Madame HALIFA Zaia, Greffière,

DEMANDERESSE

Madame [K] [E] ép [N]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 3]

comparante, assistée par sa fille Madame [W] [N]

ET

DÉFENDEUR

Société SEQENS
[Adresse 4]
[Localité 2]

représentée par Me Benoit GUYOD, avocat au barreau de Paris

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS

Madame COSNARD, juge de l’exécution,
Assistée de Madame HALIFA, Greffière.

L'affaire a été plaidée le 29 Février 2024, et mise en délibéré au 14 Mars 2024.

JUGEMENT

Prononcé le 14 Mars 2024 par mise à disposition au greffe, par décision Contradictoire et en premier ressort.

EXPOSÉ DU LITIGE

Par jugement en date du 10 juillet 2023, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Saint-Denis a notamment :
- constaté l'acquisition de la clause résolutoire du contrat de bail conclu entre Madame [K] [E] épouse [N] et Monsieur [B] [N] d'une part et la société Seqens d'autre part et portant sur le logement sis [Adresse 1]),
- condamné solidairement Madame [K] [E] épouse [N] et Monsieur [B] [N] à payer à la société Seqens la somme de 4443,22 euros au titre de l'arriéré locatif, outre une indemnité d'occupation mensuelle,
- octroyé à Madame [K] [E] épouse [N] et Monsieur [B] [N] des délais de paiement suspendant l'acquisition de la clause résolutoire,
- en cas de défaut de paiement d'une mensualité, autorisé l'expulsion de Madame [K] [E] épouse [N] et Monsieur [B] [N] et tout occupant de leur chef.

Un commandement de quitter les lieux leur a été délivré le 24 novembre 2023.

Par lettre recommandée avec accusé de réception reçue au greffe le 14 mars 2024, Madame [K] [E] épouse [N] a saisi le juge de l'exécution de la juridiction de céans afin que le commandement de quitter les lieux soit annulé et que lui soit accordé, sur le fondement des articles L. 412-3 et L. 412-4 du code des procédures civiles d'exécution, un délai pour libérer les lieux.

L'affaire a été appelée à l'audience du 29 février 2024.

À cette audience, Madame [K] [E] épouse [N], assistée par Madame [W] [N], sa fille, demande au juge de l'exécution de :
- à titre principal, annuler le commandement de quitter les lieux du 24 novembre 2023,
- à titre subsidiaire, lui accorder 12 mois de délai pour quitter les lieux.

A titre principal, elle fait part des paiements effectués. A titre subsidiaire, elle fait état de sa situation familiale, professionnelle et financière ainsi que de ses démarches de relogement. Elle indique régler progressivement sa dette.

En défense, la société Seqens, représentée par son conseil, reprend oralement ses conclusions visées par le greffe le jour-même et demande au juge de l'exécution de :
- rejeter les demandes adverses,
- subsidiairement, conditionner tout délai au paiement à bonne date de l'indemnité d'occupation majorée de 300 euros,
- condamner solidairement Monsieur [B] [N] et Madame [K] [E] épouse [N] à lui payer la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Elle expose que le commandement de quitter les lieux est valable car l'échéancier du juge des contentieux de la protection n'a pas été respecté.

L'affaire a été mise en délibéré au 14 mars 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I. Sur la demande de nullité du commandement de quitter les lieux

L'article L.411-1 du code des procédures civiles d'exécution dispose que sauf disposition spéciale, l'expulsion d'un immeuble ou d'un lieu habité ne peut être poursuivie qu'en vertu d'une décision de justice ou d'un procès-verbal de conciliation exécutoire et après signification d'un commandement d'avoir à libérer les locaux.

Ainsi, la décision de justice en vertu de laquelle l'expulsion est poursuivie doit avoir ordonné ou autorisé l'expulsion.

Par ailleurs, aux termes de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En l'espèce, le jugement du 10 juillet 2023 a notamment :
- constaté l'acquisition de la clause résolutoire du contrat de bail conclu entre Madame [K] [E] épouse [N] et Monsieur [B] [N] d'une part et la société Seqens d'autre part et portant sur le logement sis [Adresse 1]),
- condamné solidairement Madame [K] [E] épouse [N] et Monsieur [B] [N] à payer à la société Seqens la somme de 4443,22 euros au titre de l'arriéré locatif, outre une indemnité d'occupation mensuelle,
- autorisé Madame [K] [E] épouse [N] et Monsieur [B] [N] à s'acquitter de cette somme en 23 mensualités de 100 euros, et une 24e mensualité soldant la dette en principal et intérêts,
- précisé que ces mensualités seront dues à la date prévue contractuellement pour le versement du loyer courant, en sus du loyer courant, et pour la première fois le mois suivant la signification de la décision,
- suspendu l'effet de la clause résolutoire pendant l'exécution des délais accordés,
- en cas de défaut de paiement d'une mensualité ou du loyer courant à son terme, dit que la clause résolutoire retrouvera ses effets et autorisé l'expulsion de Madame [K] [E] épouse [N] et Monsieur [B] [N] et tout occupant de leur chef.

Ce jugement ayant été signifié le 14 août 2023, les délais de paiement couraient à compter du mois de septembre 2023. Il ressort du contrat de bail que chaque échéance mensuelle est payable à terme échu le dernier jour de chaque mois.

Or, il ressort du décompte locatif que, pour l'échéance du 31 octobre 2023, aucun paiement n'a été effectué par les locataires avant le 28 novembre 2023. Ainsi, le commandement de quitter les lieux du 24 novembre 2023 a été valablement délivré et il convient de rejeter la demande de nullité.

II. Sur la demande de délai pour quitter les lieux

Aux termes de l'article L412-3 alinéa 1er du code des procédures civiles d'exécution, le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel, dont l'expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales.

L'article L412-4 de ce même code précise que pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l'âge, l'état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement ; est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés.

Ce même article dispose que la durée des délais prévus à l'article L. 412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à un mois ni supérieure à un an.

En l'espèce, il ressort des pièces produites que Madame [K] [E] épouse [N] occupe les lieux avec son époux et leurs huit enfants âgés de 23, 21, 19, 16, 14, 8, 6 et 3 ans, qui pour les plus jeunes sont scolarisés à proximité du domicile.

Conformément aux documents produits et aux déclarations à l'audience, non contestées en défense, les ressources mensuelles du foyer sont composées :
- du salaire de la demanderesse : 800 euros,
- des allocations chômage de son époux : 900 euros,
- du salaire de leur fille aînée : 900 euros,
- des allocations familiales : 1050 euros.

Ainsi, les ressources de la demanderesse ne lui permettent pas de trouver un logement adapté à la composition familiale dans le parc privé.

Si Madame [K] [E] épouse [N] n'a pas encore effectué de démarches de relogement dans le parc social, cela ne suffit pas à établir sa mauvaise volonté dans l'exécution de ses obligations, compte tenu des délais suspendant l'acquisition de la clause résolutoire qui lui avaient été accordés et du caractère récent du commandement de quitter les lieux.

Par ailleurs, il ressort du décompte locatif produit par la défenderesse que les occupants versent chaque mois une somme supérieure au montant du loyer afin de régler leur dette.

Dans ces conditions, compte tenu de l'absence de solution de relogement, de la présence de cinq enfants mineurs au domicile et de la bonne volonté de la demanderesse dans l'exécution de ses obligations, il y a lieu d'accorder à Madame [K] [E] épouse [N] des délais avant expulsion d'une durée de 9 mois, soit jusqu'au 14 décembre 2024 inclus.

Afin de ne pas pénaliser excessivement la propriétaire, ces délais seront subordonnés au paiement régulier de l'indemnité d'occupation courante, telle que prévue par le jugement du 10 juillet 2023 du tribunal de proximité de Saint-Denis.

En application de l'article 696 du code de procédure civile, Madame [K] [E] épouse [N] supportera la charge des éventuels dépens et ce, malgré le succès sa prétention, l'instance ayant été introduite par cette dernière dans le seul objectif d'obtenir des délais pour quitter les lieux.

En revanche, il est équitable de rejeter sa demande formée au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La juge de l'exécution, statuant publiquement, par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe et en premier ressort :

REJETTE la demande de nullité du commandement de quitter les lieux du 24 novembre 2023 ;

ACCORDE à Madame [K] [E] épouse [N], ainsi qu'à tout occupant de son chef, un délai de 9 mois, soit jusqu'au 14 décembre 2024 inclus, pour se maintenir dans les lieux situés [Adresse 1]) ;

DIT qu'à défaut de paiement à son terme d'une indemnité d'occupation courante, telle que fixée par le jugement du 10 juillet 2023 du tribunal de proximité de Saint-Denis, Madame [K] [E] épouse [N] perdra le bénéfice du délai accordé et la société Seqens pourra reprendre la mesure d'expulsion ;

DIT que Madame [K] [E] épouse [N] devra quitter les lieux le 14 décembre 2024 au plus tard, faute de quoi la procédure d'expulsion, suspendue pendant ce délai, pourra être reprise ;

CONDAMNE Madame [K] [E] épouse [N] aux dépens,

REJETTE la demande formée au titre des frais irrépétibles.

FAIT A BOBIGNY le 14 mars 2024.

LA GREFFIÈRELA JUGE DE L'EXÉCUTION


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : Chambre 8/section 3
Numéro d'arrêt : 24/01517
Date de la décision : 14/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs en accordant des délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-14;24.01517 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award