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14/12/2007 | FRANCE | N°06/04203

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Chambre civile 3, 14 décembre 2007, 06/04203


T R I B U N A LD E GRANDEI N S T A N C ED E P A R I S

3ème chambre 2ème section
No RG : 06/04203

No MINUTE :

Assignation du :07 Mars 2006

JUGEMENT rendu le 21 Décembre 2007

DEMANDEURS

Monsieur Georges X... "...94170 LE PERREUX SUR MARNE

S.A.R.L. FIDELIA "2 rue Chenier75002 PARIS

représentées par Me Jean-christophe GUERRINI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire K.177
DÉFENDERESSE
S.A.R.L. DEUX MILLE VINGT SIX110 boulevard de Sébastopol75003 PARIS

représentée par Me Gilles BRACKA, avocat au barreau de NANTERRE, v

estiaire NAN426
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Véronique RENARD, Vice-Président, signataire de la décision Sophie CANAS, JugeG...

T R I B U N A LD E GRANDEI N S T A N C ED E P A R I S

3ème chambre 2ème section
No RG : 06/04203

No MINUTE :

Assignation du :07 Mars 2006

JUGEMENT rendu le 21 Décembre 2007

DEMANDEURS

Monsieur Georges X... "...94170 LE PERREUX SUR MARNE

S.A.R.L. FIDELIA "2 rue Chenier75002 PARIS

représentées par Me Jean-christophe GUERRINI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire K.177
DÉFENDERESSE
S.A.R.L. DEUX MILLE VINGT SIX110 boulevard de Sébastopol75003 PARIS

représentée par Me Gilles BRACKA, avocat au barreau de NANTERRE, vestiaire NAN426
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Véronique RENARD, Vice-Président, signataire de la décision Sophie CANAS, JugeGuillaume MEUNIER, Juge

assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision
DEBATS
A l'audience du 18 Octobre 2007 tenue en audience publique

JUGEMENT

Prononcé par remise de la décision au greffe Contradictoireen premier ressort

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Monsieur Georges X... indique être créateur d'articles d'habillement parmi lesquels se trouvent un modèle de jupe dénommé HELIOS et un modèle de robe dénommé PARABOLE.
Ces modèles seraient commercialisés par la société FIDELIA.
Indiquant avoir eu connaissance de la commercialisation par le magasin GALERIES LAFAYETTE de modèles de vêtements fabriqués et commercialisés par la société DEUX MILLE VINGT SIX sous les références "ONE" et "SHIREL" qui reproduiraient selon eux les caractéristiques des modèles précités, Monsieur Georges X... et la société FIDELIA, après avoir fait procéder le 10 février 2006 à une saisie-contrefaçon dans les locaux de la société DEUX MILLE VINGT SIX ont, selon acte d'huissier en date du 7 mars 2006, fait assigner cette dernière sur le fondement des articles L 111-1 et suivants ainsi que L 335-2 et suivants du Code de la Propriété Intellectuelle en contrefaçon de droits d'auteur pour obtenir, outre des mesures d'interdiction et de destruction sous astreinte ainsi que de publication, paiement des sommes de 15.000 euros et de 75.000 euros de dommages-intérêts en réparation de leurs préjudices respectifs ainsi que d'une indemnité de 10.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, le tout au bénéfice de l'exécution provisoire.
Par dernières écritures signifiées le 18 octobre 2007, Monsieur Georges X... et la société FIDELIA demandent au Tribunal de :
- constater que l'ordonnance de saisie-contrefaçon a été rendue le 23 janvier 2006 et prononcer la validité de la saisie-contrefaçon pratiquée le 10 février 2006 dans les locaux de la société DEUX MILLE VINGT SIX,
- dire et juger que la reproduction des caractéristiques des modèles de jupe "HELIOS" et de robe "PARABOLE" créés par Monsieur Georges X... et commercialisés par la société FIDELIA, comme leur détention et leur commercialisation, constituent des actes de contrefaçon des droits d'auteur sur lesdits modèles,
En conséquence,
- interdire à la société DEUX MILLE VINGT SIX de reproduire, détenir et plus largement d'exploiter de quelque manière que ce soit tout modèle de jupe ou de robe présentant des caractéristiques identiques ou similaires aux modèles revendiqués, et ce, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter du prononcé du jugement à intervenir,
- ordonner le retrait des produits litigieux aux fins de destruction sous contrôle d'huissier et aux frais avancés de la défenderesse, et ce, sous astreinte de 1.500 euros par jour de retard à compter du prononcé du jugement à intervenir,
- dire que le Tribunal se réservera la compétence de liquider lesdites astreintes en application des dispositions de l'article 35 de la loi du 9 juillet 1991,
- condamner la société DEUX MILLE VINGT SIX à payer à Monsieur Georges X... la somme de 15.000 euros en réparation de l'atteinte portée à ses droits moraux,
- condamner la société DEUX MILLE VINGT SIX à payer à la société FIDELIA la somme de 75.000 euros en réparation de l'atteinte portée à ses droits patrimoniaux,
- ordonner la publication du dispositif du jugement à intervenir dans trois revues ou journaux, français ou étrangers, au choix des demandeurs et aux frais avancés de la défenderesse, à concurrence de 7.500 euros HT par insertion,
- condamner la société DEUX MILLE VINGT SIX à payer à Monsieur Georges X... d'une part, et à la société FIDELIA d'autre part, la somme de 15.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir.
Par dernières écritures signifiées le 12 octobre 2007, la société DEUX MILLE VINGT SIX demande au Tribunal de :
- in limine litis, déclarer la saisie contrefaçon pratiquée dans ses locaux le 23 janvier 2006 nulle et de nul effet,
A titre principal,
- constater que la société FIDELIA et son gérant Monsieur X... n'ont pas qualité pour agir en contrefaçon,
- dire et juger qu'elle ne s'est pas rendue coupable d'actes de contrefaçon,
En conséquence,
- Débouter la société FIDELIA et Monsieur X... de l'ensemble de leurs demandes,
- dire qu'elle a la qualité d'auteur des modèles ONE et SHIREL,
A titre reconventionnel,
- dire et juger que la société FIDELIA et Monsieur X... se sont rendus coupables de contrefaçon en commercialisant les modèles HELIOS et PARABOLE,
- condamner solidairement la société FIDELIA et Monsieur X... à lui payer la somme de 90.000 euros à titre de dommages intérêts pour contrefaçon, ainsi que la somme de 90. 000 euros à titre de dommages intérêts pour concurrence déloyale,
- ordonner la publication du jugement à intervenir dans son intégralité ou par extraits dans trois journaux ou publications professionnels, y compris électroniques, de son choix et aux frais des défendeurs (en réalité des demandeurs), sans que le coût de chaque insertion ne puisse excéder la somme de 5000 euros HT, soit la somme totale de 15. 000 euros HT,
- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir,
- condamner la société FIDELIA et Monsieur X... à lui payer la somme de10.000 euros au titre du caractère abusif de la procédure, et subsidiairement, ordonner une expertiseafin de déterminer notamment l'antériorité des modèles revendiqués ainsi que son préjudice,
- condamner la société FIDELIA et Monsieur X... à lui payer la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 octobre 2007.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la validité de la saisie-contrefaçon du 10 février 2006
Attendu que pour soulever la nullité de la saisie-contrefaçon pratiquée le 10 février 2006, la société DEUX MILLE VINGT SIX fait valoir que celle-ci est intervenue antérieurement à l'ordonnance du 23 juin 2006 l'ayant autorisée et que l'huissier instrumentaire qui a présenté à son directeur financier Monsieur Franck Z... les modèles argués de contrefaçon sans y être autorisé et sans que l'origine desdits modèles ne soit établie, n'a procédé à aucune saisie descriptive ou réelle des produits incriminés ; qu'elle ajoute qu'un ticket de caisse n'est pas suffisant à rapporter la preuve de la contrefaçon dès lors qu'aucune corrélation n'est possible entre les vêtements prétendument achetés aux Galeries Lafayette et ceux qu'elle commercialise ;
Attendu sur le premier point qu'il y a lieu de constater que la saisie-contrefaçon pratiquée à la requête de Monsieur Georges X... et de la société FIDELIA le 23 janvier 2006 a été autorisée le même jour et non pas cinq mois après comme le soutient la défenderesse ;
que ce moyen ne peut donc prospérer ;
Attendu qu'il n'est pas contesté que l'huissier a présenté à Monsieur Franck Z..., qui s'est déclaré être le directeur financier de la société DEUX MILLE VINGT SIX, deux modèles de vêtements argués de contrefaçon ;
que cette initiative qui n'avait pas été expressément autorisée par l'ordonnance présidentielle, alors que les dispositions relatives à la procédure de saisie-contrefaçon doivent s'interpréter de façon stricte, a fait grief au saisi qui a répondu à l'interpellation de l'huissier ;
qu'il y a donc lieu de prononcer la nullité du procès verbal de saisie-contrefaçon du 10 février 2006 pour ce motif ;
Attendu que les autres arguments de la société DEUX MILLE VINGT SIX relatifs à la preuve de la contrefaçon par la production d'un ticket de caisse relèvent du fond du débat et seront examinés ci-après au titre de la contrefaçon ;
Sur la titularité des droits d'auteur
Attendu que la société DEUX MILLE VINGT SIX conteste tant la qualité à agir de Monsieur Georges X... que celle de la société FIDELIA aux motifs que le premier n'établirait pas sa qualité d'auteur des modèles revendiqués et la seconde leur commercialisation ;
Attendu qu'aux termes de l'article L 113-1 du Code de la Propriété Intellectuelle, la qualité d'auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou ceux sous le nom de qui l'oeuvre est divulguée ;
que Monsieur X... verse aux débats une attestation établie par lui-même qui, manuscrite ou non ne peut établir la qualité d'auteur qu'il revendique ;
qu'il produit également des patrons d'une jupe et d'une robe, le premier portant la mention "jupe HELIOS" et le second les mentions "jupe HELIOS" barrée et "PARABOLE", qui outre le fait qu'ils ne sont pas datés, ne comportent aucune indication de son nom ; qu'il en est de même du catalogue ICONOCLAST pour la collection printemps/été 05 ;
Attendu dès lors que Monsieur Georges X... qui ne justifie pas être l'auteur des modèles de vêtements invoqués en l'espèce doit être déclaré irrecevable à agir au titre des droits d'auteur ;
Attendu que en revanche qu'en application des dispositions de l'article L 113-5 du Code de la Propriété Intellectuelle, l'exploitation d'une oeuvre par une personne sous son nom fait présumer, à l'égard des tiers recherchés pour contrefaçon, que cette personne est titulaire sur l'oeuvre ;
Que la société FIDELIA qui exploite les vêtements en cause sous le nom commercial ICONOCLAST justifié par l'identité du numéro d'identification figurant sur son extrait d'immatriculation au Registre du Commerce et des Sociétés de Paris et de celui figurant sur son cachet commercial, produit deux factures de commercialisation des 21/02/2005 et 02/03/2005 de la jupe "HELIOS AKTIF" ou "HELIOS" et de la robe "PARABOLE", est ainsi présumée titulaire à l'encontre de la société défenderesse des droits d'auteur, indépendamment de la réalité de toute cession de droits, laquelle défenderesse poursuivie en contrefaçon n'étant pas fondée à contester les mentions portées sur lesdites factures ;
Attendu que pour contester cette présomption, la société DEUX MILLE VINGT SIX verse aux débats une attestation de son gérant qui ne peut avoir plus de valeur probante que celle du gérant de la société FIDELIA, pas plus que celle de son salarié Monsieur B... établie le 10 octobre 2007 ;
Attendu qu'elle produit également des factures de 2002 et 2003 faisant état de la commercialisation de modèles d'une "robe délavée KIRA" et d'une "jupe velours déstructurée POSITANO", qui auraient "inspiré" les modèles SHIREL et ONE ;
que cependant il y a lieu de constater que la description faite de ces vêtements ne correspond pas à celles des modèles communiqués, lesquels seraient des prototypes, non finis et jamais exposés à la vente ;
Attendu par ailleurs que les dessins des modèles "POSITANO" et "KIRA" ne comportent aucune autre date que celle de leur transmission le 5 octobre 2006 ; qu'il en est de même des rapports de ventes pour l'année 2002 édités le 01/03/2007 qui ne comportent aucune date de création et aucun élément d'authentification ;
Attendu dès lors qu'aucun des éléments invoqué n'est de nature à détruire la présomption de titularité des droits patrimoniaux d'auteur dont bénéficie la société FIDELIA ;
qu'il y a lieu en conséquence de rejeter l'exception d'irrecevabilité soulevée par la société DEUX MILLE VINGT SIX sans qu'il y ait lieu de désigner un expert pour déterminer l'antériorité des droits des parties dont l'appréciation relève du Tribunal ;
Sur la contrefaçon
Attendu que le caractère protégeable par le droit d'auteur des modèles "HELIOS" et "PARABOLE" n'est pas contesté ;
Attendu qu'à l'appui de son action en contrefaçon, la société FIDELIA produit un ticket de caisse provenant du magasin GALERIES LAFAYETTE qui fait état de l'achat le 24 septembre 2005, soit près de six mois avant l'acte introductif d'instance, de deux articles dénommés SEDUCTION référencés 64523517 et 64524218 ;
Mais attendu qu'aucune corrélation n'est établie entre ce ticket d'achat, les deux vêtements produits en pièces 6 et 7 par la société FIDELIA et les vêtements commercialisés par la société DEUX MILLE VINGT SIX ;
que dès lors l'action en contrefaçon ne peut prospérer et il convient de rejeter l'ensemble des demandes principales ;
Sur les demandes reconventionnelles
Attendu que la société DEUX MILLE VINGT SIX qui ne justifie d'aucune antériorité opposable à la société FIDELIA ne peut qu'être déboutée de sa demande en contrefaçon ;
qu'il en est de même de son action en concurrence déloyale fondée sur la commercialisation de produits contrefaisants ;
Attendu que le droit d'agir en justice ne dégénère en abus qu'en cas de mauvaise foi révélatrice d'une intention de nuire dont la preuve n'est pas rapportée en l'espèce ;
qu'en conséquence la société DEUX MILLE VINGT SIX sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;
Sur les autres demandes
Attendu que la demande d'exécution provisoire est sans objet ;
qu'enfin aucune considération d'équité ne justifie l'application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile au présent litige.
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,
- Annule le procès verbal de saisie-contrefaçon du 10 février 2006 établi par Maître Christine C..., huissier de justice.
- Dit que Monsieur Georges X... n'établit pas être l'auteur des modèles revendiqués et en conséquence le déclare irrecevable à agir en contrefaçon.
- Dit que la société FIDELIA justifie de sa qualité à agir en contrefaçon mais la déboute de l'ensemble de ses demandes.
- Déboute la société DEUX MILLE VINGT SIX de ses demandes reconventionnelles.
- Rejette les demandes fondées sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
- Rejette toute autres demandes.
- Condamne Monsieur Georges X... et la société FIDELIA aux dépens.

Fait et jugé à Paris, le 21 décembre 2007.


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 06/04203
Date de la décision : 14/12/2007
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2007-12-14;06.04203 ?
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