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15/03/1999 | FRANCE | N°99-03097

France | France, Tribunal des conflits, 15 mars 1999, 99-03097


Vu l'expédition du jugement du 6 novembre 1997 par lequel le tribunal administratif de Poitiers, saisi d'une demande de M. Claude X..., tendant à l'annulation de la décision en date du 20 septembre 1993 par laquelle le maire de Châtellerault l'a licencié pour motif économique, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de compétence ;

Vu l'arrêt du 6 février 1996 par lequel la cour d'appel de Poitiers s'est déclarée incompétente pour connaître de ce litige ;

Vu le mémoire prése

nté par la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, tendant à ce que soit déc...

Vu l'expédition du jugement du 6 novembre 1997 par lequel le tribunal administratif de Poitiers, saisi d'une demande de M. Claude X..., tendant à l'annulation de la décision en date du 20 septembre 1993 par laquelle le maire de Châtellerault l'a licencié pour motif économique, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de compétence ;

Vu l'arrêt du 6 février 1996 par lequel la cour d'appel de Poitiers s'est déclarée incompétente pour connaître de ce litige ;

Vu le mémoire présenté par la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, tendant à ce que soit déclaré nul et non avenu l'arrêt d'incompétence rendu par la cour d'appel de Poitiers ; qu'en effet, la régie municipale des abattoirs de Châtellerault a le caractère d'un service public industriel et commercial et, à la date de la décision le licenciant pour motif économique, M. X... n'avait pas la qualité de directeur de ce service ;

Vu le mémoire présenté pour la commune de Châtellerault, tendant à ce que soit déclaré nul et non avenu le jugement de renvoi du tribunal administratif de Poitiers ; qu'en effet, la décision de licenciement prise à l'encontre de M. X... constitue une mesure de nature administrative car elle a été prise en application d'une décision générale d'organisation du service public municipal et concerne, en outre, une personne qui, par ses fonctions de direction, participe directement à l'exécution dudit service ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal des Conflits a été notifiée à M. X... qui n'a pas produit de mémoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;

Vu la loi n° 65-543 du 8 juillet 1965 ;

Vu le Code des communes, notamment ses articles R. 323-81 et R. 378-4 ;

Vu le Code du travail, notamment ses articles L. 122-12 et L. 122-12-1 ;

Vu la directive du Conseil des Communautés européennes n° 77-187 du 14 février 1977 concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transferts d'entreprises, d'établissements ou de parties d'établissements ;

Considérant que la gestion des abattoirs municipaux de la commune de Châtellerault, qui avait été affermée par voie de convention à la société STAC, a, à la suite de la mise en liquidation judiciaire de cette société prononcée par un jugement du tribunal de commerce du 22 juin 1993, été reprise par la commune en régie directe en vertu d'une délibération du conseil municipal du 8 juillet 1993 ; que M. X..., antérieurement directeur de la société STAC, a, le 20 septembre 1993, été licencié par la commune pour motif économique ;

Considérant qu'il ressort des dispositions de la loi du 8 juillet 1965 relative à la gestion et à l'exploitation des abattoirs publics départementaux et municipaux éclairées par les travaux préparatoires, que le législateur a entendu faire des abattoirs publics des services publics à caractère industriel et commercial ; que du fait de la nature juridique de tels services, les litiges d'ordre individuel concernant leurs agents, à l'exception de l'agent chargé de la direction du service ainsi que du chef de la comptabilité, lorsque ce dernier possède la qualité de comptable public, relèvent de la compétence des tribunaux de l'ordre judiciaire ;

Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 122-12 du Code du travail : " S'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise " ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison des règles et des principes susmentionnés, que la commune de Châtellerault, qui a repris en régie directe l'exploitation des abattoirs municipaux antérieurement affermée à une société, doit, pour la poursuite de l'exploitation du même service public industriel et commercial être considérée comme un nouvel employeur au sens de l'article L. 122-12 du Code du travail, tenu en conséquence de respecter les contrats de travail en cours ; qu'il en va ainsi, y compris pour la personne investie d'un emploi de direction ; que, toutefois, en raison des prérogatives dont dispose une personne publique à l'égard des services publics placés sous son autorité, le maintien de l'intéressé à ce poste de responsabilité requiert la mise en oeuvre d'un régime de droit public ;

Considérant qu'à la date où a été prise la décision de licenciement pour motif économique de M. X..., l'intéressé demeurait lié à la commune de Châtellerault par un contrat de travail ; qu'en raison de la volonté de la commune de ne plus recourir à son concours pour la direction du service public, il ne s'est pas trouvé placé sous un régime de droit public ; qu'ainsi, compte tenu de sa date d'intervention, la mesure de licenciement prise à son encontre se rattache à des rapports de droit privé ; que la juridiction de l'ordre judiciaire est, par suite, compétente pour en connaître ;

DECIDE :

Article 1er : La juridiction de l'ordre judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant M. X... à la commune de Châtellerault ;

Article 2 : L'arrêt de la cour d'appel de Poitiers du 6 février 1996 est déclaré nul et non avenu. La cause et les parties sont renvoyées devant cette cour d'appel ;

Article 3 : La procédure suivie devant le tribunal administratif de Poitiers est déclarée nulle et non avenue à l'exception du jugement rendu par ce tribunal le 6 novembre 1997.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 99-03097
Date de la décision : 15/03/1999

Analyses

SEPARATION DES POUVOIRS - Commune - Service affermé par une commune puis repris par elle - Poursuite de la même entreprise - Contrat de travail - Licenciement - Licenciement du directeur du service - Compétence judiciaire - Condition .

SEPARATION DES POUVOIRS - Contrat de travail - Licenciement - Commune - Service affermé par une commune puis repris par elle - Directeur du service - Compétence judiciaire - Condition

Il résulte de la combinaison des dispositions de la loi du 8 juillet 1965 relative à la gestion et à l'exploitation des abattoirs publics départementaux et municipaux et du deuxième alinéa de l'article L. 122-12 du Code du travail, qu'une commune, qui a repris en régie directe l'exploitation des abattoirs municipaux antérieurement affermée à une société, doit, pour la poursuite de l'exploitation du même service public industriel et commercial être considérée comme un nouvel employeur tenu de respecter les contrats de travail en cours, y compris pour la personne investie d'un emploi de direction. Toutefois, en raison des prérogatives dont dispose une personne publique à l'égard des services publics placés sous son autorité, le maintien de l'intéressé à ce poste de responsabilité requiert la mise en oeuvre d'un régime de droit public. Il s'ensuit que la juridiciton de l'ordre judiciaire est compétente pour connaître du litige né du licenciement par la commune du directeur de la société, cette décision intervenant alors que l'intéresé demeurait lié à la commune par un contrat de travail et que la commune ne souhaitait plus recourir à son concours pour la direction du servie public.


Références :

Code du travail L122-12
Loi 65-543 du 08 juillet 1965

Décision attaquée : Tribunal administratif de Poitiers, 06 novembre 1997


Composition du Tribunal
Président : Président : M. Waquet .
Avocat général : Commissaire du Gouvernement : M. Sainte-Rose
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Genevois.
Avocat(s) : Avocat : M. Odent.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:1999:99.03097
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