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11/03/2008 | FRANCE | N°07/14538

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Chambre civile 3, 11 mars 2008, 07/14538


T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

3ème chambre 1ère section

No RG :

07/14538

No MINUTE :

Assignation du :

24 Octobre 2007

JUGEMENT

rendu le 11 Mars 2008

DEMANDERESSE

SOCIETE FRANCAISE DU RADIOTELEPHONE -SFR

42 avenue de Friedland

75008 PARIS

représentée par Me Isabelle LEROUX - BIRD et BIRD, avocat au barreau de PARIS, vestiaire R.255

DÉFENDERESSE

Madame Jennifer X...

...

77370 MAISON ROUGE

représentée par Me Redou

ane MAHRACH - RMS Avocats, avocat au barreau de PARIS, vestiaire A 820

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Marie COURBOULAY, Vice Présidente

Florence GOUACHE, Juge

Cécile VITON, Juge

assi...

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

3ème chambre 1ère section

No RG :

07/14538

No MINUTE :

Assignation du :

24 Octobre 2007

JUGEMENT

rendu le 11 Mars 2008

DEMANDERESSE

SOCIETE FRANCAISE DU RADIOTELEPHONE -SFR

42 avenue de Friedland

75008 PARIS

représentée par Me Isabelle LEROUX - BIRD et BIRD, avocat au barreau de PARIS, vestiaire R.255

DÉFENDERESSE

Madame Jennifer X...

...

77370 MAISON ROUGE

représentée par Me Redouane MAHRACH - RMS Avocats, avocat au barreau de PARIS, vestiaire A 820

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Marie COURBOULAY, Vice Présidente

Florence GOUACHE, Juge

Cécile VITON, Juge

assistées de Léoncia BELLON, Greffier

DEBATS

A l'audience du 30 Janvier 2008

tenue publiquement

JUGEMENT

Prononcé par remise au greffe

Contradictoire

en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

La Société Française du Radiotéléphone - SFR (ci-après SFR) propose des services de téléphonie mobile et de transmission de données pour les particuliers, les professionnels et les entreprises. Elle est titulaire de la marque française semi-figurative "SFR" déposée le 27 novembre 2002 et enregistrée sous le no FR 3196683 pour les produits des classes 9, 16, 18, 25, 28, 35, 36, 38, 39, 41 et 42.

Estimant que Madame Jennifer X... reproduisait cette marque sans son autorisation pour vendre, sous les pseudonymes "titifraisedeslunes" et "77jenny-juliebaby" sur le site internet http://www.ebay.fr, une lettre-type permettant de résilier, sous certaines modalités, ses abonnements, SFR l'a fait assigner, par acte du 24 octobre 2007 selon la procédure à jour fixe pour l'audience du 18 décembre 2007, afin d'obtenir du Tribunal, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, qu'il :

condamne Madame X... à lui payer les sommes suivantes:

- 55.000 euros en réparation des actes de contrefaçon ou d'exploitation injustifiée, soit de l'atteinte portée à son droit de marque,

- 20.000 euros en réparation du préjudice subi à raison des actes parasitaires,

ordonne à Madame X... d'avoir à communiquer en cours de délibéré les modèles de lettre litigieuses commercialisées,

interdise à Madame X... d'utiliser, de reproduire ou d'imiter la marque "SFR" revendiquée ou toute autre marque dont est titulaire SFR, sous quelque forme que ce soit et à quelque titre que ce soit, pour commercialiser des modèles de lettres de résiliation de contrats d'abonnement SFR, et ce sous astreinte de 2.000 euros par infraction constatée,

ordonne la publication du jugement à intervenir dans cinq quotidiens ou revues hebdomadaires ou mensuelles, au choix de la demanderesse, à hauteur de 5.000 euros HT par insertion, aux frais avancés du défendeur, et ce à titre de dommages et intérêts complémentaires,

ordonne la publication du jugement à intervenir sur un quart de la page d'accueil du site internet de la société Ebay, accessible à l'adresse http://www.ebay.fr, dans un délai de 8 jours à compter de sa signification, pendant une durée d'un mois sans interruption, et ce sous astreinte de 2.000 euros par jour de retard,

dise que l'ensemble des condamnations portera intérêt au taux légal à compter de la signification du jugement à intervenir,

se réserve la liquidation des astreintes ordonnées,

condamne Madame X... à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens en ce compris les frais de constat.

L'affaire était renvoyée à l'audience de jour fixe du 30 janvier 2008.

Dans ses dernières conclusions en date du 16 janvier 2008, la société SFR fait valoir que Mme X... a vendu au moins 156 modèles de lettre de résiliation pour un prix situé entre 3,90 euros et 4,30 euros ; que le logo SFR était reproduit sur chacune de ces offres; que Madame X... a commis des actes de contrefaçon au sens de l'article L.713-2 du code de la propriété intellectuelle, en ayant reproduit, sans son autorisation, la marque semi-figurative "SFR" pour vendre sur le site internet www.ebay.fr un modèle de lettre de résiliation d'abonnements SFR, c'est à dire pour désigner des services identiques à ceux désignés dans l'enregistrement de cette marque à savoir notamment des abonnements téléphoniques, conseils et expertises techniques dans le domaine des télécommunications et des réseaux informatiques ou de transmission de données.

Si le Tribunal devait considérer que les services en cause ne sont pas identiques mais similaires, SFR estime que les actes commis par Madame X... constituent la contrefaçon de sa marque semi-figurative "SFR" au sens de l'article L.713-3 du code de la propriété intellectuelle dans la mesure où la reproduction de cette marque est de nature à engendrer un risque de confusion dans l'esprit du public qui est porté à croire que Madame X... a été autorisée à la reproduire.

A titre subsidiaire, si le Tribunal considérait que les produits et services en cause ne sont ni identiques ni similaires, SFR soutient, sur le fondement de l'article L.713-5 alinéa 1 du code de la propriété intellectuelle, que Madame X... a exploité la marque semi-figurative "SFR" jouissant d'une notoriété considérable afin d'en tirer indûment profit en valorisant son offre de vente et alors qu'une telle reproduction n'était pas nécessaire. SFR estime que cette exploitation injustifiée porte atteinte à la valeur économique de la marque et lui cause un préjudice.

SFR soutient que constituent des agissements parasitaires lui causant un préjudice commercial important, le fait de tirer profit de la notoriété de SFR pour proposer à la vente des lettres de résiliation, qui se vendront nécessairement en grand nombre en raison des nombreux abonnés SFR, et le fait d'inciter ces abonnés à résilier leur abonnement au profit notamment d'autres opérateurs.

SFR répond à Mme X... que celle-ci ne peut prétendre avoir développé un service entrant dans la catégorie des conseils juridiques puisque cette activité est réglementée ; que l'annonce litigieuse qui figure sur e-bay était située dans la catégorie téléphonie et non conseil ; que la marque reproduite par Mme X... a bine été utilisée dans le cadre de la vie des affaires puisque la défenderesse a bien vendu les lettres de résiliation.

SFR conteste que la reproduction du logo soit une référence nécessaire telle que le prévoit l'article L 713-6b).

SFR réplique encore qu'elle avait répondu à son obligation d'information telle que prévue à l'article L 121-84 du Code de la consommation puisque la possibilité de résiliation du contrat est mentionnée au bas des factures qu'elle adresse à ses clients.

SFR a demandé au tribunal qu'il:

Condamne Madame X... à lui payer les sommes suivantes:

- 15.000 euros en réparation des actes de contrefaçon ou d'exploitation injustifiée, soit de l'atteinte portée à son droit de marque,

- 10.000 euros en réparation du préjudice subi à raison des actes parasitaires,

Ordonne à Madame X... d'avoir à communiquer en cours de délibéré les modèles de lettre litigieuses commercialisées,

interdise à Madame X... d'utiliser, de reproduire ou d'imiter la marque "SFR" revendiquée ou toute autre marque dont est titulaire SFR, sous quelque forme que ce soit et à quelque titre que ce soit, pour commercialiser des modèles de lettres de résiliation de contrats d'abonnement SFR, et ce sous astreinte de 2.000 euros par infraction constatée,

Ordonne la publication du jugement à intervenir dans cinq quotidiens ou revues hebdomadaires ou mensuelles, au choix de la demanderesse, à hauteur de 3.000 euros HT par insertion, aux frais avancés du défendeur, et ce à titre de dommages et intérêts complémentaires,

Ordonne la publication du jugement à intervenir sur un quart de la page d'accueil du site internet de la société Ebay, accessible à l'adresse http://www.ebay.fr, dans un délai de 8 jours à compter de sa signification, pendant une durée d'un mois sans interruption, et ce sous astreinte de 2.000 euros par jour de retard,

Dise que l'ensemble des condamnations portera intérêt au taux légal à compter de la signification du jugement à intervenir,

se réserve la liquidation des astreintes ordonnées,

Condamne Madame X... à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens en ce compris les frais de constat.

Ordonne l'exécution provisoire de la décision à intervenir

Condamne Mme X... aux entiers dépens dont distraction au profit de Mo Isabelle LEROUX, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.

Dans ses conclusions récapitulatives du 24 janvier 2008, Mme Jennifer X... fait valoir qu'étant à la recherche d'un téléphone portable d'occasion, elle a tapé le mot clé "SFR" sur le site e-bay, qu'elle a découvert un moyen légal de résilier sans frais et avant terme certains abonnements SFR, qu'elle a acheté cette lettre de résiliation et a décidé de mettre en ligne cette annonce, qu'elle a vendu 156 fois pour un prix unitaire de 3,50 euros en moyenne.

Elle conteste avoir commis une contrefaçon tant par imitation ou par similitude, et avoir exploité de façon injustifiée la marque SFR au motif que la reproduction du logo est une référence nécessaire et qu'il n'existe aucun risque de confusion dans l'esprit du public qui ne peut croire que SFR vend sur internet des lettres de résiliation des abonnements qu'elle propose.

Elle a encore nié avoir commis des agissements parasitaires et précisé que SFR aurait pu réduire son préjudice en la mettant en demeure de cesser et en informant ses abonnés des droits nés à la suite du changement des conditions contractuelles de fourniture de services.

Elle forme des demandes reconventionnelles en raison du caractère abusif de la procédure intentée à son encontre et demande au tribunal d'enjoindre SFR d'informer ses abonnés à l'avenir d'une manière conforme à la loi, de la possibilité de résilier son abonnement.

Mme Jennifer X... a sollicité du tribunal de :

Constater l'absence d'acte de contrefaçon commis par Mme Jennifer X... du fait de la mise en ligne de lettres de résiliation d'abonnement SFR portant la marque semi-figurative SFR.

Constater l'absence d'actes parasitaires commis par Mme Jennifer X... du fait de la mise en ligne de lettres de résiliation d'abonnement SFR portant la marque semi-figurative SFR.

Constater l'absence d'utilisation injustifiée de la marque semi-figurative SFR par Mme Jennifer X... .

Constater la référence nécessaire à la marque semi-figurative SFR pour désigner les services de l'opérateur de téléphonie mobile.

Constater l'absence de préjudice de SFR et à tout le moins, l'absence de lien direct de causalité avec les faits reprochés à Mme Jennifer X...,

En conséquence,

Débouter SFR de l'ensemble de ses demandes.

constater le manquement de SFR à son obligation d'information loyale lors des changements de ses conditions contractuelles découlant de l'article L 121-84 du Code de la consommation.

En conséquence,

Condamner SFR à payer à Mme Jennifer X... la somme de 10.000 euros en réparation du préjudice subi par Mme Jennifer X....

Constater que l'article 12.2.4 des conditions générales de SFR ne respecte pas les dispositions de l'article L 121-84 du Code de la Consommation.

En conséquence,

Enjoindre à SFR de mettre ses conditions générales en accord avec l'article L 121-84 du Code de la Consommation sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard et cela 30 jours après la signification du jugement à intervenir.

Condamner SFR à payer à Mme Jennifer X... la somme de 10.000 euros pour le préjudice subi du fait de la procédure abusive de SFR.

Condamner SFR au paiement de la somme de 3.000 euros pour procédure abusive conformément à l'article 32-1 du nouveau Code de procédure civile.

Condamner SFR à payer à Mme Jennifer X... la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Condamner SFR aux dépens dont distraction au profit de Mo Redouane MAHRACH (RMS AVOCATS), par application de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile;

MOTIFS

Il ressort du procès-verbal de constat établi le 28 septembre 2007 par Maître Jean-Daniel Z..., Huissier de Justice, que sur le site internet accessible à l'adresse http://www.ebay.fr, un vendeur sous les pseudonymes "titifraisedeslunes" et "77jenny-juliebaby" propose à la vente un objet intitulé "Résiliation SFR avant la fin du contrat 100% légal" à un prix compris entre 3 et 4,50 euros, en ayant reproduit au droit de l'objet vendu le logo de SFR, en lettres blanches SFR sur fond carré rouge. L'objet vendu est un modèle de lettre de résiliation d'un abonnement SFR sous certaines conditions.

Par courrier du 8 octobre 2007, la société ebay a indiqué au conseil de SFR que les pseudonymes "titifraisedeslunes" et "77jenny-juliebaby" était utilisé par Madame Jennifer X....

- sur la demande de SFR au titre de la contrefaçon fondée sur l'article L.713-2 du code de la propriété intellectuelle :

Aux termes de l'article L.713-2 du code de la propriété intellectuelle, sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, la reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, même avec l'adjonction de mots tels que "formule, façon, système, imitation, genre, méthode", ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l'enregistrement.

En l'espèce, il ressort du procès-verbal de constat établi le 28 septembre 2007 par Maître Jean-Daniel Z..., Huissier de Justice, que Madame Jennifer X... a proposé à la vente un modèle de lettre de résiliation des abonnements SFR en ayant reproduit à l'identique, sans l'autorisation de SFR, sa marque semi-figurative SFR no FR 3196683.

S'il s'agit d'un modèle de lettre ayant pour objet la résiliation des abonnements SFR, il ne propose pas d'abonnement téléphonique et il n'est pas établi qu'il contient des conseils ou d'expertises techniques dans le domaine des télécommunications et des réseaux informatiques ou de transmission de données.

SFR n'établit donc pas que la reproduction et l'usage de la marque semi-figurative "SFR"a été faite par Madame X... pour les produits ou services identiques à ceux désignés dans l'enregistrement, à savoir les produits ou services des classes 9, 16, 18, 25, 28, 35, 36, 38, 39, 41 et 42.

Il convient donc de rejeter la demande de SFR au titre de la contrefaçon fondée sur les dispositions de l'article L.713.2 du code de la propriété intellectuelle.

- sur la demande de SFR au titre de la contrefaçon fondée sur l'article L.713-3 du code de la propriété intellectuelle :

Aux termes de l'article L.713-3 du code de la propriété intellectuelle, sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public, la reproduction l'usage ou l'apposition d'une marque, ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l'enregistrement.

En l'espèce, SFR n'établit pas que l'usage litigieux a été fait pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l'enregistrement, soit les produits ou services des classes 9, 16, 18, 25, 28, 35, 36, 38, 39, 41 et 42.

Il importe peu que Mme Jennifer X... affirme inscrire ses ventes dans le cadre d'une activité de conseil juridique et que du fait de la réglementation de cette activité, elle soit en infraction à la loi ; en effet, d'une part, il n'appartient pas à SFR de faire respecter la réglementation en matière d'activité de conseil juridique et d'autre part, il est manifeste que Mme Jennifer X... n'exerce pas d'activité de conseil juridique mais se situe dans le cadre de la vente d'imprimé type comme le font toutes les libraires qui vendent des "baux types" ou des "contrats type".

Au surplus, le public ne peut raisonnablement penser que Madame X... a été autorisée par SFR à reproduire la marque semi-figurative "SFR" pour vendre un modèle de lettre de résiliation ayant pour objectif de permettre la résiliation d'abonnements SFR. Il ne peut donc résulter de l'usage litigieux un risque de confusion dans l'esprit du public.

Il y a donc lieu de rejeter les demandes de SFR au titre de la contrefaçon fondée sur les dispositions de l'article L.713.3 du code de la propriété intellectuelle.

- sur les demandes de SFR au titre de l'exploitation injustifiée :

L'article L.713-5 du code de la propriété intellectuelle prévoit que l'emploi d'une marque jouissant d'une renommée pour des produits ou services non similaires à ceux désignés dans l'enregistrement engage la responsabilité civile de son auteur s'il est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou si cet emploi constitue une exploitation injustifiée de cette dernière.

En l'espèce, il ressort des pièces produites aux débats que la marque semi-figurative "SFR" enregistrée sous le no FR 3196683 est utilisée par la société SFR dans le cadre de son activité et que cette société a réalisé des investissements publicitaires importants et a entrepris depuis plusieurs années des campagnes nationales pour développer son activité et la connaissance de son logo (nombreux articles versés au débat) . Cette marque jouit dès lors en France d'une renommée.

Mme Jennifer X... n'a d'ailleurs pas, dans les écritures relatives à ce chef de demande qu'elle avait largement développées avant l'audience de plaidoiries, contesté la renommée de la marque ; elle ne l'a fait qu'à l'audience pour tenter d'obtenir une demande de renvoi.

Il convient de préciser que logo reproduit a bien été utilisé dans la vie des affaires car Madame X... n'a pas mis en ligne un accès gratuit à un modèle de résiliation ce que faisait le blog des salariés de SFR en colère, mais a mis en vente contre paiement des modèles de lettre de résiliation, et le faible coût de la lettre est sans influence sur le fait que le logo a bien été utilisé dans la vie des affaires.

Le modèle de lettre vendu par Madame X... en utilisant cette marque a pour objet de permettre la résiliation des abonnements SFR mais il n'est pas établi qu'il incite à cette résiliation ni à la souscription d'un abonnement auprès d'autres opérateurs de téléphonie. Cette lettre est vendue sur le site de vente ebay et s'adresse à des personnes qui désirant pour des motifs qui leur sont propres à résilier leur abonnement, cherchent un modèle leur permettant d'adresser leur demande à SFR. L'emploi de la marque semi-figurative "SFR" n'est donc pas de nature à porter préjudice à SFR.

Il n'était cependant pas nécessaire pour Madame X... d'utiliser cette marque pour vendre son modèle de lettre.

En effet, elle décrit elle-même qu'elle a trouvé la lettre de résiliation qu'elle a utilisée en tapant le terme SFR comme mot-clé et non en cherchant lettre de résiliation SFR ou en s'arrêtant au logo.

La reproduction du logo au droit de son annonce n'a pour effet que de rendre facilement identifiable l'objet de la lettre vendue, à savoir la résiliation des abonnements SFR, et d'en faciliter ainsi la vente.

L'emploi de la marque semi-figurative "SFR" jouissant d'une renommée pour vendre une lettre de résiliation d'abonnements SFR constitue dès lors une exploitation injustifiée de cette dernière de nature à engager la responsabilité civile de Madame X....

Cette exploitation injustifiée entraîne une dilution de la marque semi-figurative "SFR" en ce qu'elle perd son aptitude à évoquer immédiatement les produits de SFR et une diminution de sa valeur économique.

Il convient donc de condamner Madame X... à payer à SFR la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice subi suite à l'atteinte portée à sa marque semi-figurative "SFR" no FR 3196683.

Conformément aux dispositions de l'article 1153-1 du code civil, cette somme portera intérêts au taux légal à compter du présent jugement.

Il y a lieu de faire interdiction à Madame X... d'utiliser, de reproduire ou d'imiter la marque semi-figurative "SFR" no FR 3196683 sous quelque forme que ce soit et à quelque titre que ce soit pour commercialiser des modèles de lettres de résiliation de contrats d'abonnements SFR, et ce sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée passé un délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement. Il convient de se réserver la liquidation de l'astreinte.

Compte tenu de la présente décision, il n'y a pas lieu d'ordonner à Madame X... d'avoir à communiquer en cours de délibéré les modèles de lettre litigieuses commercialisées. SFR sera déboutée de cette demande.

- sur les demandes de SFR au titre des actes parasitaires :

SFR n'établit pas que Madame X..., en vendant le modèle de lettre de résiliation d'abonnements SFR, a incité les abonnés de cette société à rompre leurs abonnements afin notamment de pouvoir souscrire d'autres abonnements auprès d'autres opérateurs de téléphonie. Elle leur a donné les moyens qu'elle estimait justifiés pour résilier les abonnements et ce dans le respect des formes légales de la résiliation et de sorte à bénéficier des avantages que SFR offre à tout nouvel adhérent.

Enfin, le procès-verbal de constat établi le 28 septembre 2007 par Maître Jean-Daniel Z..., Huissier de Justice, fait état de l'offre à la vente d'une lettre. SFR n'établit pas le nombre d'abonnements qui auraient été résiliés grâce à ce modèle de lettre, puis éventuellement repris pour obtenir un nouveau portable.

SFR ne donne pas d'élément supplémentaire sur le surcoût que représenterait pour elle la remise d'un portable nouveau pour un euro lors de la souscription d'un nouvel abonnement.

Faute pour SFR d'établir que Madame X... a agi dans une intention malveillante lui ayant causé un préjudice commercial, il convient de la débouter de sa demande de dommages et intérêts au titre des actes parasitaires.

-sur les demandes reconventionnelles de Mme Jennifer X... .

Mme Jennifer X... qui a succombé aux demandes de SFR est mal fondée à réclamer des dommages et intérêts pour procédure abusive ou une condamnation à une'une amende civile, la délivrance d'une mise en demeure préalable à la délivrance d'une assignation n'étant pas une condition nécessaire pour agir en contrefaçon et voir ses droits respectés, même si au vu des circonstances de l'espèce, il peut être considéré que l'exploitation injustifiée du logo aurait cessé plus rapidement.

Mme Jennifer X... procède par voie d'affirmation en prétendant disposer elle-même d'un abonnement à SFR et avoir subi un préjudice du fait de l'absence d'information donnée par SFR sur les conditions particulières de résiliation qui s'ouvraient à ses abonnés du fait d'un changement unilatéral dans les conditions contractuelles. Elle ne verse pas au débat ses différents contrats avec SFR et la seule pièce produite en pièce 13 est une facture au nom de Mme Amal A... en date du 23 juillet 2007.

Faute de démontrer être titulaire d'un tel contrat, elle n'a pas d'intérêt à agir et est irrecevable à réclamer quelle que indemnité que ce soit de ce chef, d'autant qu'elle n'a subi aucun préjudice puisqu'en définitive, elle prétend avoir pu résilier son contrat pour en souscrire un nouveau et acquérir pour un euro de plus un nouveau téléphone.

La demande de Mme Jennifer X... relative à la carence de SFR dans l'exécution de son obligation d'information tendant à voir le tribunal lui enjoindre de prévenir à l'avenir ses abonnés d'une manière conforme à la loi est fondée sur l'article L 121-84 du code de la consommation.

Or, là encore, Mme Jennifer X... n'a aucune qualité à agir au nom de tous les abonnés de SFR pour obtenir que SFR remplisse son obligation d'information telle que prévue à l'article L 121-19 et L 121-84-10 du code de la consommation , seule une association de consommateurs telle UFC est habilitée à agir au nom de l'ensemble des consommateurs dans le but de voir éventuellement modifier des clauses ou des pratiques commerciales et ce en application de l'article L 421-1 du Code de la consommation.

Elle sera en conséquence déclarée irrecevable à agir sur ce fondement à l'encontre de SFR.

- sur les autres demandes :

Les circonstances de l'affaire n'imposent pas d'ordonner les mesures de publications judiciaires sollicitées par SFR. Elle sera déboutée de ces demandes.

En application des dispositions de l'article 515 du Nouveau code de procédure civile, il convient d'ordonner l'exécution provisoire de la présente décision qui est compatible avec la nature de l'affaire et nécessaire eu égard aux circonstances de l'affaire.

Conformément aux dispositions de l'article 696 du Nouveau Code de Procédure Civile, Madame Jennifer X..., partie perdante, sera condamnée aux entiers dépens.

Il apparaît inéquitable de laisser à SFR la charge des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens. Madame Jennifer X... sera condamnée à lui payer la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant par jugement contradictoire, en premier ressort et mis à la disposition du public par le greffe le jour du délibéré,

Rejette la demande de la Société Française de Radiotéléphone au titre de la contrefaçon fondée sur les dispositions des articles L.713.2 et L.713-3 du code de la propriété intellectuelle.

Condamne Madame Jennifer X... à payer, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement, à la Société Française de Radiotéléphone la somme de MILLE EUROS (1.000 euros) à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice subi suite à l'atteinte portée à sa marque semi-figurative "SFR" no FR 3196683 sur le fondement des dispositions de l'article L.713-5 du code de la propriété intellectuelle,

Interdit à Madame Jennifer X... d'utiliser, de reproduire ou d'imiter la marque semi-figurative "SFR" no FR 3196683 sous quelque forme que ce soit et à quelque titre que ce soit pour commercialiser des modèles de lettres de résiliation de contrats d'abonnements SFR, et ce sous astreinte de MILLE EUROS (1.000 euros) par infraction constatée passé un délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement,

Se réserve la liquidation de l'astreinte,

Déboute la Société Française de Radiotéléphone de ses demandes de dommages et intérêts au titre des actes parasitaires, de communication par Madame Jennifer X... en cours de délibéré des modèles de lettre litigieuses commercialisées, et de publications judiciaires,

Déboute Mme Jennifer X... de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive et de condamnation à une amende civile.

Déclare Mme Jennifer X... irrecevable en ses demandes fondées sur le code de consommation,

Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision,

Condamne Madame Jennifer X... à payer à la Société Française de Radiotéléphone la somme de MILLE EUROS (1.000 euros) au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile,

Condamne Madame Jennifer X... aux entiers dépens de l'instance, comprenant notamment les frais de constat de Maître Jean-Daniel Z..., Huissier de Justice, du 28 septembre 2007, qui seront recouvrés par Maître Isabelle LEROUX, Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

FAIT A PARIS LE ONZE MARS DEUX MIL HUIT./.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 07/14538
Date de la décision : 11/03/2008
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2008-03-11;07.14538 ?
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