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16/05/2008 | FRANCE | N°04/03013

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Chambre civile 3, 16 mai 2008, 04/03013


T R I B U N A L
D E GRANDE
I N S T A N C E
D E P A R I S

3ème chambre 2ème section

No RG :
04 / 03013

No MINUTE :

Assignation du :
09 Février 2004

JUGEMENT
rendu le 16 Mai 2008

DEMANDEURS

Société Y...
...
75008 PARIS

Madame Olga Y..., dite Olga Y...,
...
75004 PARIS

représentées par Me Patrice DE CANDE, de la SELARL Z... de A... avocat au barreau de PARIS, vestiaire L. 280

DÉFENDERESSES

Société HIPPOLYTE
...
75008 PARIS

Maître B..., pris en sa

qualité d'administrateur judiciaire de la Société par Actions Simplifiée HIPPOLYTE
...
75008 PARIS

La SELAFA MJA, représentée par Maître PIERREL prise en sa qualit...

T R I B U N A L
D E GRANDE
I N S T A N C E
D E P A R I S

3ème chambre 2ème section

No RG :
04 / 03013

No MINUTE :

Assignation du :
09 Février 2004

JUGEMENT
rendu le 16 Mai 2008

DEMANDEURS

Société Y...
...
75008 PARIS

Madame Olga Y..., dite Olga Y...,
...
75004 PARIS

représentées par Me Patrice DE CANDE, de la SELARL Z... de A... avocat au barreau de PARIS, vestiaire L. 280

DÉFENDERESSES

Société HIPPOLYTE
...
75008 PARIS

Maître B..., pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de la Société par Actions Simplifiée HIPPOLYTE
...
75008 PARIS

La SELAFA MJA, représentée par Maître PIERREL prise en sa qualité de représentant des créanciers de la Société par Actions Simplifiée HIPPOLYTE
...
75013 PARIS

représentés par Me Marco GIOMMONI de la SCP VERSINI- CAMPINCHI et ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire P 454

Société ZINTALA S. R. L
Contrada Mostrapiedi, 167
Cassette d'Ete di S. Elpidio a Mare (AP)
(ITALIE)

représentée par Me Stéphane COLOMBET, de la SCP VIVIEN et JUVIGNY avocat au barreau de PARIS, vestiaire R. 210

Société CIRO C... SPA
Vialle Delle Industrie,
ARZANO 80022 (NA) (ITALIE)

représentée par Me Alexandra AGREST de la SCP CALLIGE AGREST et ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire P303

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Véronique D..., Vice- Président, signataire de la décision
Sophie CANAS, Juge
Guillaume MEUNIER, Juge

assistée de Marie- Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision

DÉBATS

A l'audience du 20 Mars 2008 Prononcé par remise de la décision au greffe, devant Sophie E..., Guillaume MEUNIER, juges rapporteurs, qui, sans opposition des avocats, ont tenu seuls l'audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en ont rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l'article 786 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Prononcé par remise de la décision au greffe
Contradictoire
en premier ressort

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société anonyme Y... a pour activité la fabrication et la commercialisation de souliers de grand luxe.

Elle expose que Madame Olga Y..., dite Olga Y... a conçu en 1962 un modèle de souliers sur mesure pour Andy F..., proposé à la clientèle depuis 1992 en prêt- à- chausser sous la référence 348 et sous le nom " Mocassin Andy F... ", et qu'elle a également élaboré un modèle référencé 573 réalisé en hommage à Ettore G....

Ces deux modèles ont fait l'objet le 26 octobre 1995 d'un dépôt au rang des minutes de la SCP Hubert LOUVEL- Thierry H..., notaires associés à PARIS.

Madame Olga Y... a cédé ses droits patrimoniaux d'auteur afférents à ces deux modèles au profit de la société Y....

Indiquant avoir eu connaissance à la fin de l'année 2003 que la société HIPPOLYTE commercialisait dans un magasin à l'enseigne " KITON ", situé..., des souliers sous les références " Clamart " et " I... George " reproduisant servilement les caractéristiques des modèles précités, et après avoir fait procéder le 09 janvier 2004 à une saisie- contrefaçon qui a permis d'établir que lesdits souliers avaient été acquis auprès de la société de droit italien ZINTALA, la société Y... et Madame Olga Y... dite Olga Y... ont, selon acte d'huissier en date du 09 février 2004, fait assigner la société par actions simplifiée HIPPOLYTE devant le Tribunal de Grande Instance de PARIS en contrefaçon de droits d'auteur et concurrence déloyale aux fins d'obtenir, outre des mesures d'interdiction, de remise aux fins de destruction et de publication, la condamnation de cette dernière à verser à titre de dommages- intérêts à Madame Olga Y... la somme de 30. 000 euros en réparation de l'atteinte portée à son droit moral d'auteur et à la société Y... la somme de 100. 000 euros en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon et la somme de 50. 000 euros en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale, ainsi qu'à leur payer la somme de 15. 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, le tout sous le bénéfice de l'exécution provisoire.

Suivant acte d'huissier en date du 08 juin 2004, la société Y... et Madame Olga Y... dite Olga Y... ont mis en la cause Maître Gérard J..., es qualité d'administrateur judiciaire de la société HIPPOLYTE, et la SELAFA MJA, représentée par Maître PIERREL, es qualité de représentant des créanciers de la société HIPPOLYTE, cette dernière ayant fait l'objet le 29 mars 2004 d'un jugement d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire.

La société HIPPOLYTE et Maîtres J... et PIERREL, es qualités, ont, selon acte d'huissier en date du 26 octobre 2004, assigné en intervention forcée et en garantie la société de droit italien ZINTALA.

Par acte d'huissier en date du 29 juin 2005, la société ZINTALA a assigné en intervention forcée la société de droit italien CIRO C..., cessionnaire du fonds de commerce exploité sous l'enseigne " KITON " et dépendant de la société HIPPOLYTE en vertu du jugement rendu le 19 août 2004 par le Tribunal de Commerce de PARIS.

Ces procédures ont fait l'objet d'une jonction.

Suivant ordonnance rendue le 26 janvier 2007, le juge de la mise en état a ordonné à la société ZINTALA de mettre à disposition pour consultation au cabinet de son avocat, Maître COLOMBET, les pièces numérotées no 36, 37, 38, 40, 41, 46, 47, 48 et 52 sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de l'ordonnance et s'est réservé la liquidation de l'astreinte.

Par ordonnance en date du 07 septembre 2007, le juge de la mise en état a débouté la société Y... et Madame Olga Y... de leurs demandes en liquidation d'astreinte et en production forcée et sous astreinte des originaux des pièces suscitées, a rejeté la demande reconventionnelle de communication de pièces de la société ZINTALA et a condamné les demanderesses à verser à cette dernière la somme de 1. 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Dans leurs conclusions récapitulatives signifiées le 06 février 2008, la société Y... et Madame Olga Y... demandent au Tribunal de :

- donner acte à la société Y... et Madame Olga Y... de ce qu'elles s'inscrivent en faux contre les pièces versées aux débats par la société ZINTALA sous les numéros 36, 37, 38, 40, 41, 46, 47, 48, 52 et 54,

En conséquence,

- ordonner qu'il sera procédé à l'examen des pièces litigieuses conformément aux articles 299 et 287 à 295 du Code de procédure civile,

- débouter les défendeurs de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

- dire et juger que la société HIPPOLYTE (antérieurement au jugement d'ouverture du 29 mars 2004 pour cette dernière), Maître J..., es qualités, la société CIRO C... et la société ZINTALA tout particulièrement en réapprovisionnant la boutique à l'enseigne KITON sise..., postérieurement à cette date, ont commis des actes de contrefaçon en important, en commercialisant et en reproduisant les modèles " I... George " et " Clamart ", copies serviles des modèles Y... 348 et 573,

- dire qu'il a ainsi été porté atteinte tant au droit patrimonial de la société Y... qu'au droit moral de Madame Olga Y...,

- dire et juger que la société ZINTALA, la société HIPPOLYTE, Maître J..., es qualités, et la société CIRO C... ont commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Y...,

En conséquence,

- interdire à Maître J..., es qualités, et la société CIRO C... sous astreinte de 1. 000 euros par infraction constatée à compter de la signification du jugement à intervenir, de poursuivre la fabrication, l'importation, la commercialisation et plus largement la promotion, la reproduction et la représentation des modèles de souliers contrefaisant les modèles Y... 348 et 573,

- interdire à la société ZINTALA d'importer et de commercialiser en France, sous astreinte de 1. 000 euros par infraction constatée, tout modèle de soulier reproduisant les caractéristiques des modèle 348 et 573 de la société Y... et en particulier les modèles " I... George " et " Clamart ",

- ordonner à Maître J..., es qualités, et à la société CIRO C... la remise à la société Y... dans les 48 heures de la signification du jugement à intervenir, sous astreinte de 6. 000 euros par jour de retard, des souliers actuellement dans leurs stocks ce en vue d'une destruction sous contrôle d'huissier,

- ordonner à la société ZINTALA la remise à la société Y... dans les 48 heures de la signification du jugement à intervenir, sous astreinte de 6. 000 euros par jour de retard, des souliers actuellement dans ses stocks ce en vue d'une destruction sous contrôle d'huissier,

- fixer aux sommes suivantes, au titre des faits antérieurs au jugement d'ouverture, les créances indemnitaires de la société Y... et de Madame Olga Y... :
* à Madame Olga Y... la somme de 30. 000 euros de dommages- intérêts au titre de l'atteinte portée à son droit moral d'auteur,
* à la société Y... la somme de 100. 000 euros de dommages- intérêts en raison des actes de contrefaçon,
* à la société Y... la somme de 50. 000 euros de dommages- intérêts en raison des actes de concurrence déloyale,

- condamner solidairement la société ZINTALA, Maître J..., es qualités, et la société CIRO C... au titre des faits postérieurs au jugement d'ouverture, à verser :
* à Madame Olga Y... la somme de 40. 000 euros de dommages- intérêts au titre de l'atteinte portée à son droit moral d'auteur,
* à la société Y... la somme de 120. 000 euros de dommages- intérêts en raison des actes de contrefaçon,
* à la société Y... la somme de 50. 000 euros de dommages- intérêts en raison des actes de concurrence déloyale,

- ordonner la publication du texte suivant, avec reproduction des deux modèles contrefaits :

" Par jugement du 2008, le Tribunal de Grande Instance de PARIS a condamné la société HIPPOLYTE exerçant sous l'enseigne KITON ainsi que son fournisseur, la société italienne ZINTALA, pour avoir fabriqué, importé, commercialisé et fait la promotion de souliers reproduisant les caractéristiques de deux modèles de souliers créés par Madame Olga Y... et commercialisés par la société Y..., à payer à ce titre la somme de X0. 000 euros à Madame Olga Y... et la somme de X00. 000 euros à la société Y... "

dans différents journaux, revues ou magazines au choix des demanderesses, dans la limite de quatre et aux frais solidairement avancés de la société ZINTALA, Maître J..., es qualités, et de la société CIRO C... à hauteur de 35. 000 euros hors taxes pour l'ensemble des publications,

- condamner solidairement la société ZINTALA, Maître J..., es qualités, et la société CIRO C... à payer à Madame Olga Y... et à la société Y... la somme de 35. 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, lesquels comprendront les frais de saisie- contrefaçon,

- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir nonobstant toute voie de recours et sans constitution de garantie.

Dans ses conclusions récapitulatives signifiées le 08 février 2008, la société ZINTALA entend voir :

A titre principal,

- constater que la société Y... et Madame Olga Y... ne justifient pas d'une date certaine de création de chacun des deux modèles " Andy F... " et " Bugatti " ou même, à défaut, d'une date certaine de première commercialisation de ces modèles,

- constater, au besoin à dire d'expert et aux frais avancés par la société Y... et Madame Olga Y..., que les modèles " Clamart " et " I... George " sont commercialisés par la société ZINTALA depuis une date antérieure au dépôt chez huissier par la société Y... des modèles " Andy F... " et " Bugatti ",

- dire et juger que les actes de contrefaçon allégués par la société Y... et Madame Olga Y... ne sont donc pas établis,

- dire et juger que la société ZINTALA n'a commis aucun acte de concurrence déloyale au préjudice de la société Y...,

En conséquence,

- débouter la société Y... et Madame Olga Y... de l'ensemble de leurs demandes,

- condamner la société Y... et Madame Olga Y... à verser à la société ZINTALA une somme de 75. 000 euros pour procédure abusive,

A titre subsidiaire,

- constater que la société Y... et Madame Olga Y... se sont désistées de toute instance et action s'agissant d'une prétendue contrefaçon de leur modèle " Andy F... " par le modèle " I... George " de la société ZINTALA,

- débouter la société Y... et Madame Olga Y... de l'ensemble de leurs demandes s'agissant de cette prétendue contrefaçon,

A titre plus subsidiaire,

- dire et juger que les demandes de la société Y... et de Madame Olga Y..., qui n'apportent pas la preuve de la réalité du préjudice qu'elles allèguent, de son étendue ni de son montant, sont manifestement injustifiées et disproportionnées,

- réduire le montant de ces demandes au quantum du préjudice réellement subi par la société Y... et Madame Olga Y..., limiter au territoire français les mesures de saisie sollicitées et rejeter les demandes de publication du jugement à intervenir,

A titre plus subsidiaire encore,

- condamner exclusivement la société HIPPOLYTE, Maître J... et la SELAFA MJA au titre des faits postérieurs au 09 février 2004, date de l'acte introductif d'instance,

En toute hypothèse,

- condamner la société Y... et Madame Olga Y... à verser à la société ZINTALA la somme de 30. 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses dernières écritures en date du 14 février 2008, la société CIRO C... demande au Tribunal de :

- constater que la société ZINTALA a renoncé à l'intégralité de ses demandes à l'encontre de la société CIRO C...,

- constater que l'exploitation du fonds de commerce sis... a été réalisée par la société HIPPOLYTE sous contrôle de son administrateur judiciaire entre le 19 août et le 04 novembre 2005,

- constater que le litige a été sciemment dissimulé à la société CIRO C..., tant par la société HIPPOLYTE que par Maître J... et la SELAFA MJA, jusqu'au 25 août 2005, date de délivrance de l'assignation de la société ZINTALA à son encontre,

- constater que la société Y... et Madame Olga Y... ne justifient pas d'une date certaine de création de chacun des deux modèles " Andy F... " et " Bugatti " ou même, à défaut, d'une date certaine de première commercialisation de ces modèles,

En conséquence,

- dire et juger que les actes de contrefaçon allégués par la société Y... et Madame Olga Y... ne sont donc pas établis,

- dire et juger que la société CIRO C... n'a commis aucun acte de concurrence déloyale au préjudice de la société Y...,

- débouter les demanderesses et appelantes en garanties de leurs demandes à son encontre,

- condamner la société ZINTALA à verser à la société CIRO C... la somme de 5. 000 euros à titre de dommages- intérêts pour procédure abusive,

A titre reconventionnel,

- condamner Maître J... es qualité d'administrateur judiciaire de la société HIPPOLYTE à verser à la société CIRO C... une somme de 7. 577 euros correspondant à la valeur des souliers contrefaisant vendus à CIRO C...,

A titre subsidiaire,

- condamner la société ZINTALA, Maître J... et la SELAFA MJA es qualités à garantir et relever indemne la société CIRO C... de toute condamnation pouvant être prononcée à son encontre,

En tout état de cause,

- condamner tout succombant à verser à la société CIRO C... la somme de 5. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans le dernier état de leurs écritures en date du 02 septembre 2005, la société HIPPOLYTE, Maître Gérard J... et la SELAFA MJA, représentée par Maître PIERREL, concluent au débouté de la société Y... et Madame Olga Y... de l'ensemble de leurs demandes, entendent subsidiairement voir dire et juger que les publications requises ont un caractère vexatoire et condamner la société ZINTALA à les garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à leur encontre, et sollicitent en tout état de cause la condamnation de la société Y... et Madame Olga Y... à leur verser la somme de 3. 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 février 2008.

MOTIFS DE LA DÉCISION

- Sur la titularité des droits d'auteur

Attendu que la société ZINTAL soulève dans le corps de ses écritures, sans que ce moyen soit expressément repris dans son dispositif, le défaut de qualité à agir de la société Y... et de Madame Olga Y..., ces dernières ne justifiant pas selon elle d'une date certaine de création ou de commercialisation sur les modèles objets de la présente instance et partant de la titularité des droits d'auteur qu'elles revendiquent ;

Que cependant, il convient de rappeler que la personne morale qui exploite un modèle sous son nom est présumée, à l'égard des tiers recherchés pour contrefaçon, titulaire du droit patrimonial de propriété intellectuelle de l'auteur ;

Qu'en l'espèce, il est suffisamment établi que les deux modèles opposés sont commercialisés sous les références 348 et 573 par la société Y..., qui bénéficie ainsi de la présomption de titularité ci- dessus énoncée, et il n'est pas contesté que celle- ci tient ses droits de Madame Olga K..., dite Olga Y... ;

Que lesdits modèles ont l'un et l'autre fait l'objet d'un dépôt au rang des minutes de la SCP Hubert LOUVEL- Thierry H..., notaires associés à PARIS, en date du le 26 octobre 1995, un tel dépôt étant suffisant à leur conférer une date certaine ;

Que la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité à agir des demanderesses sera donc rejetée, la discussion relative aux droits antérieurs invoqués par la société ZINTALA pour faire échec à l'action en contrefaçon relevant quant à elle de l'examen au fond de l'affaire.

- Sur l'incident de faux

Attendu qu'aux termes de l'article 299 du Code de procédure civile, " si un écrit sous seing privé produit en cours d'instance est argué de faux, il est procédé à l'examen de l'écrit litigieux comme il est dit aux articles 287 à 295 " ;

Qu'aux termes des articles 287 à 295 du même Code, il appartient au juge de procéder à la vérification d'écriture au vu des éléments dont il dispose, au besoin en ayant recours à toute mesure d'instruction ;

Attendu que les demanderesses se prévalent de ces dispositions pour voir écarter des débats les pièces communiquées par la société ZINTALA sous les numéros 36, 37, 38, 40, 41, 46, 47, 48, 52 et 54, constituées par des factures émises en 1989, 1992, 1993 et 1994 et les livres de TVA y afférents, contre lesquelles elles s'inscrivent en faux ;

Qu'elles exposent que les documents qui leur ont été présentés au cabinet de Maître COLOMBET, suite à l'ordonnance du juge de la mise en état rendue le 26 janvier 2007, ne correspondent pas aux documents à partir desquels les prétendues copies certifiées conformes à l'original ont été établies et en concluent que celles- ci ne peuvent qu'être des faux ;

Qu'elles mettent également en doute l'authenticité des documents prétendument originaux compte tenu de leur état de conservation " étonnamment parfait " ;

Que la société ZINTALA, qui ne conteste pas les différences relevées par les demanderesses entre les pièces initialement communiquées et les pièces originales mises à leur disposition au cabinet de son conseil, les explique par le fait que sur la période concernée, ses factures étaient saisies et dupliquées manuellement pour constituer deux originaux, un pour le client et l'autre pour sa propre comptabilité, et qu'elle conservait ainsi deux exemplaires des factures, à savoir un original et une copie de l'autre exemplaire original ;

Que cependant, faute pour elle de rapporter la preuve de ses allégations, il y a lieu pour le Tribunal de constater que les copies versées aux débats par la société ZINTALA sous le numéros 36, 37, 38, 40, 41, 46, 47, 48, 52 et 54 présentent des différences avec les documents en original mis à la disposition de la partie adverse dans les conditions prévues par le juge de la mise en état dans son ordonnance rendue le 26 janvier 2007 et doivent en conséquence être écartées des débats ;

Qu'en revanche, les originaux eux- mêmes ne sauraient être écartés dès lors que leur bon état de conservation est en lui seul insuffisant à remettre en cause leur authenticité.

- Sur l'antériorité du modèle " Clamart "

Attendu que la société ZINTALA, pour s'opposer aux demandes formées à son encontre, indique qu'elle a créé le modèle d'escarpin à lacets " Clamart " antérieurement à la commercialisation par la société Y... du modèle " Bugatti " référencé 573, dont il constituerait prétendument la copie servile ;

Qu'il résulte en effet de la facture originale no 44. 89 en date du 17 mars 1989 que la société ZINTALA commercialisait à cette date un modèle de chaussures référencé " Clamart " ;

Que les attestations versées aux débats sont, contrairement à ce que soutiennent les demanderesses, suffisantes à établir que ledit modèle présentait les mêmes caractéristiques que le modèle " Clamart " argué de contrefaçon dans le cadre de la présente instance ;

Que la société Y... et Madame Olga Y..., qui affirment que le modèle référencé 573 a été " continuellement commercialisé ", ne versent cependant aux débats pour en justifier que son dépôt au rang des minutes de la SCP Hubert LOUVEL- Thierry H..., notaires associés à PARIS, en date du 26 octobre 1995 ;

Que l'antériorité du modèle de chaussures " Clamart " est ainsi démontrée ;

Attendu que la société Y... et Madame Olga Y... ne pourront dès lors qu'être déboutées de leurs demandes formées à ce titre.

- Sur l'antériorité du modèle " I... George "

Attendu que de la même manière, la société ZINTALA justifie par la production de la facture originale no 14. 89 en date du 30 janvier 1989 de la commercialisation à compter de cette date d'un modèle de chaussures référencé " I... George " qui, selon les attestations versées aux débats, présentaient des caractéristiques identiques à celles du modèle éponyme argué de contrefaçon dans le cadre de la présente instance ;

Qu'elle considère ainsi rapporter la preuve de l'antériorité de son modèle par rapport au modèle Y... référencé 348 qui lui est opposé ;

Que cependant, la société Y... et Madame Olga Y... versent aux débats le magazine PLAYBOY de septembre 1981 qui comporte en page 89 un article consacré aux chaussures sur mesure, qui contient une photographie représentant manifestement le modèle de mocassins " Andy F... " référencé 348 invoqué en l'espèce, ce que la société ZINTALA ne peut utilement contester bien que la légende indique à tort que " ce modèle existe depuis les années 30 ", ce d'autant plus que cette pièce est corroborée par les attestations produites, et particulièrement celles émanant de Monsieur L... et de Madame M... qui indiquent avoir acheté le modèle Y... en cause respectivement en 1974 et en 1978 ;

Que l'antériorité du modèle Y... référencé 348 sur le modèle " I... George " est ainsi démontrée.

- Sur la fin de non- recevoir tirée de l'existence d'une transaction

Attendu que la société ZINTALA conteste subsidiairement la recevabilité de la société Y... et de Madame Olga Y... à agir en contrefaçon du modèle de soulier " Andy F... " au motif que celles- ci se sont désistées de leur instance et de leur action dans le cadre d'une précédente procédure engagée notamment à son encontre du fait de la commercialisation du modèle de mocassin référencé " I... George ", également incriminé dans le cadre de la présente instance ;

Qu'elle affirme que les demanderesses ont du fait de leur désistement d'action perdu le droit d'introduire une nouvelle instance ayant le même objet à son égard ;

Qu'il résulte en effet des pièces versées aux débats que par exploit d'huissier en date du 19 avril 2001, la société Y... et Madame Olga Y... ont fait assigner les sociétés BARONET, UGO, CELK, ARTIOLI CALZATURIFICIO STAR et ZINTALA en contrefaçon et agissements parasitaires du fait de l'importation et de la commercialisation de modèles de chaussures sous la marque " FRANCESCO N... " référencés " I... George ", et selon elles copies serviles des modèles Y... référéncés 348 et B0 159 ;

Que par jugement rendu le 26 octobre 2001, le Tribunal de Grande Instance de PARIS a déclaré parfait leur désistement d'instance et d'action ;

Que cependant, si la société Y... et Madame Olga Y... ont ainsi renoncé à faire valoir en justice leurs droits s'agissant des faits ci- dessus énoncés, le désistement d'action ne saurait les priver de leur droit d'agir pour voir sanctionner des faits nouveaux commis postérieurement, la société ZINTALA ne pouvant sur ce point se prévaloir des termes- au demeurant inconnus- de la transaction intervenue le 31 juillet 2001 entre la société Y... et Madame Olga Y... d'une part, et les sociétés BARONET, UGO et CELK d'autre part, soumise au principe de l'effet relatif des conventions ;

Que la fin de non recevoir tirée de ce chef sera donc rejetée.

- Sur l'originalité du modèle Y... référencé 348

Attendu que la société Y... et Madame Olga Y... revendiquent un modèle de mocassin ainsi décrit :
"- L'empeigne est sensiblement plus allongée que dans un mocassin traditionnel,
- le bout de l'empeigne est fin et droit,
- le bout de la semelle est également fin et droit,
- la couture délimitant un plateau sur l'empeigne est également droite et parallèle au bout du soulier et au bout de la semelle,
- la couture est de forme sensiblement rectangulaire,
- la languette dépasse très largement de la bride du coup de pied,
- les contours de la languette sont carrés,
- la bride est de forme rectangulaire, ses deux coins supérieurs étant cependant en angle sensiblement aigu,
- la bride comporte en son centre une fenêtre aux bords longitudinaux sensiblement parallèles et aux bords latéraux légèrement incurvés, évidement représentant sensiblement le tiers de la surface dudit passant " ;

Que pour contester son originalité, les sociétés défenderesses font en substance valoir que ce modèle de mocassin à bout carré, de forme courante bien qu'effilée, reprend des éléments banals du domaine public et ne saurait bénéficier, sans porter atteinte aux règles de la libre concurrence, de la protection au titre du droit d'auteur dès lors qu'il ne fait que présenter des caractéristiques communes à ce genre déterminé de chaussures ;

Que cependant, elles ne versent aux débats aucune pièce relative à un modèle de mocassin révélant l'ensemble des éléments caractérisant le modèle Andy F..., tels que ci- dessus rappelés, et ainsi susceptible de constituer une antériorité pertinente destructrice de l'originalité du modèle revendiqué ;

Que cette originalité réside dans le choix de proportions, de formes et la combinaison d'éléments, certes déjà connus, selon un agencement particulier, qui confèrent à l'ensemble sa physionomie propre et traduit un parti pris esthétique reflétant l'empreinte de la personnalité de son auteur ;

Que le modèle Y... référencé 348 doit donc bénéficier de la protection instaurée par le Livre I du Code de la Propriété Intellectuelle.

- Sur la contrefaçon

* Sur l'atteinte aux droits patrimoniaux

Attendu qu'aux termes de l'article L. 122-4 du Code de la Propriété Intellectuelle, " toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droits ou ayants cause est illicite. Il en va de même pour la traduction, l'adaptation ou la transformation, l'arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque " ;

Attendu en l'espèce que la société Y... et Madame Olga Y... estiment que le modèle référencé " I... George " saisi auprès du magasin à l'enseigne " KITON " constitue la copie servile de son modèle " Andy F... " en ce qu'il reproduit l'ensemble des caractéristiques originales de ce dernier, telles que ci- dessus décrites ;

Que les sociétés défenderesses opposent en substance que les seuls éléments communs aux deux modèles en cause sont ceux qui caractérisent le genre du mocassin à bout carré, lesdites chaussures présentant pour le surplus des différences suffisamment importantes pour exclure la contrefaçon, la société HIPPOLYTE ajoutant que la spécificité des modèles Y... réside dans les teintes, patines et glaçage de leurs cuirs qui ne se retrouvent nullement sur les modèles fabriqués par la société ZINTALA ;

Que la société ZINTALA verse à l'appui de ses allégations un tableau comparatif détaillé des modèles en cause réalisé par les artisans travaillant dans son atelier et pointant leurs différences ;

Que cependant, outre le fait que l'aspect du cuir n'est nullement revendiqué par les demanderesses dans le cadre de la présente instance, il convient de rappeler que la contrefaçon s'apprécie d'après les ressemblances, et non par les différences, et au regard de l'impression d'ensemble ;

Qu'il résulte de la comparaison entre les modèles en cause qu'en dépit de légères différences, lesquelles ne sont pas immédiatement perceptibles et n'affectent pas l'impression d'ensemble qui s'en dégage, le modèle " I... George " reproduit, dans une combinaison identique, l'ensemble des caractéristiques du modèle " Andy F... " telles que ci- dessus énoncées ;

Attendu que la contrefaçon est ainsi caractérisée.

* Sur l'atteinte aux droits moraux

Attendu qu'aux termes de l'article L. 121-1 du Code de la Propriété Intellectuelle, " l'auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son oeuvre. " ;

Que les demanderesses font à ce titre valoir qu'en commercialisant un modèle constituant la copie servile du modèle " Andy F... ", les sociétés défenderesses ont porté atteinte au droit moral de Madame Olga Y..., et notamment à son droit à la paternité et au respect de son oeuvre ;

Que cependant, Madame Olga Y... ne saurait, sans se contredire, invoquer une dénaturation de son oeuvre alors même qu'elle considère que le modèle argué de contrefaçon copie servilement les caractéristiques de son propre modèle ;

Que l'atteinte au droit à la paternité est en revanche constituée dès lors qu'il est établi que le modèle " I... George ", qui reproduit un modèle dont elle est l'auteur, ne comporte aucune mention de son nom.

- Sur la concurrence déloyale

Attendu que les demanderesses font valoir à ce titre qu'en poursuivant malgré l'introduction de la présente instance la commercialisation de modèles reproduisant servilement les modèles 348 et 573 de la société Y..., au surplus avec une finition au moyen d'une patine et d'un glaçage très proches de ceux utilisés par cette dernière, les sociétés défenderesses ont commis des actes de concurrence déloyale ;

Qu'elles ajoutent que cette commercialisation a été réalisée à quelques mètres seulement du magasin Y... situé... et que la société ZINTALA s'est déjà, au cours de l'année 2001, rendue coupable des mêmes faits, également à proximité du magasin Y..., ceci traduisant la volonté de cette dernière de se livrer à une pillage systématique de leur patrimoine ;

Qu'il convient au préalable de rappeler que la société ZINTALA ayant justifié de l'antériorité de ses droits sur le modèle " Clamart ", aucun acte de concurrence déloyale ne saurait être retenu de ce chef ;

Que pour le surplus, il résulte du procès- verbal de saisie- contrefaçon dressé le 09 janvier 2004 et des photographies authentifiées selon procès- verbal d'huissier en date du 12 janvier 2004 que le magasin à l'enseigne " KITON " est situé au..., soit dans la même rue et quasiment en face du magasin Y... ;

Que le procès- verbal de constat en date du 23 février 2005 établit en outre que les souliers contrefaisants le modèle " Andy F... " mis en vente à cette date dans le magasin à l'enseigne " KITON " reproduisent le glaçage qui fait la spécificité des modèles Y... selon les affirmations de la société HIPPOLYTE elle- même ;

Que ces faits, à l'exclusion de tous autres- les faits relevés en 2001 et ayant donné lieu à une désistement d'action ne pouvant de nouveau être invoqués par les demanderesses-, constituent, contrairement à ce que soutiennent les défenderesses, des actes distincts de concurrence déloyale ;

Que ces dernières ne sauraient en effet prétendre que les clientèles des enseignes KITON et Y... sont radicalement différentes, dès lors que les produits proposés par l'une- à savoir principalement des vêtements- et par l'autre- à savoir uniquement des chaussures- sont parfaitement complémentaires et qu'il s'agit dans les deux cas de produits de luxe destinés à une même clientèle ;

Qu'elles ne peuvent pas plus arguer du fait que la clientèle concernée est composée de consommateurs avertis, ni du fait que le modèle litigieux était vendu à un prix supérieur à celui du modèle original, de tels éléments étant à eux seuls insuffisants à exclure tout risque de confusion.

- Sur les mesures réparatrices

Attendu qu'il sera fait droit à la demande d'interdiction dans les conditions énoncées au dispositif de la présente décision ;

Qu'une telle mesure étant suffisante à faire cesser sur le territoire national les faits incriminés, il n'y a pas lieu d'ordonner la remise des stocks aux fins de destruction par ailleurs sollicitée ;

Attendu qu'il ressort du procès- verbal de saisie- contrefaçon dressé le 09 janvier 2004 que la société ZINTALA a fourni à la société HIPPOLYTE, selon factures en date du 20 mars 2003, vingt- deux paires du modèle " I... George " pour un prix unitaire de 617 euros ;

Que la société HIPPOLYTE indique avoir vendu 10 paires dudit modèle pour un montant unitaire allant de 925 euros à 1. 850 euros ;

Que les procès- verbaux de constat dressés les 31 janvier 2005 et 23 février 2005 établissent que le modèle litigieux était toujours offert à la vente dans le magasin à l'enseigne " KITON " à ces dates ;

Que la société Y... justifie quant à elle avoir consacré en 2006 un budget total de 75. 328, 16 euros pour les dépenses publicitaires liées à la promotion du modèle " Andy F... ", soit 31, 64 % de l'investissement total média en 2006, ce modèle représentant environ 10 % du total des ventes en volume de souliers Y... et 14 % du chiffre d'affaires souliers ;

Qu'il y a lieu en considération de l'ensemble de ces éléments d'allouer à la société Y... la somme de 60. 000 euros à titre de dommages- intérêts en réparation de l'atteinte portée à ses droits patrimoniaux d'auteur et à Madame Olga Y... la somme de 10. 000 euros à titre de dommages- intérêts en réparation de l'atteinte portée à ses droits moraux ;

Qu'il y a lieu en outre d'allouer à la société Y... la somme de 30. 000 euros à titre de dommages- intérêts en réparation des actes de concurrence déloyale commis à son encontre ;

Attendu qu'il convient, à titre de complément d'indemnisation, d'autoriser la publication du présent jugement selon les modalités prévues ci- dessous.

- Sur les responsabilités

Attendu que la société Y... et Madame Olga Y... versent aux débats leurs déclarations de créance entre les mains de Maître Jean- Claude PIERREL, représentant des créanciers de la société HIPPOLYTE, en date du 30 avril 2004 ;

Attendu que la société Y... et Madame Olga Y..., qui justifient ainsi qu'il a été précédemment indiqué de la poursuite des actes illicites postérieurement à la délivrance de l'acte introductif d'instance et donc postérieurement au jugement d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire rendu le 29 mars 2004 à l'égard de la société HIPPOLYTE, sollicitent d'une part la fixation de leurs créances indemnitaires pour les faits antérieurs au jugement d'ouverture, sans par ailleurs réclamer pour ces mêmes faits la condamnation des défenderesses in bonis, et d'autre part la condamnation solidaire de la société ZINTALA, de Maître J..., es qualité, et de la société CIRO C... au titre des faits postérieurs au jugement d'ouverture ;

Qu'il y a lieu en conséquence de fixer au passif de la société HIPPOLYTE, au titre des faits antérieurs au jugement d'ouverture, les créances de la société Y... à hauteur de 30. 000 euros en réparation des actes de contrefaçon et de 15. 000 euros en réparation des actes de concurrence déloyale commis à son encontre et la créance de Madame Olga Y... à hauteur de 5. 000 euros en réparation de l'atteinte portée à son droit moral d'auteur ;

Qu'au titre des faits postérieurs au jugement d'ouverture, il y a lieu de condamner in solidum la société ZINTALA et Maître J..., pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société HIPPOLYTE, au paiement à la société Y... de la somme de 30. 000 euros en réparation des actes de contrefaçon et de 15. 000 euros en réparation des actes de concurrence déloyale et à Madame Olga Y... de la somme de 5. 000 euros en réparation de l'atteinte portée à son droit moral d'auteur ;

Que la société CIRO C..., cessionnaire du fonds de commerce par jugement rendu le 19 août 2004 par le Tribunal de Commerce de PARIS et bénéficiaire d'une convention d'entrée en jouissance en date du 31 août 2004 à effet au 19 août 2004, sera condamnée sous la même solidarité au paiement de ces sommes, sans qu'elle puisse utilement invoquer son ignorance du litige opposant les sociétés HIPPOLYTE et ZINTALA aux demanderesses, la bonne foi étant inopérante en la matière ;

Attendu que la société HIPPOLYTE, prise en la personne de ses représentants légaux, demande au Tribunal de condamner son fournisseur, la société ZINTALA, à la garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre ;

Que cette dernière lui doit en effet garantie en vertu de l'article 1626 du Code civil et ne saurait s'en exonérer, pas plus que de sa responsabilité en tant que fabricant et importateur des produits contrefaisants, en prétendant qu'il appartenait à la société HIPPOLYTE, puis à son administrateur judiciaire, de retirer, à titre conservatoire, immédiatement de la vente les souliers litigieux ;

Qu'elle devra en outre garantir sur ce fondement la société CIRO C... ;

Que cette dernière ne saurait en revanche rechercher la garantie de Maître J... et de la SELAFA MJA, es qualités, dès lors que la convention d'entrée en jouissance qu'elle verse elle- même aux débats prévoit à sa charge exclusive " toutes dettes et tous engagements liés à l'utilisation des éléments " corporels et incorporels du fond de commerce.

- Sur la demande reconventionnelle en paiement formée par la société CIRO C...

Attendu que la société CIRO C..., qui fait valoir que la société HIPPOLYTE et son administrateur judiciaire ont manqué à leurs obligations en ne lui déclarant pas le litige en cours, en lui cédant un stock susceptible d'être contrefaisant et non commercialisable et en poursuivant la vente desdits souliers pendant la période de régularisation des actes de cession, sollicite reconventionnellement la condamnation de Maître J... es qualité à l'indemniser du préjudice ainsi subi, correspondant à la valeur du stock ZINTALA non commercialisable, repris et payé dans le cadre de la cession d'entreprise, soit onze paires du modèle " I... George " et une paire du modèle " Clamart " pour un montant total de 7. 577 euros ;

Qu'une telle demande ne saurait cependant prospérer dès lors que la convention d'entrée en jouissance en date du 31 août 2004 à effet au 19 août 2004 prévoyait, ainsi qu'il a été précédemment indiqué, que " la société CIRO C... s'engage à l'égard de Maître J... es qualité à prendre à sa charge exclusive toutes dettes et tous engagements liés à l'utilisation des éléments ci- dessus, ainsi que tout passif lié à l'exploitation sans que Maître J... es qualité, à quelque titre que ce soit et pour quelque cause que ce soit, puisse être recherché ou inquiété à ce sujet et ce à partir du 19 août 2004. ".

- Sur la demande reconventionnelle de dommages- intérêts pour procédure abusive formée par la société CIRO C... à l'encontre de la société ZINTALA

Attendu que l'exercice d'une action en justice constitue, en principe, un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages- intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi, ou d'erreur grossière équipollente au dol ;

Que la société CIRO C..., qui fait valoir que la société ZINTALA l'a assignée en intervention forcée puis a renoncé en cours d'instance à former toutes demandes à son encontre, sera néanmoins déboutée de sa demande à ce titre, faute pour elle de rapporter la preuve d'une quelconque intention de nuire ou légèreté blâmable de la part de cette dernière, qui a pu légitimement se méprendre sur l'étendue de ses droits.

- Sur les autres demandes

Attendu qu'il y a lieu de condamner la société ZINTALA, Maître J... pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société HIPPOLYTE et la société CIRO C..., partie perdante, aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;

Qu'en outre, ils doivent être condamnés à verser à la société Y... et Madame Olga Y..., qui ont dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir leurs droits, une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile qu'il est équitable de fixer à la somme de 10. 000 euros ;

Attendu que l'ancienneté du litige justifie le prononcé de l'exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et rendu en premier ressort,

- REJETTE la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la société Y... et de Madame Olga Y... ;

- REJETTE la fin de non recevoir tirée de l'existence d'une transaction ;

- ECARTE des débats les pièces no 36, 37, 38, 40, 41, 46, 47, 48, 52 et 54 communiquées par la société ZINTALA ;

- DIT que la société ZINTALA justifie de l'antériorité de son modèle de chaussure référencé " Clamart " sur le modèle Y... référencé 573 et DEBOUTE en conséquence la société Y... et Madame Olga Y... de l'ensemble de leurs demandes de ce chef ;

- DIT que le modèle Y... référencé 348 est antérieur au modèle " I... George " fabriqué par la société ZINTALA ;

- DIT que le modèle Y... référencé 348 est original et bénéficie ainsi de la protection instaurée par le Livre I du Code de la Propriété Intellectuelle ;

- DIT qu'en fabriquant, en important et en commercialisant le modèle de chaussure " I... George " reproduisant les caractéristiques du modèle " Andy F... " référencé 348 commercialisé par la société Y..., la société HIPPOLYTE, antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire en date du 29 mars 2004, Maître J... pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société HIPPOLYTE, postérieurement à cette date, la société ZINTALA et la société CIRO C... ont commis des actes de contrefaçon et des actes de concurrence déloyale ;

En conséquence,

- INTERDIT à Maître J... pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société HIPPOLYTE, à la société ZINTALA et à la société CIRO C... la poursuite de tels agissements, ce sous astreinte de 1. 000 euros par infraction constatée à compter de la signification du jugement à intervenir ;

- DIT que le Tribunal se réserve la liquidation de l'astreinte ;

- FIXE, au titre des faits antérieurs au jugement d'ouverture, au passif de la société HIPPOLYTE les créances indemnitaires de la société Y... et de Madame Olga Y... comme suit :
* pour la société Y... : la somme de 30. 000 euros à titre de dommages- intérêts en réparation de l'atteinte portée à ses droits patrimoniaux d'auteur et la somme de 15. 000 euros en réparation des actes de concurrence déloyale
* pour Madame Olga Y... : la somme de 5. 000 euros à titre de dommages- intérêts en réparation de l'atteinte portée à ses droits moraux d'auteur ;

- CONDAMNE solidairement, au titre des faits postérieurs au jugement d'ouverture, Maître J... pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société HIPPOLYTE, la société ZINTALA et la société CIRO C... à payer :
* à la société Y... : la somme de 30. 000 euros à titre de dommages- intérêts en réparation de l'atteinte portée à ses droits patrimoniaux d'auteur et la somme de 15. 000 euros en réparation des actes de concurrence déloyale
* à Madame Olga Y... : la somme de 5. 000 euros à titre de dommages- intérêts en réparation de l'atteinte portée à ses droits moraux d'auteur ;

- AUTORISE la publication du texte suivant, avec reproduction du modèle contrefait :

" Par jugement du 16 mai 2008, le Tribunal de Grande Instance de PARIS a condamné Maître J... pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société HIPPOLYTE, la société ZINTALA et la société CIRO C... pour avoir fabriqué, importé, commercialisé des souliers reproduisant les caractéristiques d'un modèle de souliers créé par Madame Olga Y... et commercialisé par la société Y..., à payer à ce titre la somme de 5. 000 euros à Madame Olga Y... et les sommes de 30. 000 euros et 15. 000 euros à la société Y... "

dans trois journaux ou revues au choix des demanderesses et aux frais in solidum des défenderesses, sans que le coût de chaque publication n'excède, à la charge de celles- ci, la somme de 3. 500, 00 euros H. T. ;

- CONDAMNE in solidum Maître J... pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société HIPPOLYTE, la société ZINTALA et la société CIRO C... à payer à la société Y... et Madame Olga Y... ensemble la somme de 10. 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- CONDAMNE la société ZINTALA à garantir la société CIRO C... et Maître J... pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société HIPPOLYTE de toutes condamnations prononcées à leur encontre ;

- REJETTE toutes demandes plus amples ou contraires ;

- CONDAMNE in solidum Maître J... pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société HIPPOLYTE, la société ZINTALA et la société CIRO C... aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile et qui comprendront les frais de saisie- contrefaçon ;

- ORDONNE l'exécution provisoire.

Fait et jugé à PARIS le 16 mai 2008.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 04/03013
Date de la décision : 16/05/2008
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2008-05-16;04.03013 ?
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