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20/02/2008 | FRANCE | N°07/05089

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Chambre civile 3, 20 février 2008, 07/05089


T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

3ème chambre 3ème section

No RG :

07/05089

No MINUTE :

Assignation du :

27 Mars 2007

JUGEMENT

rendu le 20 Février 2008

DEMANDERESSES

S.A.S BALAS PARTICIPATION GESTION

6 rue Philippe de GIRARD

93583 SAINT OUEN

S.A.S L'ART ET LA MANIERE

108 bis rue du Cherche MIDI

75006 PARIS

représentées par Me Philippe BESSIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire E.804

DÉFENDERESSE

S.A.R.L. A'BATH S

ERVICES

11 rue de la Grande CHAUMIERE

75006 PARIS

défaillante

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Elisabeth BELFORT, Vice-Président, signataire de la décision

Agnès THAUNAT, Vice-Prési...

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

3ème chambre 3ème section

No RG :

07/05089

No MINUTE :

Assignation du :

27 Mars 2007

JUGEMENT

rendu le 20 Février 2008

DEMANDERESSES

S.A.S BALAS PARTICIPATION GESTION

6 rue Philippe de GIRARD

93583 SAINT OUEN

S.A.S L'ART ET LA MANIERE

108 bis rue du Cherche MIDI

75006 PARIS

représentées par Me Philippe BESSIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire E.804

DÉFENDERESSE

S.A.R.L. A'BATH SERVICES

11 rue de la Grande CHAUMIERE

75006 PARIS

défaillante

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Elisabeth BELFORT, Vice-Président, signataire de la décision

Agnès THAUNAT, Vice-Président

Michèle PICARD, Vice-Président,

assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision

DEBATS

A l'audience du 14 Janvier 2008

tenue en audience publique

JUGEMENT

Prononcé par remise de la décision au greffe

Réputé Contradictoire

en premier ressort

RAPPEL DES FAITS ET PROCEDURE

La société BALAS PARTICIPATION GESTION existe depuis deux cents ans.

Son domaine d‘activité est celui de la couverture, de la plomberie, de la grande cuisine et de la salle de bains.

Elle est titulaire de la marque française semi-figurative "B'BATH" no01 3 076 946 déposée le 11 janvier 2001 en classes internationales 3, 11, 19, 20, 37 et 42.

Cette marque est exploitée par la société filiale "L'ART ET LA MANIERE" laquelle est spécialisée dans la vente de matériels et équipements haut de gamme pour la salle de bains et l'installation, l'agencement et la décoration de ces salles de bains et tous les services liés à cette activité.

La société L'ART ET LA MANIERE exploite cette marque et également le nom commercial et l'enseigne B'BATH au travers notamment d'un show room sis 108 bis rue du Cherche Midi à Paris 6ème, ainsi que comme slogan sur ses plaquettes et son site internet "l'art et la manière du bain".

La société L'ART ET LA MANIERE exploite également un site internet dénommé "bbath.fr" présentant l'activité de la société sous la marque B'bath ainsi que les services proposés..

Par ailleurs, la société L'ART ET LA MANIERE utilise comme slogan sur ses plaquettes et son site internet "l'art et la manière du bain".

Les sociétés BALAS et L'ART ET LA MANIERE ayant appris que la société A'BATH SERVICES dont le siège social est 11 rue de la grande Chaumière à Paris 6ème, proposait des services notamment de dépannage ainsi qu'une "sélection de produits pointus destinés à la salle de bains" sous les termes "l'art et la manière du bain" et qu'elle exploitait le site internet "abath.eu", ont, par acte d'huissier de justice en date du 27 mars 2007, assigné la SARL A'BATH SERVICES devant le tribunal de grande instance de Paris et demandent, au visa des articles L 713-3, L 716-1 et suivants du code de propriété intellectuelle et 1382 du code civil, de :

dire que la défenderesse a porté atteinte aux droits de la société BALAS PARTICIPATION GESTION sur la marque B'bath no01 3076946 et s'est rendue coupable de contrefaçon,

dire qu'il existe également des actes distincts de concurrence déloyale au préjudice de la société L'ART ET LA MANIERE,

en tout état de cause, faire défense à la société défenderesse sous astreinte définitive de 2500 euros par jour de retard passé la signification du jugement à intervenir d'utiliser de quelque façon que ce soit et/ou de reproduire partiellement ou entièrement la marque ci-dessus citée et ce sur quelque support que ce soit, notamment par voie de presse, catalogue, affiche, internet, télévision, cinéma...

En tout état de cause, lui faire défense sous astreinte définitive de 2500 euros par jour de retard passé la signification du jugement à intervenir d'utiliser de quelques façon que ce soit et/ou de reproduire partiellement ou entièrement les éléments distinctifs suivants appartenant à la société L'ART ET LA MANIERE soit :

-l'enseigne et le nom commercial "l'art et la manière", soit B'BATH,

-les termes "l'art et la manière du bain" ou "l'art et la manière",

-la présentation du site internet telle qu'elle figure sur le site internet www.abath.eu sous la rubrique A'BATH EXPERIENCE avec la liste des fournisseurs de la société L'ART ET LA MANIERE le lien hypertexte vers le site de ces fournisseurs, le qualificatif accompagnant le nom de chaque fournisseur ainsi que le texte commercial,

-le logo du carré bleu avec inscription en lettres blanches,

-la photographie de la cabine de douche crée en exclusivité par AGAPE pour la société L'ART ET LA MANIERE,

- le nom de domaine www.abath quelque soit l'extension choisie .com, .eu, .org, .fr etc...

Et ce sur quelque support que ce soit , notamment par voie de presse, catalogue, affiche, internet, télévision, cinéma...

condamner la défenderesse à une somme de 60 000 euros à titre de dommages-intérêts du fait de la contrefaçon de marque au bénéfice de la société BALAS PARTICIPATION GESTION, ainsi qu'à une somme distincte de 60 000 euros compte tenu des actes de concurrence déloyale et parasitaire précités au bénéfice de la société L'ART ET LA MANIERE,

ordonner également à titre de supplément de dommages-intérêts la parution, du jugement à intervenir dans cinq journaux de leur choix et aux frais de la défenderesse dans une limite de 50000 euros HT maximum par insertion soit un total de 25 000 euros HT,

ordonner l'exécution provisoire,

condamner la défenderesse à une somme de 10 000 euros par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens comprenant les frais de saisie contrefaçon avec distraction au profit de Maître Philippe BESSIS, avocat en application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

La société A'BATH a été citée à l'étude de l'huissier. Le jugement sera rendu de manière réputée contradictoire, l'instance étant susceptible d‘appel.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la contrefaçon de marque par imitation

Les signes en cause étant différents (B'BATH / A'BATH) c'est au regard de l'article L713-3 b du code de la propriété intellectuelle qui dispose que "sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public :...

b)l'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement.", que doit être examiné le grief de contrefaçon.

La marque opposée est semi-figurative mais sa partie verbale est dominante et distinctive car seule mémorisable par la clientèle

Le Tribunal relève :

sur les signes

que la dénomination sociale, le nom commercial et le nom de domaine adoptées par la défenderesse reprennent quasiment à l'identique, à l'exception de la première lettre l'élément verbal de la marque précitée, et notamment sa graphie particulière par adjonction d'une apostrophe après la lettre d'attaque, le terme SERVICES, de la dénomination sociale A'BATH SERVICES étant inopérant car ne constituant qu'un descriptif de l'activité, de même que l'extension "eu" du nom de domaine "a'bath.eu".

Les deux termes sont similaires d'un point de vue phonétique, l'accentuation s'effectuant sur la deuxième syllabe ; d'un point de vue visuel compte tenu de la reprise de la composition du signe constituée d'une lettre isolée suivie d'une apostrophe, ainsi que d'un point de vue conceptuel s'agissant dans les deux cas d'un néologisme bâti à partir d'un mot anglais.

sur les produits:

qu'ils sont identiques, la société A'BATH SERVICES exploitant selon l'extrait Kbis délivré par le registre du commerce une activité de :"bâtiment, plomberie, chauffage, électricité et serrurerie" et la marque opposé étant déposée notamment pour des "installations sanitaires, (...) services d'installation et /ou d'entretien d'équipement sanitaires (...)".

sur le risque de confusion:

Il est constant que le risque de confusion doit s'apprécier globalement en tenant compte des différences et des similitudes, tant des signes que des produits, au regard du public concerné. En l'espèce, il s'agit du grand public désireux d'installer une salle de bain dans son habitation. Dès lors, compte tenu de la forte similitude des signes, le signe second reprenant l'élément verbal déterminant de la marque déposée à l'exception de la lettre d'attaque, et notamment sa graphie particulière avec une apostrophe dans le nom lui conférant un caractère original et facilement mémorisable, de l'identité des produits et du caractère moyennement attentif de la clientèle qui ne mémorisera que l'élément verbal de la marque, un risque de confusion existe.

Dans ces conditions, la contrefaçon par imitation de ladite marque au sens de l'article L713-3 du code de la propriété intellectuelle est caractérisée en l'espèce.

Sur la concurrence déloyale

Il est constant que l'action en concurrence déloyale trouve son fondement dans les articles 1382 et 1383 du code civil qui impliquent non seulement l'existence d'une faute commise par le défendeur, mais aussi celle d'un préjudice souffert par le demandeur et la démonstration d'un lien de causalité entre la faute et le préjudice subi par le demandeur.

L'emploi par la société A'BATH SERVICES sur son site intenet "abath.eu" du signe "A'BATH" constitue une atteinte au nom commercial et à l'enseigne de la société L'ART ET LA MANIERE" : B'BATH tel qu'il figure à son extrait Kbis du registre du commerce et constitue donc un acte de concurrence déloyale.

Il en est de même de l'utilisation du slogan "l'art et la manière du bain" dans le site internet de la défenderesse ainsi que l'établit le constat d'huissier du 19 mars 2007 dans la rubrique A'BATH EXPERIENCE qui est utilisé comme slogan par la société L'ART ET LA MANIERE dans de nombreux documents publicitaires produits aux débats.

En outre, dans le procès verbal de saisie-contrefaçon dressé le 19 mars 2007, M. A... gérant de la société défenderesse a déclaré à l'huissier que pour la construction de son site internet il s'est "inspiré à la fois des données fournies par le catalogue pour lequel un téléchargement est proposé sur le site "abath.eu" mais aussi du site "bbath.fr" notamment en ce qui concerne le catalogue à télécharger, les marques des fournisseurs notamment". L'examen des devis qu'il a effectués et qui ont été remis à l'huissier montre qu'il n'a en fait pas utilisé comme fournisseurs ceux dont les coordonnées avaient été téléchargées à partir du site "bbath.fr".

En revanche le procès verbal démontre qu'à la rubrique "A'BATH EXPERIENCE" du site internet du défendeur figure la liste des fournisseurs de la société L'ART ET LA MANIERE le lien hypertexte vers le site de ces fournisseurs, le qualificatif accompagnant le nom de chaque fournisseur ainsi que le texte commercial,

-le logo du carré bleu avec inscription en lettres blanches,

-la photographie de la cabine de douche crée en exclusivité par AGAPE pour la société L'ART ET LA MANIERE.

Tous ces faits visant à créer la confusion dans l'esprit de la clientèle avec la Société L'ART et LA MANIERE sont des actes de concurrence déloyale et constitutifs de fautes en application de l'article 1382 du code civil, ayant entraîné pour la société L'ART ET LA MANIERE un préjudice certain.

Sur les mesures réparatrices

Il sera fait droit à la mesure d'interdiction sollicitée dans des conditions précisées au dispositif.

La société demanderesse justifie avoir dépensé un budget publicitaire de 243000 euros depuis 2001 pour promouvoir la marque B'BATH; la société A'BATH SERVICES a pour sa part réalisé l'intégralité de son chiffre d'affaire depuis sa création sous la dénomination contrefaisante ABATH SERVICES soit 60 902 euros entre le 1er mai 2006 et le 28 février 2007. Son site internet indique qu'il a été visité par 29.554 internautes

L'atteinte aux droits privatifs de la société BALAS sur sa marque et le préjudice que la société L'ART ET LA MANIERE subi du fait des actes de concurrence déloyale seront donc réparés par une somme de 15 000 euros au titre de la contrefaçon et 15 000 euros au titre de la concurrence déloyale. Ces condamnations réparant l'entier préjudice, la mesure de publicité est rejetée.

Il parait inéquitable de laisser à la charge des sociétés demanderesses les frais irrépétibles qu'elle a pu engager et qui ne sont pas compris dans les dépens. Il y a lieu de lui allouer 3500 euros de ce chef à chacune.

Eu égard à l'ancienneté de l'affaire et à sa nature, il y a lieu à exécution provisoire de la présente décision.

Il convient de condamner la défenderesse qui succombe dans ses prétentions aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal statuant de manière réputée contradictoire, en premier ressort par décision remise au greffe,

Dit qu'en exerçant son activité commerciale sous la dénomination sociale et le nom commercial "A'BATH SERVICES",et en exploitant un site internet sous le nom "a'bath.eu" la société A'BATH SERVICES a commis des actes de contrefaçon par imitation de la marque B'BATH no 01 3 076 946 dont la société BALAS PARTICIPATION GESTION est titulaire en application de l'article L713-3 du code de la propriété intellectuelle,

Dit qu'elle a en outre commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société L'ART ET LA MANIERE exerçant sous l'enseigne "B'BATH", par l'utilisation de la dénomination "A'BATH SERVICES" du slogan "L'ART ET LA MANIERE", de la liste des fournisseurs de cette Société, de son logo et d'une des photographies qu'elle exploite.

en conséquence,

Interdit à la société A'BATH SERVICES la poursuite de ces agissements, passé le délai de deux mois après la signification du présent jugement ,sous astreinte de 150 euros par infraction constatée, le tribunal se réservant la liquidation de l'astreinte,.

Condamne la société A'BATH SERVICES à payer à la société BALAS PARTICIPATION GESTION à titre de dommages-intérêts la somme de 15000 euros en réparation de l'atteinte à la marque ,

Condamne la société A'BATH SERVICES à payer à la société L'ART ET LA MANIERE à titre de dommages-intérêts la somme de 15.000 euros au titre de la concurrence déloyale,

Condamne la Société A'BATH SERVICE à payer la somme de 3500 euros à chacun des demanderesses en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Ordonne l'exécution provisoire,

Condamne la société défenderesse aux dépens, en ce compris le coût du procès verbal de saisie contrefaçon du 19 mars 2007 et celui du procès verbal de constat avec distraction au profit de Maître Philippe BESSIS en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Fait à Paris, le 20 février 2008

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Marie-Aline PIGNOLET Elisabeth BELFORT


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 07/05089
Date de la décision : 20/02/2008
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2008-02-20;07.05089 ?
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