Vu la lettre par laquelle le Garde des Sceaux, ministre de la Justice, a transmis au Tribunal le dossier de la procédure opposant Aéroports de Paris et la société Compagnie nationale Air France à la société TAT European Airlines devant la cour d'appel de Paris ;
Vu le déclinatoire présenté par le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, tendant à voir déclarer la juridiction de l'ordre judiciaire incompétente par les motifs que les mesures d'affectation des compagnies aériennes entre les aérogares et d'utilisation de l'ouvrage aéroportuaire prises en application d'une décision de la Direction générale de l'aviation civile procéderaient de l'organisation du service public administratif et constitueraient des actes de gestion domaniale relevant de la seule compétence de la juridiction administrative ;
Vu l'arrêt, en date du 23 février 1999, par lequel la cour d'appel de Paris, statuant sur le recours formé par l'établissement Aéroports de Paris et la société Compagnie nationale Air France contre une décision du Conseil de la concurrence, a rejeté le déclinatoire ;
Vu l'arrêté, en date du 12 mars 1999, par lequel le préfet a élevé le conflit ;
Vu l'arrêt en date du 6 mai 1999 par lequel la cour d'appel de Paris a sursis à statuer dans l'attente de la décision du Tribunal ;
Vu les observations du directeur de l'aviation civile concluant à ce qu'il soit fait droit à l'arrêté de conflit ;
Vu les observations présentées par la société civile professionnelle Baraduc-Duhamel pour la société Compagnie nationale Air France tendant à ce que la juridiction administrative soit déclarée compétente pour statuer sur le litige par les motifs que la décision, prise par la direction générale de l'aviation civile, de réorganisation des aérogares d'Orly-Ouest et Orly-Sud, constitue l'exercice d'une prérogative de puissance publique parce qu'elle concerne l'organisation du service public et détermine l'affectation du domaine public aéroportuaire ;
Vu les observations présentées par la société civile professionnelle Piwnica-Molinié, pour l'établissement Aéroports de Paris, tendant à la confirmation de l'arrêté de conflit par les motifs que la décision de réorganisation de la plate-forme et des conditions d'exercice de l'activité des compagnies aériennes a été prise dans le cadre de prérogatives de puissance publique et de la gestion d'installations ayant le caractère d'ouvrages publics ;
Vu les observations présentées par la société civile professionnelle Vier-Barthélémy pour la société TAT European Airlines tendant à l'annulation de l'arrêté de conflit par les motifs qu'Aéroports de Paris se livre à des activités de services au sens de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et que la sanction de pratiques anticoncurrentielles relève de la compétence du Conseil de la concurrence et de la cour d'appel de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu l'ordonnance du 1er juin 1828 modifiée ;
Vu l'ordonnance des 12-21 mars 1831 modifiée ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence ;
Considérant que la cour d'appel de Paris a été saisie conformément à l'article 2 de la loi n° 87-499 du 6 juillet 1987 d'un recours contre la décision du Conseil de la concurrence qui a prononcé des sanctions pécuniaires à l'encontre de l'établissement public Aéroports de Paris et de la compagnie Air France ; qu'à la charge de ces derniers ont été relevées des pratiques d'entente illicite ayant conduit au regroupement dans l'aérogare d'Orly-Ouest du trafic du groupe Air France ; qu'en outre, a été retenu contre Aéroports de Paris un abus de position dominante consistant, d'une part, dans le refus opposé le 17 juin 1994 à la société TAT European Airlines d'ouvrir à partir de l'aérogare d'Orly-Ouest de nouvelles liaisons et d'autre part, dans le fait d'avoir imposé à ladite société de ne pas recourir à son propre personnel mais d'utiliser les services d'assistance en escale d'Aéroports de Paris sur l'aérogare d'Orly-Sud alors qu'une telle obligation n'était pas imposée à la compagnie Air France ;
Considérant que si dans la mesure où elles effectuent des activités de production, de distribution ou de services les personnes publiques peuvent être sanctionnées par le Conseil de la concurrence agissant sous le contrôle de l'autorité judiciaire, les décisions par lesquelles ces personnes assurent la mission de service public qui leur incombe au moyen de prérogatives de puissance publique, relèvent de la compétence de la juridiction administrative pour en apprécier la légalité et, le cas échéant, pour statuer sur la mise en jeu de la responsabilité encourue par ces personnes publiques ;
Considérant que les décisions de regrouper à l'aérogare d'Orly-Ouest les activités du groupe Air France et de refuser à la société TAT European Airlines d'ouvrir de nouvelles lignes à partir de cette aérogare qui se rattachent à la gestion du domaine public constituent l'usage de prérogatives de puissance publique ; qu'il suit de là qu'en ce qui concerne les pratiques relevées par le Conseil de la concurrence qui sont en réalité indissociables de la réorganisation des aérogares d'Orly décidée par l'établissement public puis approuvée, le 4 mai 1994, par le ministre de l'Equipement, du Transport et du Logement, c'est à bon droit que le conflit a été élevé ;
Considérant en revanche, que sont détachables de l'appréciation de la légalité d'un acte administratif, les pratiques d'Aéroports de Paris susceptibles de constituer un abus de position dominante consistant dans l'obligation faite à la compagnie TAT European Airlines d'utiliser les services d'assistance en escale de cet établissement public en substitution à ses personnels ; que c'est par suite à tort que l'arrêté de conflit a revendiqué pour la juridiction administrative la connaissance desdites pratiques ;
DECIDE :
Article 1er : L'arrêté de conflit pris le 12 mars 1999 par le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qu'il concerne les effets attachés à la décision ministérielle du 4 mai 1994 et à la décision d'Aéroports de Paris du 17 juin 1994 est confirmé. Il est annulé pour le surplus ;
Article 2 : Sont déclarés nuls et non avenus la procédure relative aux effets attachés aux actes administratifs mentionnés à l'article 1er et l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 23 février 1999 en ce qu'il déclare la juridiction judiciaire compétente pour en connaître.