Vu, enregistrée à son secrétariat le 26 février 2018, l'expédition du jugement du 19 octobre 2017, par lequel le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, saisi d'une demande de M. B...tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme totale de 4 806 641 F CFP, en réparation des préjudices subis du fait du non-renouvellement par le vice-rectorat de la Nouvelle-Calédonie de son contrat de maître délégué, a renvoyé au Tribunal, en application de l'article 32 du décret du 27 février 2015, le soin de décider sur la question de la compétence ;
Vu le jugement du 30 avril 2015 par lequel le tribunal du travail de Nouméa a déclaré la juridiction judiciaire incompétente pour connaître de ce litige ;
Vu les observations, enregistrées le 17 avril 2018, par lesquelles le ministre de l'éducation nationale conclut à la compétence de la juridiction judicaire ;
Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal a été notifiée à M. B..., au Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie et au Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, qui n'ont pas produit de mémoire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu le décret n° 2015- 233 du 27 février 2015 ;
Vu le code du travail de Nouvelle-Calédonie ;
Vu la loi du pays du 13 avril 2007 relative à la situation des personnels enseignants et de documentation des établissements d'enseignement privés sous contrat qui exercent leurs fonctions en Nouvelle-Calédonie ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Rémy Schwartz, membre du Tribunal,
- les conclusions de Mme Bénédicte Vassallo-Pasquet, rapporteur public ;
Considérant que M. B...a été recruté par les services de l'Etat en Nouvelle-Calédonie pour enseigner en qualité de maître délégué contractuel au collège privé Saint Joseph à Vao, établissement sous contrat d'association situé sur l'Ile des Pins ; que son contrat n'ayant pas été renouvelé, M. B...a saisi le tribunal du travail de Nouméa d'une demande de condamnation de l'Etat à des dommages et intérêts au motif qu'il aurait fait l'objet d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que, par un jugement du 30 avril 2015, ce tribunal s'est déclaré incompétent pour connaître du litige ; que M. B...a ensuite saisi le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de la même demande ; que, par un jugement du 19 octobre 2017, le tribunal administratif a estimé, quant à lui, que seule la juridiction judiciaire était compétente pour connaître de ce litige et, compte tenu de la décision devenue définitive du tribunal du travail de Nouméa, a renvoyé au Tribunal le soin de décider sur la question de compétence sur le fondement de l'article 32 du décret du 27 février 2015 ;
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 442-5 du code de l'éducation, rendu applicable en Nouvelle-Calédonie par l'article L. 494-1 de ce code : " Les établissements d'enseignement privés du premier et du second degré peuvent demander à passer avec l'Etat un contrat d'association à l'enseignement public, s'ils répondent à un besoin scolaire reconnu qui doit être apprécié en fonction des principes énoncés aux articles L. 141-2, L. 151-1 et L. 442-1./ Le contrat d'association peut porter sur une partie ou sur la totalité des classes de l'établissement. Dans les classes faisant l'objet du contrat, l'enseignement est dispensé selon les règles et programmes de l'enseignement public. Il est confié, en accord avec la direction de l'établissement, soit à des maîtres de l'enseignement public, soit à des maîtres liés à l'Etat par contrat. Ces derniers, en leur qualité d'agent public, ne sont pas, au titre des fonctions pour lesquelles ils sont employés et rémunérés par l'Etat, liés par un contrat de travail à l'établissement au sein duquel l'enseignement leur est confié, dans le cadre de l'organisation arrêtée par le chef d'établissement, dans le respect du caractère propre de l'établissement et de la liberté de conscience des maîtres(...°) " ; que l'article Lp. 1 de la loi du pays du 13 avril 2007 relative à la situation des personnels enseignants et de documentation des établissements d'enseignement privés sous contrat qui exercent leurs fonctions en Nouvelle-Calédonie rappelle que : " Les personnels enseignants et de documentation des personnels d'enseignement privés sous contrat d'association ne sont pas, au titre des fonctions pour lesquelles ils sont employés et rémunérés par l'Etat, liés par un contrat de travail à l'établissement d'enseignement privé au sein duquel l'enseignement leur est confié." ;
Considérant, d'autre part, que l'article Lp. 111-1 du code du travail de la Nouvelle-Calédonie prévoit l'application de ce code, dont le contrôle relève du juge judiciaire, à tous les " salariés " de Nouvelle-Calédonie et aux personnes qui les emploient ; que l'article Lp. 111-2 de ce code définit comme salarié entrant dans son champ d'application " toute personne physique qui s'est engagée à mettre son activité professionnelle, moyennant rémunération, sous l'autorité d'une autre personne physique ou morale publique ou privée " ; que ne sont exclues du champ d'application du code du travail de Nouvelle-Calédonie, aux termes de son article Lp. 111-3, que les " personnes relevant d'un statut de fonction publique ou d'un statut de droit public " ; qu'un agent contractuel de l'Etat exerçant en Nouvelle-Calédonie ne relève pas, au sens et pour l'application de ces dispositions, d'un statut de fonction publique ou d'un statut public ;
Considérant que M. B...a été employé sous contrat par l'Etat en qualité de maître délégué pour enseigner en Nouvelle-Calédonie ; qu'il résulte des textes précités que si son contrat prévoyait l'applicabilité des dispositions du décret du 17 janvier 1986 modifié portant dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l'Etat, il ne relevait toutefois pas d'un " statut de fonction publique ou d'un statut de droit public " ; qu'il était en conséquence soumis au code du travail de Nouvelle-Calédonie et le litige l'opposant à l'Etat relève, par suite, de la compétence de la juridiction judiciaire ;
D E C I D E :
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Article 1er : La juridiction judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant M. B... à l'Etat.
Article 2 : Le jugement du 30 avril 2015 du tribunal du travail de Nouméa est déclaré nul et non avenu. La cause et les parties sont renvoyées devant ce tribunal.
Article 3 : La procédure suivie devant le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie est déclarée nulle et non avenue à l'exception du jugement rendu par ce tribunal le 19 octobre 2017.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M.B..., au Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, au ministre de l'éducation nationale et au Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.