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28/11/2007 | FRANCE | N°07/10007

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Chambre civile 3, 28 novembre 2007, 07/10007


T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

3ème chambre 3ème section

No RG :

07/10007

No MINUTE :

Assignation du :

14 Juin 2007

JUGEMENT

rendu le 28 Novembre 2007

DEMANDEURS

Monsieur Serge X...

...

92100 BOULOGNE BILLANCOURT

E.U.R.L. Y... SERGE, représentée par son gérant, M. Serge X....

...

92100 BOULOGNE BILLANCOURT

représentée par Me Roger ZEINEH, avocat au barreau de PARIS, vestiaire R026

DÉFENDEURS

S.A.R.L. MEDIA 5 CON

SEIL ET ORGANISATION

17 Pas Saint-Bernard

75011 PARIS

S.A.R.L. OB TOURS

...

75011 PARIS

Monsieur Serge Z...

...

75019 PARIS

représentés par Me Jean-Michel BRANCHE, avocat a...

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

3ème chambre 3ème section

No RG :

07/10007

No MINUTE :

Assignation du :

14 Juin 2007

JUGEMENT

rendu le 28 Novembre 2007

DEMANDEURS

Monsieur Serge X...

...

92100 BOULOGNE BILLANCOURT

E.U.R.L. Y... SERGE, représentée par son gérant, M. Serge X....

...

92100 BOULOGNE BILLANCOURT

représentée par Me Roger ZEINEH, avocat au barreau de PARIS, vestiaire R026

DÉFENDEURS

S.A.R.L. MEDIA 5 CONSEIL ET ORGANISATION

17 Pas Saint-Bernard

75011 PARIS

S.A.R.L. OB TOURS

...

75011 PARIS

Monsieur Serge Z...

...

75019 PARIS

représentés par Me Jean-Michel BRANCHE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire R.194

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Elisabeth A..., Vice-Président, signataire de la décision

Agnès B..., Vice-Président

Michèle C..., Vice-Président,

assistée de Marie-Aline PIGNOLET Greffier signataire de la décision

DEBATS

A l'audience du 22 Octobre 2007

tenue en audience publique

JUGEMENT

Prononcé par remise de la décision au greffe

Contradictoire

en premier ressort

I- RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Monsieur Serge X... est réalisateur audiovisuel et il a notamment réalisé l'émission "Tout le monde en parle" animée par Thierry D... et diffusée sur France 2. Au cours de l'émission, lorsque l'animateur souhaitait diffuser des séquences audiovisuelles, il les introduisait en employant l'expression "Y... Serge".

Monsieur X... est le gérant d'une EURL Y... SERGE qui a pour objet l'édition, la production, la réalisation de films télévisuels, de vidéocassettes et plus largement de toutes oeuvres musicales, artistiques, littéraires ou audiovisuelles.

Il est par ailleurs titulaire de la marque française verbale Y... SERGE déposée le 17 septembre 2001 et enregistrée sous le no 3 121 200 pour désigner les produits et services des classes 25, 35, 38 et 41, soit les "Vêtements. Publicités. Télécommunications. Divertissements".

Monsieur X... constatait à la fin de l'année 2004 qu'une société MEDIA 5 ayant pour activité la presse et l'édition de journaux avait procédé à la fin de l'année 2004 à l'enregistrement des noms de domaine "magnetoserge.fr", "magneto-serge.fr", "magnetoserge.com" et "magneto-serge.com".

Pendant plus de deux ans les adresses internet litigieuses ne renvoyaient à aucun site Internet en activité. Puis, à partir de la mise en demeure envoyée par les demandeurs en février 2007, les noms de domaine renvoyaient au site "virtuoselimousines.com", site exploité par la société OB TOURS dont le gérant est Monsieur Serge Z... et qui exerce une activité de location de voitures de luxe. Enfin, à partir du mois de mai 2007 les noms de domaine permettaient d'accéder à un site internet Y... SERGE ayant pour objet la location de limousines.

Des démarches amiables s'étant révélées infructueuses, Monsieur Serge X... et la société Y... SERGE ont fait assigner à jour fixe, après en avoir été dûment autorisés, les sociétés MEDIA 5, OB TOURS et Monsieur Z... par actes d'huissier délivrés le 14 juin 2007.

Dans leurs dernières conclusions signifiées le 25 septembre 2007, ils demandent au tribunal de débouter les défendeurs de leur exception de nullité de l'acte introductif d'instance, de dire qu'en reproduisant et en faisant usage de la marque Y... SERGE les défendeurs ont commis des actes de contrefaçon sur le fondement des articles L 713-2 du Code de la propriété intellectuelle, de dire qu'en faisant usage de la marque Y... SERGE à titre de nom de domaine pour l'accès à un site internet, ils ont engagé leur responsabilité à l'égard de Monsieur X... sur le fondement de l'article L.713-5 du Code de la propriété intellectuelle, qu'en usurpant la dénomination sociale Y... SERGE pour l'utiliser à titre de nom de domaine ils ont engagé leur responsabilité à l'égard de la société Y... SERGE sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, en conséquence de leur ordonner de procéder sous astreinte au transfert gratuit des noms de domaine litigieux à Monsieur X..., de leur ordonner de procéder sous astreinte à l'interruption de tous liens entre les sites internet et le site "virtuoselimousines.com", de leur interdire d'exploiter à quelque titre que ce soit et sous quelque forme que ce soit la dénomination "magneto serge" sous astreinte, de les condamner in solidum à payer à Monsieur X... et à la société Y... SERGE à chacun la somme de 25.000 euros à titre de dommages et intérêts, de les condamner in solidum à leur payer à chacun la somme de 3.500 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et d'ordonner l'exécution provisoire de la décision.

Les sociétés MEDIA 5 CONSEIL ET ORGANISATION, OB TOURS et Monsieur Z... ont signifié leurs dernières conclusions le 8 octobre 2007. Ils demandent au tribunal in limine litis de constater que l'assignation est entachée d'un vice en ce qu'elle indique une heure d'audience erronée qui fait nécessairement grief puisqu'elle a pour conséquence de les empêcher d'assurer leur défense, en conséquence de prononcer la nullité de l'assignation, subsidiairement, de dire que la contrefaçon de la marque Y... SERGE n'est pas constituée, de dire que l'usurpation de la dénomination sociale n'est pas constituée, de dire que la pratique du cybersquatting n'est pas susceptible en soi d'être sanctionnée et donc de débouter les demandeurs de l'intégralité de leurs demandes, de le condamner in solidum au paiement de la somme de 25.000 euros pour procédure abusive et de les condamner au paiement de la somme de 3.500 euros à chacun en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

II- SUR CE :

* Sur la nullité de l'assignation

Les défendeurs font valoir que l'assignation est nulle en ce qu'elle mentionne que l'audience est fixée à 9h30 alors que le Président l'a fixée le même jour à 12h30.

Le tribunal constate que l'assignation mentionne que l'audience est fixée le 25 septembre 2007 à 9heures 30 et que l'audience a bien eu lieu ce jour là à 9 heures 30, peu important que l'affaire n'ait n'ait été examinée que plus tard mais toujours au cours de l'audience.

Il y a lieu au surplus de mentionner qu'au cours de cette audience l'affaire a été renvoyée contradictoirement à l'audience du 22 octobre pour y être plaidée.

Cette exception sera en conséquence rejetée.

* Sur la contrefaçon

Monsieur X... fait valoir que les défendeurs ont commis des actes de contrefaçon par reproduction de sa marque en l'utilisant pour une activité de "télécommunication" sur le réseau internet, soit pour un service identique à ceux protégés, de contrefaçon par usage d'une marque reproduite en l'utilisant pour faire la promotion du site "virtuoselimousines.com", soit pour un service de publicité, protégé par la marque.

Les défendeurs font valoir que les noms de domaines déposés par la société MEDIA 5 CONSEIL correspondent à des produits et services différents de ceux pour lesquels la marque à été déposée, que c'est le contenu du site qui détermine les droits et non l'activité de la société déposante et qu'en l'espèce les noms de domaine concernent des sites relatifs au secteur de la location de véhicules de luxe avec chauffeur et non des produits et services "Vêtements; Publicité; Télécommunication; Divertissement".

Aux termes des dispositions de l'article L.713-2 du Code de la propriété intellectuelle " Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire :

a) La reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, même avec l'adjonction de mots tels que : « formule, façon, système, imitation, genre, méthode», ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l'enregistrement;

b) La suppression ou la modification d'une marque régulièrement apposée."

Il est constant qu'une marque ne bénéficie de protection que pour les produits et services similaires ou identiques à ceux pour lesquels elle est déposée et que c'est effectivement l'utilisation du signe, soit le contenu du site, qui détermine l'existence de la contrefaçon et non l'activité du titulaire du site.

En l'espèce, la marque est déposée pour des services de "Vêtements; Publicité; Télécommunication; Divertissements" et les sites internets litigieux étaient tout d'abord inactifs puis renvoyaient vers un autre site de location de voitures de luxe.

Le service de location de voitures ne peut être considéré comme étant similaire ou identique aux produits et services visés par la marque.

Dès lors il convient de débouter Monsieur X... de sa demande en contrefaçon de la marque Y... SERGE no 3 121 200.

* Sur la marque notoire

Monsieur X... fait valoir que sa marque est une marque notoire ce qui est contesté par les défendeurs.

Aux termes des dispositions de l'article L.713-5 du Code de la propriété intellectuelle "L'emploi d'une marque jouissant d'une renommée pour des produits ou services non similaires à ceux désignés dans l'enregistrement engage la responsabilité civile de son auteur s'il est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou si cet emploi constitue une exploitation injustifiée de cette dernière. (...)"

Le tribunal relève que l'expression Y... Serge était connue des spectateurs d'une émission maintenant terminée mais qu'elle n'était pas utilisée à titre de marque.

Les demandeurs n'établissent pas qu'il s'agit d'une marque notoire susceptible de protection au delà de sa spécialité.

Il convient en conséquence de débouter Monsieur X... de sa demande à ce titre.

* Sur l'usurpation de la dénomination sociale

La société Y... SERGE fait valoir que la société MEDIA 5 a usurpé sa dénomination sociale et qu'elle a une activité d'édition de presse.

Les défendeurs soutiennent que les noms de domaine litigieux étant utilisé pour un site de location de voitures il n'existe aucun risque de confusion entre ceux ci et la dénomination sociale de la demanderesse.

Le tribunal relève que la réservation par la société MEDIA 5 et l'utilisation par la société OB TOURS des noms de domaine contenant l'expression Y... SERGE interdit de fait à la société Y... SERGE d'utiliser sa dénomination sociale antérieure comme nom de domaine sur Internet. Les défendeurs ne pouvaient ignorer l'existence de ces droits antérieurs lorsqu'ils ont déposé les noms de domaine calquant la dénomination sociale de la demanderesse.

Le tribunal note à cet égard que la société MEDIA 5 qui a déposé les noms de domaine ne les a jamais utilisés pas et que c'est la société OB TOURS qui les exploite. De plus le site internet mentionne que le responsable de la société de location de limousines, Monsieur Serge Z... est "dit Y... Serge".

Il résulte de ces éléments que la société MEDIA 5 et la société OB TOURS ont commis une faute sur le fondement de l'article 1382 du Code civil en monopolisant en connaissance de cause une dénomination sociale au préjudice de sa titulaire.

Peu importe à cet égard que le site internet exploité sous les noms de domaine litigieux soient consacrés à la location de limousines dès lors que ces signes sont devenus indisponibles pour leur légitime titulaire.

Il convient en conséquence de retenir à l'égard des sociétés MEDIA 5 et OB TOURS une faute constitutive d'un préjudice pour la société Y... SERGE.

Monsieur Z... qui n'est que le gérant de la société OB TOURS n'ayant pas commis personnellement d'actes fautifs, il sera mis hors de cause.

* Sur les mesures réparatrices

Il convient de prononcer les mesures d'interdiction d'usage et d'ordonner à la société MEDIA 5 de transférer les noms de domaines litigieux à la société Y... SERGE.

Il sera par ailleurs alloué à la société Y... SERGE la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts.

* Sur l'exécution provisoire :

L'exécution provisoire est compatible avec la nature de l'affaire et nécessaire pour faire cesser le trouble né des actes fautifs commis par les sociétés MEDIA 5 et OB TOURS.

Il convient en conséquence de l'ordonner.

* Sur l'article 700 :

La société Y... SERGE sollicite le paiement de la somme de 3.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Il serait inéquitable de laisser à sa charge les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens. Il lui sera en conséquence alloué la somme de 3.500 euros de ce chef.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL,

Statuant en premier ressort, par jugement contradictoire et remis au greffe,

Déboute Monsieur Serge X... de ses demandes au titre de la contrefaçon et de l'atteinte à la renommée de sa marque Y... SERGE no 3 121 200,

Dit que les sociétés MEDIA 5 ORGANISATION ET CONSEIL et OB TOURS ont commis une faute en déposant et en exploitant les noms de domaine "magnetoserge.fr", "magneto-serge.fr", "magnetoserge.com" et "magneto-serge.com" au préjudice de la société Y... SERGE,

En conséquence,

Fait interdiction aux sociétés MEDIA 5 ORGANISATION ET CONSEIL et OB TOURS d'exploiter à quelque titre que ce soit et sous quelque forme que ce soit la dénomination Y... SERGE sous astreinte de 150 euros par infraction constatée passé le délai de quinze jours à compter de la signification de la présente décision,

Ordonne à la société MEDIA 5 ORGANISATION ET CONSEIL de transférer à la société Y... SERGE les noms de domaine "magnetoserge.fr", "magneto-serge.fr", "magnetoserge.com" et "magneto-serge.com" sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé le délai de un mois à compter de la signification de la présente décision,

Dit que le tribunal se réserve la liquidation des astreintes ainsi ordonnées en application de l'article 35 de la loi du 9 juillet 1991,

Condamne in solidum les sociétés MEDIA 5 ORGANISATION ET CONSEIL et OB TOURS à payer à la société Y... SERGE la somme de 3.500 euros à titre de dommages et intérêts,

Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement,

Condamne in solidum les sociétés MEDIA 5 ORGANISATION ET CONSEIL et OB TOURS à payer à la société Y... SERGE la somme de 3.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Condamne in solidum les Sociétés MEDIA 5 ORGANISATION ET CONSEIL et OB TOURS aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Fait à PARIS le 28 novembre 2007.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 07/10007
Date de la décision : 28/11/2007
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2007-11-28;07.10007 ?
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