Vu la lettre par laquelle le Garde des Sceaux, ministre de la Justice, a transmis au tribunal le dossier de la procédure opposant les époux de X... Saint-Genies à l'Etat français, devant la cour d'appel de Montpellier ;
Vu le déclinatoire présenté le 7 avril 1995 par le préfet de l'Aude, tendant à voir déclarer la juridiction de l'ordre judiciaire incompétente, par les motifs que les dommages invoqués par les époux de X... Saint-Genies seraient, à les supposer établis, la conséquence de travaux publics ;
Vu l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier, en date du 28 novembre 1995, par lequel le déclinatoire a été déclaré irrecevable, et l'affaire renvoyée à toutes fins utiles à l'audience du 20 mai 1996 pour être statué au fond ;
Vu l'arrêté, en date du 13 décembre 1995, par lequel le préfet a élevé le conflit ;
Vu le rapport du procureur général près de la cour d'appel de Montpellier communiquant le dossier de la procédure et concluant à l'irrecevabilité du déclinatoire ;
Vu les observations du ministre de la Défense contestant l'irrecevabilité du déclinatoire en raison de la tierce opposition formée par l'agent judiciaire du Trésor contre le jugement du tribunal de grande instance de Carcassonne, en date du 4 juin 1992, sur la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire, et concluant à la confirmation de l'arrêté de conflit ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu l'ordonnance du 1er juin 1828 modifiée ;
Vu l'ordonnance des 12-21 mars 1831 modifiée ;
Vu les articles 500, 582 et suivants du nouveau Code de procédure civile ;
Considérant que saisi d'un litige opposant, en raison de la privation de droits d'eau potable, les époux de X... Saint-Genies à l'Etat français, pris en la personne du préfet représentant le ministre de la Défense, le tribunal de grande instance de Carcassonne, dans le dispositif de son jugement réputé contradictoire du 4 juin 1992, a déclaré cette privation constitutive d'une voie de fait, et la juridiction de l'ordre judiciaire compétente pour statuer, après expertise, sur ses conséquences dommageables ; que ce jugement, signifié le 16 juin 1992 au préfet de l'Aude, n'a pas été frappé de recours ; que, par jugement réputé contradictoire du 8 avril 1993, le Tribunal a condamné l'Etat à payer une indemnité aux époux de X... Saint-Genies ; qu'après avoir interjeté appel de ce jugement, au nom de l'Etat, le préfet de l'Aude a présenté un déclinatoire de compétence, que la cour d'appel a déclaré irrecevable, par arrêt du 28 novembre 1995, contre lequel le préfet a pris un arrêté de conflit ;
Considérant que l'article 4 de l'ordonnance du 1er juin 1828 fait obstacle à ce qu'un conflit soit élevé postérieurement à un jugement rendu en dernier ressort ou acquiescé ; que la tierce opposition formée le 8 juin 1993 par l'agent judiciaire du Trésor contre le jugement du 4 juin 1992 n'a pas eu pour effet d'en suspendre l'exécution ni de lui retirer la force de chose jugée qu'il avait acquise en l'absence de recours par une voie ordinaire ; que, la décision sur la compétence ayant un caractère définitif, le déclinatoire n'était pas recevable, et le conflit ne pouvait être élevé ;
DECIDE :
Article 1er : L'arrêté de conflit pris le 13 décembre 1995 par le préfet de l'Aude est annulé.