La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/10/2018 | FRANCE | N°C4133

France | France, Tribunal des conflits, 08 octobre 2018, C4133


Vu, enregistrée à son secrétariat le 22 mai 2018, l'expédition de l'arrêt du 16 mai 2018 par lequel la Cour de cassation (première chambre civile), saisie du pourvoi formé par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) et tendant à l'annulation de l'ordonnance de référé du 2 mars 2017 rendue par le premier président de la cour d'appel de Versailles dans le litige l'opposant à la société Axa France IARD, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 35 du décret du 27 février 2015, le soin

de décider sur la question de compétence ;

Vu, enregistré le 25 ju...

Vu, enregistrée à son secrétariat le 22 mai 2018, l'expédition de l'arrêt du 16 mai 2018 par lequel la Cour de cassation (première chambre civile), saisie du pourvoi formé par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) et tendant à l'annulation de l'ordonnance de référé du 2 mars 2017 rendue par le premier président de la cour d'appel de Versailles dans le litige l'opposant à la société Axa France IARD, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 35 du décret du 27 février 2015, le soin de décider sur la question de compétence ;

Vu, enregistré le 25 juin 2018, le mémoire présenté par la SCP Sevaux, Mathonnet, pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), tendant à ce que la juridiction judiciaire soit déclarée compétente pour connaître du litige et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société Axa France IARD au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, par les motifs que ni la compétence de principe du juge administratif ni l'article 15 de l'ordonnance du 1er septembre 2005 n'interdisent au juge judiciaire saisi de l'action en garantie de l'ONIAM contre l'assureur de connaître de la responsabilité du centre de transfusion assuré, que la compétence judiciaire est seule conforme à l'intention du législateur exprimée lors de l'adoption de la loi du 17 décembre 2012 et qu'elle est conforme à la bonne administration de la justice ;

Vu, enregistré le 25 juin 2018, le mémoire présenté par la SCP Celice, Soltner, Texidor, Perier pour la société Axa France IARD, tendant à ce que la juridiction administrative soit déclarée compétente pour connaître du litige, par les motifs que l'article 15 de l'ordonnance du 1er septembre 2005 a donné une compétence exclusive au juge administratif, laquelle n'a pas été remise en cause par l'intervention de la loi du 17 décembre 2012 et n'a pas été abrogée implicitement ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal a été notifiée au ministre des solidarités et de la santé, qui n'a pas produit de mémoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu le décret n° 2015-233 du 27 février 2015 ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 ;

Vu la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 ;

Vu l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005 ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jacques-Henri Stahl, membre du Tribunal,
- les observations de la SCP Sevaux, Mathonnet pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) ;
- les observations de la SCP Celice, Soltner, Texidor, Perier pour la société AXA France IARD ;
- les conclusions de Mme Bénédicte Vassallo-Pasquet, rapporteur public ;

Considérant, d'une part, que l'article 67 de la loi du 17 décembre 2008 de financement de la sécurité sociale pour 2009 a chargé l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) d'indemniser les victimes de préjudices résultant de la contamination par le virus de l'hépatite C causée par une transfusion de produits sanguins ou une injection de médicaments dérivés du sang ; que le I de cet article 67 a inséré au code de la santé publique un article L. 1221-14 déterminant la procédure d'indemnisation des victimes par l'Office ; que le IV du même article a, en outre, prévu que l'Office se substitue à l'Etablissement français du sang dans les contentieux en cours au titre des préjudices mentionnés à l'article L. 1221-14 du code de la santé publique n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable ;

Considérant que le c) du 4°) du I de l'article 72 de la loi du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013 a modifié l'article L. 1221-14 du code de la santé publique pour prévoir que l'Office, lorsqu'il a indemnisé une victime, peut directement demander à être garanti des sommes qu'il a versées par les assureurs des structures reprises par l'Etablissement français du sang en vertu du B de l'article 18 de la loi n° 98-535 du 1er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire de produits destinés à l'homme, de l'article 60 de la loi de finances rectificative pour 2000 (n° 2000-1353 du 30 décembre 2000) et de l'article 14 de l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005 relative aux établissements publics nationaux à caractère sanitaire et aux contentieux en matière de transfusion sanguine ; que le II du même article 72, applicable aux actions juridictionnelles en cours à la date du 1er juin 2010 sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, a complété le IV de l'article 67 de la loi du 17 décembre 2008 pour prévoir aussi un recours de l'ONIAM à l'encontre des assureurs des structures reprises par l'Etablissement français du sang, en l'étendant aux créances des tiers payeurs remboursés par l'Office ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 1er septembre 2005 relative aux établissements publics nationaux à caractère sanitaire et aux contentieux en matière de transfusion sanguine : " Les demandes tendant à l'indemnisation des dommages résultant de la fourniture de produits sanguins labiles ou de médicaments dérivés du sang élaborés par les personnes morales de droit public mentionnées à l'article 14 de la présente ordonnance ou par des organismes dont les droits et obligations ont été transférés à l'Etablissement français du sang en vertu d'une convention conclue en application de l'article 18 de la loi du 1er juillet 1998 visée ci-dessus ou dans les conditions fixées au I de l'article 60 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2000 visée ci-dessus relèvent de la compétence des juridictions administratives quelle que soit la date à laquelle est intervenu le fait générateur des dommages dont il est demandé réparation. Les juridictions judiciaires saisies antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance de demandes pour lesquelles elles étaient compétentes le demeurent après cette entrée en vigueur " ;

Considérant que l'ONIAM, après que le tribunal administratif de Rouen l'eut condamné, par un jugement du 6 juillet 2011, à verser à Mme A...et à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen des indemnités à raison de la contamination de l'intéressée par le virus de l'hépatite C, jugée imputable aux transfusions sanguines reçues en 1983, 1986 et 1987 au centre hospitalier de Rouen, a assigné, sur le fondement des dispositions issues de l'article 72 de la loi du 17 décembre 2012 précédemment mentionnées, la société Axa France IARD, en sa qualité d'assureur de l'ancien centre de transfusion sanguine de Bois-Guillaume, en vue d'obtenir le remboursement des sommes versées à la victime et à la caisse ; que, par une ordonnance du 9 décembre 2016, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Nanterre a sursis à statuer et renvoyé à la juridiction administrative, par voie préjudicielle, la question de la responsabilité de l'Etablissement français du sang venu aux droits et obligations du centre de transfusion ; que l'ONIAM a assigné en référé l'assureur devant le premier président de la cour d'appel afin d'être autorisé à interjeter appel immédiat de cette ordonnance, puis s'est pourvu en cassation contre le rejet de cette demande ; que, par arrêt du 16 mai 2018, la Cour de cassation a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 35 du décret du 27 février 2015, le soin de décider sur la question de compétence ;

Considérant qu'en prévoyant, par les dispositions de l'article 72 de la loi du 17 décembre 2012, la possibilité pour l'ONIAM de chercher à être garanti, par les assureurs des structures de transfusion reprises par l'Etablissement français du sang, des sommes qu'il a versées, le législateur a entendu conférer à la juridiction compétente pour connaître de cette action en garantie plénitude de juridiction pour statuer sur l'ensemble des questions qui s'y rapportent, sans qu'y fassent obstacle les dispositions de l'article 15 de l'ordonnance du 1er septembre 2005 ; qu'il s'ensuit que la juridiction judiciaire est compétente pour connaître du litige ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par l'ONIAM au titre des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;

D E C I D E :
--------------
Article 1er : La juridiction judiciaire est compétente pour connaître du litige.
Article 2 : Les conclusions de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales présentées sur le fondement de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, à la société Axa France IARD et au ministre des solidarités et de la santé.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C4133
Date de la décision : 08/10/2018
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR DES TEXTES SPÉCIAUX - ATTRIBUTIONS LÉGALES DE COMPÉTENCE AU PROFIT DES JURIDICTIONS JUDICIAIRES - DIVERS CAS D`ATTRIBUTIONS LÉGALES DE COMPÉTENCE AU PROFIT DES JURIDICTIONS JUDICIAIRES - ACTION EN GARANTIE DE L'ONIAM CONTRE LES ASSUREURS DES STRUCTURES DE TRANSFUSION SANGUINE REPRISES PAR L'EFS (7E AL - DE L'ART - L - 1221-14 DU CSP - ISSU DE L'ART - 72 DE LA LFSS POUR 2013) - COMPÉTENCE DE LA JURIDICTION JUDICIAIRE POUR STATUER SUR L'ENSEMBLE DES QUESTIONS QUI S'Y RAPPORTENT - NONOBSTANT LA COMPÉTENCE RECONNUE AU JUGE ADMINISTRATIF PAR L'ARTICLE 15 DE L'ORDONNANCE DU 1ER SEPTEMBRE 2005.

17-03-01-02-05 En prévoyant, par l'article 72 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012, la possibilité pour l'ONIAM de chercher à être garanti, par les assureurs des structures de transfusion sanguine reprises par l'Etablissement français du sang (EFS), des sommes qu'il a versées, le législateur a entendu conférer à la juridiction compétente pour connaître de cette action en garantie plénitude de juridiction pour statuer sur l'ensemble des questions qui s'y rapportent, sans qu'y fasse obstacle l'article 15 de l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005. Il s'ensuit que la juridiction judiciaire est compétente pour connaître d'une telle action en garantie.

RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITÉ EN RAISON DES DIFFÉRENTES ACTIVITÉS DES SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC DE SANTÉ - DONS DU SANG - ACTION EN GARANTIE DE L'ONIAM CONTRE LES ASSUREURS DES STRUCTURES DE TRANSFUSION SANGUINE REPRISES PAR L'EFS (7E AL - DE L'ART - L - 1221-14 DU CSP - ISSU DE L'ART - 72 DE LA LFSS POUR 2013) - COMPÉTENCE DE LA JURIDICTION JUDICIAIRE POUR STATUER SUR L'ENSEMBLE DES QUESTIONS QUI S'Y RAPPORTENT - NONOBSTANT LA COMPÉTENCE RECONNUE AU JUGE ADMINISTRATIF PAR L'ARTICLE 15 DE L'ORDONNANCE DU 1ER SEPTEMBRE 2005.

60-02-01-02 En prévoyant, par l'article 72 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012, la possibilité pour l'ONIAM de chercher à être garanti, par les assureurs des structures de transfusion sanguine reprises par l'Etablissement français du sang (EFS), des sommes qu'il a versées, le législateur a entendu conférer à la juridiction compétente pour connaître de cette action en garantie plénitude de juridiction pour statuer sur l'ensemble des questions qui s'y rapportent, sans qu'y fasse obstacle l'article 15 de l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005. Il s'ensuit que la juridiction judiciaire est compétente pour connaître d'une telle action en garantie.

RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RECOURS OUVERTS AUX DÉBITEURS DE L'INDEMNITÉ - AUX ASSUREURS DE LA VICTIME ET AUX CAISSES DE SÉCURITÉ SOCIALE - ACTION EN GARANTIE - ACTION EN GARANTIE DE L'ONIAM CONTRE LES ASSUREURS DES STRUCTURES DE TRANSFUSION SANGUINE REPRISES PAR L'EFS (7E AL - DE L'ART - L - 1221-14 DU CSP - ISSU DE L'ART - 72 DE LA LFSS POUR 2013) - COMPÉTENCE DE LA JURIDICTION JUDICIAIRE POUR STATUER SUR L'ENSEMBLE DES QUESTIONS QUI S'Y RAPPORTENT - NONOBSTANT LA COMPÉTENCE RECONNUE AU JUGE ADMINISTRATIF PAR L'ARTICLE 15 DE L'ORDONNANCE DU 1ER SEPTEMBRE 2005.

60-05-01 En prévoyant, par l'article 72 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012, la possibilité pour l'ONIAM de chercher à être garanti, par les assureurs des structures de transfusion sanguine reprises par l'Etablissement français du sang (EFS), des sommes qu'il a versées, le législateur a entendu conférer à la juridiction compétente pour connaître de cette action en garantie plénitude de juridiction pour statuer sur l'ensemble des questions qui s'y rapportent, sans qu'y fasse obstacle l'article 15 de l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005. Il s'ensuit que la juridiction judiciaire est compétente pour connaître d'une telle action en garantie.


Composition du Tribunal
Président : M. Maunand
Rapporteur ?: M. Jacques-Henri Stahl
Rapporteur public ?: Mme Vassallo-Pasquet

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:2018:C4133
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award