La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/05/2008 | FRANCE | N°02/14038

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Chambre civile 3, 13 mai 2008, 02/14038


T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

3ème chambre 1ère section

No RG : 02/14038

No MINUTE :

JUGEMENT

rendu le 13 Mai 2008

DEMANDEUR

Monsieur Jean-Pierre X...

...

75013 PARIS

représenté par Me Jean AITTOUARES - SELARL OX, avocat au barreau de PARIS , vestiaire A 966

DÉFENDEURS

Monsieur Yannick Y...

6 Hameau du Fossard

1226 THONEX

SUISSE

Société IMG

...

75008 PARIS

représentés par Me Simon TAHAR - SCP TAHAR ROSNA

Y, avocat au barreau de PARIS, vestiaire P.394

S.A.R.L. Z... ADDICT

...

92120 MONTROUGE

représentée par Me Alain BARSIKIAN- CARRERAS BARSIKAN ROBERTSON et Associés, avocat au barreau d...

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

3ème chambre 1ère section

No RG : 02/14038

No MINUTE :

JUGEMENT

rendu le 13 Mai 2008

DEMANDEUR

Monsieur Jean-Pierre X...

...

75013 PARIS

représenté par Me Jean AITTOUARES - SELARL OX, avocat au barreau de PARIS , vestiaire A 966

DÉFENDEURS

Monsieur Yannick Y...

6 Hameau du Fossard

1226 THONEX

SUISSE

Société IMG

...

75008 PARIS

représentés par Me Simon TAHAR - SCP TAHAR ROSNAY, avocat au barreau de PARIS, vestiaire P.394

S.A.R.L. Z... ADDICT

...

92120 MONTROUGE

représentée par Me Alain BARSIKIAN- CARRERAS BARSIKAN ROBERTSON et Associés, avocat au barreau de PARIS, vestiaire R139

Monsieur Thierry A...

...

75016 PARIS

Société TS3

...

75017 PARIS

représentés par Me Alexandre BRAUN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire C.1646

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Marie B..., Vice Présidente

Florence GOUACHE, Juge

Cécile VITON, Juge

assistées de Léoncia BELLON, Greffier

DEBATS

A l'audience du 03 Mars 2008

tenue publiquement

JUGEMENT

Prononcé par remise au greffe

Contradictoirement

en premier ressort

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES.

Estimant que M. Yannick Y... a cessé d'exécuter depuis la remise d'une lettre non signée datée du 18 juin 2001 le contrat de manager les unissant depuis l'été 1998 , M. Jean-Pierre X... a fait assigner M. Yannick Y..., en présence de la S.A.R.L. Z... ADDICT, de la société IMG et de M. Thierry A... exerçant son activité sous le nom commercial TS3, par acte des 23, 24, 27, 29, 31 mai et 5 juin 2002, devant le tribunal de grande instance de Paris pour obtenir paiement des redevances dues en exécution de ce contrat.

Par jugement en date du 29 octobre 2003, il a été ordonné une expertise confiée à M. C... pour donner au tribunal tous les éléments permettant de déterminer la nature de l'engagement professionnel et des relations qui ont existé entre M. Yannick Y... et M. Jean-Pierre X..., de préciser le montant des sommes reçues et leur mode de calcul.

Le rapport était déposé le 3 avril 2006 et un complément de rapport était déposé le 2 mai 2006.

Dans ses dernières écritures du 27 février 2008 en ouverture de rapport, M. Jean-Pierre X... a demandé au tribunal de :

Rejeter l'ensemble des demandes formées à son encontre.

Condamner M. Yannick Y... à lui verser la somme de 459.943,04 euros à titre de provision.

Pour l'avenir, dire que la S.A.R.L. Z... ADDICT, la société IMG et la société TS3 devront chacune pour les sommes les concernant verser directement à M. Jean-Pierre X... les sommes lui revenant.

Ordonner à M. Yannick Y... de produire sous astreinte de 5.000 euros par jour de retard:

*les relevés de redevance reçus par la SARL Z... ADDICT au titre des 1er et 2ème semestres 2004, des 1er et 2ème semestres 2005, du 1er semestre 2006,

*les relevés ADAMI de l'année 1999, les pages 1 et 2 du relevé de décembre 2000, la page 3 du relevé de juin 2000, la page 3 du relevé de juin 2001, la page 3 du relevé de novembre 2001 et les relevés des années 2002, 2003, 2004 et 2005;

Condamner M. Yannick Y... à verser à M. Jean-Pierre X... une somme de 50.000 euros en réparation de son préjudice moral et de carrière.

Ordonner la publication du dispositif du jugement à intervenir dans cinq journaux ou revues au choix de M. Jean-Pierre X... et aux frais de M. Yannick Y..., dans la limite de 30.000 Euros HT.

Condamner M. Yannick Y... à lui payer la somme de 45.000 euros pour résistance abusive.

Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir.

Condamner M. Yannick Y... au paiement des entiers dépens dont distraction au profit de Mo Jean AITTOUARES, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile, en ce compris les frais d'expertise.

Condamner M. Yannick Y... à verser à M. Jean-Pierre X... la somme de 52.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Condamner la SARL Z... ADDICT à payer à M. Jean-Pierre X... la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Condamner in solidum M. Thierry A... et la société TS3 à verser à M. Jean-Pierre X... la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Dans ses conclusions récapitulatives du 27 février 2008, M. Yannick Y... a sollicité du tribunal de :

constater qu'il n'a été conclu entre les parties aucun contrat de management dont les termes seraient reproduits sur la proposition de contrat antidaté du 1er janvier 2001, la dernière en date établie par M. Jean-Pierre X... que M. Yannick Y... n'a ni approuvé ni signé.

Dire que M. Jean-Pierre X... quelque soit le terme sous lequel il est présenté, n'a en vérité collaboré avec M. Yannick Y... qu'en assurant un travail de secrétariat juridique servant de courroie de transmission entre les différents opérateurs et tenant l'agenda de ses activités sans rapport aucun avec toute intervention influente dans la stratégie de sa carrière, ses décisions et ses choix artistiques, la négociation et la conclusion de ses contrats.

En conséquence,

Dire M. Jean-Pierre X... mal fondé à prétendre à une commission de 20% sur les revenus de M. Yannick Y... sous forme de droit de suite au delà-même de la cessation de cette collaboration.

Le débouter de toutes ses demandes et notamment les nouvelles aux fins de dommages et intérêts pour résistance abusive.

Donner acte à M. Yannick Y... de ce qu'il offre de verser à M. Jean-Pierre X... la somme de 534,20 euros correspondant à la commission sur les salaires perçus du 17 mai 2000 au 5 décembre 2000.

Subsidiairement au cas où par impossible le tribunal devait juger que M. Yannick Y... était néanmoins tenu de verser à M. Jean-Pierre X... une compensation,

Donner acte à M. Yannick Y... de ce qu'il offre de payer à ce titre et dans cette hypothèse seulement la somme de 10.857,50 euros voire au maximum celle de 15.245 euros.

Donner acte à M. Yannick Y... de ce qu'il a communiqué de nouveaux relevés de ses redevances visés dans l'assignation.

Condamner M. Jean-Pierre X... à payer à M. Yannick Y... la somme de 100.000 euros en réparation de son préjudice pour procédure abusive et celle de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens qui comprendront les frais d'expertise.

Dans ses dernières écritures du 12 décembre 2007, la S.A.R.L. Z... ADDICT a demandé au tribunal de :

Lui donner acte de ses explications.

Condamner M. Jean-Pierre X... au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Dans ses conclusions récapitulatives du 9 mai 2007, M. Thierry A... et la société TS3 ont sollicité du tribunal de :

Leur donner acte de leurs explications.

Condamner M. Jean-Pierre X... au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La clôture a été prononcée le 3 mars 2008.

MOTIFS DE LA DÉCISION.

Sur le statut de M. Jean-Pierre X....

Les relations professionnelles entre M. Jean-Pierre X... et M. Yannick Y... ne sont pas contestées, seuls leur contenu et leur nature juridique sont l'objet du litige puisqu'aucun contrat n'a été signé entre les parties;

M. Jean-Pierre X... affirme qu'il a travaillé comme manager de l'artiste M. Yannick Y... et ce dernier répond que M. Jean-Pierre X... n'a eu de relations qu'avec l'ensemble du groupe ZAM ZAM au sein duquel M. Yannick Y... évoluait alors et qu'il n'a, en aucun cas, eu le statut ou le rôle de manager, même si ce terme a été employé sur des jaquettes de disque ou dans des courriers;

Dans son rapport, M. C... a retracé les éléments factuels qu'il a obtenus à la suite de deux réunions d'expertise, les documents qu'il a reçus, lus et analysés, les réponses données aux nombreux dires de M. Jean-Pierre X... et a répondu aux questions posées par le tribunal comme suit :

*travail de M. Jean-Pierre X... en relation avec les concerts.

En 2000 et 2001, M. Jean-Pierre X... a suivi l'organisation matérielle de certains concerts , il a connaissance de toutes les dates et suit plus particulièrement celui qui va se dérouler à l'Olympia, en 2002, aucune pièce produite ne permet de vérifier si M. Jean-Pierre X... avait en amont effectué quelques taches.

C'est M. Thierry A... qui est le tourneur présenté par M. Robert D... qui a la charge de trouver les concerts et de les organiser.

*travail de M. Jean-Pierre X... en relation avec l'album

Pendant les six premiers mois d'octobre 1998 à avril 1999, M. Jean-Pierre X... assure l'interface entre M. Yannick Y..., la société EAST WEST FRANCE (le producteur) et IMG (la société gérant les intérêts sportifs de M. Yannick Y...).

Entre mai 1999 et septembre 2000, M. Jean-Pierre X... gère en priorité le planning de M. Yannick Y... en liaison avec IMG.

Il est destinataire de toutes les informations adressées à M. Yannick Y..., venant de M. Robert D..., de Sony Music et de Z... Addict et il leur transmet les choix et avis de M. Yannick Y... ; il ne travaille pas sur l'écriture des chansons et les choix artistiques sont faits par M. Yannick Y... lui-même ; le plan promotionnel de l'album est dressé par la société SONY MUSIC et les équipes du Ricard E... Z....

Il sert d'interface lors de la conclusion du contrat signé entre S.A.R.L. Z... ADDICT et M. Yannick Y..., mais il ne le négocie pas ; c'est un tiers qui finalise la rédaction et la signature.

Il n'a pas géré l'image de l'artiste auprès des médias, ce travail a été accompli par l'équipe de SONY MUSIC.

Pour l'année 2000, il a reçu de M. Yannick Y... la somme de 142.437,30F soit 20% des montants nets reçus par M. Yannick Y... au titre du décompte des royautés du 2nd semestre 2000 sur l'album "Yannick Y..." ainsi que sur les singles "Simon F... Tara" "la voix des sages" et les passages de clips en télévision.

*contenu et durée de l'engagement professionnel de M. Jean-Pierre X... auprès de M. Yannick Y....

M. Jean-Pierre X... a rencontré M. Yannick Y... à la demande des musiciens du groupe ZAM ZAM et à l'initiative de G... Cristiani ; il a commencé son travail en octobre 1998, il a suggéré d'orienter différemment la carrière de l'artiste et a fait, dans ce but, se rencontrer M. Yannick Y... et M. Robert D... .

Les musiciens et M. Yannick Y... lui-même ont reconnu dans leur lettre du 18 juin 2001 que M. Yannick Y... avait joué le rôle de manager sans pour autant s'entendre sur le contenu de cette mission faute de définition de cet emploi en France ; les envois de sony music porte la mention de M. Jean-Pierre X..., manager et la jaquette du phonogramme "Yannick Y..." indique "management : M. Jean-Pierre X...".

Il a continué à travailler auprès de M. Yannick Y... jusqu'à la lettre reçue le 30 novembre 2001

Le talent artistique de M. Yannick Y... avait déjà été révélé lors de la parution du disque SAGA AFRICA en 1991/1992 ; M. Jean-Pierre X... a conseillé à M. Yannick Y... de prendre M. Robert D... comme producteur pour orienter différemment sa carrière et donc de quitter la société EAST WEST FRANCE.

Le rapport ne prend pas parti sur la valeur de projet de contrat signé par M. Yannick Y... seul, mais qui n'est ni daté ni signé par M. Jean-Pierre X....

Il est constant que M. Jean-Pierre X... a travaillé aux côtés de M. Yannick NOAH d'octobre 1998 au 18 juin 2001 puis ponctuellement jusqu'au 30 novembre 2001 date de réception de la lettre recommandée avec accusé de réception mettant fin à leur relation.

M. Yannick Y... soutient que le rôle de M. Jean-Pierre X... n'était pas limité à une assistance à sa personne mais bien à l'ensemble du groupe ZAM ZAM.

Or, force est de constater d'une part que le groupe ZAM ZAM est fédéré autour de la personne de M. Yannick Y..., et d'autre part que c'est sur les sommes perçues par M. Yannick Y... que M. Jean-Pierre X... a été payé ; qu' enfin pour l'ensemble des intervenants, M. Jean-Pierre X... travaillait aux côtés de M. Yannick NOAH, quelle que soit la nature de son statut et que les musiciens du groupe ZAM ZAM n'ont pas jugé utile d'intervenir volontairement à la procédure aux côtés de M. Yannick NOAH pour soutenir cette affirmation.

La relation professionnelle entre M. Jean-Pierre X... et M. Yannick Y... a donc duré d'octobre 1998 au 30 novembre 2001.

M. Jean-Pierre X... verse au débat un projet de contrat non daté qui n'a pas été signé par les parties et qui résulte de négociations qu'il a menées directement avec Mme H..., gérante de la société IGM, qui s'occupe des intérêts sportifs et de l'agenda sportif de M. Yannick Y....

Ce contrat qui n'a pas été signé et qui n'a pas de date certaine, ne peut faire la loi entre les parties au sens de l'article 1134 du Code civil car il n'est pas démontré qu'il représente ce sur quoi les parties se sont effectivement entendues.

Il établit qu'il existait des négociations entre les parties pour donner au travail de M. Jean-Pierre X... aux côtés de M. Yannick NOAH un statut, et que ce dernier n'a pas entendu, en tout cas avant tout litige, reconnaître à M. Jean-Pierre X... le rôle de manager.

Des éléments récoltés par l'expert, il ressort de façon claire et non contestée que M. Jean-Pierre X... a présenté M. Robert D... à M. Yannick Y... pour qu'ils travaillent ensemble ; qu'à la suite de cette présentation, M. Yannick Y... a effectivement choisi de travailler avec ce dernier et sa société S.A.R.L. Z... ADDICT avec la quelle il a signé un contrat de représentation et de production, puis avec les sociétés avec lesquelles M. Robert D... a l'habitude de travailler, la société SONY MUSIC et que M. Yannick Y... connaissait pour avoir travaillé avec M. Jean-Jacques D..., frère de M. Robert D..., lors des tournées des Restos du Coeur, et la société TS3 et M. Thierry A..., qui exercent l'activité de tourneur.

Le contrat conclu entre M. Yannick Y... et la S.A.R.L. Z... ADDICT n'a pas été rédigé et finalisé par M. Jean-Pierre X... mais par une tierce personne ; M. Jean-Pierre X... n'a pas tenu de rôle prépondérant dans cette négociation. Il a certes tenté d'obtenir le paiement direct par la SARL Z... ADDICT de 20% des redevances revenant à M. Yannick Y... mais M. Robert D... a refusé d'intégrer cette clause dans le contrat sans avoir reçu un accord écrit express de l'artiste ; cet accord n'ayant jamais été reçu, aucun versement direct d'une telle redevance n'a été comprise dans le contrat.

Les concerts auxquels a participé M. Yannick Y... et son groupe ZAM ZAM en 2000 et 2001 ont tous été trouvés et organisés par M. Thierry A....

La promotion de l'album "M. Yannick Y... " a été le fait de la société SONY MUSIC et non de M. Jean-Pierre X....

Enfin et surtout, M. Yannick Y... a toujours effectué ses choix artistiques seul ou avec son groupe et non avec et sur les conseils de M. Jean-Pierre X....

Ainsi, il apparaît que M. Jean-Pierre X... a donné au début de leur relation professionnelle à M. Yannick Y... un excellent conseil en lui suggérant de travailler avec M. Robert D... et a ensuite servi, comme le fait la société IMG pour une autre facette des activités de M. Yannick Y..., les activités sportives, d'intermédiaire entre les différents acteurs de la production musicale et M. Yannick Y....

Cette entremise de M. Jean-Pierre X... a, comme que l'a expliqué l'expert avec précision et sur la base des documents qu'il a examinés et joints au rapport, essentiellement consisté à gérer le calendrier de M. Yannick Y... c'est-à-dire à faire concorder les dates des différents rendez-vous, à recevoir les informations, à les transmettre à M. Yannick Y... (comme ce dernier l'avait d'ailleurs expressément demandé) et à renvoyer vers les interlocuteurs les réponses ou questions de M. Yannick Y....

Ainsi quand M. Yannick Y... a dit de façon certes cruelle que M. Jean-Pierre X... avait joué un rôle de secrétaire, il a résumé la nature de l'activité de M. Jean-Pierre X... à compter de sa rencontre avec M. Robert D....

En effet, hormis le conseil initial de travailler avec M. Robert D..., aucun rôle de conseil de M. Jean-Pierre X... auprès de M. Yannick Y... dans la gestion de sa carrière n'a été démontré, ni pour la réalisation, la sortie et la promotion de l'album, ni pour l'organisation des tournées, ni pour la gestion de son image, (M. Yannick Y... qui n'a pas de manager gère seul depuis longtemps son image).

M. Jean-Pierre X... ne démontre donc pas avoir eu un rôle prépondérant dans le développement de la carrière de M. Yannick Y... et aucun fléchissement dans la carrière de ce dernier n'a été observé ou établi après le départ de M. Jean-Pierre X....

Il importe peu que les jaquettes du disque "Yannick Y..." et des singles qui en sont issus portent la mention "management :M. Jean-Pierre X... " ou que des courriers adressés par des tiers lui reconnaissent ce statut.

En effet, les mentions portées sur les jaquettes des phonogrammes valent divulgation pour ce qui est des qualités d'auteur reconnues par les textes et donc pas pour la qualité de manager qui n'est pas reconnue en France.

En tout état de cause, cette présomption de titularité d'un droit n'est pas irréfragable et il peut être apporté la preuve contraire.

Le fait que la société SONY MUSIC, tiers au contrat, adresse son courrier à M. Yannick Y... en tant que manager, ne peut créer aucun droit spécifique en faveur de ce dernier, d'autant que là encore la notion de manager n'étant pas juridiquement définie, il est impossible de savoir ce qu'elle recouvre dans l'esprit de cette société.

Enfin, comme il l'a été rappelé par l'expert et par le présent jugement, la mission du manager n'est pas définie en France ; seule la fonction d'agent d'artiste est définie et a été réglementée de façon à faire cesser les abus subis par les artistes qui consentaient à des personnes dont la compétence n'était pas toujours reconnue et avérée, des contrats aux termes desquels ils cédaient un pourcentage trop élevé sur leurs gains contre un service quasi inexistant.

L'agent d'artiste doit donc, pour pouvoir exercer en France, voir sa compétence reconnue et agréée par le ministère de la Culture et ne peut être rémunéré par le versement d'une redevance supérieure à 10% des gains de l'artiste.

Le manager ne peut donc réclamer plus que ce que la loi a accepté pour l'agent d'artiste et doit exercer une activité différente de celle de l'agent, sauf à enfreindre la loi.

En général, il représente l'artiste et le conseille sur ses choix artistiques et sur son image et met à sa disposition son carnet d'adresses et son réseau de connaissances.

En l'espèce, si M. Jean-Pierre X... a représenté M. Yannick Y... dans ses relations avec les différents acteurs de l'édition musicale, il n'a conseillé M. Yannick Y... ni dans ses choix artistiques ni dans la gestion de son image et n'a fait que mettre en relation M. Yannick Y... et M. Robert D... qui a, lui, amené les autres intervenants.

Il ne peut donc se voir reconnaître la qualité de manager ; il a exécuté le rôle de représentation de M. Yannick Y... mais n'a en aucun cas rempli un rôle de conseil dans la carrière de l'artiste, ce qui est un élément essentiel de la fonction de manager, élément qui était d'ailleurs mentionné dans le projet d'accord de début 2000.

Sur les demandes de rémunération de M. Jean-Pierre X... au titre du travail effectué.

M. Yannick Y... a reconnu le travail effectué par M. Jean-Pierre X... à ses cotés et notamment le fait qu'il a favorisé la rencontre

avec M. Robert D... ; il a en conséquence payé M. Jean-Pierre X... pour le travail effectué en lui versant une somme de 142.437,30F correspondant à 20% des royautés reçues par lui au 2nd semestre 2000 et a proposé lors de la fin de leur relation professionnelle, de verser une somme de 100.000F pour la période postérieure au 1er janvier 2001.

A supposer même que M. Jean-Pierre X... se soit vu reconnu la qualité de manager, il ne peut prétendre à un droit de suite c'est-à-dire à se voir rémunérer sur des sommes qui sont versées après la cessation de son activité car l'activité du manager n'est liée ni à la négociation des contrats qui est de la seule compétence d'un agent d'artiste, ni à la création des disques et des clips qui dépend de la société d'édition.

En conséquence, le manager ne peut être payé que par une somme forfaitaire ou par une redevance calculée sur les événements qui ont lieu pendant son activité mais pas après la cessation de ses fonctions, à la différence de l'agent d'artiste.

En l'espèce, M. Jean-Pierre X... n'a pas participé à la négociation des contrats avec SARL Z... ADDICT, ni avec la société SONY MUSIC, ni avec M. Thierry A.... Il n'est pas davantage à l'origine de l'organisation des tournées et des concerts ni de la création et de la réalisation des disques pendant la période de ses relations avec M. Yannick Y.... Il n'a ainsi pas vocation à percevoir un pourcentage sur les trois autres albums prévus au contrat signé par M. Yannick Y... avec SARL Z... ADDICT.

M. Yannick Y... n'a manifestement pas entendu voir la SARL Z... ADDICT verser 20% de ses redevances directement 0 M. Jean-Pierre X... puisqu'il n'a jamais donné son accord pour ce faire à la SARL Z... ADDICT.

L'intervention de M. Jean-Pierre X... auprès de la SARL Z... ADDICT ou de M. Robert D... était donc faite davantage dans son propre intérêt propre que dans celui de l'artiste.

Les sommes reçues représentent donc l'exact paiement de ses gages jusqu'au 31 décembre 2000 et la somme de 100.000F proposée par M. Yannick Y... lors de leur rupture correspondait à une indemnisation juste et proportionnée pour le travail fourni jusqu'au jour de la cessation de leur relation professionnelle.

Il sera en conséquence, pris acte de l'offre de M. Yannick Y... de payer à M. Jean-Pierre X... la somme de 15.245 euros représentant le prix du travail effectué pour l'année 2001.

Sur les autres demandes indemnitaires de M. Jean-Pierre X....

Il ressort par ailleurs du rapport d'expertise (page 81) que contrairement à ce que soutient M. Jean-Pierre X..., il a continué à travailler pour d'autres personnes en même temps qu'il s'occupait de M. Yannick Y....

M. Jean-Pierre X... ne démontre pas s'être exclusivement occupé de M. Yannick Y... de début octobre 1998 à fin novembre 2001 ; il ressort au contraire du rapport d'expertise qu'il a continué à faire d'autres tâches (page 81 du rapport) ; il n'établit pas davantage être le manager d'autres artistes et donc subir un préjudice de carrière.

Il sera débouté de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice de carrière.

M. Jean-Pierre X... prétend que M. Yannick Y... a opposé une résistance abusive à son égard et a eu une attitude vexatoire.

Or, il ressort des termes mêmes du présent jugement que la position de M. Yannick Y... était justifiée et qu'en l'absence de statut de manager de M. Yannick Y..., il n'avait aucune raison de remettre les relevés ADAMI ou les redditions de comptes des sociétés SONY MUSIC et MUSIC ADDICT.

Aucune résistance abusive de M. Yannick Y... n'est donc démontrée.

M. Jean-Pierre X... ne démontre pas davantage que M. Yannick Y... ait eu à son encontre un comportement vexatoire et ce d'autant moins que ce dernier a offert spontanément de l'indemniser pour le travail effectué en 2001.

En conséquence, M. Jean-Pierre X... sera débouté de l'ensemble de ses demandes fondées sur sa qualité de manager et de ses demandes de dommages et intérêts et il sera donné acte à M. Yannick Y... de ce qu'il offre de payer la somme de 15.245 euros à M. Jean-Pierre X... pour le travail effectué jusqu'au jour de la rupture de leur relation professionnelle.

sur les autres demandes.

M. Yannick Y... ne démontre pas l'intention de nuire de M. Jean-Pierre X... dans la mise en oeuvre de son action, et ce dernier a pu se méprendre sur les droits qu'il pouvait détenir.

En conséquence la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par M. Yannick Y... sera rejetée.

L'exécution provisoire est compatible avec la nature de l'affaire, elle est nécessaire et sera ordonnée.

Les conditions sont réunies pour allouer la somme de 5.000 euros à M. Yannick Y... à la charge de M. Jean-Pierre X... sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Les conditions sont également réunies pour allouer la somme de 1.500 euros à M. Thierry A... et à la société TS3 d'une part et à la S.A.R.L. Z... ADDICT d'autre part à la charge de M. Jean-Pierre X... sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

M. Jean-Pierre X... qui succombe supportera les dépens et les frais de l'expertise diligentée par M. C....

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort et par remise au greffe,

- Dit que M. Jean-Pierre X... n'avait pas le statut de manager de M. Yannick Y....

-Déboute M. Jean-Pierre X... de ses demandes et notamment de celles fondées sur sa qualité de manager et de ses demandes de dommages et intérêts.

- Donne acte à M. Yannick Y... de ce qu'il offre de payer la somme de 15.245 euros à M. Jean-Pierre X... pour le travail effectué jusqu'au 31 novembre 2001.

En tant que de besoin,

-Condamne M. Yannick Y... à payer à M. Jean-Pierre X... la somme de 15.245 euros.

-Déboute M. Yannick Y... de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

- Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision.

- Condamne M. Jean-Pierre X... à payer à M. Yannick Y... la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

-Condamne M. Jean-Pierre X... à payer à la SARL Z... ADDICT d'une part et à M. Thierry A... et à la société TS3 d'autre part la somme de 1.500 euros à chacune sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

- Déboute les parties du surplus de leurs demandes.

- Condamne M. Jean-Pierre X... aux dépens qui comprendront le coût de l'expertise.

Fait et jugé à PARIS, le TREIZE MAI DEUX MIL HUIT./.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 02/14038
Date de la décision : 13/05/2008
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2008-05-13;02.14038 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award