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08/01/2008 | FRANCE | N°06/08330

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Chambre civile 3, 08 janvier 2008, 06/08330


T R I B U N A L
D E GRANDE
I N S T A N C E
D E P A R I S

3ème chambre 1ère section

No RG :
06 / 08330

No MINUTE :

Assignation du :
15 Mai 2006

JUGEMENT
rendu le 08 Janvier 2008

DEMANDEURS

Madame Angélique X...
...
20151 SARI D'ORCINO (CORSE)

Monsieur Jean Claude X...
...
20151 SARI D'ORCINO (CORSE)

S. A. R. L. ANALEKTA
3, rue Nollet
75017 PARIS

représentés par Me Pierre HENRIOT, avocat au barreau de PARIS vestiaire E. 1918

DÉFENDERESSE

S. A. S. D

AJMA
79, avenue Ledru Rollin
75012 PARIS

représentée par Me Jean- Louis LANGLOIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire C. 880

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Ma...

T R I B U N A L
D E GRANDE
I N S T A N C E
D E P A R I S

3ème chambre 1ère section

No RG :
06 / 08330

No MINUTE :

Assignation du :
15 Mai 2006

JUGEMENT
rendu le 08 Janvier 2008

DEMANDEURS

Madame Angélique X...
...
20151 SARI D'ORCINO (CORSE)

Monsieur Jean Claude X...
...
20151 SARI D'ORCINO (CORSE)

S. A. R. L. ANALEKTA
3, rue Nollet
75017 PARIS

représentés par Me Pierre HENRIOT, avocat au barreau de PARIS vestiaire E. 1918

DÉFENDERESSE

S. A. S. DAJMA
79, avenue Ledru Rollin
75012 PARIS

représentée par Me Jean- Louis LANGLOIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire C. 880

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Marie COURBOULAY, Vice Présidente
Florence GOUACHE, Juge
Cécile VITON, Juge

assistées de Léoncia BELLON, Greffier

DEBATS

A l'audience du 05 Novembre 2007
tenue en audience publique

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

Par courrier du 6 décembre 2005, la société DAJMA, producteur, a commandé via la société ANALEKTA à Monsieur et Madame X..., compositeurs- réalisateurs, la musique originale des épisodes 2 et 3 de la série Rose et Val pour un montant forfaitaire de 16. 000 euros par film.

Par courrier du 31 janvier 2006, la société DAJMA a informé Monsieur et Madame X... de ce qu'elle résiliait la convention de commande.

Contestant cette résiliation, Monsieur et Madame X... et la société ANALEKTA ont fait assigner, par acte du 15 mai 2006, la société DAJMA afin d'obtenir l'indemnisation de leur préjudice.

Dans leurs dernières conclusions du 25 avril 2007, Madame Angélique X..., Monsieur Jean- Claude X... et la société ANALEKTA demandent au Tribunal, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, de :
constater la résiliation du contrat aux torts exclusifs de la société DAJMA et l'impossibilité de poursuivre son exécution,

condamner la société DAJMA à payer à la société ANALEKTA les sommes de :
-26. 790, 40 euros TTC au titre du complément demeuré impayé du montant de la commande en cause, avec intérêts de retard afférents calculés à échéance de la fin de collaboration prévue, soit au 21 février 2006,
condamner la société DAJMA à payer à Monsieur et Madame X... les sommes de :
-8. 000 euros à chacun au titre d'un montant complémentaire correspondant à la perte de droits d'auteurs résultant du défaut d'exploitation de leurs compositions pour la bande sonore des épisodes de la série télévisuelle,
-15. 000 euros à chacun à titre de dommages et intérêts pour l'atteinte portée à leur réputation professionnelle,
condamner la société DAJMA à payer à Monsieur et Madame X... et à la société ANALEKTA la somme de 2. 500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Ils soulignent qu'ils avaient déjà fourni, à la satisfaction de tous, la musique de l'épisode pilote de la série en cause, et qu'ils avaient collaboré de nombreuses fois avec la société TF1, le diffuseur.
Ils font valoir qu'ils ont eu un délai très court pour préparer et délivrer les premiers travaux compte tenu des dates de remise des maquettes, que la société DAJMA ne leur ayant pas donné de directives claires en vue d'une modification radicale des musiques attendues, ils ont pu légitimement s'inspirer de l'épisode pilote qui avait été un succès, que la société TF1, étrangère au contrat conclu avec la société DAJMA, ne pouvait décider de la résiliation de ce contrat, que les sociétés DAJMA et TF1 ne leur ont pas laissé un délai suffisant pour transformer les maquettes préliminaires en enregistrements définitifs prenant en compte d'éventuelles corrections de la part du producteur, et que les musiques retenues en définitive par la société DAJMA pour illustrer l'épisode no2 ne sont pas radicalement différentes des musiques qu'ils avaient soumis.
Ils relèvent qu'ils ont fourni la maquette début janvier 2006 et que la société DAJMA ayant résilié leur contrat fin janvier ne peut leur reprocher de ne pas avoir livré les enregistrements les 14 et 21 février 2006.

Ils estiment que la résiliation unilatérale de la commande par la société DAJMA porte atteinte à leur réputation professionnelle et entraîne un préjudice financier puisque ladite société n'a versé qu'un tiers du montant contractuellement convenu et qu'ils sont privés de tous les droits d'auteurs qu'ils étaient en droit d'attendre via la SACEM- SDRM.

Aux termes de ses dernières écritures du 7 mars 2007, la société DAJMA sollicite du Tribunal qu'il déboute Monsieur et Madame X... et la société ANALEKTA de leurs demandes et les condamne à lui payer la somme de 7. 500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle soutient que les époux X... et la société ANALEKTA n'ont pas rempli leurs obligations contractuelles aux motifs qu'ils ont livré 1 ou 2 jours après le 2 janvier 2006, date prévue au contrat, la maquette de la musique de l'épisode 2 et non pas des deux épisodes, que leur maquette n'était qu'un arrangement bâclé du thème et des musiques de l'épisode pilote, et n'était pas conforme aux intentions générales et aux indications orales précises données par le producteur, le monteur et le réalisateur de la série qui souhaitaient une musique originale et dynamique correspondant à une série devenue policière.

Elle relève que le paiement de la dernière échéance devait intervenir à l'acceptation de la musique, ce qui n'a pas été fait et que Monsieur et Madame X... n'ont subi aucun préjudice du fait de la société TF1 qui leur a passé de nouvelles commandes.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 septembre 2007.

EXPOSE DES MOTIFS

Par courrier du 6 décembre 2005, la société DAJMA a commandé à la société ANALEKTA la musique originale des épisodes 2 et 3 de la série Rose et Val, intitulés provisoirement Piège pour deux flics et Peur au ventre, moyennant le paiement d'une somme de 16. 000 euros HT par film qui était réglable de la manière suivante : 30 % à la signature de la commande sur présentation de la facture, 40 % à la livraison de la musique et 30 % à l'acceptation du PAD.

Il était prévu une présentation de la maquette avant enregistrement pour le 2 janvier 2006 et la livraison des enregistrements mixés pour les 14 et 21 février 2006.

Il n'est pas contesté que conformément aux termes de la lettre de commande, la société DAJMA a versé à la société ANALEKTA la somme de 9. 600 euros HT représentant 30 % à la signature de la commande sur présentation de la facture.

Il ressort des explications des parties que cette commande faisait suite à la réalisation par les époux X... de la musique de l'épisode pilote de la série policière qui avait donné satisfaction aux commanditaires.

Le 7 novembre 2006, Monsieur Michel Z..., monteur image des deux épisodes de la série, a certifié avoir remis à Monsieur et Madame X... un premier montage de 30 minutes de chaque film à la fin du mois de novembre 2005.

Le 13 novembre 2006, Monsieur Christian A..., réalisateur des épisodes de la série, a attesté avoir remis, le 22 décembre 2005 à Monsieur X..., les DVD du premier montage images intégral des deux épisodes.

Messieurs Z...et A...indiquent que Monsieur X... a remis, au début du mois de janvier 2006, uniquement la maquette pour l'épisode 2 de la série.

Dans son attestation, Monsieur Christian A...indique que le travail alors remis par les époux X... ne convenait pas en ce qu'il était une reprise du thème musical du film pilote et leur a demandé, le 6 janvier 2006, de modifier leur travail, et que le 17 janvier 2006, la nouvelle maquette remise par les époux X... était très courte et ne lui donnait pas satisfaction.

Par courrier du 31 janvier 2006, la société DAJMA a informé la société ANALEKTA que la décision prise par TF1 l'amenait à mettre un terme à la commande de la musique des deux épisodes de la série Rose et Val et que l'acompte de 30 %, soit 9. 600 euros HT, versé rémunérait les travaux accomplis.

Monsieur Michel Z...certifie avoir précisé à Monsieur et Madame X..., dès la remise fin novembre 2005 des premiers montages de 30 minutes de chaque film puis lors de la remise des deux DVD des films le 22 décembre 2005, que le thème écrit pour l'épisode pilote ne convenait plus aux deux épisodes suivants pour lesquels le thème devait être plus rock.

Monsieur Christian A...atteste avoir réitéré à Monsieur X..., lors de la remise des DVD du premier montage intégral des deux épisodes, l'orientation musicale nouvelle souhaitée sur la série, c'est à dire une musique plus " rock and roll " que celle du pilote qui était dans une tonalité de comédie.

Ces deux attestations qui émanent de personnes ayant travaillé pour le compte de la société DAJMA et qui ne sont pas corroborées par les termes de la lettre de commande du 6 décembre 2005 qui ne comporte aucune précision sur le contenu, le rythme ou l'orchestration voulue, ni sur leur durée ne suffisent pas à établir que Monsieur et Madame X... étaient informés, avant leur remise de la maquette début janvier 2006, de ce que la musique devait être radicalement différente de celle de l'épisode pilote qu'ils avaient réalisé et qui avait donné entière satisfaction aux sociétés DAJMA et TF1.

En l'absence de commande claire et précise sur le contenu de la musique demandée, les époux X... pouvaient légitimement penser pouvoir s'inspirer de la musique de l'épisode pilote.

La société ne saurait également leur reprocher de n'avoir pas pris en compte les critiques formulées puisqu'elle a résilié leur contrat le 31 janvier 2006 alors qu'aux termes de la lettre de commande du 6 décembre 2005, la livraison des enregistrements mixés était prévue pour les 14 et 21 février 2006 et qu'ils avaient eu un délai court pour réaliser la musique après la remise des deux DVD des films le 22 décembre 2005.

Il ressort enfin des pièces versées aux débats par la société DAJMA que Monsieur et Madame X... lui ont transmis deux CD audio, l'un intitulé Rose et Val film 2, maquettes musiques, et l'autre intitulé Rose et Val film 3, maquettes.

En résiliant le contrat passé avec les époux X... via la société ANALEKTA alors qu'elle ne leur avait pas donné de directives claires et ne leur a pas permis de remédier aux critiques sur leur musique, la société DAJMA a manqué à ses obligations contractuelles.

Compte tenu des fautes commises par la société DAJMA, il convient de prononcer la résiliation du contrat conclu le 6 décembre 2005 aux torts exclusifs de la société DAJMA.

Il convient, en tant que de besoin, d'interdire aux parties de poursuivre l'exécution du contrat conclu le 6 décembre 2005, et notamment l'exploitation des maquettes déposées par la société ANALEKTA.

Aux termes de la lettre de commande du 6 décembre 2005, la somme de 16. 000 euros HT par film était payable de la manière suivante : 30 % à la signature de la commande sur présentation de la facture, 40 % à la livraison de la musique et 30 % à l'acceptation du PAD.

La société DAJMA a versé la somme de 9. 600 euros HT correspondant à 30 % lors de la signature de la commande.

Compte tenu de la résiliation de ce contrat conclu le 6 décembre 2005, la société ANALEKTA n'a pas perçu la somme de 40 % lors de la livraison de la musique. Le reliquat de la rémunération, soit 30 %, étant subordonné à l'acceptation du PAD, il n'est pas certain que la société ANALEKTA l'aurait perçu même si le contrat n'avait pas été résilié.

Il convient donc de condamner la société DAJMA à payer à la société ANALEKTA la somme de 12. 800 euros HT, soit 15. 308, 80 euros TTC après application d'une TVA à 19, 6 %, à titre de dommages et intérêts représentant 40 % de la rémunération prévue pour les deux films à hauteur de 32. 000 euros HT.

Conformément aux dispositions de l'article 1153-1 du code civil, cette somme portera intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement.

Compte tenu de la résiliation du contrat conclu le 6 décembre 2005, Monsieur et Madame X... ont perdu une chance de pouvoir percevoir les droits d'auteurs sur la musique qu'ils avaient livrée à la société DAJMA. Celle- ci sera dès lors condamnée à leur payer à chacun la somme de 4. 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de ce préjudice.

Monsieur et Madame X... ont reçu depuis de nouvelles commandes pour la société TF1 et n'établissent pas que l'attitude de la société DAJMA a porté atteinte à leur réputation professionnelle. Il y a donc lieu de les débouter de leur demande de dommages et intérêts pour l'atteinte portée à leur réputation professionnelle.

En application des dispositions de l'article 515 du Nouveau code de procédure civile, il convient d'ordonner l'exécution provisoire de la présente décision qui est compatible avec la nature de l'affaire, s'agissant du paiement de sommes d'argent, et nécessaire eu égard à son ancienneté.

Conformément aux dispositions de l'article 696 du Nouveau code de procédure civile, la société DAJMA, partie perdante, sera condamnée aux entiers dépens de l'instance.

Il paraît inéquitable de laisser à la charge de la société ANALEKTA et des époux X... l'intégralité des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. La société DAJMA sera condamnée à leur payer la somme totale de 2. 500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal statuant par jugement contradictoire, en premier ressort et mis à la disposition du public par le greffe le jour du délibéré,

Prononce la résiliation du contrat conclu le 6 décembre 2005 entre la société DAJMA et la société ANALEKTA aux torts exclusifs de la société DAJMA,

En tant que de besoin, interdit aux parties de poursuivre l'exécution du contrat conclu le 6 décembre 2005, et notamment l'exploitation des maquettes déposées par la société ANALEKTA,

Condamne la société DAJMA à payer à la société ANALEKTA la somme de QUINZE MILLE TROIS CENT HUIT EUROS QUATRE VINGT CENTIMES (15. 308, 80 euros) TTC à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement,

Condamne la société ANALEKTA à payer à Monsieur Jean- Claude X... et à Madame X... la somme de QUATRE MILLES EUROS (4. 000 euros) à chacun à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice résultant de leur perte de chance d'avoir pu percevoir les droits d'auteurs sur la musique qu'ils avaient livrée,

Déboute Monsieur Jean- Claude X... et Madame X... de leur demande de dommages et intérêts pour l'atteinte portée à leur réputation,

Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision,

Condamne la société DAJMA à payer à la société ANALEKTA, et à Monsieur Jean- Claude X... et Madame X... la somme totale de DEUX MILLE CINQ CENTS EUROS (2. 500 euros) au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile,

Condamne la société DAJMA aux entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés par Maître Pierre HENRIOT, Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau code de procédure civile.

FAIT ET JUGÉ À PARIS LE 08 JANVIER 2008

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 06/08330
Date de la décision : 08/01/2008
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2008-01-08;06.08330 ?
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