TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS
3ème chambre
1ère section
No RG 18/13549
No Portalis 352J-W-B7C-COIDV
No MINUTE :
Assignation du :
20 novembre 2018
JUGEMENT
rendu le 18 novembre 2021
DEMANDEUR
Monsieur [B] [N]
[Adresse 3]
[Localité 7]
représenté par Me Anne-Laure MOYA-PLANA, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C0176
DÉFENDERESSES
Société L'OCCITANE INTERNATIONAL SA
[Adresse 4]
[Adresse 2] (SUISSE)
Société MetL DISTRIBUTION FRANCE
[Adresse 13]
C/o L'Occitane
[Localité 1]
représentées par Me Julien BLANCHARD de la SELARL CANDÉ - BLANCHARD - DUCAMP, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0265
Société PMJC
[Adresse 5]
[Localité 6]
représentée par Maîtres David PITOUN et Guénola COUSIN du Cabinet OLLYNS, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #T14
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Nathalie SABOTIER, 1ère vice-présidente adjointe
Gilles BUFFET, Vice président
Alix FLEURIET, Juge
assistés de Caroline REBOUL, Greffière,
DÉBATS
A l'audience du 01 juin 2021 tenue en audience publique devant Nathalie SABOTIER et Gilles BUFFET, juges rapporteurs, qui, sans opposition des avocats, ont tenu seuls l'audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en ont rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l'article 805 du Code de Procédure Civile.
JUGEMENT
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort
EXPOSÉ DU LITIGE :
M. [B] [N] est un artiste, créateur de mode et illustrateur français.
Le 30 août 1978, il a fondé la société de droit français « JEAN CHARLES [N]», spécialisée dans la création de vêtements et d'accessoires de mode.
Le 3 mai 2011, cette société a été placée en redressement judiciaire, et, par un jugement du 13 septembre 2011, le tribunal de commerce de Paris a arrêté le plan de cession de l'intégralité des actifs de la société « JEAN CHARLES [N] » au profit d'une société « PMJC», alors en cours de création.
Par une convention de prestation de services du 21 juillet 2011, la société PMJC a confié à M. [N], la direction artistique des collections de vêtements et d'accessoires jusqu'au 31 décembre 2015.
Le 3 février 2012, l'acte de cession d'actifs était conclu entre les sociétés « JEAN CHARLES [N] » et PMJC , aux termes duquel la société PMJC obtenait le droit d'exploiter le signe « [G] » pour les produits liés au domaine de la mode dans les classes 18, 24 et 25.
Dans ce cadre, la société PMJC est titulaire du nom de domaine etlt;www.[011].cometgt; et exploite le site du même nom. Elle est également titulaire de la marque verbale « [G] Paris ».
Le 31 décembre 2015, le contrat de prestations de services de M. [N] est arrivé à expiration, et n'a pas été renouvelé, la société PMJC nommant Mme [J] [X], ancienne directrice de collection, en qualité de directrice artistique.
La société de droit Suisse L'OCCITANE INTERNATIONALE conçoit et commercialise des produits de soin et de parfumerie, distribués en France par sa filiale, la SARL MetL DISTRIBUTION.
M. [N] expose avoir été contacté en janvier 2018 par une responsable de l'enseigne L'OCCITANE en Australie l'informant du prochain lancement d'une collection de produits cosmétiques en édition limitée pour Noël, intitulée « L'Occitane x [G] ».
Il ajoute avoir découvert la publication, sur le compte Instagram de l'enseigne L'OCCITANE, le 11 septembre 2018, d'une vidéo annonçant la commercialisation de produits dont le packaging et les éléments marketing constituent selon lui des adaptations non autorisées de ses oeuvres antérieures. Dès le lendemain il a mis en demeure les sociétés PMJC et MetL DISTRIBUTION FRANCE (enseigne L'OCCITANE) d'en cesser toute reproduction.
Le 17 septembre 2018, M. [N] a fait assigner les sociétés PMJC et la SARL MetL DISTRIBUTION (FRANCE) devant le juge des référés de ce tribunal, aux fins d'obtenir l'interdiction d'exploiter les dessins « Mes Valeurs », « Phylactère », « Ma Vision », « Ma Planète », « Maison », « Ma Provence », « Bouche », « Lune », « Cadeau », « Etoiles », « Oiseau » et « Arbre », imitant selon lui ses oeuvres antérieures.
Par une ordonnance du 24 septembre 2018, le juge des référés a rejeté ses demandes faute pour lui d'établir la titularité de ses droits, et notamment la date certaine des créations revendiquées.
Par actes d'huissier du 20 novembre 2018, M. [N] a fait assigner les sociétés PMJC et MetL DISTRIBUTION FRANCE devant ce tribunal en contrefaçon de sept de ses oeuvres (Constellation, Phylactère, Oiseau, Main, Bouche, Lune, et Cadeau), ainsi qu'en concurrence déloyale et parasitaire.
Par une ordonnance rendue sur requête, par la présidente de la 3ème chambre / 1ère section de ce tribunal à laquelle l'affaire avait été distribuée, M. [N] a été autorisé à faire réaliser des opérations de saisie-contrefaçon dans les locaux de la société MetL DISTRIBUTION FRANCE.
Ces opérations se sont déroulées le 19 décembre 2018, et, au cours de ces opérations, le saisi a demandé le placement sous scellés de nombreux documents, notamment les courriels des deux dirigeants de la société sélectionnés par mots-clés, estimés tous confidentiels, ainsi que la copie du contrat conclu entre les sociétés L'OCCITANE INTERNATIONAL et PMJC, outre les éléments financiers concernant les produits litigieux fabriqués en France et exportés, et les investissements promotionnels.
Par une ordonnance du 11 juillet 2019, le juge de la mise en état a ordonné la production du contrat de partenariat entre les sociétés PMJC et L'OCCITANE INTERNATIONAL ainsi qu'une expertise de tri aux fins de déterminer et d'écarter des débats les documents saisis couverts par la confidentialité des relations avocat / client.
L'expert [Z] a déposé son rapport le 21 octobre 2019.
Par une autre ordonnance d'incident, le juge de la mise en état a rejeté la demande aux fins de communication sous astreinte des annexes au contrat de partenariat, ainsi que celle aux fins de communication des pièces no 7, 8, 12, 15, 16 et 17 du sous-fichier « Levilion », dont l'expert avait considéré qu'elles étaient couvertes par le secret professionnel prévu par l'article 66-5 de la Loi no 71-1130 du 31 décembre 1971.
Dans ses dernières conclusions no5, notifiées par la voie électronique le 11 février 2021, M. [N] demande au tribunal de :
Vu les articles L. 112-2, L. 113-4, L. 121-1, L. 122-4, L. 331-1-3, L. 332-1 et suivants et L. 335-2 et suivants ;
Vu les articles 1240 et suivants du code civil ;
Vu les articles 695 et 700 du code de procédure civile ;
- JUGER qu'en commercialisant et en assurant la promotion d'articles revêtus d'adaptations, d'altérations et de dénaturations des oeuvres antérieures de M. [N] que constituent les dessins « Constellation », « Phylactère », « Oiseau », « Main », « Bouche », « Lune » et « Cadeau », les sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION (FRANCE) et L'Occitane International SA ont commis des actes de contrefaçon ;
- JUGER que les circonstances dans lesquelles les sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION (FRANCE) et L'Occitane International SA ont réalisé la campagne Noël 2018 des produits L'Occitane caractérisent des actes de concurrence déloyale par risque de confusion et par parasitisme au détriment de M. [B] [N] ;
- INTERDIRE aux sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION (FRANCE) et L'Occitane International SA, sous astreinte définitive de cinq cent euros (500€) par infraction constatée, de commercialiser les produits litigieux objet du partenariat ;
- ORDONNER aux sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION (FRANCE) et L'Occitane International SA, sous astreinte définitive de cinq cent euros (500€) par infraction constatée, le retrait des circuits de distribution des produits objet du partenariat litigieux ;
- INTERDIRE aux sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION (FRANCE) et L'Occitane International SA, sous astreinte définitive de cinq cent euros (500€) par infraction constatée, de communiquer à quelque titre et sous quelque forme que ce soit, sur le partenariat litigieux et sur l'oeuvre de M. [N] ;
- DÉSIGNER tel expert qu'il plaira au tribunal afin de fournir au tribunal toutes les informations nécessaires à l'évaluation du préjudice subi par M. [N] et plus particulièrement avec pour mission :
* de déterminer les quantités totales de produits issus du partenariat litigieux (i) commercialisés en France par les sociétés MetL DISTRIBUTION (FRANCE) et/ou L'Occitane International SA et (ii) fabriqués ou conditionnés en France et exportés à l'étranger par les sociétés MetL DISTRIBUTION (France) et/ou L'Occitane International SA, jusqu'à la date de dépôt du rapport ;
* de déterminer le chiffre d'affaires correspondant ;
* de déterminer la marge brute réalisée par les sociétés MetL DISTRIBUTION (FRANCE) et/ou L'Occitane International SA sur ces ventes, et
* d'évaluer distinctement le préjudice moral subi par M. [N] ;
- DIRE que les opérations d'expertise porteront sur tous les articles relevant du partenariat litigieux et commis postérieurement au 18 décembre 2018, jusqu'à la date de dépôt du rapport;
Subsidiairement de ce chef, en cas d'annulation du procès-verbal de saisie-contrefaçon :
- DIRE que les opérations d'expertise porteront sur tous les articles relevant du partenariat litigieux et commis à compter du 1er septembre 2018, jusqu'à la date de dépôt du rapport;
- DIRE que le tribunal réserve les droits de M. [B] [N] sur l'évaluation du préjudice subi et ordonner le sursis à statuer s'agissant de l'évaluation de ce préjudice ;
- CONDAMNER solidairement les sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION (FRANCE) et L'Occitane International SA à payer à M. [N] la somme de 1.320.000 € (un million trois cent vingt mille), correspondant aux préjudices subis pour les faits condamnés déjà identifiés, à titre de provision à valoir sur le montant des dommages-intérêts définitifs qui sera fixé par le Tribunal au titre de l'atteinte au droit patrimonial d'auteur de M. [N] ;
Subsidiairement de ce chef, si l'atteinte aux droits d'auteur de M. [N] n'est pas retenue:
- CONDAMNER solidairement les sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION (FRANCE) et L'Occitane International SA à payer à M. [N] la somme de 1.000.000 € (un million d'euros), correspondant au préjudice subi pour les faits antérieurs au 18 décembre 2018, à titre de provision à valoir sur le montant des dommages-intérêts définitifs qui sera fixé par le tribunal au titre des actes de concurrence déloyale par risque de confusion et par parasitisme commis à son détriment ;
En tout état de cause :
- CONDAMNER solidairement les sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION (FRANCE) et L'Occitane International SA à payer à M. [N] la somme de 100.000 € au titre du préjudice moral subi par M. [N] ;
- ORDONNER LA PUBLICATION du dispositif du jugement à intervenir, dans un délai de dix (10) jours à compter de la signification du jugement à intervenir et sous astreinte de mille euros (1.000€) par jour de retard, sur la page d'accueil des sites Internet exploités, directement ou indirectement, par les sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION (FRANCE) et L'Occitane International SA, et en particulier les sites Internet accessibles à l'adresse etlt;www.[011].cometgt; et etlt;www.[012].cometgt; , la page Facebook et Instagram accessible par www.instagram.com/[08] et https://www.facebook.com/[09]/ », le site Internet https://fr.loccitane.com/, le site compte Instagram https://www.instagram.com/loccitane/ et le compte Facebook https://www.facebook.com/loccitane.fr/, pendant un délai de trois (3) mois ;
- ORDONNER la publication du dispositif du jugement à intervenir, accompagné d'un message objectif et explicatif, dans cinq (5) journaux ou revues au choix de M. [B] [N], en France et/ou à l'international, aux frais avancés des sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION (FRANCE) et L'Occitane International SA, sans que le coût n'excède la somme de trois mille euros (3.000€) hors taxes par insertion ;
- ORDONNER la publication du dispositif du jugement à intervenir, pendant un délai de trois (3) mois, accompagné d'un message objectif et explicatif, dans l'intégralité des boutiques au sein desquelles les produits contrefaisants ont été commercialisés (dont la liste figure en Pièce no4.38 et en Pièce no4.39), sous la forme d'une affiche d'un format minimum de 2 mètres de haut par 2 mètres de large, aux frais des sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION (FRANCE) et L'Occitane International SA et sous astreinte de mille euros (1.000€) par jour de retard ;
- DIRE que Mme ou M. le Président du Tribunal sera compétent pour connaître de la liquidation des astreintes prononcées, conformément aux dispositions de l'article 35 de la loi 91-650 du 9 juillet 1991 ;
- ORDONNER l'exécution provisoire du jugement à intervenir ;
- REJETER l'ensemble des demandes, fins et prétentions des sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION (FRANCE) et L'Occitane International SA;
- CONDAMNER solidairement les sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION (FRANCE) et L'Occitane International SA aux entiers dépens d'instance et à payer, chacune, à M. [B] [N], la somme de 40.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, dont distraction au profit de Maître Anne-Laure Moya-Plana, avocat constitué, sur ses affirmations de droit dans les termes de l'art. 699 du code de procédure civile.
Dans leurs dernières conclusions signifiées le 26 février 2012, les sociétés MetL DISTRIBUTION (FRANCE) et L'OCCITANE INTERNATIONAL demandent au tribunal de :
-Prononcer la nullité du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 19
décembre2018, écarter des débats toutes les pièces saisies lors des
opérations ou qui en sont la suite, notamment les pièces produites par M. de [G] no4.36 à 4.40 et tous les moyens fondés sur
celles-ci ;
- Débouter M. de [G] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;
À titre subsidiaire, dans le cas où la responsabilité des sociétés MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL serait retenue,
-Juger M.de [G] mal fondé en ses demandes
indemnitaires ainsi qu'en sa demande d'expertise ;
À titre infiniment subsidiaire,
- Condamner la société PMJC à garantir pleinement les sociétés MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL de toute éventuelle condamnation ;
Condamner M.de [G] ou, le cas échéant, la société PMJC, à verser aux sociétés MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL la somme de 50.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions notifiées électroniquement le 5 février 2021, la société PMJC demande au tribunal de :
- RECEVOIR la société PMJC en ses conclusions, moyens et prétentions, la dire bien fondée et ce faisant :
SUR LA CONTREFACON
A titre principal
- JUGER que M. [B] [N] ne rapporte pas la preuve de sa qualité d'auteur sur les dessins qu'il revendique,
- JUGER que M. [B] [N] ne rapporte pas la preuve de la titularité de ses droits patrimoniaux sur les dessins qu'il revendique,
En conséquence,
- DECLARER M. [B] [N] irrecevable en l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
A titre subsidiaire,
- JUGER que M. [B] [N] ne rapporte pas la preuve d'une atteinte aux droits patrimoniaux,
- JUGER que M. [B] [N] ne rapporte pas la preuve d'une atteinte aux droits moraux,
En conséquence,
- DEBOUTER M. [B] [N] de l'ensemble de ses demandes ;
A titre infiniment subsidiaire
- RAMENER le montant des condamnations éventuelles à de justes proportions,
- DEBOUTER les sociétés MetL Distribution et L'Occitane International de leurs demandes à l'encontre de la société PMJC au titre de la garantie contractuelle ;
SUR LA CONCURRENCE DELOYALE
- JUGER que M. [B] [N] ne rapporte pas la preuve d'actes distincts de concurrence déloyale et de parasitisme,
En conséquence,
- DEBOUTER M. [B] [N] de l'ensemble de ses demandes ;
EN TOUT ETAT DE CAUSE
- CONDAMNER M. [B] [N] au paiement de la somme de 30.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société PMJC ;
- CONDAMNER M. [B] [N] aux entiers dépens.
L'instruction de l'affaire a été clôturée par une ordonnance du 2 mars 2021.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1o) Sur la nullité du procès-verbal de saisie-contrefaçon
Les sociétés MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL soutiennent que le procès-verbal de saisie-contrefaçon est affecté de nombreux griefs de nullité. Elles font en particulier valoir que le procés-verbal de signification de l'ordonnance ayant autorisé la mesure mentionne des voies de recours erronées, en l'occurrence celles du recours en rétractation de l'article 497 du code de procédure civile, et que cette erreur les a privées d'une voie de recours effectif.
Ces sociétés soutiennent encore que le procès-verbal de saisie est nul comme comportant des mentions incohérentes concernant le début des opérations de saisie, tandis que la requête comportait 970 feuillets, ce qui nécessitait un temps significatif afin de permettre au saisi d'en prendre connaissance. Les défenderesses ajoutent que l'huissier mandaté a dépassé ses pouvoirs en sollicitant, avant même le début de ses opérations un organigramme de la société MetL DISTRIBUTION, ce que ne l'autorisait pas à faire l'ordonnance, puis en exigeant la remise de documents concernant exclusivement la société L'OCCITANE INTERNATIONAL, tels que le contrat de partenariat avec la société PMJC et le chiffre d'affaires à l'étranger du groupe. Elles reprochent également à l'huissier d'avoir, au cours des opérations, pris l'attache de l'avocat du requérant lequel s'est directement adressé à la préposée du saisi, Mme [R], ce que le procès-verbal ne mentionne pas. Les sociétés MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL soutiennent enfin que le procès-verbal de saisie signifié est incomplet ainsi qu'en atteste la communication de l'avocat du requérant à l'occasion de la présente instance.
M. de CASTEBAJAC demande pour sa part au tribunal d'écarter l'ensemble des griefs de nullité du procès-verbal de saisie-contrefaçon invoqués par les sociétés défenderesses. Il fait en effet valoir que le procès-verbal de signification de l'ordonnance sur requête mentionne les dispositions de l'article L.332-2 du code de la propriété intellectuelle, tandis qu'en tout état de cause, la société MetL DISTRIBUTION ne caractérise pas le grief que lui aurait causé la prétendue irrégularité tirée de la mention concomitante de l'article 497.
Le demandeur soutient s'agissant de l'heure de début des opérations que même dans l'hypothèse la plus défavorable, la société MetL DISTRIBUTION a bénéficié de 24 minutes pour prendre connaissance de l'ordonnance, ce qui est considéré par la jurisprudence comme amplement suffisant. Il ajoute que l'huissier a agi dans le strict cadre de la mission autorisée par l'ordonnance, la production de l'organigramme et des statuts ayant été rendue nécessaire par l'absence de collaboration du saisi à la mesure. S'agissant de l'intervention de l'avocat au cours des opérations, il indique verser aux débats un témoignage de Me [C], l'huissier ayant réalisé les opérations, qui démontre que l'intervention de ce dernier s'est limitée à indiquer à l'huissier qu'il devait solliciter le caviardage des pièces remises, et, en cas de refus du saisi, devait les placer entièrement sous séquestre afin de garantir leur confidentialité.
En ce qui concerne enfin la signification du procès-verbal de saisie, M. [N] indique que le différentiel en terme de nombres de feuilles s'explique par le fait que son conseil a pris l'initiative d'imprimer des pièces remises par le saisi sous forme électronique.
a - Sur la mention erronée des voies de recours
La saisie contrefaçon a été autorisée au visa de l'article L.332-1 du code de la propriété intellectuelle, procédure propre au droit d'auteur ayant été très peu atteinte par la transposition de la directive 2004/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle, et qui donne compétence au président du tribunal de grande instance pour délivrer l'ordonnance autorisant une telle saisie.
L'article L.332-2 de ce code dispose en outre que "Dans un délai fixé par voie réglementaire, le saisi ou le tiers saisi peuvent demander au président du tribunal de grande instance de prononcer la mainlevée de la saisie ou d'en cantonner les effets (...).
Le président du tribunal de grande instance statuant en référé (...)"
Il est à cet égard constamment jugé que l'action en mainlevée de la saisie n'est pas une procédure en rétractation : "L'article 497 du code de procédure civile qui permet la modification ou la rétractation de l'ordonnance prise est sans application au cas de saisie-contrefaçon, soumise au seul code de la propriété intellectuelle" (Cass. Civ 1ère, 19 mai 1998, pourvoi no96-19.225 ; Cass. Civ 1ère, 30 mai 2000, pourvoi no97-16.548). Ce code ne prévoit en effet expressément comme voie de recours que la demande en mainlevée ou en cantonnement qui doit être engagée dans les délais précis prévus à l'article R.332-3 du code de la propriété intellectuelle.
Ceci étant, le défaut de mention des voies de recours est une nullité de forme qui suppose, pour pouvoir invalider la saisie, la démonstration d'un grief (Cass. Com., 14 janvier 2003, pourvoi no01-01.759 ; Cass. Civ.1ère, 8 novembre 2017, pourvoi no 16-24.212).
En l'occurrence, outre que les dispositions de l'article L.332-2 du code de la propriété intellectuelle sont citées par le procès-verbal de signification de l'ordonnance du 4 décembre 2018, de sorte que les sociétés MetL DISTRIBUTION FRANCE et L'OCCITANE INTERNATIONAL étaient informées du délai "fixé par voie réglementaire" pour agir en mainlevée, ces dernières n'allèguent pas avoir saisi hors délai le président du tribunal de grande instance.
Elles ne démontrent donc l'existence d'aucun grief tiré de la mention erronée de l'article 497 du code de procédure civile sur le procès-verbal de signification de l'ordonnance ayant autorisé la saisie.
b - Sur l'heure de début des opérations
Il résulte des mentions du procès-verbal de saisie-contrefaçon que l'huissier s'est présenté à 8h49 au siège de la société MetL DISTRIBUTION, et que ce n'est qu'à 9h30, après qu'a été jointe Mme [Y] du service juridique de L'OCCITANE INTERNATIONAL dont le siège se trouve en Suisse, que Mme [R], directeur financier de MetL LABORATOIRE, a été déclarée habilitée à représenter la société MetL DISTRIBUTION pour les opérations de saisie-contrefaçon, en l'absence des dirigeants de cette dernière société le 19 décembre 2018.
Selon les mentions de ce même procès-verbal, les opérations ont débuté à 10 heures.
La société MetL DISTRIBUTION a donc disposé d'un délai de 30 minutes, et même davantage si l'on inclut le temps de l'appel téléphonique à Mme [Y], ce qui apparaît suffisant pour permettre au saisi de prendre connaissance des termes de l'ordonnance et de la requête, et de prendre les dispositions et conseils utiles avant le début des opérations, peu important si ce délai ne laissait pas au saisi le temps de prendre connaissance de l'ensemble des pièces ayant justifié l'octroi de l'autorisation et qui faisaient partie des 970 feuillets dont copie lui avait été laissée lors de la signification.
Il n'est donc justifié d'aucune irrégularité de ce chef.
c - Sur le dépassement par l'huissier de ses pouvoirs
Conformément aux termes de l'ordonnance l'huissier était autorisé à poser au saisi toutes questions utiles à l'accomplissement de sa mission, ainsi qu'à solliciter la production de tous éléments propres à établir l'origine et l'étendue de la contrefaçon, et ce, conformément aux dispositions de l'article L.332-1-1 du code de la propriété intellectuelle interprété à la lumière des articles 6 et 7 de la Directive 2004/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle.
En l'occurrence, les atermoiements constatés par l'huissier pour la désignation d'un représentant de la société MetL DISTRIBUTION justifiait pleinement qu'il sollicite un organigramme de cette société, puis à défaut d'un tel document, ses statuts. Pour le surplus les éléments réclamés correspondaient expressément aux termes de l'ordonnance.
Il n'y a donc pas davantage d'irrégularité de ce chef.
d - Sur l'intervention de l'avocat du requérant
Il résulte du témoignage de l'huissier que l'intervention de l'avocat de M. [N], appelé par téléphone par l'huissier au cours des opérations face à la difficulté posée par la confidentialité des échanges, soulevée par le saisi, alors qu'il était autorisé à les saisir, s'est limitée à suggérer le caviardage de certaines pièces et, in fine, le placement de l'ensemble des correspondances saisies sous séquestre, dans l'intérêt bien compris du saisi.
Il n'est donc justifié d'aucune irrégularité de ce chef.
e - Sur la signification du procès-verbal de saisie-contrefaçon
Le procès-verbal se compose de 21 feuilles, des pièces remises en mains propres à l'huissier lors des opérations de saisie et listées en page 17, ainsi que d'une clé USB "confidentielle".
Ce sont ces pièces listées en page 17 que l'avocat du requérant a imprimé dans le cadre de la présente instance aux fins de communication au conseil de la partie adverse.
Il en résulte que le nombre de feuillets composant le procès-verbal de saisie-contrefaçon est connu et l'absence de nullité du procès-verbal de saisie-contrefaçon.
2o) Sur la titularité des droits de M. [N]
La société PMJC conclut à l'irrecevabilité des demandes de M. [N], faute pour ce dernier de rapporter la preuve de sa qualité d'auteur des oeuvres sur lesquelles il revendique des droits. Elle rappelle que toutes les demandes présentées en référé par le demandeur ont été rejetées pour ce motif en raison de ses droits concurrents sur l'ensemble des créations réalisées par le demandeur entre 1978 et 2011. La société PMJC fait ainsi valoir que M. [N] a cédé à sa société l'ensemble des droits de propriété intellectuelle sur ses créations, lesquelles ont été cédées à la société PMJC dans le cadre de la cession des actifs de cette société autorisée par le tribunal de commerce. Elle ajoute que les droits sur les créations réalisées dans le cadre du contrat de prestation de services entre 2011 et 2015 lui ont été directement cédées par le demandeur.
La société PMJC en déduit que, dès lors qu'aucune des oeuvres invoquées n'a date certaine, il n'est pas possible de retenir qu'elle ne serait pas la réelle titulaire des droits d'auteur en vertu des contrats ayant lié les parties et des différentes cessions de droit intervenues selon elle depuis 1978.
M. [N] conclut à la parfaite recevabilité de ses demandes. Il indique qu'aucune des oeuvres sur laquelle il revendique des droits n'a été réalisée dans le cadre de ses fonctions, pour sa société ou dans le cadre du contrat de prestation de service, mais qu'elles l'ont toutes été dans le cadre d'activités personnelles. Il ajoute que la société PMJC, qui se contente d'observations abstraites ne produit aux débats aucune archive lui appartenant et qu'elle aurait cédée à la société L'OCCITANE INTERNATIONAL et qu'en tout état de cause, la société PMJC n'avait aucun droit d'adaptation des oeuvres acquises et encore moins de céder ces adaptations en faisant usage des marques à des fins autres que celles pour lesquelles elles lui ont été cédées, à savoir la commercialisation d'articles d'habillement.
Sur ce,
a - Sur la qualité d'auteur de M. [N] :
Aux termes de l'article L.113-1 du code de la propriété intellectuelle, "La qualité d'auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l'oeuvre est divulguée."
En l'occurrence, M. [N] justifie de la divulgation, sous son nom, des oeuvres suivantes:
1 - oeuvre publiée dans l'ouvrage intitulé "[B] [N]" paru aux éditions Aveline en novembre 1993 :
2 - Oeuvre publiée dans l'ouvrage intitulé "Le grand Armorial équestre de la Toison d'Or" par [U] [O] et [B] [N] et créditant M. [N] pour l'ensemble des dessins "originaux" paru aux éditions du Seuil en 2017 :
3 - fresque réalisée pour le centre commercial Cidade Jardim de Sao Paulo en novembre 2017 pour les fêtes de Noël et extrait de l'invitation à l'homage rendu à l'artiste le 27 novembre 2017:
4 - Timbre français :
5 - Extrait du compte Instagram du demandeur du 24 mai 2017 :
6 - Extrait du compte Instagram du demandeur du 24 mars 2018 :
Toutes ces oeuvres ont en commun d'être signées de l'auteur et d'avoir été divulguées sous son nom, ainsi que d'avoir date certaine, s'agissant de publications dans des ouvrages, d'une oeuvre exposée sur le domaine public, de publications sur les réseaux sociaux, et même d'un timbre. Aussi, pour ces oeuvres, M. [N] justifie d'une divulgation sous son nom ayant date certaine et de sa qualité d'auteur.
b - Sur la cession de droits :
A l'exception de la première et de la quatrième (timbre français), aucune création n'est antérieure à l'année 2017.
La première création date de 1993.
Il s'agit d'un extrait d'un livre consacré à l'oeuvre du demandeur et illustrant la thématique religieuse récurrente de celle-ci.
En supposant que l'accord de 2004 versé aux débats par la société PMJC (pièce PMJC no3) s'applique à cette création (ce qui est douteux vu sa date), elle se trouve nécessairement exclue de la cession consentie à la société Marchpole constatée par cet accord, ne se rapportant pas à un produit créé, fabriqué, promu ou vendu par la société "[B] [N] SA" (dernier alinéa de l'article 2.1.11 de ce contrat) dans le cadre de son activité de création d'articles d'habillement, d'accessoires, parfum, bijoux, fourrures, meubles, articles ménagers et autres "produits de consommation" (article 3 du préambule). Elle n'a donc pas été cédée à cette société aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la société PMJC.
De la même manière, en ce qui concerne la quatrième oeuvre, créée en 2014, il est rappelé que les droits des parties sont déterminés par le protocole de prestation de services du 21 juillet 2011.
Aux termes de l'article 3 de ce contrat : "La société a la propriété, au sens des dispositions du code de la propriété intellectuelle, des prérogatives patrimoniales du droit d'auteur portant sur les dessins et modèles créés dans le cadre de l'exécution du contrat par M. [B] [N] et dans le cadre des activités. La société aura le droit de procéder à toute adaptation d'ordre technique, les adaptations d'ordre esthétique étant soumises à la validation de M. [B] [N]." (Le soulignement est le fait du tribunal)
L'article 2.3 distingue les "activités" des "activités dérogatoires", soumises à un régime différent. Les secondes concernent les activités du demandeur dans le cadre des "arts plastiques et graphiques, (...), l'édition, la littérature, le théâtre, la musique, la scénographie, l'activité de design de biens meubles ou immeubles, l'architecture, la direction artistique, hors mode, d'événements publics ou privés, les alcools et spiritueux", dès lors qu'elles ne sont pas financées par la société PMJC.
Il résulte de cette distinction que M. [N] a cédé à la société PMJC ses droits patrimoniaux d'auteur sur les créations réalisées dans le cadre de ses "activités" de directeur artistique de la maison de mode, entre juillet 2011 et décembre 2015, à l'exclusion des droits portant sur ses créations réalisées dans le cadre de ses "activités dérogatoires". Il a également cédé à la société PMJC le droit de déterminer les procédés de fabrication aux fins d'obtention du résultat qu'il a créé.
M. [N] a néanmoins conservé (pour les oeuvres réalisées dans le cadre de ses "activités") le droit d'adaptation esthétique de l'ensemble de ses oeuvres, c'est à dire le droit de procéder à des adaptations de nature à modifier l'apparence visuelle et l'harmonie de ses créations.
Cette disposition contractuelle, qui réserve à l'auteur le droit au respect de son oeuvre, est conforme à l'article L.121-1 du code de la propriété intellectuelle aux termes duquel " L'auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son oeuvre.
Ce droit est attaché à sa personne.
Il est perpétuel, inaliénable et imprescriptible."
La société PMJC qui n'allègue pas avoir financé la création du timbre n'a donc aucun droit sur cette création qui entre à l'évidence dans le cadre des activités dérogatoires.
La société PMJC n'est en outre nullement en droit de modifier l'apparence des créations de M. [N] réalisées entre 2011 et 2015. La société PMJC est encore moins en droit de reproduire les créations réalisées par le demandeur après le 1er janvier 2016.
Le tribunal observe en outre que la société PMJC ne verse aux débats aucune oeuvre qui appartiendrait aux archives de la société du demandeur acquises en 2011 et qu'elle aurait (valablement) cédé à la société L'OCCITANE INTERNATIONAL.
En l'état des éléments de preuve ayant date certaine versés aux débats par M. [N], il y a lieu de retenir que celui-ci établit être le seul titulaire des droits patrimoniaux et moraux d'auteur sur les oeuvres pour lesquelles il sollicite le bénéfice de la protection par le droit d'auteur et l'absence de cession des droits sur ces oeuvres toutes crées en marge de ses activités sociales ou contractuelles.
3o) Sur l'originalité
La société PMJC conteste l'originalité de ces oeuvres, telle que revendiquée par le demandeur. Elle fait notamment valoir que M. [N], ainsi que l'a déjà jugé le juge des référés de ce tribunal, ne saurait s'arroger un monopole sur des éléments aussi communs que des coeurs, des yeux, des étoiles, des cadeaux ou des phylactères.
Les sociétés MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL ajoutent que des artistes tels que Matisse ou Picasso ont, bien avant le demandeur, réalisé des dessins reproduisant des visages au trait noir épuré sur lesquels se superposent des aplats de couleurs primaires, ce que le demandeur a au demeurant lui-même admis dans le cadre d'interviews, de même que ces artistes constituaient une source d'inspiration pour lui, inspiration sur laquelle il ne saurait aujourd'hui tenter de s'arroger un monopole.
Sur ce,
Conformément à l'article L.111-1 du code de la propriété intellectuelle, l'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous comportant des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d'ordre patrimonial.
En application de l'article L.112-1 du même code, ce droit appartient à l'auteur de toute oeuvre de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination.
La protection d'une oeuvre de l'esprit est acquise à son auteur sans formalité et du seul fait de la création d'une forme originale en ce sens qu'elle porte l'empreinte de la personnalité de son auteur et n'est pas la banale reprise d'un fonds commun non appropriable.
Dans ce cadre toutefois, il appartient à celui qui se prévaut d'un droit d'auteur dont l'existence est contestée de définir et d'expliciter les contours de l'originalité qu'il allègue. En effet, seul l'auteur, dont le juge ne peut suppléer la carence, est en mesure d'identifier les éléments traduisant sa personnalité et qui justifient son monopole.
Au cas particulier, M. [N] revendique la création d'un univers poétique dans lequel des personnages ainsi que des animaux sont réalisés d'un simple trait au feutre noir auxquels s'ajoute l'emploi quasi exclusif des couleurs jaune, rouge et bleu, caractéristique du travail de M. [N], de même que la création d'un environnement d'étoiles et de coeurs autour des personnages.
Le demandeur précise que l'oeuvre divulguée en 1993 est révélatrice de l'influence de la thématique religieuse dans son travail, symbolisé ici par la présence d'anges portant une couronne dans un univers étoilé, les étoiles, de même que la lune représentée dans cette oeuvre, étant irrégulières et reliées entre elles par des trais droits évoquant la fragmentation des morceaux de verre dans les vitraux.
La deuxième oeuvre est quant à elle significative de l'influence du Moyen-âge dans le travail du demandeur, laquelle se retrouve dans l'usage de phylactères, toujours porteurs de messages en lien avec le dessin dans lequel ils s'insèrent, systématiquement réalisés de manière irrégulière, à la main, en lettres capitales de couleur noire. La présence de phylactères se retrouve dans les oeuvres 3 et 7 reproduites ci-dessus. Dans la deuxième oeuvre encore, le personnage utilise sa main d'une manière également propre à l'oeuvre du demandeur, à savoir tenant entre le pouce et l'index un élément "à peine tenu" afin de le mettre en valeur. Le dessin est, comme dans l'ensemble de son oeuvre, réalisé d'un trait noir et épuré. Ces spécificités se retrouvent dans les dessins 5, 6 et 7.
L'oeuvre no3 est de la même manière réalisée au trait noir et épuré avec des aplats de couleurs primaires. Elle révèle le dessin naïf et enfantin de deux ours portant des ailes d'anges et tenant entre leurs "mains" un phylactère porteur d'un message de Noël au dessus d'un environnement urbain sur un fond de ciel étoilé, un oiseau étant également représenté tenant dans son bec un coeur. Le demandeur précise que les représentations d'oiseaux sont très présentes dans son oeuvre, toujours dessinés de cette manière, l'animal portant toujours un présent ou un phylactère porteur d'un message.
Ces oeuvres portent incontestablement l'empreinte de la personnalité de M.[N].
Il convient également d'observer qu'il n'est justifié d'aucune "antériorité" reproduisant les combinaisons arbitraires revendiquées ici par le demandeur.
L'originalité des oeuvres ainsi explicitée sera donc retenue par le tribunal.
4o) Sur la contrefaçon de droits d'auteur
Les sociétés MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL concluent au rejet des demandes au titre de la contrefaçon faisant valoir qu'il ne peut lui être reproché d'avoir reproduit le "style" de M. [N]. Elles soutiennent à cet égard qu'à l'instar des idées, le style est de libre parcours, qui plus est lorsque ce style est lui-même emprunté à d'autres artistes plus anciens et qu'il est "simple et épuré", fait d'étoiles, de coeur et de phylactères, ainsi que le revendique lui-même le demandeur.
La société PMJC conclut de la même manière au rejet des demandes soutenant qu'il ne peut lui être reproché d'avoir reproduit le détail d'un dessin, utilisé avec d'autres détails de dessins, sauf à reconnaître au demandeur le dropit de s'approprier le style qu'il estime être le sien, ce qui est constamment condamné par les tribunaux.
Sur ce,
a - Sur la reproduction non autorisée
Aux termes de l'article L.123-4 du code de la propriété intellectuelle, "Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l'adaptation ou la transformation, l'arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque."
Le juge statue en fonction des ressemblances (Cass. Civ. 1ère, 9 avril 2015, pourvoi no23-28.768) et non en fonction des différences.
Il convient donc de comparer les oeuvres reproduites ci-dessus avec les conditionnements des produits proposés par les sociétés MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL:
Le tribunal ne peut que constater que ces produits reproduisent, en l'adaptant, la combinaison originale et arbitraire constituée du ciel étoilé dans lequel des étoiles de style simple, dessinées d'un trait d'encre noire, de manière irrégulière, sont reliées entre elles par des lignes droites. La ressemblance avec le dessin original de M. [N] (ci-dessus oeuvre no1) est encore aggravée par l'ajout de représentations de lunes, de coeurs, de mains et de phylactères avec leurs messages manuscrits, propres au travail de M. [N] décrit ci-dessus, ainsi que par l'emploi exclusif de couleurs primaires, que l'on retrouve dans tous les visuels divulgués.
La contrefaçon, caractérisée par une adaptation non autorisée des dessins précisément identifiés de M. [N], apparaît donc établie, l'adaptation pouvant porter sur la combinaison de plusieurs éléments caractéristiques des oeuvres de l'auteur protégées au titre du droit d'auteur.
b - Sur l'apparence de régularité
Les sociétés MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL soulignent qu'elles ont agi de bonne foi en contractant avec une société que tout désignait comme la seule titulaire des droits patrimoniaux d'auteur sur les créations de M. [N].
Sur ce,
Il est constamment jugé qu'en matière de contrefaçon la bonne foi est indifférente (Cass. Civ. 1ère, 13 novembre 2008, pourvoi no06-19.021, Bull. 2008, I, no258 ; Cass. Civ. 1ère, 3 décembre 2002, pourvoi no 00-20.332, Bull. 2002, I, no 292 ; Cass. Civ. 1ère, 29 mai 2001, pourvoi no 99-15.284, Bull. 2001, I, no 154).
Le moyen tiré de l'apparence de régularité de la cession consentie par la société PMJC ne peut donc qu'être écarté ce d'autant plus qu'en l'occurrence, les sociétés MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL ont été très tôt informées du désaccord du demandeur quant au lancement de cette campagne.
5o) Sur la concurrence déloyale et parasitaire
M. [N] reproche à ce titre à la société PMJC de s'être appropriée son univers artistique, jusqu'à son écriture, agissant comme si elle disposait de droits sur l'intégralité de l'oeuvre du demandeur, quelle que soit la date ou les circonstance de sa création, aux fins de créer la plus grande confusion entre elle-même et l'artiste et ainsi se placer dans son sillage, sans bourse délier, et en particulier sans tirer les conséquences de droit de la cessation de leurs relations contractuelles.
La société PMJC conclut au rejet de cette demande. Elle fait valoir que le demandeur ne rapporte la preuve d'aucun fait distinct des actes de contrefaçon.
Sur ce,
Aux termes des articles 1240 et 1241 du code civil, "Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer." et "Chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence."
Au visa de ces deux textes, il est constamment jugé que la liberté du commerce autorise tout acteur économique à attirer vers lui la clientèle de son concurrent. Aussi, l'imitation d'un concurrent n'est, en tant que telle, pas fautive, à moins que ne soient utilisés des procédés illicites ou contraires aux usages loyaux du commerce.
A cet égard, les procédés consistant, par imitation des signes d'un concurrent, à créer dans l'esprit du public une confusion de nature à tromper la clientèle et la détourner, caractérisent des actes de concurrence déloyale.
L'appréciation de la faute doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée des faits en prenant en compte le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de l'imitation, l'ancienneté du signe imité, l'originalité ou la notoriété du signe copié.
Est de la même manière fautif le fait, pour un agent économique, de s'immiscer dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire particulier (Cass. Com., 26 janvier 1999, pourvoi no 96-22.457 ; Cass. Com., 10 septembre 2013, pourvoi no 12-20.933), ce qui constitue un acte de parasitisme.
Si M. [N] n'est pas fondé à reprocher à la société PMJC d'associer le nom "[G]" à divers projets, puisque les actifs de la société éponyme lui ont été cédés dans le cadre de la procédure collective rappelée plus haut, il doit être précisé que cette cession n'autorise pas pour autant la société PMJC à reproduire en les adaptant les oeuvres, actuelles comme passées, de son ancien partenaire et à divulguer ces adaptations en faisant croire au plublic, par l'usage des marques, que le demandeur en est l'auteur.
A cet égard, le fait de suggérer que M. [N] serait le créateur des dessins en cause et qu'il aurait accepté de s'associer au lancement de la vente de ces produits de soin, ce qui n'est pas le cas et alors que lui-même, dans le cadre de ses activités personnelles, a développé des partenariats avec des marques, crée un risque de confusion dans l'esprit du public et de ses partenaires.
De la même manière, le fait que la société PMJC présente les dessins figurant sur les produits qu'elle commercialise comme étant de la main de [B] [N] constitue également des actes parasitaires, la société PMJC s'abstenant de tirer les conséquences de droit résultant de la fin de leur relation contractuelle et, ainsi, de tirer profit, de façon injustifiée, du travail du demandeur et de la signature d'un artiste connu du grand public.
Ces faits sont distincts de ceux retenus au titre de la contrefaçon de droit d'auteur. Ils justifient l'allocation au demandeur d'une somme de 100.000 euros à titre de dommages-intérêts compte tenu du caractère massif de la distribution des produits litigieux (parfaitement connue de la société PMJC) et de l'ampleur de la communication ayant accompagné cette distribution (parfaitement assumée par les sociétés MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL ainsi qu'en attestent les courriels de ses dirigeants saisis dans le cadre des opérations de saisie-contrefaçon : "Nous avons vérifié s'il peut arrêter la campagne en référé ce qui n'est pas le cas. Mais il faut savoir que nous aurons un litige à gérer après la campagne").
6o) Sur la réparation des préjudices résultant de la contrefaçon
Selon l'article L.331-1-3 du code de la propriété intellectuelle, "Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :
1o Les conséquences économiques négatives de l'atteinte aux droits, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
2o Le préjudice moral causé à cette dernière ;
3o Et les bénéfices réalisés par l'auteur de l'atteinte aux droits, y compris les économies d'investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de l'atteinte aux droits.
Toutefois, la juridiction peut, à titre d'alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si l'auteur de l'atteinte avait demandé l'autorisation d'utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n'est pas exclusive de l'indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée."
Les opérations de saisie-contrefaçon ont révélé qu'à la date du 19 décembre 2018, la masse contrefaisante constituait un chiffre d'affaires hors taxes de :
- 5.110.311€ au titre des ventes réalisées par la vente au détail,
- 2.720.887,15€ au titre des ventes réalisées hors retail,
soit un total de l'ordre de 7,8 millions d'euros.
Contrairement à ce qu'affirment les défenderesses, il n'est pas pertinent de distinguer les produits classiques (vendus dans les coffrets contrefaisants comme le montrent les visuels reproduits ci-dessus) pour ne retenir que les produits reproduisant eux-mêmes les dessins contrefaisants, dès lors qu'ainsi que le relève à juste titre le demandeur, en période de fêtes, ces illustrations sont loin de revêtir un caractère accessoire mais sont au contraire déterminants pour la clientèle en recherche de cadeaux à faire.
S'agissant du taux de redevance, il n'est pas contesté autrement que par voie d'affirmations, qu'il est généralement et usuellement compris, dans le secteur concerné, entre 5 et 10% du chiffre d'affaires net réalisé par la société licenciée. Conformément aux termes de l'article L. 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle, il convient de majorer ce taux de redevance afin de le porter à 12%.
Il convient donc d'allouer au demandeur, à titre provisionnel, la somme de (7.831.198,15 € × 12 / 100) 939.743,78 €, arrondie à 940.000€ en réparation de l'atteinte à son droit patrimonial causée par la commercialisation massive des produits litigieux.
Le demandeur a subi un indéniable préjudice moral résultant des atteintes portées à son oeuvre, lesquelles se sont trouvées dénaturées (en particulier par la perte de la tonalité spirituelle et religieuse du dessin original), qui sera réparé par le versement de la somme de 60.000 euros.
L'entier préjudice subi reste à parfaire s'agissant des produits commercialisés après le 19 décembre 2018 et exportés depuis le territoire national, sans pour autant qu'il y ait lieu à expertise de ce chef. Ces éléments seront donc transmis au demandeur dans le cadre de son droit d'information prévu à l'article L.331-1-2 du code de la propriété intellectuelle et les parties renvoyées à la détermination amiable du préjudice selon les modalités précisées au dispositif de la présente décision.
Il sera fait droit à la demande d'interdiction selon les modalités précisées au dispositif de la présente décision, ainsi qu'à la demande de publication de la présente décision conformément aux dispositions de l'article L.331-1-4 du code de la propriété intellectuelle.
7o) Sur les autres demandes
a - Sur la garantie de la société PMJC
Conformément aux dispositions de l'article C du contrat de partenariat, il sera fait droit à la demande de garantie présentée par les sociétés MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL.
Celle-ci sera cependant limitée à 50% de l'ensemble des condamnations prononcées contre ces sociétés, qui, informées du risque encouru par les lettres et l'action enagée en urgence par M. [N], ont fait le choix assumé de poursuivre la commercialisation massive des produits contrefaisants sans rien changer à leur communication ni à la présentation de leurs produits.
Le tribunal observe que la société PMJC ne sollicite pas elle-même la garantie de ses co-défenderesses.
b - Sur l'article 700 et les dépens
Parties perdantes au sens de l'article 696 du code de procédure civile, les sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL seront condamnées in solidum aux dépens, ainsi qu'à payer à M. [B] [N] la somme de 90.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
c - Sur l'exécution provisoire
Nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire, l'exécution provisoire sera ordonnée sauf en ce qui concerne la publication du jugement compte tenu de son caractère irrémédiable.
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en premier ressort,
Le tribunal,
ECARTE les moyens de nullité des opérations de saisie-contrefaçon soulevés par les sociétés MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL ;
DIT qu'en commercialisant et en assurant la promotion d'articles revêtus d'adaptations d'oeuvres de M. [N], les sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL ont commis des actes de contrefaçon de droits d'auteur ;
DIT que les circonstances dans lesquelles les sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL ont réalisé la campagne de Noël 2018 des produits "L'Occitane" caractérisent des actes de concurrence déloyale et parasitaire ;
FAIT en tant que de besoin défense aux sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL de commercialiser les produits litigieux objet du partenariat, et ce, sous astreinte de cinq cent euros par infraction constatée (c'est à dire par produit contrefaisant les oeuvres de M. [N]) courant à l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la signification de la présente décision ;
ORDONNE aux sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL, de retirer des circuits de distribution les produits objet du partenariat litigieux, et ce, sous astreinte de cinq cent euros par infraction constatée (c'est à dire par produit contrefaisant les oeuvres de M. [N]) courant à l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la signification de la présente décision ;
ENJOINT aux sociétés MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL de communiquer à M. [N] tous éléments certifiés par un commissaire au compte ou un expert comptable attestant :
* des quantités totales de produits issus du partenariat litigieux (i) commercialisés en France par les sociétés MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL et (ii) fabriqués ou conditionnés en France et exportés à l'étranger par ces mêmes sociétés, entre le 18 décembre 2018 jusqu'à la date de la présente décsion ;
* du chiffre d'affaires correspondant ;
RENVOIE les parties à la détermination amiable du préjudice et, à défaut d'accord, par le tribunal saisi par nouvelle assignation ;
CONDAMNE in solidum les sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL à payer à M. [N] la somme provisionnelle, à valoir sur l'indemnisation définitive de son préjudice, de 940.000 euros, en réparation de son préjudice patrimonial ;
CONDAMNE in solidum les sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL à payer à M. [N] la somme de 60.000 euros en réparation de son préjudice moral ;
CONDAMNE in solidum les sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL à payer à M. [N] la somme de 100.000 € en réparation du préjudice causé par les agissements de concurrence déloyale et parasitaire commis ;
ORDONNE LA PUBLICATION du dispositif du présent jugement pendant une durée de deux mois, sur la page d'accueil des sites Internet exploités, directement ou indirectement, par les sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL, et en particulier les sites Internet accessibles aux adresses etlt;www.[011].cometgt; et etlt;www.[012].cometgt; , les pages Facebook et Instagram accessibles par www.instagram.[010] et https://www.facebook.com/[09]/ », le site Internet "loccitane.com", le compte Instagram https://www.instagram.com/loccitane/ et le compte Facebook https://www.facebook.com/loccitane.fr/, et ce sous astreinte de mille euros (1.000€) par jour de retard à exécuter le présent jugement courant à l'expiration d'un délai de dix jours suivant le jour où le présent jugement sera passé en force de chose jugée ;
DIT que le tribunal se réserve la liquidation des astreintes prononcées ;
CONDAMNE in solidum les sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL aux dépens et autorise Maître [E] [V] à recouvrer directement ceux dont elle aurait fait l'avance sans avoir reçu provision conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
CONDAMNE in solidum les sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL à payer à M. [B] [N], la somme de 90.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société PMJC à garantir les sociétés PMJC, MetL DISTRIBUTION et L'OCCITANE INTERNATIONAL des condamnations prononcées contre elles à hauteur de 50 % ;
ORDONNE l'exécution provisoire de la présente décision sauf en ce qui concerne les mesures de publication.
Fait et jugé à Paris le 18 novembre 2021.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE