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21/11/2007 | FRANCE | N°06/06792

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Chambre civile 3, 21 novembre 2007, 06/06792


3ème chambre 3ème section
No RG : 06 / 06792

No MINUTE :

Assignation du : 26 Avril 2006

JUGEMENT rendu le 21 Novembre 2007

DEMANDERESSE

Madame Valérie X.... ...75003 PARIS

représentée par Me Nadia BENNICKS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire B775
DÉFENDERESSE
Société INTERNATIONAL TRADE EXHIBITION COMPANY FRANCE SAS 55 rue Pierre CHARRON 75008 PARIS

représentée par Me Pierre- Marie BOUVERY, avocat au barreau de PARIS, vestiaire P 253
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Elisabeth BELFORT, Vice- Président, signataire d

e la décision Agnès THAUNAT, Vice- Président Michèle PICARD, Vice- Président, assistée de Marie- Aline PIGNOLET, Gr...

3ème chambre 3ème section
No RG : 06 / 06792

No MINUTE :

Assignation du : 26 Avril 2006

JUGEMENT rendu le 21 Novembre 2007

DEMANDERESSE

Madame Valérie X.... ...75003 PARIS

représentée par Me Nadia BENNICKS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire B775
DÉFENDERESSE
Société INTERNATIONAL TRADE EXHIBITION COMPANY FRANCE SAS 55 rue Pierre CHARRON 75008 PARIS

représentée par Me Pierre- Marie BOUVERY, avocat au barreau de PARIS, vestiaire P 253
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Elisabeth BELFORT, Vice- Président, signataire de la décision Agnès THAUNAT, Vice- Président Michèle PICARD, Vice- Président, assistée de Marie- Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision

DEBATS
A l' audience du 09 Octobre 2007 tenue en audience publique

JUGEMENT
Prononcé par remise de la décision au greffe Contradictoire en premier ressort

I- RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Madame Valérie X... est designer graphiste.
La société INTERNATIONAL TRADE EXHIBITION COMPANY (ci- après ITEC) a pour activité l' organisation de salons professionnels internationaux dédiés à la beauté, dont le salon " Cosmeeting " en 2003, le salon CREATIVE en 2005 et le salon SPA et INSTITUT en 2005 également. Ces salons ont été rassemblés sous la dénomination " BEYOND BEAUTY PARIS " qui se tient tous les ans en septembre à Paris.
Madame X... a réalisé pour ITEC un certain nombre de créations, plaquettes, flyers, annonces presse, logos, pictogrammes qu' elle lui a facturés selon plusieurs notes d' honoraires. Ces diverses créations étaient destinées à une partie de la communication du salon COSMEETING 2004.
La société ITEC informait Madame X... en février 2005 que la communication du salon COSMEETING 2005 ne lui serait pas confiée mais à la société DREAM TEAM.
Madame Valérie X... découvrait qu' une partie des travaux initialement prévus pour la communication du salon 2004 et strictement cédés pour les utilisations suivantes :- plaquette COSMEETING BEYOND BEAUTY 2004,- plaquette COSMEETING BEYOND BEAUTY 2005,- annonces de presse, avaient été réutilisés par la société ITEC :- pour la partie communication du salon Cosmeeting 2004 confiée à l' agence KELVIN design et la communication du salon Cosmeeting 2005,- par DREAM TEAM en 2006,- par ITEC en dehors du salon pour illustrer la couverture d' un ouvrage édité par ITEC et intitulé " Beauty Niche Bible 2005 / 2006 ", et ce sans son autorisation, sans la mention de son nom et sans paiement de droits de reproduction ou de représentation.

C' est ainsi qu' elle sollicitait le paiement de droits d' auteur par courriel du 2 novembre 2005
La société ITEC ayant refusé de la payer, elle la faisait assigner par acte d' huissier délivré le 26 avril 2006.
Dans ses dernières conclusions signifiées le 1er février 2007, Madame Valérie X... demande au tribunal de dire que la reproduction sans autorisation de ses créations constitue une contrefaçon, en conséquence d' interdire à la société ITEC de reproduire, divulguer sur tous supports et par tous moyens ses créations sous astreinte, de la condamner à lui verser la somme de 50. 000 euros en indemnisation de son préjudice patrimonial et la somme de 20. 000 euros en réparation de son préjudice moral, de dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 30 janvier 2006, d' ordonner l' exécution provisoire du jugement et de condamner la société ITEC au paiement de la somme de 10. 000 euros en application de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile..
La société ITEC a signifié ses dernières conclusions le 6 mars 2007. Elle demande au tribunal de débouter Madame X... de ses demandes et de la condamner au paiement de la somme de 5. 000 euros en application de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile.
II- SUR CE :
* Sur l' originalité :
La société ITEC soutient que les oeuvres revendiqués par Madame X... sont dépourvues d' originalité et de nouveauté, et notamment qu' elles rappellent les oeuvres de CALDER et de MIRO.
Madame X... fait valoir que ses oeuvres, quand bien même elles seraient inspirées d' autres oeuvres, n' en demeurent pas moins originales.
Le tribunal constate que les oeuvres revendiquées par Madame X... sont des logos et pictogrammes ainsi que la mise en page de plaquettes publicitaires et annonces presse.
Les logos et pictogrammes sont des symboles destinés à identifier les divers secteurs des salons. Ils ont des formes diverses et arbitraires faits de bulles, de spirales, de virgules ou de carrés imbriqués.
La mise en page des plaquettes se caractérise par une couverture avec des bandes horizontales, une bande supérieure comportant un dessin tramé, une bande intermédiaire comportant une photographie et une bande inférieure avec les différentes informations nécessaires, soit la date au bas dans une bande de ton différent, le nom du salon et d' autres mentions. Une autre couverture montre une femme assise entourée de sortes d' étiquettes de formes triangulaires arrondies dans lesquels s' inscrivent des dénominations formant un programme. La page est striée de lignes courbes et de logos surimprimés.
Peu importe en l' espèce que ces diverses oeuvres graphiques s' inspirent, de très loin cependant, des oeuvres picturales de CALDER ou de MIRO. Ce sont sans aucun doute des créations originales qui portent l' empreinte de la personnalité de leur auteur, Madame X....
* Sur la titularité des droits :
La société ITEC fait valoir que les supports de communication revendiqués sont une oeuvre collective, propriété de la personne sous le nom de laquelle elle est divulguée. Elle expose que ces oeuvres ont été créées sous sa direction et qu' elle a donné des instructions précises à Madame X... pour leur conception.
Madame X... conteste la qualité d' oeuvre collective de ses créations et fait valoir qu' elle a réalisé seule la plaquette COSMEETING 2004, la plaquette COSMEETING 2005 et l' annonce presse.
Le tribunal note d' une part que les plaquettes portent le crédit de Madame X... et d' autre part que la société ITEC ne produit aucune pièce qui établirait qu' elle a donné des instructions à cette dernière.
Il convient en conséquence de constater que Madame X... est l' auteur des oeuvres qu' elle revendique.
* Sur la contrefaçon :
- Sur l' atteinte aux droits patrimoniaux
Madame X... soutient qu' elle n' a cédé les droits d' exploitation et de reproduction de ses oeuvres que pour une seule utilisation. N' ayant pas consenti à d' autres utilisations elle estime que la société ITEC a commis des actes de contrefaçon en reproduisant sans son autorisation ses plaquettes COSMEETING BEYOND BEAUTY 2004 et 2005 et ses annonces de presse sur la partie de la communication du salon COSMEETING 2004 confiée à l' agence KELVIN DESIGN, sur la communication réalisée par DREAM TEAM en 2006 et sur la couverture de l' ouvrage BEAUTY NICHE BIBLE 2005 / 2006.
La société ITEC ne conteste pas avoir utilisé les éléments graphiques des plaquettes et annonces crées par Madame X... ainsi que ses pictogrammes et logos.
Elle fait valoir cependant qu' elle est cessionnaire des droits d' utilisation sur l' ensemble des ces créations et tout particulièrement sur les logos et pictogrammes et que, pour ce qui concerne le matériel de communication de 2004, Madame X... avec qui elle était encore en relation d' affaires, était au courant de ces utilisations.
Le tribunal relève que les factures d' honoraires de Madame X... ne comportent aucune précision de sorte qu' il y a lieu de considérer qu' en principe la cession n' a été opérée que pour une seule utilisation en ce qui concerne les éléments graphiques des plaquettes et annonces. Cependant, pour ce qui concerne les Guides et Programmes 2004, il y a lieu de constater que la société ITEC n' a pas utilisé les créations de Madame X... à son insu et que les deux parties ont continué à travailler ensemble par la suite. Dès lors, il convient de considérer que Madame X... a cédé ses droits pour l' ensemble de la communication 2004 mais non pour les communications postérieures.
En revanche, pour ce qui concerne les logos et pictogrammes, compte tenu de leur nature et notamment du fait qu' ils sont des symboles récurrents destinés à identifier les divers secteurs des salons et permettent ainsi aux visiteurs de se diriger, le tribunal estime qu' ils ont été cédés a priori pour toutes les utilisations et pour une durée indéterminée.
Il résulte de ces éléments que les contrefaçons commises par la société ITEC se trouvent dans les matériels de communication suivants :- le programme de conférences réalisé par KELVIN DESIGN en 2005 laquelle reprend les éléments caractéristiques de la couverture de la plaquette 2004,- le Guide du visiteur 2005 réalisé par KELVIN DESIGN en 2005 et qui reprend une partie de la plaquette 2005,- l' ouvrage édité par ITEC et intitulé BEAUTY NICHE BIBLE 2005 / 2006 qui reprend en couverture une partie de la plaquette 2005,

- la plaquette COSMEETING BEYOND BEAUTY 2006 réalisée par DREAM TEAM qui reprend le graphisme de la couverture de la plaquette 2005.

- Sur l' atteinte au droit moral
Madame X... reproche à la société ITEC d' une part de ne pas avoir mentionné son nom et d' autre part d' avoir dénaturé son oeuvre.
La société ITEC fait valoir qu' il n' est pas d' usage de créditer l' auteur graphiste de plaquettes publicitaires et annonces presse d' une part et d' autre part que Madame X... ne précise pas quelles sont les dénaturations dont elle est victime.
Pour ce qui concerne les crédits, le tribunal relève que le nom de Madame X... figurait sur les plaquettes réalisées par elle, ce qui dément les affirmations de la société ITEC.
Son nom n' étant pas mentionné sur les plaquettes réalisés par la société KELVIN DESIGN en 2005 et DREAM TEAM en 2006, il convient de constater que la société ITEC a porté atteinte à son droit à la paternité.
Pour ce qui concerne les dénaturations, le tribunal constate à l' examen des divers éléments produits que la couverture de l' ouvrage Beauty Niche Bible 2005 / 2006 reprend un élément graphique de la plaquette 2005 mais après l' avoir recadré. Les autres dénaturations alléguées concernent soit le programme 2004 que le tribunal a déjà écarté du fait de la nécessaire acceptation de Madame X... pour cette utilisation et la reprise modifiée d' un logo que le tribunal a également écarté du fait de la cession des droits sur cette création.
* Sur les mesures réparatrices :
Madame X... sollicite outre les mesures d' interdiction d' usage qui seront prononcées à l' exclusion des logos et pictogrammes, le paiement de la somme de 50. 000 euros en réparation de son préjudice patrimonial et le paiement de la somme de 20. 000 euros en réparation de son préjudice moral.
Il résulte de l' examen des factures produites par la demanderesse que cette dernière a été payée environ 30. 000 euros pour l' ensemble de son travail, y compris la création des pictogrammes et logos.
Compte tenu de ces éléments, il convient de fixer son préjudice patrimonial et moral à la somme de 15. 000 euros, toutes causes de préjudice confondues.
Il n' y a pas lieu en l' espèce de déroger aux dispositions de l' article 1153- 1 du Code civil.
* Sur l' exécution provisoire :
L' exécution provisoire est compatible avec la nature de l' affaire et nécessaire pour faire cesser le trouble né de la contrefaçon.
Il convient en conséquence de l' ordonner.

* Sur l' article 700 :

Madame Valérie X... sollicite le paiement de la somme de 10. 000 euros au titre des dispositions de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Il serait inéquitable de laisser à sa charge les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens. Il lui sera en conséquence alloué la somme de 60. 000 euros de ce chef.
PAR CES MOTIFS LE TRIBUNAL, Statuant en premier ressort, par jugement contradictoire et remis au greffe,

Dit que la société ITEC a porté atteinte aux droits patrimoniaux de Madame Valérie X... sur ses créations graphiques figurant sur les plaquettes COSMEETING BEYOND BEAUTY 2004 et 2005 et sur des annonces presse en les reproduisant sans son autorisation,
Dit que la société ITEC a porté atteinte au droit à la paternité de l' oeuvre de Madame X... en ne la créditant pas dans les plaquettes et guides et programmes 2005 et 2006 et à l' intégrité de son oeuvre en recadrant un élément graphique dans la couverture de l' ouvrage Beauty Niche Bible,
Fait interdiction à la société ITEC de reproduire, divulguer sur tous supports et par tous moyens les créations contrefaites de Madame X... sous astreinte de 150 euros par infraction constatée passé le délai de un mois à compter de la signification de la présente décision,
Dit que le tribunal se réserve la liquidation des astreintes ainsi ordonnées en application de l' article 35 de la loi du 9 juillet 1991,
Condamne la société ITEC à payer à Madame X... la somme de 15. 000 euros en réparation de son préjudice moral et patrimonial,
Ordonne l' exécution provisoire du présent jugement,
Rejette le surplus des demandes,
Condamne la société ITEC à payer à Madame Valérie X... la somme de 60. 000 euros sur le fondement des dispositions de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile,
Condamne la société ITEC aux dépens.

Fait à PARIS le 21 novembre 2007.


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 06/06792
Date de la décision : 21/11/2007
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2007-11-21;06.06792 ?
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