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24/10/2007 | FRANCE | N°05/04393

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Chambre civile 3, 24 octobre 2007, 05/04393


3ème chambre 3ème section
No RG : 05 / 04393

No MINUTE :
Assignation du : 16 Mars 2005

JUGEMENT rendu le 24 Octobre 2007

DEMANDEUR
Monsieur Christian X...... 94370 SUCY EN BRIE

représenté par Me Caroline DENEUVILLE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire E. 1179
DÉFENDERESSES
S. A. VERRERIE OUVRIERE D'ALBI ZI Albi Saint Juery 81011 ALBI CEDEX 9

représentée par Me Michel-Paul ESCANDE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire R266
Association AGROPOINT 1 rue Gustave Eiffel 81000 ALBI

représentée par Me Bérangère MONTA

GNE, avocat au barreau de PARIS vestiaire P 430
COMITE INTERPROFESSIONNEL DES VINS DE GAILLAC, en intervention ...

3ème chambre 3ème section
No RG : 05 / 04393

No MINUTE :
Assignation du : 16 Mars 2005

JUGEMENT rendu le 24 Octobre 2007

DEMANDEUR
Monsieur Christian X...... 94370 SUCY EN BRIE

représenté par Me Caroline DENEUVILLE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire E. 1179
DÉFENDERESSES
S. A. VERRERIE OUVRIERE D'ALBI ZI Albi Saint Juery 81011 ALBI CEDEX 9

représentée par Me Michel-Paul ESCANDE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire R266
Association AGROPOINT 1 rue Gustave Eiffel 81000 ALBI

représentée par Me Bérangère MONTAGNE, avocat au barreau de PARIS vestiaire P 430
COMITE INTERPROFESSIONNEL DES VINS DE GAILLAC, en intervention Forcée Place Saint MICHEL 81600 GAILLAC

Syndicat de Défense AOC GAILLAC Maison des Vins Abbaye Saint-Michel 81600 GAILLAC

Monsieur Michel Y... Préisdent du Comité Interprofessionnel des Vins du Sud Ouest Complexe de L'INRA Boîte Postale 19 31221 CASTANET TOLOSAN

représentés par Me Stéphane SALEMBIEN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire R 35, et Me Hzenri FERRIE Avocat au Barreau d'Albi, et Me Jeanine ROSSIER, Avocat au Barreau de Toulouse.
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Elisabeth BELFORT, Vice-Président, signataire de la décision Agnès THAUNAT, Vice-Président Michèle PICARD, Vice-Président,

assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision
DEBATS
A l'audience du 04 Septembre 2007 tenue en audience publique

JUGEMENT
Prononcé en audience publique Contradictoire en premier ressort

FAITS ET PROCEDURE
La dénomination GAILLAC est protégée au titre des appellations d'origine contrôlée.
Le 4 novembre 1974, le syndicat de défense de l'A. O. C. GAILLAC a déposé à l'INPI quatre modèles de bouteilles enregistrés sous les numéros 149. 323 à 149. 325 en classe 9-01 portant les appellations : Gaillacoise rouge et Flûte Gaillacoise.
La forme de ces bouteilles rendant leur stockage difficile, un consensus s'est dégagé chez les producteurs et " acteurs " du Gaillacois afin de moderniser cette bouteille.
M. Christian X..., qui connaissait le Président du syndicat de défense de l'A. O. C Gaillac et avait été intronisé au sein de la Confrérie de la Dive Bouteille de Gaillac a proposé de collaborer à l'élaboration de cette nouvelle bouteille.
M. Christian X... a déposé à l'INPI le 22 octobre 2001, la marque " LA GAILLACOISE " en classes 21, 32 et 33 pour désigner les produits et services suivants : " ustensiles et récipients pour le ménage ou la cuisine (ni en métaux précieux, ni en plaqué) ; peignes et éponges ; brosses (à l'exception des pinceaux) ; matériaux pour la brosserie ; matériel de nettoyage ; paille de fer ; verre brut ou mi-ouvré (à l'exception du verre de construction) ; verrerie porcelaine et faïence non comprise dans d'autres classes. A savoir : bouteilles en verre, boîte en verre, bougeoirs non en métaux précieux, cache-pot non en papier ; figurines en porcelaine ou en verre mosaïques en verre (non pour la construction)-Opalines-Vases (non ne métaux précieux)-Verres (récipients)-Flacons (non en métaux précieux)-Porte-savon (non en métaux précieux)-Porte-serviettes (non en métaux précieux)-Poudriers (non en métaux précieux)-Pulvérisateurs de parfum-Vaporisateurs à Parfum. Bières, eaux minérales et gazeuses et autres boissons non alcooliques ; boissons de fruits et jus de fruits ; sirops et autres préparations pour faire des boissons. Vins bénéficiant de l'une des appellations d'origine comportant le terme " Gaillac ". M. Christian X... a mis au point avec un designer, M. Z..., un modèle de bouteille destinée à la commercialisation du vin de Gaillac, qu'il a fait protéger par un dépôt auprès de l'INPI, le 14 février 2002 sous le numéro d'enregistrement 02 11 03.

M. X... a fait réaliser trois prototypes en bois du modèle de bouteille déposé, lesquelles ont été présentées revêtues d'étiquettes syndicales à la Fête du vin de 2002. M. X... s'est par la suite rapproché de la société BSN afin de faire fabriquer la bouteille selon le modèle déposé.

Le 28 novembre 2003, lors d'un rendez-vous à la Maison des Vins de Gaillac, M. A..., Président du syndicat informait M. X... de sa volonté de travailler, non pas avec la société BSN, mais avec la société VOA VERRERIES OUVRIERES D'ALBI, son partenaire depuis de nombreuses années et lui faisait part de son refus corrélatif de travailler sur son modèle.
Le 15 mars 2004, le syndicat de défense des vins de Gaillac déposait auprès de l'INPI, sous le no041339 un modèle de bouteille dénommé " bouteille Gaillacoise rouge 77 ".
Estimant que le modèle de bouteille déposé par le syndicat contrefaisait le modèle qu'il avait lui-même déposé, M. X... a par ordonnance sur requête du 4 mars 2005 du président du tribunal de grande instance de Paris été autorisé à faire pratiquer une saisie-contrefaçon. Cette mesure a été réalisée le 5 mars 2005, sur le stand de l'association AGROPOINT, au Salon de l'Agriculture de la Porte de Versailles.
Par acte d'huissier de justice en date du 16 mars 2005, M. Christian X... a assigné la société VOA VERRERIE D'ALBI, le syndicat de défense AOC GAILLAC et l'association AGROPOINT devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon de modèle et de droit d'auteur.
Par dernières conclusions communiquées le 12 juin 2007, M. Christian X... demande au tribunal de :
au visa des articles L111-1, L112-1, L335-3, L511-1 à L511-4, L511-9, L511-10, L513-2, L513-4, L513-5, L521-1 du code de propriété intellectuelle et 1382 du code civil,
débouter les défendeurs de l'ensemble de leurs demandes reconventionnelles,
faire droit à ses demandes,
valider la saisie pratiquée le 5 mars 2005 sur le stand de l'association AGROPOINT stand 82 du Salon de l'Agriculture qui s'est tenu au Parc des expositions, Porte de Versailles,
nommer tel expert qu'il plaira au tribunal de désigner afin de déterminer l'ampleur des agissements de contrefaçon et notamment,-le nombre de modèles contrefaisants fabriqués et commercialisés ou utilisés à des fins commerciales en France,-l'identité et la localisation des différents distributeurs auprès de qui ces modèles contrefaisants sont commercialisés,-le contenu des documents publicitaires et commerciaux, afin de permettre ultérieurement au tribunal d'évaluer son préjudice,

mais dès à présent,
faire interdiction in solidum à la société VOA VERRERIE D'ALBI, au syndicat de défense AOC GAILLAC et à l'association AGROPOINT de fabriquer, vendre, exposer, commercialiser et, détenir et utiliser à des fins commerciales le bouteilles contrefaisantes et ce sous astreinte de 1000 euros par infraction et jour de retard à y satisfaire,
condamner in solidum les défendeurs à rappeler les produits contrefaisants chez les distributeurs et revendeurs auprès desquels ils ont été vendus ou placés et ce sous astreinte de 3000 euros par jour de retard à y satisfaire,
ordonner la destruction des stocks de bouteilles contrefaisantes, sous le contrôle de M. X... et aux frais des défendeurs,
condamner in solidum les défendeurs à lui verser par provision et à titre d'acompte la somme de 100. 000 euros en réparation du préjudice commercial que leurs agissements fautifs lui ont causé,
ordonner à titre de dommages-intérêts complémentaires la publication par extrait de la décision à intervenir dans cinq journaux de son choix, aux frais des défendeurs et dans la limite de 5000 euros par publication,
ordonner l'attribution à M. X... des modèles contrefaisants déposés à l'INPI par le syndicat de défense AOC GAILLAC,
ordonner l'exécution provisoire,
condamner in solidum les défendeurs à lui payer la somme de 12. 000 Euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
condamner in solidum des défendeurs aux entiers dépens avec distraction au profit de Maître DENEUVILLE en application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Par dernières conclusions communiquées le 14 mai 2007, le syndicat de défense AOC GAILLAC, le Comité Interprofessionnel des Vins de Gaillac (CIVG) intervenant forcé et le Comité Interprofessionnel des Vins du Sud Ouest (CIVSO), pris en la personne de M. Michel Y..., son président, intervenant volontaire, demandent de :
à titre principal,
dire que M. X... est irrecevable à agir tant sur le fondement de la contrefaçon que de la concurrence déloyale et du parasitisme,
dire que ces demandes devront être intégralement rejetées sur le fondement du principe la " fraude corrompt tout " et de la règle " nemo auditur ",
prononcer la nullité du modèle déposé par M. X...,
en tout état de cause mettre hors de cause le Comité Interprofessionnel des Vins,
à titre subsidiaire,
dire que le syndicat de défense AOC GAILLAC et le Comité Interprofessionnel des Vins de Gaillac ne se sont pas rendus coupables d'actes de contrefaçon ou de concurrence déloyale et de parasitisme,
en conséquence débouter M. X...,
à titre infiniment subsidiaire,
dire que les demandes visant à faire interdiction in solidum au Syndicat et à ses partenaires d'utiliser ladite bouteille, leur enjoindre de rappeler les produits contrefaisants, ordonner la destruction des stocks des bouteilles contrefaisantes ne pourront prospérer à leur encontre,
dire que le syndicat, le Comité interprofessionnel des vins de Gaillac ne peuvent être condamnés à des dommages-intérêts même par provision,
à titre reconventionnel,
ordonner le transfert de la marque " LA GAILLACOISE " déposée par M. X... à l'INPI sous le no31 27 156 le 22 octobre 2001 au syndicat de défense de l'appellation Gaillac ; si par extraordinaire le tribunal n'ordonnait pas le transfert de la marque " LA GAILLACOISE ", en prononcer la nullité,

condamner M. X... à cesser toute utilisation de L'AOC GAILLAC ou GAILLAC ou du terme LA GAILLACOISE par astreinte de 1000 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision,
en tout état de cause, condamner M. X... au paiement de 20 000 euros de dommages-intérêts au syndicat de défense de l'AOC GAILLAC,
ordonner la publication du jugement aux frais de M. X... dans trois journaux, dans la limite d'un plafond hors taxe de 5000 euros et ce, au besoin à titre de dommages-intérêts complémentaires,
condamner M. X... à leur payer, à chacun, la somme de 10. 000 Euros du fait de la procédure abusive et du préjudice causé par la saisie contrefaçon, et la somme de 5000 euros à chacun des concluants en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
condamner M. X... aux entiers dépens avec distraction au profit de Maître Stéphane SALEMBIEN, avocat associé de la SCP FOURMENTIN LE QUINTREC VEERSAMY CORCOS et associés, en application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Par dernières conclusions communiquées le 14 mai 2007, la société VOA VERRERIE d'ALBI demande au tribunal de :
dire et juger que le modèle déposé le 14 février 2002 sous le numéro 02 1103 par M. X... est dénué de nouveauté, de tout caractère propre et de toute originalité et qu'il ne saurait par conséquent bénéficier tant de la protection au titre du droits des dessins et modèles que ce celle du droit d'auteur,
dire et juger que le modèle déposé le 14 février 2002 et enregistré sous le no02 1103 par M. X... en ce qu'il reproduit la dénomination GAILLAC, constitue une appropriation illicite de l'appellation d'origine GAILLAC,
prononcer la nullité du modèle déposé le 14 février 2002 et enregistré sous le no02 1103 par M. X...,
dire et juger que la marque " LA GAILLACOISE " déposée le 22 octobre 2001 et enregistrée sous le numéro 3 127 156 par M. X..., en ce qu'elle évoque la dénomination GAILLAC, constitue un risque de détournement illicite et d'affaiblissement de la notoriété de l'appellation d'origine GAILLAC,
dire et juger que la marque " LA GAILLACOISE " déposée le 22 octobre 2001 et enregistrée sous le numéro 3 127 156 par M. X..., en ce qu'elle évoque la dénomination GAILLAC, constitue l'appropriation illicite de l'appellation d'origine GAILLAC,
prononcer la nullité de la marque " LA GAILLACOISE " déposée le 22 octobre 2001 et enregistrée sous le numéro 3 127 156 par M. X...,
à titre subsidiaire,
dire et juger que le modèle " bouteille Gaillacoise rouge 77 " déposé le 15 mars 2004 sous le numéro 041339 par le syndicat de défense de l'AOC GAILLAC ne constitue pas la contrefaçon du modèle déposé par M. X... le 14 février 2002,
dire et juger que M. X... ne démontre pas l'existence d'actes distincts de concurrence déloyale,
en tout état de cause,
dire et juger irrecevables et mal fondées l'ensemble de ses demandes,
le condamner à lui verser 10 000 euros au titre de la procédure abusive sur le fondement de l'article 1382 du code civil,
ordonner la publication du jugement à intervenir, dans la limite d'un plafond global de 15. 000 euros pour l'ensemble de trois publications,
condamner M. Christian X... à lui payer la somme de 10. 000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
condamner M. Christian X... aux entiers dépens avec distraction au profit de la SELARL MP ESCANDE en application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Par dernières conclusions communiquées le 4 juin 2007, l'association AGROPOINT demande au tribunal de :
au visa des articles 1315, 1382 du code civil, L511-1 et suivants du code de propriété intellectuelle et notamment des articles L111-1, L111-2, L335-2, L335-3, L511-3, L511-4, L511-9, L513-4, L513-5 et L521-1 du code de propriété intellectuelle,
débouter M. X... de ses demandes en ce qu'elles sont dirigées à son encontre,
prononcer la mise hors de cause de l'association AGROPOINT,
subsidiairement,
surseoir à statuer sur les demandes financière de M. X...,
en toute hypothèse, si une condamnation intervenait à son encontre, condamner le Comité interprofessionnel des vins de Gaillac à la garantir de l'ensemble des condamnations qui seraient prononcées à son encontre,
condamner M. Christian X... ou tout succombant à lui payer la somme de 8. 000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
condamner M. Christian X... aux entiers dépens avec distraction au profit de la SCP ANQUETIL-GAUD et associés, en application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur l'irrecevabilité de l'action de M. X...
L'article L511-9 du code de propriété intellectuelle dispose que : " la protection du dessin ou modèle conférée par les dispositions du présent livre s'acquiert par l'enregistrement. Elle est accordée au créateur ou à son ayant cause. L'auteur de la demande d'enregistrement est, sauf preuve contraire, regardé comme le bénéficiaire de cette protection. "
Le syndicat de défense AOC GAILLAC soulève l'irrecevabilité de l'action de M. X... au motif qu'il n'est pas titulaire de droits sur le modèle dont il se prévaut, ne bénéficie que d'une présomption de propriété sur le fondement du dépôt du dit modèle, détruite par la preuve contraire, le flacon ayant été créé par M. Z... et le contrat signé entre MM. X... et Z... ne prévoyant pas une cession de droits, mais uniquement un droit d'industrialisation et de commercialisation sous condition suspensive.
Il est constant que M. X... est le demandeur à l'enregistrement du modèle de bouteille litigieux. Il n'est cependant pas l'auteur de ce modèle qui a été créé par M. Z....
Par contrat du 10 août 2001, intitulé " réalisation d'une nouvelle bouteille pour les vins de Gaillac ", il était convenu que M. Z... dessinerait cette bouteille, et que ce dernier cédait à M. X... tous droits d'industrialisation et d'exploitation commerciale de la bouteille dessinée par lui, dès lors que M. X... acquittait à M. Z... l'intégralités des royalties convenues.
M. Z... aux termes d'une attestation en date du 24 janvier 2007, " certifie avoir cédé à M. X... tous droits de reproduction et de représentation que je détiens sur les dessins et plans qui ont servis à l'élaboration des prototypes de la bouteille de Gaillac, lorsqu'il est apparu que ce modèle ne serait pas commercialisé puisque le syndicat avait passé un accord avec la verrerie ouvrière d'Albi. "
Il convient de rappeler que la cession des droits sur un modèle n'est soumise à aucune condition de forme et que les tiers ne peuvent se prévaloir d'une irrégularité dans l'acte de cession.
Dès lors, M. Z... reconnaissant ainsi avoir cédé ses droits à M. X... à une période antérieure à l'assignation, celui-ci est recevable à agir en contrefaçon au titre de la défense des droits d'exploitation cédés sur le modèle en cause.
Sur la validité du modèle déposé par M. X...
L'article L511-3 du code civil dispose que : " un dessin ou modèle est regardé comme nouveau, si à la date de dépôt de la demande d'enregistrement ou de la date de la priorité revendiquée, aucun dessin ou modèle identique n'a été divulgué. Des dessins ou modèles sont considérés comme identiques lorsque leurs caractéristiques ne diffèrent que par des détails insignifiants. "
La société VOA VERRERIES D'ALBI verse aux débats la marque figurative déposée à l'INPI le 17 juillet 1984, renouvelée le 20 mai 1994, enregistrée sous le numéro 1281981 par la société Saint Raphaël.
Le tribunal constate que cette marque figurative représente une bouteille présentant un col long et élancé, un resserrement ou pincement au bas de la bouteille, des diamètres à l'épaule et aux pied débordant et enfin une courbure de son jable, identiques aux caractéristiques revendiquées par M. X.... Dès lors, l'impression d'ensemble étant semblable entre la bouteille, signe de la marque figurative et le modèle déposé par M. X..., celui-ci ne peut être considéré comme étant nouveau.
La mention GAILLAC figurant sur le modèle déposé par M. X... ne peut être une caractéristique donnant à cette bouteille un caractère propre, dès lors, que cette dénomination relève d'une appellation d'origine, non appropriable.
S'agissant du dessin stylisé du coq, il n'est pas détachable de la mention GAILLAC renvoyant à l'origine du vin et n'est pas de ce fait de nature à donner un caractère propre à la bouteille.
Dans ces conditions, le modèle déposé par M. X... est nul en application de l'article L512-4 du code de propriété intellectuelle.
Sur la protection par le droit d'auteur
M. X... soutient qu'il détient les droits d'auteur sur une oeuvre à part entière matérialisée par la réalisation de trois prototypes en bois.
Pour être protégeable, une oeuvre doit révéler une véritable recherche esthétique portant l'empreinte de la personnalité de son auteur et se distinguant par là même des créations antérieures.
En l'espèce, les caractéristiques revendiquées par M. X... à savoir " un col long et élancé, un resserrement ou pincement au bas de la bouteille, des diamètres à l'épaule et au pied débordant identiques et enfin une courbure de son jable ", ne sont pas originales puisqu'on les retrouve déjà dans la même combinaison dans le dessin déposé en 1984 comme marque figurative, sus évoquée.
Dans ces conditions, les bouteilles revendiquées par M. X... ne sont pas protégées par le droit d'auteur.
Sur la contrefaçon des droits d'auteur et du modèle déposé par M. X...
Le dit modèle étant annulé et n'étant pas protégé par le droit d'auteur, il n'y a pas lieu d'examiner le grief de contrefaçon.
Sur la concurrence déloyale et le parasitisme
M. X... soutient que l'utilisation par les défendeurs de son modèle de bouteille constitue un acte de concurrence déloyale ou à tout le moins de parasitisme.
Il est constant qu'une telle demande ne peut prospérer qu'autant que le demandeur démontre l'existence de faits distincts des actes de contrefaçon.
En l'espèce de tels actes n'étant pas démontrés, il y a lieu de rejeter cette demande de dommages-intérêts. De plus, M. X... ne démontre pas que les défenderesses ont utilisé ses investissements et notamment le travail de M. Z... pour l'élaboration de leur nouvelle bouteille, celle-ci comme on l'a vu précédemment s'inspirant d'un modèle antérieur.
Sur les demandes reconventionnelles
-sur la nullité de la marque LA GAILLACOISE
L'article L711-2 du code de propriété intellectuelle dispose que : " Le caractère distinctif d'un signe de nature à constituer une marque s'apprécie à l'égard des produits ou services désignés. Sont dépourvus de caractère distinctif a) les signes ou dénominations, qui dans le langage courant ou professionnel sont exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service ".
Par ailleurs, aux termes de l'article L711-3 du dit code " ne peut être adopté comme marque ou élément de marque un signe c) de nature à tromper le public, notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique du produit ou du service. "
Le syndicat de défense AOC GAILAC sollicite le transfert à son profit de la marque LA GAILLACOISE déposée par M. X... à l'INPI le 22 octobre 2001 sous le numéro 3127156 ou la nullité de cette marque.
Le syndicat apporte la preuve par la production aux débats du certificat du modèle de bouteille et de flûte déposé en 1974, qu'il avait déjà dénommé ces flacons : Gaillacoise rouge et Flûte gaillacoise.
L'appellation " Gaillacoise rouge 77 " est utilisé dans le contrat de licence conclu par le syndicat et la société VOA VERRERIE D'ALBI le 8 décembre 1994 ainsi que sur les factures émises en octobre 2001 par la société VOA VERRERIE D'ALBI.
Par ailleurs, il résulte de l'attestation de M. Jean-Paul I..., vigneron que celui-ci dans son domaine a toujours " utilisé les bouteilles syndicales Flûtes et Carafe Gaillacoise depuis plus de trente ans. "
Dès lors, il apparaît que l'appellation " Gaillacoise " était couramment utilisée pour désigner les bouteilles syndicales du vin de Gaillac et M. X... ne pouvait s'approprier sans fraude ce terme pour désigner notamment des " bouteilles en verre " et des " vins bénéficiant de l'une des appellations d'origine comportant le terme " Gaillac ".
Cependant, il est établi par la production aux débats de la " déclaration de retrait ou de renonciation " que le 1 juin 2007 M. X... a présenté une demande de retrait de la marque LA GAILLACOISE, déposée le 22 octobre 2001 et enregistrée sous le no01 312 71 56 ;
Dès lors, la demande de nullité ou de transfert est sans objet s'agissant d ‘ une marque radiée.
-sur l'utilisation des termes " la gaillacoise " ou " gaillac "
Le syndicat soutient que M. X... ne craint pas d'utiliser l'appellation pour obtenir la conclusion de contrats à son profit, c'est ainsi que le contrat de licence conclu entre celui-ci et la société BSN fait état de l'appellation ; de même l'appellation Gaillac figure sur le modèle déposé à son nom ; dès lors, en tentant de se réserver un droit privatif sur des éléments tendant à créer une confusion avec une appellation d'origine contrôlée et d'en tirer profit à l'encontre de l'association en charge de la protection de l'appellation, M. X... a commis des actes de parasitisme de l'appellation d'origine " Gaillac " et devra être condamné à ce titre à des dommages-intérêts.
Le tribunal observe qu'une telle demande ne peut prospérer qu'autant qu'est rapportée la preuve non seulement de la faute mais encore d'un dommage, et d'un lien de causalité. En l'espèce, l'existence d'un dommage n'est pas établie les démarches de M. X... étant connues des défenderesses. Elles s'inscrivaient dans le cadre de pourparlers existant entre le syndicat et M. X... et visant à créer une nouvelle bouteille pour l'A. O. C. GAILLAC. En outre M. X... a présenté ses prototypes en bois à la Fête du vin en 2002, avec l'accord du syndicat, puisque les bouteilles étaient revêtues d'étiquettes syndicales. Dans ces conditions cette demande de dommages-intérêts sera rejetée.
Le syndicat se plaint également du fait que le dépôt de la marque LA GAILLACOISE dans des catégories de produits tels que des ustensiles de cuisine est de nature à affaiblir et à ternir l'image de l'Appellation. De même la désignation de produits tels que des bières, eaux minérales et boissons non alcooliques sous un terme qui créé une confusion avec une appellation d'origine contrôlée strictement réglementée est de nature à créer un trouble à l'ordre public qu'il convient de sanctionner.
Il convient de retenir que l'appellation d ‘ origine contrôlée protégée n'est pas " LA GAILLACOISE " mais " GAILLAC ". Dans ces conditions les griefs articulés par le syndicat ne sont pas fondés et il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de dommages-intérêts..
En revanche, la demande tendant à interdire à M. X... d'utiliser les termes GAILLAC et LA GAILLACOISE est fondée en son principe, s'agissant pour le premier terme d'une appellation d'origine contrôlée, l'utilisation de ce terme portant atteinte à l'A. O. C. et pour le second de l'appellation couramment utilisée pour désigner la bouteille syndicale, dont l'utilisation doit rester librement appropriable par les viticulteurs de cette A. O. C. qui désignent leurs bouteilles sous cette appellation..
-sur les demandes de condamnation pour procédure abusive
Les défendeurs présentent à l'encontre de M. X... des demandes de condamnations pour procédure abusive.
Le tribunal observe qu'il ressort des pièces produites aux débats et notamment d'un article paru dans le journal LA DEPECHE du 7 novembre 2002 que le Syndicat a utilisé un des prototypes mis au point par M. X... dans le cadre de la Fête du vin, qu'il y a eu, en outre des discussions entre le syndicat et M. X... sur la bouteille qu'il avait réalisée, même s'il n'y a pas eu de commande par le syndicat à M. X... relative à la réalisation de celle-ci. Dans ces conditions, l'action en justice de M. X... en défense de son modèle ne parait pas revêtir les caractères d'une action abusive ouvrant droit à des à dommages-intérêts.
Sur la mise hors de cause de l'association AGROPOINT
L'association AGROPOINT explique et justifie du fait qu'elle a pour objet de favoriser le développement du secteur agroalimentaire du Tarn, que dans le cadre d'une mission reçue du Conseil Général du Tarn, elle organise chaque année la promotion du Département du Tarn au Salon International de l'Agriculture de Paris, que le Comité Interprofessionnel des Vins de Gaillac a choisi d'y présenter des bouteilles de vins de Gaillac.
Dès lors, l'association AGROPOINT doit être mise hors de cause. Sur la publication du jugement
Aucun élément ne commande d'autoriser la publication de la présente décision.
Sur l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile
Il parait inéquitable de laisser à la charge des défendeurs les frais irrépétibles et non compris dans les dépens. Il convient de leur allouer à ce titre une indemnité de 4000 euros, en ce qui concerne l'association AGROPOINT, 5000 euros chacun en ce qui concerne le Syndicat de défense AOC GAILLAC et le comité interprofessionnel des vins du sud ouest, 10. 000 euros en ce qui concerne la société VOA VERRERIES D'ALBI.
Sur les dépens
Le demandeur succombant dans ses prétentions doit être condamné aux entiers dépens selon des modalités précisées au dispositif.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort,
Dit que le modèle déposé le 14 février 2002 sous le numéro 02 1103 par M. Christian X... est dénué de nouveauté, de tout caractère propre et de toute originalité et qu'il ne peut par conséquent bénéficier ni de la protection au titre des dessins et modèles ni de celle au titre du droit d'auteur,
Prononce la nullité du modèle déposé le 14 février 2002 sous le numéro 02 1103 par M. Christian X... déposé le 14 février 2002 sous le numéro 02 1103 par M. Christian X...
Dit que le jugement, devenu définitif sera transmis par le greffe préalablement requis par la partie la plus diligente, à l'INPI pour inscription sur le registre des dessins et modèles,
Donne acte à M. Christian X... du retrait de la marque LA GAILLACOISE déposée le 22 octobre 2001 et enregistrée à l'INPI sous le numéro 3 127 156,
Déclare irrecevable et mal fondées l'ensemble des demandes de M. X... et l'en déboute,
Met hors de cause l'association AGROPOINT,
Condamne M. X... à cesser toute utilisation de l'AOC GAILLAC ou du terme " LA GAILLACOISE " sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé le délai d'un mois suivant la signification de la présente décision,
Rejette pour le surplus les demandes reconventionnelles,
Condamne M. Christian X... à payer en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile :
-4000 euros, en ce qui concerne l'association AGROPOINT,.
-5000 euros à chacun en ce qui concerne le Syndicat de défense AOC GAILLAC et le comité interprofessionnel des vins du sud ouest,
-10. 000 euros en ce qui concerne la société VOA VERRERIES D'ALBI.
Ordonne l'exécution provisoire,
Condamne M. Christian X... aux entiers dépens avec distraction au profit de Maître SALEMBIEN, avocat associé de la SCP FOURMENTIN LE QUINTREC VEERSAMY CORCOS et associés, de la SCP ANQUETIL-GAUD et associés et de la SELARL M-P ESCANDE, en application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Fait à Paris, le 24 octobre 2007
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Marie-Aline PIGNOLET Elisabeth BELFORT


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 05/04393
Date de la décision : 24/10/2007
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2007-10-24;05.04393 ?
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