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30/01/2008 | FRANCE | N°06/16321

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Chambre civile 3, 30 janvier 2008, 06/16321


3ème chambre 3ème section
Assignation du :09 Novembre 2006

JUGEMENT rendu le 30 Janvier 2008

DEMANDERESSES
S.A. SWAROVSKI AktiengesellschaftDröschistrasse 159495 TRISEN, LIECHTENSTEIN
S.A.S. SWAROVSKI FRANCE12 boulevard Poissonnière75002 PARIS
représentées par SCP WENNER DELGRANGE HONNEN LEPAGE SCHODEL ORSINI, DAVENE avocats au barreau de PARIS, vestiaire P 314

DÉFENDERESSE
S.A. AUCHAN FRANCE200 rue de la Recherche59650 VILLENEUVE D ASCQ
représentée par Me Jean-Louis GUIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire C1626
COMPOSITION DU TRIBUNAL>Elisabeth BELFORT, Vice-Président, signataire de la décision Agnès THAUNAT, Vice-PrésidentMichèle...

3ème chambre 3ème section
Assignation du :09 Novembre 2006

JUGEMENT rendu le 30 Janvier 2008

DEMANDERESSES
S.A. SWAROVSKI AktiengesellschaftDröschistrasse 159495 TRISEN, LIECHTENSTEIN
S.A.S. SWAROVSKI FRANCE12 boulevard Poissonnière75002 PARIS
représentées par SCP WENNER DELGRANGE HONNEN LEPAGE SCHODEL ORSINI, DAVENE avocats au barreau de PARIS, vestiaire P 314

DÉFENDERESSE
S.A. AUCHAN FRANCE200 rue de la Recherche59650 VILLENEUVE D ASCQ
représentée par Me Jean-Louis GUIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire C1626
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Elisabeth BELFORT, Vice-Président, signataire de la décision Agnès THAUNAT, Vice-PrésidentMichèle PICARD, Vice-Président,
assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision
DEBATS
A l'audience du 04 Décembre 2007 tenue en audience publique

JUGEMENT
Prononcé par remise de la décision au greffe Contradictoireen premier ressort

RAPPEL DES FAITS ET PROCEDURE
La société SWAROVSKI AKTIENGESELLSCHAFT (ci-après SWAROVSKI AG) est titulaire, notamment des marques communautaires "SWAROVSKI" enregistrées à l'O.H.M.I. sous les numéros 120576 et 3895091.
La première de ces marques déposée le 1er avril 1996 est enregistrée le 20 avril 1998 et vise notamment en classe 14 "les pierres précieuses naturelles ou synthétiques de toutes sortes et pour tous usages, pierres d'orfèvrerie parures (bijouterie) vraies ou fausses" et en classe 26des "petits objets de bijouterie en verre".
La deuxième déposée le 22 juin 2004 et enregistrée le 23 août 2005 vise en classe 35 :"le commerce de détail, en particulier de pierres de bijouterie, bijoux, objets de décoration essentiellement en verre."
La société SWAROVSKI commercialise en France , sous l'enseigne SWAROVSKI, l'intégralité des produits du groupe SWAROVSKI.
Ces deux sociétés ont découvert que la société AUCHAN FRANCE avait édité un catalogue intitulé "10 jours Pâques en fête" diffusé dans au moins quarante quatre de ses magasins du 5 au 15 avril 2006 sur lequel on pouvait lire en page 6 , dans la rubrique "loisirs créatifs", les mentions "perles en cristal SWAROVSKI" avec l'image d'un produit sur lequel figure l'inscription "perles Swarovski" ainsi que la mention "kit bague en cristal Swarovski".
Par acte d'huissier de justice en date du 9 novembre 2006, les sociétés SWAROVSKI AG et SWAROVSKI FRANCE ont assigné la société AUCHAN FRANCE devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon de marque et concurrence déloyale.
Par dernières conclusions communiquées le 11 septembre 2007, les sociétés SWAROVSKI AG et SWAROVSKI FRANCE demandent au tribunal de :
constater que le catalogue "10 jours Pâques en fête" édité et diffusé par la société défenderesse du 5 au 15 avril 2006 dans ses magasins fait figurer en page 6 la marque SWAROVSKI pour la vente de pierre de bijouterie et qu'elle contrefait donc la marque dont la société SWAROVSKI AG est titulaire,
constater que l'utilisation par AUCHAN dans son catalogue "10 jours Pâques en fête" de la marque SWAROVSKI dénomination sociale de la société SWAROVSKI FRANCE, constitue un acte de parasitisme causant un préjudice à la société SWAROVSKI FRANCE,

au visa des articles L717-1 du code de propriété intellectuelle, 9 du règlement 40/94 du 20 décembre 1993 et de l'article 1382 du code civil,
condamner la société AUCHAN FRANCE à verser à la société SWAROVSKI AG une somme d'un montant de 100 000 euros à titre de dommages-intérêts et à la société SWAROVSKI FRANCE une somme de 57 000 euros à titre de dommages-intérêts,
condamner la société AUCHAN FRANCE à leur payer à chacune la somme de 5000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
condamner la société AUCHAN FRANCE aux entiers dépens avec distraction au profit de la SCP WENNER en application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Par dernières conclusions communiquées le 10 octobre 2007, la société AUCHAN FRANCE demande au tribunal de :
débouter les demanderesses,
condamner les demanderesses à lui payer la somme de 5000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION
Sur la contrefaçon par reproduction
-sur l'épuisement des droits
La société AUCHAN soutient qu'elle commercialise des produits authentiques et que dès lors le dépliant publicitaire litigieux ne faisait qu'informer sa clientèle de l'origine des cristaux mis en vente.
Il n'est pas établi que la société SWAROVSKI commercialise sous sa marque des perles de cristal destinées à la fabrication de bijoux fantaisie. Dès lors, il importe peu que les produits vendus aient été fabriqués par la société SWAROVSKI puisqu'il n'est pas établi qu'ils ont été mise en vente sous cette marque par son titulaire. En effet, celui qui est titulaire d'une marque dispose d'un droit de propriété sur sa marque et il a seul le droit d‘apposer sa marque sur le produit. Celui qui appose la marque sur un produit même authentique sans autorisation du titulaire de la marque se rend coupable d'un acte de contrefaçon. Dès lors la théorie de l'épuisement des droits ne peut s'appliquer en l'espèce.
Par ailleurs, il n'est pas établi qu'il soit nécessaire de faire référence à la marque SWAROVSKI pour désigner l'origine de ces produits.
-sur la contrefaçon de la marque no120576:
C'est au regard de l'article 9 1 a) du règlement CE du 20 décembre 1993 qui dispose : " la marque communautaire confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est habilité à interdire à tous tiers, en l'absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires : a) d'un signe identique à la marque communautaire pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels elle est enregistrée."que doit être apprécié le grief de contrefaçon par reproduction
En l'espèce, la marque communautaire SWAROVSKI est apposée sur le catalogue AUCHAN pour désigner des perles en verres destinées à la confection de bijoux fantaisies, ces produits sont identiques à ceux visés à la marque 120576 qui vise notamment en classe 14 "les pierres précieuses naturelles ou synthétiques de toutes sortes et pour tous usages, pierres d'orfèvrerie parures (bijouterie) vraies ou fausses" et en classes 26 des "petits objets de bijouterie en verre". Il importe peu que la marque SWAROVSKI ne soit pas enregistrée pour des perles de cristal, ces bijoux étant compris dans la désignation "pierres d'orfèvrerie parures (bijouterie) vraies ou fausses" et "petits objets de bijouterie en verre".
Les signes et la produits étant identiques, la contrefaçon est constituée en application du texte précité.
-sur la contrefaçon de la marque no3895091:

Par ailleurs, les produits désignés au catalogue AUCHAN sont similaires aux produits visés à l'enregistrement de la marque 3895091 qui vise en classe 35 :"le commerce de détail, en particulier de pierres de bijouterie, bijoux, objets de décoration essentiellement en verre." Il s'agit en effet d'offre en vente de bijoux en verre. Dès lors, c'est au regard de l'article 9 1 b) du règlement CE du 20 décembre 1993 qui dispose : " la marque communautaire confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est habilité à interdire à tous tiers, en l'absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires : b) d'un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque communautaire et en raison de l'identité ou de la similitude des produits ou services couverts par la marque communautaire et le signe, il existe un risque de confusion dans l'esprit du public ; le risque de confusion comprend le risque d'association entre le signe et la marque.", que doit être apprécié le grief de contrefaçon par imitation s'agissant de produits similaire.
Il est constant que le risque de confusion doit être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents de l'espèce. Cette appréciation globale doit en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause être fondée sur l'impression d'ensemble produite par les marques en tenant compte notamment des éléments distinctifs et dominants de celle-ci.
En l'espèce la marque étant reprise à l'identique, pour des produits similaires le risque de confusion est certain. La contrefaçon de cette marque est dès lors constituée.
Sur la concurrence déloyale
La société SWAROVSKI FRANCE reproche à la défenderesse au titre de la concurrence déloyale de porter atteinte à sa dénomination sociale par la reprise de la dénomination SWAROVSKI et d'utiliser aussi de façon parasitaire sa notoriété.

Il est constant que l'action en concurrence déloyale trouve son fondement dans les articles 1382 et 1383 du code civil qui impliquent non seulement l'existence d'une faute commise par le défendeur, mais aussi celle d'un préjudice souffert par le demandeur et la démonstration d'un lien de causalité entre la faute et le préjudice subi par le demandeur.
En utilisant le signe "SWAROVSKI" la société défenderesse a porté atteinte à la dénomination sociale de la société SWAROVSKI FRANCE.
La société défenderesse en diffusant des documents publicitaires sur lesquels figurait la mention de la marque SWAROVSKI s'est placée dans le sillage de la société SWAROVSKI dont la notoriété dans le domaine du commerce des bijoux en cristal n'est pas contestée par la défenderesse. La société défenderesse a cherché à utiliser les investissements publicitaires des demanderesses, ce qui constitue également un acte de concurrence déloyale et parasitaire d'autant plus grave que la société SWAROVSKI axe sa communication sur le domaine du luxe alors que la société AUCHAN est un distributeur de produits de consommation courante.
Les agissements de la société défenderesse ainsi relevés constituent des fautes en application de l'article 1382 du code civil, ayant entraîné pour la société SWAROVSKI FRANCE un préjudice certain d'image.
Sur les mesures réparatrices
Dans ces conditions, le tribunal possède suffisamment d'éléments pour établir à la somme de 30 000 euros le montant du préjudice subi par la société SWAROVSKI AG du fait des actes de contrefaçon et à la somme de 10 000 euros le préjudice subi par la société SWAROVSKI FRANCE du fait des actes de concurrence déloyale et parasitaire.
Sur l'exécution provisoire
Il parait nécessaire en l'espèce et compatible avec la nature de l'affaire d'ordonner l'exécution provisoire de la présente décision.
Sur l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile
Il parait inéquitable de laisser à la charge des sociétés demanderesses les frais irrépétibles et non compris dans les dépens. Il convient de leur allouer à chacune à ce titre une indemnité de 5000 euros.
Sur les dépens
La société défenderesse succombant dans ses prétentions doit être condamnée aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS
Le tribunal statuant contradictoirement, en premier ressort et par décision remise au greffe,
Dit que le catalogue "10 jours Pâques en fête" édité et diffusé par la société AUCHAN FRANCE du 5 au 15 avril 2006 dans ses magasins fait figurer en page 6 la marque SWAROVSKI pour la vente de perles de cristal et que la société AUCHAN FRANCE contrefait ainsi les marques communautaires no120576 et 3895091 dont la société SWAROVSKI AG est titulaire,
Dit que la diffusion par la société AUCHAN dans son catalogue "10 jours Pâques en fête" du signe SWAROWSKI dénomination sociale de la société SWAROVSKI FRANCE, constitue des actes de concurrence déloyale et parasitaires au préjudice à la société SWAROVSKI FRANCE,
Condamne la société AUCHAN FRANCE à verser à la société SWAROVSKI AG une somme d'un montant de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation des actes de contrefaçon,
Condamne la société AUCHAN FRANCE à verser à la société SWAROVSKI FRANCE une somme d'un montant de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour les actes de concurrence déloyale et parasitaire,
Condamne la société AUCHAN FRANCE à payer à chacune des société demanderesse la somme de 5000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Ordonne l'exécution provisoire
Condamne la société AUCHAN FRANCE aux entiers dépens avec distraction au profit de la SCP WENNER en application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Fait à Paris, le 30 janvier 2008

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Marie-Aline PIGNOLET Elisabeth BELFORT


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 06/16321
Date de la décision : 30/01/2008
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2008-01-30;06.16321 ?
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