La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/04/2008 | FRANCE | N°07/16081

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Chambre civile 3, 16 avril 2008, 07/16081


T R I B U N A L
D E GRANDE
I N S T A N C E
D E P A R I S

3ème chambre 3ème section

No RG :
07 / 16081

No MINUTE :

Assignation du :
28 Novembre 2007

JUGEMENT
rendu le 16 Avril 2008

DEMANDERESSE

S. A. S JUNE 21
73 rue Sainte-Anne
75002 PARIS

représentée par Me Pascal WILHELM, avocat au barreau de PARIS, vestiaire K24

DÉFENDERESSES

UNION DE LA PUBLICITE EXTERIEURE
40 boulevard Malesherbes
75008 PARIS

représentée par Me Jean ENNOCHI, avocat au barreau de PARIS, ves

tiaire E. 330

S. A. Y... X...
11 Quai Léon Blum
92150 SURESNES

Société H, Intervenante Volontairement aux droits de la Société DEVARRIEUXVILLARE...

T R I B U N A L
D E GRANDE
I N S T A N C E
D E P A R I S

3ème chambre 3ème section

No RG :
07 / 16081

No MINUTE :

Assignation du :
28 Novembre 2007

JUGEMENT
rendu le 16 Avril 2008

DEMANDERESSE

S. A. S JUNE 21
73 rue Sainte-Anne
75002 PARIS

représentée par Me Pascal WILHELM, avocat au barreau de PARIS, vestiaire K24

DÉFENDERESSES

UNION DE LA PUBLICITE EXTERIEURE
40 boulevard Malesherbes
75008 PARIS

représentée par Me Jean ENNOCHI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire E. 330

S. A. Y... X...
11 Quai Léon Blum
92150 SURESNES

Société H, Intervenante Volontairement aux droits de la Société DEVARRIEUXVILLARET
11 square Léon Blum
92150 SURESNES

représentées par Me Olivier BARATELLI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire D. 1395

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Elisabeth BELFORT, Vice-Président, signataire de la décision
Agnès THAUNAT, Vice-Président
Michèle PICARD, Vice-Président,

assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision

DEBATS

A l'audience du 29 Janvier 2008
tenue en audience publique

JUGEMENT

Prononcé par remise de la décision au greffe
Contradictoire
en premier ressort

FAITS ET PRETENTIONS DES PARTIES :

La société JUNIE 21 a assigné selon la procédure à jour fixe, le 28 novembre 2007 l'Union de la Publicité Extérieure (ci-après UPE) et la société Y... X... (ci-après DV) aux fins de voir le tribunal au visa des articles L 113-2, L 121-1 du Code de Propriété Intellectuelle et 1382 du code civil

*condamner l'UPE à faire publier le message suivant :

" Lors de la 34ème édition du Grand Prix de l'affichage qui s'est tenu à Barcelone du 27 au 29 septembre 2007, deux campagnes Transilien (" Utiles " et " Scènes ") ont été récompensées respectivement d'un Prix et d'une Mention. Ces campagnes par erreur ont été attribuées à l'agence Devarrieuxvillaret alors qu'elles ont été, en réalité, conçues et réalisées exclusivement par l'Agence JUNE 21 " ;

*dire que cette publication devra intervenir dans les huit jours de la signification du jugement à intervenir, sous astreinte de 10. 000 euros par jour de retard et paraître :

- d'une part en première page du site de l'UPE pendant un durée d'un mois ;

- d'autre part dans trois journaux professionnels et trois quotidiens d'informations générales choisis par elle et aux frais de l'UPE, l'insertion devant occuper au moins 1 / 2 page desdits journaux ou quotidiens ;

- condamner l'Agence DV à lui payer un euro à titre de dommages et intérêts ;

- condamner l'Agence Devarrieuxvillaret à ne jamais faire état sur quelque support que ce soit dans aucune criconstance, aux récompenses qui lui ont été attribuées par le 34ème Prix de l'Affichage et ce, sous astreinte de 150. 000 euros par infraction constatée,

- condamner cette même agence et l'UPE à lui payer chacune la somme de 15000 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

le tout sous le bénéfice de l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

La société JUNE 21 expose qu'elle est une agence de publicité qui a été fondée en mars 2007 par M. Jean-Pierre X..., ancien co-fondateur avec M. Y... de l'Agence DV ; qu'elle a débuté son activité en juin 2007 et s'est vu confier par la SNCF la conception et la réalisation d'un ensemble de campagnes de presse et d'affichage pour le Transilien SNCF intitulé " SENS 2007 " et comprenant notamment la campagne d'affichage " Scènes " et " Utiles " ; que ces deux campagnes ont été récompensées par un Prix et une Mention du jury au Palmarès du 34ème Grand Prix d'Affichage organisé par l'UPE mais que la paternité de celles-ci a été attribuée à torts à l'Agence DV et non à elle ; que malgré sa réclamation, l'UPE n'a pas rectifié l'erreur, ce qui explique l'introduction de la présente instance.

La société UPE soutient :

- à titre liminaire qu'il convient de renvoyer l'affaire devant la 4ème chambre de ce Tribunal du fait de la connexité de l'affaire avec le litige soumis à cette formation ou à tout le moins de sursoir à statuer ;

- au fond qu'elle n'a commis aucune faute, les dossiers adressés par la société JUNE 21 à la société TNS MEDIA INTELLIGENCE et portant sur les campagnes publicitaires en cause ne comportant aucune signature ; qu'elle a estimé que ces campagnes constituaient le prolongement des campagnes précédentes réalisées par l'Agence DV et signées par celle-ci ; que la presse s'étant fait l'écho de la séparation de MM. Y... et X..., le jury a décidé d'attribuer le prix à ces deux personnes pensant que l'Agence DV avait disparu et sachant qu'un différend portant sur la propriété de la campagne publicitaire Transilien était porté devant le tribunal.

Aussi, l'UPE plaide principalement le renvoi devant la 4ème chambre, à défaut le sursis à statuer et très subsidiairement le débouté des demandes et la condamnation de la société JUNE 21 à lui payer une indemnité de 5000 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

La société H qui intervient volontairement à l'instance aux droits de l'Agence Y... X... par suite de la transmission universelle de patrimoine intervenue à la suite de la décision du 30 novembre 2007 de dissolution sans liquidation de l'Agence DV et l'Agence DV rappellent sur les faits que :

- fin 2006, début 2007 un certain nombre de personnes de l'Agence DV ont démissionné pour rejoindre M. X... qui avait quitté en décembre 2006 ses fonctions de Directeur Commercial, de Président et d'Administrateur de la société DV pour créer une agence concurrente, la société JUNE 21 ; que cette dernière a détourné un certain nombre de clients dont notamment la SNCF ainsi que le concept de la campagne " transilien " et s'est ainsi approprié le travail et la valeur économique créés par l'Agence DV ; que M. Y... faisait partie à titre personnel du jury du Grand Prix de l'Affichage et a ainsi pu se rendre compte que la société JUNE 21 s'était appropriée la campagne " Transilien " ; que l'Agence DV a assigné MM. X... et Z... et leur société JUNE 21 en concurrence déloyale, instance actuellement pendante devant la 4ème chambre du tribunal (RG 07 / 13538).

Aussi, ces défenderesses demandent le dessaisissement de la chambre et le renvoi de la présente affaire devant cette formation du tribunal en application de l'article 101 du Code de Procédure Civile et la condamnation de la société JUNE 21 à payer à la société H une somme de 2500 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

La société JUNE 21 réplique :

*que le différend porté devant la 4ème chambre du tribunal ne porte pas sur la paternité des campagnes publicitaires " Transilien " mais sur des griefs de concurrence déloyale pour la reprise des " idées publicitaires " qui étaient à la base de la précédente campagne " Transilien " réalisée par l'Agence DV ; que dès lors, il n'y a aucun risque de contrariété de décisions ;

*les pièces produites établissent que c'est bien elle qui a pris l'initiative de la conception et de la réalisation des campagnes Transilien " Utiles " et " Scènes " dont elle a piloté l'ensemble du processus créatif et technique ; ces campagnes ainsi qu'il est traditionnel en matière de publicité, doivent être qualifiées d'oeuvres collectives ;

*elle jouit dès lors du droit moral y afférent en application de l'article L 121-1 du Code de Propriété Intellectuelle et l'UPE a porté atteinte à celui-ci en attribuant une paternité erronée à ces oeuvres et en refusant de procéder à une rectification malgré les demandes amiables qui lui ont été faites ;

*si les campagnes n'étaient pas signées, il n'en reste pas moins vrai que c'est elle qui avait adressé le dossier dans lequel figuraient les visuels des deux volets de la campagne accompagnés d'une fiche technique faisant clairement apparaître son nom ; le fait de ne pas signer les campagnes ne sauraient la priver de son droit de paternité.

Aussi, la société JUNE 21 maintient ses demandes et dirige sa demande de condamnation au paiement d'un euro à titre de dommages et intérêts à l'encontre de la société H.

SUR CE,

*sur l'intervention volontaire de la société H :

Il y a lieu de donner acte à la société H de son intervention volontaire comme venant aux droits de la société Y... X... par transmission universelle du patrimoine de cette dernière, suite à la décision du 30 novembre 2007 de dissolution anticipée, décision publiée le 3 décembre 2007 et non contestée dans le délai de 30 jours de l'article 1844-5 du Code Civil.

*sur l'exception de connexité :

L'article 101 du Code de Procédure Civile dispose que s'il existe entre des affaires portées devant deux juridictions distinctes un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire et juger ensemble, il peut être demandé à l'une de ces juridictions de se dessaisir et de renvoyer en l'état la connaissance de l'autre juridiction.

Cet article est inapplicable en l'espèce, les deux affaires dont il est demandé le rapprochement ayant été portées devant la même juridiction.

Il s'agit en fait d'apprécier s'il est d'une bonne administration de la justice de redistribuer la présente affaire à la 4ème chambre.

Par l'assignation du 26 septembre 2007 placée devant cette dernière formation, la société DV demande au tribunal de sanctionner le comportement déloyal de Jean-Pierre X..., Jean-Marc Z... et de la société JUNE 21 ainsi que la violation par Jean-Pierre X... de son obligation de loyauté en qualité de dirigeant de l'agence DV. La société DV fait grief aux défendeurs d'avoir débauché des salariés entraînant sa désorganisation, d'avoir capté des clients et fournisseurs par des comportements déloyaux et d'avoir repris de manière fautive et injustifiée le travail et la valeur économique d'autrui et notamment les idées publicitaires conçues et développées par elle dans la campagne " transilien " 2005 pour la campagne " transilien " 2007.

Le tribunal considère au vu de ces éléments qu'il n'y a aucun risque de contrariété de décisions avec celle devant intervenir à la 4ème chambre du tribunal, cette dernière n'étant pas saisie d'une revendication de paternité de la campagne " Transilien " 2007 par l'Agence DV mais uniquement en déclaration de responsabilité du fait du comportement parasitaire de JUNE 21 à l'occasion de celle-ci.

Dans ces conditions, il n'y a pas lieu à redistribution ni à sursis à statuer.

*sur la revendication de paternité :

Il ressort des pièces produites par la société JUNE 21 (premières esquisses manuscrites des campagnes d'affichage Transilien UTILES et SCENES, maquettes " UTILES ", maquettes " SCENES ", courriels échangés avec la SNCF, factures émises par JUNE 21, factures du photographe) et du contenu de l'assignation délivrée par la société DV précédemment rappelée que c'est bien la société JUNE 21 qui est l'auteur de la campagne publicitaire " Transilien " 2007, celle-ci ayant été réalisée à son initiative, sous sa direction et divulguée à la SNCF et à la société TNS Media intelligence, société déléguée par l'UPE pour l'organisation du Grand Prix de l'Affichage 2007, sous son nom.

De plus, il y lieu de relever que la société H qui vient aux droits de la société DV ne revendique pas de droits moraux sur les deux oeuvres en cause pour le compte de son ayant-cause.

Aussi, en application de L 113-5 du Code de Propriété Intellectuelle, la société JUNE 21 est investie des droits d'auteur et notamment du droit à la paternité.

Dans ces conditions, la société JUNE 21 est bien-fondée à solliciter la rectification de paternité relative à ses deux oeuvres primées et attribuées à torts à la société DV.

*sur les mesures réparatrices :

Il y a lieu de faire droit aux mesures de publicité sollicitées par la société JUNE 21 qui sont seules susceptibles de rétablir aux yeux du public sa paternité sur les oeuvres primées ainsi qu'à la mesure d'interdiction pour éviter la poursuite de l'atteinte à son droit moral.

L'erreur d'attribution de paternité étant imputable à l'UPE et à M. Y..., membre du jury à titre personnel et non présent à la cause, la demande de condamnation à dommages et intérêts dirigée à l'encontre de la société H est rejetée.

L'équité commande d'allouer à la société JUNE 21 une indemnité de 10. 000 euros au titre des frais irrépétibles qu'elle a exposés dans la présente procédure. Cette condamnation sera supportée par moitié par chaque défenderesse.

Eu égard à la nature de l'affaire, il y a lieu d'ordonner son exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS LE TRIBUNAL,
statuant contradictoirement, par décision en premier ressort et remise au greffe,
sous le bénéfice de l'exécution provisoire,

Déclare recevable l'intervention volontaire de la société H comme venant aux droits de la société DV dissoute,

Rejette l'exception de connexité et le sursis à statuer ;

Condamne l'UPE à faire publier le message suivant :

" Lors de la 34ème édition du Grand Prix de l'affichage qui s'est tenu à Barcelone du 27 au 29 septembre 2007, deux campagnes Transilien (" Utiles " et " Scènes ") ont été récompensées respectivement d'un Prix et d'une Mention. Ces campagnes par erreur ont été attribuées à l'agence Devarrieuxvillaret alors qu'elles ont été, en réalité, conçues et réalisées exclusivement par l'Agence JUNE 21 " ;

Dit que cette publication devra intervenir dans les huit jours de la signification du jugement à intervenir, sous astreinte de 10. 000 euros par jour de retard à paraître :

- d'une part en première page du site de l'UPE pendant un durée d'un mois ;

- d'autre part dans trois journaux professionnels et trois quotidiens d'informations générales choisis par elle et aux frais de l'UPE, l'insertion devant occuper au moins 1 / 2 page desdits journaux ou quotidiens ;

Condamne la société H venant aux droits de l'Agence Devarrieuxvillaret à ne jamais faire état sur quelque support que ce soit dans aucune circonstance, aux récompenses qui ont été attribuées à cette Agence par le 34ème Prix de l'Affichage et ce, sous astreinte de 150. 000 euros par infraction constatée,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne in solidum la société H et l'UPE à lui payer chacune la somme de 5000 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux dépens

Fait et Jugé à Paris, le 16 avril 2008,

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 07/16081
Date de la décision : 16/04/2008
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2008-04-16;07.16081 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award