T R I B U N A L
D E GRANDE
I N S T A N C E
D E P A R I S
3ème chambre 2ème section
No RG :
07/07041
No MINUTE :
Assignation du :
09 Mai 2007
JUGEMENT
rendu le 15 Février 2008
DEMANDEUR
Monsieur Benjamin X...
...
75009 PARIS
représenté par Me Raphaël NACCACH, avocat au barreau de PARIS, vestiaire R.058
DÉFENDERESSE
Société UNIVERSAL MUSIC FRANCE SAS
22 rue des Fosses ST JACQUES
75005 PARIS
représentée par Me Nicolas BOESPFLUG, avocat au barreau de PARIS, vestiaire E.329
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Véronique RENARD, Vice-Président, signataire de la décision
Sophie CANAS, Juge
Guillaume MEUNIER, Juge
assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision
DEBATS
A l'audience du 20 Décembre 2007 tenue en audience publique
JUGEMENT
Prononcé par remise de la décision au greffe
Contradictoire
en premier ressort
Faits, procédure et prétentions des parties
Par contrat du 11 juin 2002, Monsieur Benjamin X... s'est vu confier, par la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE, producteur, la réalisation d'un vidéogramme illustrant le phonogramme "Real Fonky Time" du groupe Dax Riders.
Le même contrat stipulait au profit de la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE la cession du "droit de propriété incorporelle" de Monsieur X... sur l'oeuvre, à l'exception des "attributs d'ordre intellectuel et moral" attachés à la personne de l'auteur.
Monsieur X... expose que la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE n'a rien fait pour empêcher la diffusion, par la société allemande UNIVERSAL MUSIC GERMANY, à compter du mois de décembre 2002, de la vidéo jugée contrefaisante du titre "Mundian to bach ke" du groupe PANJABI FC, laquelle a rencontré un important succès.
Se fondant en outre sur l'absence d'exploitation réelle de son oeuvre et sur l'absence de reddition de comptes depuis la conclusion du contrat, Monsieur X..., par exploit d'huissier du 9 mai 2007, a assigné son producteur devant le Tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir le Tribunal :
- constater que le vidéoclip illustrant le titre "Mundian to bach ke" constitue une contrefaçon du vidéoclip illustrant le titre "Real Fonky Time" dont il est l'auteur,
- juger que la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE a manqué à ses obligations légales et contractuelles en ne satisfaisant pas à son obligation d'exploitation de l'oeuvre, de reddition des comptes et de défense des droits dont elle est cessionnaire,
- prononcer la résiliation du contrat du 11 juin 2002,
- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir,
- condamner la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE aux entiers dépens, dont distraction au profit de son conseil,
- condamner la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE au paiement de la somme de 10.000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
En réponse, par conclusions du 9 novembre 2007, la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE demande au Tribunal :
- de lui donner acte de ce qu'elle conteste les griefs qui lui sont adressés par Monsieur Benjamin X... et de ce qu'elle s'en rapporte à la justice en ce qui concerne la demande de résiliation,
- de débouter le demandeur de sa demande fondée sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 novembre 2007.
Motifs de la décision
Sur la contrefaçon
Attendu que pour demander au Tribunal de constater que le vidéoclip illustrant le titre "Mundian to bach ke" constitue une contrefaçon du vidéogramme illustrant le titre "Real Fonky Time" dont il est l'auteur, sans d'ailleurs en tirer de conséquences juridiques autres que celles venant au soutien de sa demande de résiliation, Monsieur X... se contente de procéder par voie d'affirmation ;
Attendu que faute pour le demandeur de motiver plus amplement sa demande, le Tribunal ne peut déterminer dans quelle mesure le vidéogramme argué de contrefaçon porterait atteinte à ses droits d'auteur ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de procéder au constat sollicité.
Sur la résiliation du contrat du 11 juin 2002
Attendu qu'en premier lieu, Monsieur X... fonde sa demande de résiliation sur l'inaction de la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE vis-à-vis de l'exploitation d'une oeuvre qu'il juge contrefaisante ;
Mais attendu que faute de démontrer, dans le cadre du présent litige, l'existence d'une contrefaçon, le demandeur ne peut utilement reprocher à la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE de n'avoir pas défendu les intérêts de son oeuvre ;
Attendu qu'en second lieu, Monsieur X... soutient que son oeuvre n'a pas été exploitée, et que la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE n'a jamais rendu de comptes ;
Attendu qu'il fonde sa demande de résiliation sur l'article L. 132-27 du Code de la propriété intellectuelle, aux termes duquel le producteur est tenu d'assurer à l'oeuvre audiovisuelle une exploitation conforme aux usages de la profession ;
Qu'il se prévaut en outre de l'article 6 de la convention litigieuse, lequel stipule que "les comptes d'exploitation seront arrêtés le 30 juin et le 31 décembre de chaque année, et adressés à l'auteur ou toute personne désignée par lui dans les trois mois de leur date d'arrêté, accompagnés s'il y a lieu du produit des pourcentages revenant à l'auteur conformément aux stipulations de l'article 5" ;
Attendu que la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE se borne à contester formellement les griefs qui lui sont adressés, et entend s'en rapporter à la justice s'agissant de la demande de résiliation ;
Qu'elle ne justifie cependant pas s'être conformée aux obligations sus énoncées ;
Attendu qu'il convient en conséquence de prononcer, à ses torts exclusifs, la résiliation du contrat du 11 juin 2002 portant sur la réalisation d'un vidéogramme illustrant le phonogramme "Real Fonky Time" du groupe Dax Riders" ;
Sur les autres demandes
Attendu que la nature de l'espèce et l'ancienneté du litige justifient d'ordonner l'exécution provisoire du présent jugement ;
Attendu que la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE, succombant, sera condamnée aux entiers dépens ;
Qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur X... la totalité des frais irrépétibles ; qu'il convient, en conséquence, de lui allouer la somme globale de 3.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Par ces motifs
Le Tribunal,
Statuant publiquement, par mise à disposition du présent jugement au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par le deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile,
Par jugement contradictoire, rendu en premier ressort,
- DIT n'y avoir lieu à constater que le vidéogramme illustrant le titre "Mundian to bach ke" constitue une contrefaçon du vidéogramme illustrant le titre "Real Fonky Time" dont Monsieur X... est l'auteur,
- CONSTATE que la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE n'a pas respecté les obligations mises à sa charge par les articles L. 132-27 du Code de la propriété intellectuelle et 6 du contrat du 11 juin 2002,
- PRONONCE, en conséquence, la résiliation du contrat du 11 juin 2002 dit "contrat de réalisation d'une vidéomusique et de cession de droits", portant sur la réalisation d'un vidéogramme illustrant le phonogramme "Real Fonky Time" du groupe Dax Riders, aux torts exclusifs de la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE,
- ORDONNE l'exécution provisoire,
- CONDAMNE la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE à payer à Monsieur X... la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- CONDAMNE la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE aux entiers dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Fait et jugé à Paris le 15 Février 2008
Le Greffier Le Président