Vu l'expédition de l'ordonnance en date du 20 mars 1995, par laquelle le magistrat du tribunal administratif de Nice, chargé des référés, a renvoyé au tribunal, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de compétence relative à la demande d'expertise formée par les consorts X... contre la société de pêche de la Moyenne Tinée ;
Vu l'ordonnance, en date du 3 novembre 1994, par laquelle le juge des référés du tribunal de grande instance de Nice s'est déclaré incompétent pour connaître de la demande d'expertise formée par les consorts X... contre les entreprises Orgéas, Del Fabro, et la société de pêche de la Moyenne Tinée ;
Vu, enregistrées le 15 mai 1995, les observations du ministre de l'Equipement, tendant à ce que la juridiction de l'ordre judiciaire soit déclarée compétente pour connaître de la demande d'expertise dirigée contre la société de pêche ;
Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal des Conflits a été notifiée aux consorts X..., à l'entreprise Orgéas, à l'entreprise Del Fabro, au département des Alpes-Maritimes et au ministre de l'Intérieur, qui n'ont pas produit de mémoire ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Vu le Code rural ;
Considérant que les consorts X... sont propriétaires indivis de parcelles situées entre la rivière Tinée et une route départementale dont l'élargissement a été confié par la direction de l'équipement des Alpes-Maritimes aux entreprises Orgéas et Del Fabro ; qu'à la suite des travaux exécutés par ces entreprises, et par la société de pêche de la Moyenne Tinée, ils ont assigné celles-ci en référé devant le président du tribunal de grande instance de Nice, aux fins de désignation d'un expert, en vue d'apprécier et évaluer les dommages occasionnés à leur propriété, ainsi que le coût de sa remise en état ; que par ordonnance en date du 3 novembre 1994, devenue définitive, le juge des référés du tribunal de grande instance de Nice s'est déclaré incompétent pour connaître de la demande d'expertise, et a renvoyé les consorts X... à mieux se pourvoir devant la juridiction administrative, au motif qu'il s'agissait d'un dommage de travail public ;
Considérant que saisi par les consorts X... de la même demande d'expertise, assortie d'une demande de provision, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a, par ordonnance du 20 mars 1995, sursis à statuer sur la demande d'expertise à l'égard de la société de pêche, et renvoyé au Tribunal des Conflits le soin de trancher la question de compétence relative à cette demande, aux motifs qu'en admettant même que, comme l'allèguent les requérants, la société de pêche ait prélevé sur leur propriété et sans leur autorisation un certain nombre de pierres et leur ait causé quelque dommage du fait de la circulation d'engins transportant ces pierres jusqu'au lit de la Tinée sise en contrebas de ladite propriété, en vue d'aménager dans le lit mineur de ce cours d'eau des " bassins à poissons ", les travaux correspondants ont été effectués par une personne morale de droit privé, qui, même si elle a fait l'objet d'un agrément conformément aux dispositions combinées des articles L. 234-3 et R. 234-23 du Code rural, et si elle est de ce fait soumise à une certaine tutelle du préfet, car elle est associée à une mission de service public, n'en conserve pas moins une autonomie fonctionnelle pour l'exécution de cette mission, de sorte que les travaux réalisés par elle ne peuvent être réputés faits pour le compte de l'Etat, ni constituer des travaux publics ; que, par la même ordonnance, le juge administratif a ordonné une expertise en présence des entreprises Orgéas et Del Fabro, et rejeté la demande de provision envers toutes les parties ;
Considérant qu'en l'état où la demande ne tend plus qu'à voir ordonner une mesure d'instruction avant tout procès et où le fond du litige est de nature à relever, fût-ce pour partie, de la compétence des juridictions de l'ordre auquel il appartient, le juge des référés ne peut refuser de se saisir ; qu'il s'ensuit que le magistrat délégué du tribunal administratif de Nice, statuant en référé, ne pouvait en l'espèce renvoyer au Tribunal des Conflits le soin de trancher sur la question de compétence ;
DECIDE :
Article 1er : L'article 2 de l'ordonnance rendue le 20 mars 1995 par le magistrat délégué du tribunal administratif de Nice est déclaré nul et non avenu. La cause et les parties sont renvoyées devant ce tribunal.