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27/06/2008 | FRANCE | N°08/03841

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Chambre civile 3, 27 juin 2008, 08/03841


T R I B U N A L
D E GRANDE
I N S T A N C E
D E P A R I S

3ème chambre 2ème section

No RG :
08 / 03841

No MINUTE :

Assignation du :
07 Mars 2008

JUGEMENT
rendu le 27 Juin 2008

DEMANDERESSE

Madame CHristine X...
...
94220 CHARENTON LE PONT

représentée par Me Dominique KERNINON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire D. 1546

DÉFENDEUR

Monsieur Frédéric Y...
...
75004 PARIS

défaillant

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Véronique RENARD, Vice-Président, signat

aire de la décision
Sophie CANAS, Juge
Guillaume MEUNIER, Juge

assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision

DEBATS

A l'audience du 3...

T R I B U N A L
D E GRANDE
I N S T A N C E
D E P A R I S

3ème chambre 2ème section

No RG :
08 / 03841

No MINUTE :

Assignation du :
07 Mars 2008

JUGEMENT
rendu le 27 Juin 2008

DEMANDERESSE

Madame CHristine X...
...
94220 CHARENTON LE PONT

représentée par Me Dominique KERNINON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire D. 1546

DÉFENDEUR

Monsieur Frédéric Y...
...
75004 PARIS

défaillant

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Véronique RENARD, Vice-Président, signataire de la décision
Sophie CANAS, Juge
Guillaume MEUNIER, Juge

assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision

DEBATS

A l'audience du 30 Mai 2008
tenue en audience publique

JUGEMENT

Prononcé par remise de la décision au greffe
Réputé contradictoire
en premier ressort

Faits, procédure et prétention des parties

Madame X... et Monsieur Y... sont co-inventeurs d'un dispositif permettant d'associer des effets sensoriels à la diffusion de programmes audiovisuels, objet d'une demande de brevet français no2 884 096 déposée auprès de l'INPI le 30 août 2005 ayant abouti le 17 août 2007 à la délivrance du titre no05 50823.

Ils ont en outre déposé, le 30 mars 2006, une demande de brevet européen sous priorité du précédent titre, publiée le 4 octobre 2006 sous le noEP 1 708 501, portant sur un " Procédé de génération d'un signal multimédia, signal multimédia, procédé et dispositif de restitution, moyens de stockage et programmes d'ordinateur correspondants ".

Par contrat du 21 mai 2005, les co-inventeurs sont convenus être copropriétaires à hauteur de 50 % chacun des " droits de propriété industrielle protégeant l'invention tant en France qu'à l'étranger ", ainsi que des " perfectionnements et du savoir-faire " se rapportant à l'invention, chacun d'entre eux devant supporter à hauteur de 50 % " tous les frais et charges que nécessitent la protection, l'exploitation, le maintien en vigueur, les procédures d'examen et de délivrance, la défense dans le cadre d'une action amiable ou judiciaire " du brevet susvisé, étant précisé que " l'absence de prise en charge de sa quote-part de frais par l'une des parties tel que prévue (...) sera réputée correspondre à une renonciation, en l'absence de régularisation dans le délai d'un mois à compter de la notification par la partie qui aura assumé l'intégralité des frais ", la partie " renonçante " s'engageant alors " à donner toutes les signatures et à participer à toutes les démarches nécessaires à l'accomplissement du transfert des droits en question ".

Madame X... expose qu'à compter du 16 mai 2006, Monsieur Y... n'a plus donné signe de vie, de sorte qu'elle a dû assumer seule le coût financier nécessaire à la conservation et à l'évolution du brevet dont s'agit.

Après diverses notifications, dont la dernière réalisée par huissier de justice les 14, 19 et 21 novembre 2007, Madame X..., dûment autorisée par ordonnance de Monsieur le Président du Tribunal de grande instance de Paris du 5 mars 2008, a par exploit d'huissier du 7 mars 2008 assigné Monsieur Y... à l'audience de jour fixe du 18 avril 2008 de la juridiction de céans.

Le réceptionnaire de l'acte introductif d'instance s'avérant un homonyme, l'examen de l'affaire a été renvoyé à l'audience du 30 mai 2008 afin de permettre à la demanderesse de citer son cocontractant.

Une nouvelle assignation a été délivrée le 20 mai 2008, et a fait l'objet d'un enrôlement distinct.

Madame X..., ayant développé ses prétentions lors de l'audience du 30 mai 2008, demande au Tribunal :

- de constater la défaillance de Monsieur Y... dans l'exécution de ses obligations contractuelles, et la persistance de la dite défaillance malgré la mise en demeure lui ayant été adressée le 21 novembre 2007,
- de prononcer la déchéance de Monsieur Y... de tous ses droits sur l'invention intitulée en France " Système permettant d'associer des effets sensoriels à la diffusion de programmes audiovisuels " objet du brevet publié le 17 août 2007 sous le noFR 2 884 096, et en Europe " Procédé de génération d'un signal multimédia, signal multimédia, procédé et dispositif de restitution, moyens de stockage et programmes d'ordinateur correspondant " objet de la demande de brevet européen publiée le 4 octobre 2006 sous le noEP 1 708 501,
- de prononcer la déchéance de Monsieur Y... de tous ses droits sur les brevets objets du contrat de copropriété tant en France (brevet publié le 17 août sous le no2 884 096) que dans les pays désignés dans la demande de brevet européen publiée le 4 octobre 2006 sous le no1 708 501,
- en conséquence de dire et juger que Monsieur Y... est déchu de sa demande de brevet français déposée le 30 mars 2005 sous le no05 5082, " de ses droits de copropriété dans le contrat de copropriété " du 21 mai 2005, du titre de propriété industrielle sur le brevet français délivré le 17 août 2007 et publié au BOPI le même jour sous le no2 844 096, de sa demande de brevet européen déposée le 30 mars 2006 sous le no06 112 043 2, et de tout droit à l'obtention du brevet européen susceptible d'en résulter,
- de dire et juger que Madame X... disposera seule de la faculté d'accomplir les démarches nécessaires, tant en France qu'à l'étranger, pour parvenir à se rendre seule titulaire des droits sur l'invention,
- d'ordonner la publication du jugement au Bulletin officiel de la propriété industrielle et au Bulletin Européen des Brevets,
- de condamner Monsieur Y... à payer à Madame X... la somme de 2. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- d'ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir,
- de condamner Monsieur Y... aux entiers dépens.

Monsieur Y..., cité conformément aux dispositions de l'article 659 du Code de procédure civile, n'a pas constitué avocat. La présente décision, susceptible d'appel, sera réputée contradictoire.

Motifs de la décision

A titre liminaire

Attendu qu'une bonne administration de la justice justifie d'ordonner la jonction des affaires no0807445 et no0803841 sous ce dernier numéro.

I. Sur les demandes principales

Attendu que l'article 472 du Code de procédure civile dispose que si le défendeur ne comparaît, il est néanmoins statué au fond, et que le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée ;

Attendu qu'il résulte des termes de l'article L. 613-32 du Code de la propriété intellectuelle que les copropriétaires d'une demande de brevet ou d'un brevet peuvent à tout moment déroger aux règles régissant la copropriété du titre, établies par les articles L. 613-29 à L. 613-31 du même Code, en établissant un règlement de copropriété ;

Attendu qu'en vertu de l'article 1134 du Code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi ;

Attendu qu'il résulte du contrat du 21 mai 2005 conclu entre les parties :

- que ces dernières sont co-inventeurs du système " objet de la demande de brevet français no05 50823 du 30 mars 2005 ", et sont, notamment, chacune " co-titulaires des droits de propriété industrielle protégeant l'invention tant en France qu'à l'étranger ",
- qu'elles ont définies comme " brevets du contrat " " la demande de brevet française no0550823 du 30 mars 2005, et le brevet qui en découlera, les demandes de brevet déposées à l'étranger sous priorité de ladite demande de brevet, les demandes de continuation, toute demande divisionnaire, demande de redélivrance, pour autant que ces demandes soient effectuées sur la base de priorité citée ci-avant, et les brevets délivrés correspondants qui s'incorporeront automatiquement au présent contrat " (article 0),
- qu'elles ont décidé " de partager, à parts égales (50 % chacune), tous les frais et charges que nécessitent la protection, l'exploitation, le maintien en vigueur, les procédures d'examen et de délivrance, la défense dans le cadre d'une action amiable ou judiciaire des brevets du contrat " (article 3. 1),
- que " l'absence de prise en charge de sa quote-part de frais par l'une des parties tel que prévue " précédemment " sera réputée correspondre à une renonciation, en l'absence de régularisation dans un délai de un mois à compter de la notification par la partie qui aura assumé l'intégralité des frais " (article 3. 5),
- qu'en cas de " manquement à l'une des clauses du contrat par l'une des parties, l'autre pourra la mettre en demeure, par lettre recommandée avec avis de réception, de remédier à l'état de chose litigieux dans un délai de trente jours à compter de la réception de ladite lettre " (article 7. 1), étant rappelé une nouvelle fois que " si le manquement est d'ordre financier, la partie défaillante perd tous ses droits sur l'invention ou sur les brevets du contrat dans le pays objet du litige et s'engage à effectuer toutes les démarches nécessaires, et à sa charge, pour que l'autre partie devienne seule titulaire des droits sur l'invention " (article 7. 2),

Attendu que Madame X... prétend s'être acquittée seule de la somme de 3. 531, 71 € pour payer l'analyse du rapport de recherche préalable à la délivrance du titre français, des sommes de 95, 68 € et 35 € au titre des taxes de maintien en vigueur du brevet français, de la somme de 85 € au titre de la délivrance de l'impression du fascicule du brevet français, de la somme de 6. 583, 98 € pour la demande de brevet européen, de la somme de 717, 60 € due notamment pour l'analyse du rapport de recherche européen, de la somme de 1. 895 € au titre des taxes relatives à l'examen de la demande de brevet européen ;

Qu'elle parvient tout au plus à justifier du paiement de la somme de 717, 60 €, portée le 31 octobre 2006 au débit d'un compte bancaire ouvert à son nom, de sorte qu'au moins pour ce montant, il est établi que Monsieur Y... n'a pas assumé la quote-part mise à sa charge par la convention des parties ;

Attendu que conformément aux dispositions de l'article 7. 1 du contrat, Madame X..., par lettre du 15 octobre 2007, notifiée par voie d'huissier aux dernières adresses connues de l'intéressé, a mis Monsieur Y... en demeure de remédier à sa carence, sans succès ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de prononcer une quelconque déchéance, celle-ci étant, en vertu de l'article L. 613-22 du Code de la propriété en cas de non paiement des annuités par le ou les titulaires du brevet ;

Que le Tribunal ne peut en tout état de cause sanctionner la défaillance de Monsieur Y... qu'au regard de ce que les parties ont exprimé lors de l'élaboration du règlement de copropriété litigieux ;

Qu'à cet égard, il ne peut que constater que conformément aux termes dépourvus d'ambiguïté des articles 3. 5, 3. 6 et 7. 2 du contrat, Monsieur Y..., notamment, est réputé renoncer à sa quote-part, " perd tous ses droits sur l'invention ou sur les brevets du contrat ", soit le brevet français no05 50823 et la demande de brevet européen noEP 1 708 501, " dans le pays objet du litige ", à savoir la France, et devra " effectuer toutes les démarches nécessaires, et à sa charge, pour que l'autre partie devienne seule titulaire des droits sur l'invention " ;

Attendu que l'article L. 613-9 du Code de la propriété intellectuelle dispose que tous les actes transmettant, ou modifiant les droits attachés à un brevet ou à une demande de brevet doivent, pour être opposables aux tiers, être inscrits au registre national des brevets tenu par l'INPI ;

Qu'en vertu de l'article L. 614-11 du même Code, l'inscription au registre européen des brevets des actes transmettant ou modifiant les droits attachés à une demande de brevet européen ou à un brevet européen rend ces actes opposables aux tiers ;

Attendu, en conséquence, que sauf à priver de toute portée les stipulations du règlement de copropriété du 21 mai 2005, il est nécessaire d'ordonner la publication de la présente décision au registre national et au registre européen des brevets.

II. Sur les autres demandes

Attendu que la nature de l'espèce et l'ancienneté du litige justifient d'ordonner l'exécution provisoire du présent jugement ;

Attendu que Monsieur Y..., succombant, sera condamné aux entiers dépens ;

Qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Madame X... la totalité des frais irrépétibles ; qu'il convient, en conséquence, de lui allouer la somme globale de 2. 000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Par ces motifs

Le Tribunal,
Statuant publiquement, par mise à disposition du présent jugement au greffe,
Par jugement réputé contradictoire, rendu en premier ressort,

ORDONNE la jonction des affaires no0807445 et no0803841 sous ce dernier numéro

-CONSTATE qu'en violation des stipulations du contrat conclu le 21 mai 2005, pris en son article 3. 1, Monsieur Y... s'est abstenu de payer la moitié de la somme de 717, 60 € due notamment pour l'analyse du rapport de recherche européen relatif à la demande de brevet européen déposée le 30 mars 2006, publiée le 4 octobre 2006 sous le noEP 1 708 501,

- CONSTATE que Madame X... s'est personnellement acquittée du paiement de la totalité de cette somme,

- CONSTATE qu'en application de l'article 3. 5 de la convention des parties, l'absence de prise en charge, par Monsieur Y..., de sa part, non régularisée, est " réputée correspondre à une renonciation " à ses droits sur le brevet français no05 50823 délivré le 17 août 2006 et sur la demande de brevet européen déposée le 30 mars 2006 sous priorité du brevet français, publiée le 4 octobre 2006 sous le noEP 1 708 501,

- CONSTATE qu'en application de l'article 7. 2 du contrat du 21 mai 2005, Monsieur Y... " perd tous ses droits sur l'invention ou sur " le brevet français no05 50823 délivré le 17 août 2006 et sur la demande de brevet européen déposée le 30 mars 2006 sous priorité du brevet français, publiée le 4 octobre 2006 sous le noEP 1 708 501, sur le territoire national,

- CONSTATE qu'en application de l'article 3. 6 du contrat du 21 mai 2005, Monsieur Y... est tenu de " donner toutes les signatures " et de " participer à toutes les démarches nécessaires à l'accomplissement du transfert des droits en question ",

- CONSTATE qu'en application de l'article 7. 2 du même contrat, Monsieur Y... est tenu " d'effectuer toutes les démarches nécessaires, et à sa charge, pour que Madame X... devienne seule titulaire des droits sur l'invention ",

- ORDONNE la publication du dispositif de la présente décision au registre national des brevets et au registre européen des brevets,

- DEBOUTE Madame X... du surplus de ses demandes,

- ORDONNE l'exécution provisoire,

- CONDAMNE Monsieur Y... à payer à Madame X... la somme de 2. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- CONDAMNE Monsieur Y... aux entiers dépens.

Fait et jugé à Paris le 27 Juin 2008

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 08/03841
Date de la décision : 27/06/2008
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2008-06-27;08.03841 ?
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