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13/07/2007 | FRANCE | N°06/06324

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Chambre civile 3, 13 juillet 2007, 06/06324


T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S

3ème chambre 2ème section
No RG : 06 / 06324

No MINUTE :
Assignation du : 07 Avril 2006

JUGEMENT rendu le 13 Juillet 2007

DEMANDERESSES
S. A. PHENIX HOLDING II 24 rue GAFFELT L 3380 DUDELANGE (LUXEMBOURG)

Société RHONETEX Assisté de Me Bruno X... en sa qualité d' Administrateur judiciaire ZA La Maladiere 07130 ST PERAY

représentée par Me Corinne CHAMPAGNER KATZ, avocat au barreau de PARIS, vestiaire C. 1864
DÉFENDERESSE
S. A. R. L. MONCEY TEXTILES 26 rue MONCEY

69003 LYON 03

représentée par Me Emmanuelle HOFFMAN- ATTIAS, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant...

T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S

3ème chambre 2ème section
No RG : 06 / 06324

No MINUTE :
Assignation du : 07 Avril 2006

JUGEMENT rendu le 13 Juillet 2007

DEMANDERESSES
S. A. PHENIX HOLDING II 24 rue GAFFELT L 3380 DUDELANGE (LUXEMBOURG)

Société RHONETEX Assisté de Me Bruno X... en sa qualité d' Administrateur judiciaire ZA La Maladiere 07130 ST PERAY

représentée par Me Corinne CHAMPAGNER KATZ, avocat au barreau de PARIS, vestiaire C. 1864
DÉFENDERESSE
S. A. R. L. MONCEY TEXTILES 26 rue MONCEY 69003 LYON 03

représentée par Me Emmanuelle HOFFMAN- ATTIAS, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire D. 405
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Mme VALLET, Vice- Président, signataire de la décision Mme RENARD, Vice- Président Mme CANAS, Juge

assistée de Marie- Aline PIGNOLET, Greffier, lors des débats et de Jeanine ROSTAL, lors du prononcé, signataire de la décision
DEBATS
A l' audience du 24 Mai 2007 tenue en audience publique

JUGEMENT
Prononcé en audience publique Contradictoire en premier ressort

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La société de droit luxembourgeois PHENIX HOLDING II est titulaire des marques françaises suivantes :
- la marque semi- figurative " R ROYAL WEAR " no 99 809672 déposée le 27 août 1999 en classes 25 et 26, dont l' élément figuratif de couleur noire sur fond blanc est composé d' une couronne stylisée surmontant un cercle à l' intérieur duquel figure la lettre " R " ;
- la marque semi- figurative " R ROYAL WEAR " no 01 3123953 déposée le 28 septembre 2001 en classes 18, 25 et 26, dont l' élément figuratif de couleur blanche sur fond rouge est composé d' une couronne stylisée surmontant un cercle à l' intérieur duquel figure la lettre " R " ;
- la marque verbale " ROYAL WEAR " no 01 3123954 déposée le 28 septembre 2001 en classes 18, 25 et 26,
- la marque semi- figurative " R ROYAL WEAR " no 02 3156423 déposée le 28 mars 2002 en classes 3, 9, 12 et 14 et présentant des éléments caractéristiques identiques à ceux de la marque no 01 3123953.
Elle est également propriétaire d' une marque communautaire figurative no 003 715 224 déposée le 16 mars 2004 en classes 3, 9, 12, 14, 16, 18, 24, 25, 26, 28, 35, 38 et 43 et constituée par une couronne stylisée surmontant un cercle à l' intérieur duquel figure la lettre " R ", le tout de couleur noire sur fond blanc.
Par contrat en date du 19 décembre 2002, régulièrement inscrit le 14 février 2006 au Registre National des Marques sous le numéro 428534, la société PHENIX HOLDING II a concédé à la société par actions simplifiée RHONETEX, qui a pour activité la création, la fabrication et la commercialisation de vêtements de prêt- à- porter, la licence exclusive d' exploitation des marques françaises précitées.
La société PHENIX HOLDING II expose par ailleurs être propriétaire de trois modèles de vêtements référencés SUBSTANCE, ADRENALINE et DARK.
Indiquant avoir constaté que la société à responsabilité limitée MONCEY TEXTILES proposait à la vente différents vêtements sur lesquels est apposée une inscription imitant l' élément figuratif des marques précitées, que celle- ci a en outre déposé le 18 novembre 2004 en classe 25 les marques semi- figuratives " RIVALDI " no 04 324 571 et no 04 3 324 568 et la marque figurative no 04 3 324 573 dont l' élément figuratif est composé de la lettre " R " surmontée d' une couronne stylisée et enfin qu' elle commercialise des modèles référencés " LUXEMBOURG ", " LIBERATION " et " WHEEL " reproduisant l' ensemble des caractéristiques de leurs propres produits, et après avoir fait procéder le 27 mars 2006 à quatre saisies- contrefaçon, la société PHENIX HOLDING II et la société RHONETEX, assistée de Maître Bruno X... en sa qualité d' administrateur judiciaire désigné par jugement du Tribunal de Commerce d' Annonay en date du 08 mars 2005, ont fait assigner, suivant acte d' huissier en date du 07 avril 2006, la société MONCEY TEXTILES en contrefaçon de marques, en contrefaçon de modèles et en concurrence déloyale et parasitaire.
Dans leurs dernières conclusions signifiées le 18 janvier 2007, les sociétés PHENIX HOLDING II et RHONETEX demandent au Tribunal de :
Avant dire droit :
- faire injonction à la société MONCEY TEXTILES de verser aux débats l' ensemble de sa comptabilité relative à l' acquisition et la commercialisation des modèles référencés WHEEL et LUXEMBOURG dans sa collection,
Sur le fond :
- valider les procès- verbaux de saisie- contrefaçon dressés par Maîtres Y...et Z... le 27 mars 2006 au siège de la société MONCEY TEXTILES ainsi qu' en ses établissements sis à VILLEURBANNE et à PARIS,
- dire et juger que la société MONCEY TEXTILES s' est rendue coupable de contrefaçon des marques françaises semi- figuratives no 99 809672 et no 01 3123953 et de la marque communautaire figurative no 003 715 224 en déposant et en utilisant la marque RIVALDI no 3325571,
- dire et juger que les modèles référencés SUBSTANCE, ADRENALINE et DARK dans la collection de la société PHENIX HOLDING II sont originaux et protégeables au sens des dispositions du Code de la Propriété Intellectuelle,
- dire et juger que la société MONCEY TEXTILES s' est rendue coupable de contrefaçon en commercialisant des vêtements contrefaisant les modèles SUBSTANCE, ADRENALINE et DARK dont la société PHENIX HOLDING II est propriétaire,
- dire et juger que la société MONCEY TEXTILES s' est rendue coupable de concurrence déloyale et parasitaire,
En conséquence,
- faire interdiction à la société MONCEY TEXTILES de fabriquer, faire fabriquer et / ou commercialiser des vêtements reproduisant les modèles revendiqués par la société PHENIX HOLDING II, et ce sous astreinte de 1. 500, 00 euros par infraction constatée à compter du jugement à intervenir, le Tribunal se réservant le droit de liquider l' astreinte directement,
- ordonner la confiscation de l' ensemble des vêtements contrefaisants, et ce tant au siège social de la société défenderesse que dans l' ensemble de ses établissements secondaires, succursales, usines, sous- traitants, grossistes et détaillants,
- ordonner la destruction des vêtements en cause par un Huissier au choix de la demanderesse, à ses frais avancés qui lui seront remboursés par la société défenderesse sur simple présentation des factures justificatives,
- interdire à la société MONCEY TEXTILES d' utiliser le sigle " R " (en entier ou en partie) encerclé surmonté d' une couronne stylisée et toute inscription en constituant une contrefaçon et / ou une imitation illicite, à quelque titre que ce soit, et ce sous astreinte définitive de 500, 00 euros par jour et par infraction constatée à compter du jugement à intervenir, le Tribunal se réservant le droit de liquider l' astreinte directement,
- dire et juger que les dépôts à l' INPI des marques semi- figuratives et figurative " RIVALDI " no 04 324 571, no 04 3 324 568 et no 04 3 324 573 sont frauduleux et prononcer leur retrait immédiat du Registre National des Marques tenu par l' INPI, et ce dans un délai de huit jours à compter du prononcé de la décision à intervenir,
- nommer tel huissier qu' il lui plaira avec mission de surveiller que les mesures d' annulation des dépôts frauduleux soient suivies d' effet, de pouvoir comptabiliser toutes les infractions aux mesures d' interdiction sous astreinte prononcées par le Tribunal et d' ordonner à la société défenderesse de consigner telle somme qu' il plaira au Tribunal de nature à couvrir les frais d' huissier, tous les frais inhérents à l' annulation des marques, cette somme devant être versée au jour de la décision à intervenir et séquestrée entre les mains de l' huissier,
- condamner la société MONCEY TEXTILES au paiement de la somme de 250. 000, 00 euros en réparation du préjudice subi par les sociétés PHENIX HOLDING II et RHONETEX du fait des actes de contrefaçon de marques,
- condamner la société MONCEY TEXTILES au paiement de la somme provisionnelle de 300. 000, 00 euros en réparation du préjudice subi par les sociétés PHENIX HOLDING II et RHONETEX du fait des actes de contrefaçon de modèles, sous réserve des éléments produits en cours d' instance,
- condamner la société MONCEY TEXTILES au paiement de la somme de 300. 000, 00 euros en réparation du préjudice subi par la société RHONETEX du fait des actes de concurrence déloyale et parasitaire,
- ordonner la publication du jugement à intervenir, en intégralité ou par extraits, dans vingt journaux ou publications professionnels y compris électroniques au choix des requérantes et aux frais de la défenderesse, sans que le coût de chaque insertion ne puisse excéder la somme de 5. 000, 00 euros H. T., soit la somme totale de 100. 000, 00 euros,
En tout état de cause,
- débouter la société MONCEY TEXTILES de l' intégralité de ses demandes,
- ordonner l' exécution provisoire du jugement à intervenir,
- condamner la société MONCEY TEXTILES à leur payer la somme de 60. 000, 00 euros au titre de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu' aux entiers dépens, qui comprendront les frais de saisie- contrefaçon arrêtés à la somme de 4. 371, 85 euros.
Dans ses dernières écritures en date du 02 mai 2007, la société MONCEY TEXTILES conclut au débouté des sociétés PHENIX HOLDING II et RHONETEX de l' ensemble de leurs demandes. Elle sollicite à titre reconventionnel le prononcé de la nullité des marques françaises no 99 809672 et no 01 3123953 et de la marque communautaire no 003 715 224 dont la société PHENIX HOLDING II est titulaire ainsi que la condamnation solidaire des demanderesses à lui payer la somme de 20. 000, 00 euros à titre de dommages- intérêts pour procédure abusive et la somme de 10. 000, 00 euros sur le fondement de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile, outre les entiers dépens. Elle fait valoir en substance que les marques arguées de contrefaçon ne sont pas distinctives pour la classe 25, ou à tout le moins faiblement distinctives ce qui exclut tout risque de confusion, que par ailleurs les modèles revendiqués, sur lesquels la société PHENIX HOLDING II ne démontrerait pas être titulaire de droits d' auteur, sont dépourvus d' originalité et ne peuvent dès lors bénéficier de la protection accordée par le livre I du Code de la Propriété Intellectuelle, et qu' en tout état de cause les demanderesses ne rapportent nullement la preuve du préjudice qu' elles prétendent avoir subi pas plus que de faits distincts de concurrence déloyale.
L' ordonnance de clôture a été rendue le 11 mai 2007.
MOTIFS DE LA DÉCISION
- Sur la demande d' injonction de communication de pièces comptables
Attendu que les sociétés PHENIX HOLDING II et RHONETEX sollicitent avant dire droit qu' il soit fait injonction à la société MONCEY TEXTILES de verser aux débats l' ensemble de sa comptabilité relative à l' acquisition et à la commercialisation des modèles référencés WHEEL et LUXEMBOURG dans sa collection, aucune pièce comptable relative à ces deux modèles n' ayant pu être obtenue dans le cadre des opérations de saisie- contrefaçon ;
Que la défenderesse oppose qu' en l' absence de toute entrave de sa part, les demanderesses ont eu la possibilité à l' occasion des quatre saisies- contrefaçon qu' elles ont fait diligenter de vérifier sa comptabilité ;
Que si une telle argumentation ne saurait être retenue, les énonciations des procès- verbaux de saisie- contrefaçon laissant apparaître les difficultés rencontrées par l' huissier instrumentaire pour obtenir de tels éléments, il n' y a pas lieu pour autant d' ordonner avant dire droit une telle mesure, dont l' opportunité nécessite un examen du fond de l' affaire et dont l' utilité s' apprécie, dans l' hypothèse où les faits de contrefaçon seraient retenus, au stade de l' indemnisation du préjudice.
- Sur la validité des marques françaises no 99 809672 et no 01 3123953 et de la marque communautaire no 003 715 224
Attendu qu' aux termes des dispositions de l' article L. 711- 2 du Code de la Propriété Intellectuelle, " le caractère distinctif d' un signe de nature à constituer une marque s' apprécie à l' égard des produits et services désignés. Sont dépourvus de caractère distinctif : a) les signes ou dénominations qui, dans le langage courant ou professionnel, sont exclusivement la désignation nécessaire, générique et usuelle du produit ou du service ; b) Les signes ou dénominations pouvant servir à désigner une caractéristique du produit ou du service, et notamment l' espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l' époque de la production du bien ou de la prestation de service, c) les signes constitués exclusivement par la forme imposée par la nature ou la fonction du produit, ou conférant à ce dernier sa valeur substantielle. Le caractère distinctif peut, sauf dans le cas prévu au c, être acquis par l' usage. ".

Attendu que la société MONCEY TEXTILES soutient que l' élément figuratif principal des marques no 99 809672, no 01 3123953 et no 003 715 224 dont la société PHENIX HOLDING II est titulaire est une couronne et qu' un tel signe est particulièrement banal pour désigner des vêtements de la classe 25 et ne peut dès lors conférer le caractère de distinctivité requis par le droit des marques ;
Qu' elle verse aux débats de nombreuses pièces démontrant en effet que la couronne est un élément couramment utilisé à titre de marque dans le domaine de la mode, et notamment du prêt- à- porter destiné à une cible de consommateurs jeunes et adeptes du streetwear ;
Attendu cependant que, comme le rappelle justement les demanderesses, l' élément figuratif des marques précitées est constitué par la combinaison de trois éléments, à savoir la couronne, le cercle, et la lettre " R ", et son caractère distinctif doit s' apprécier globalement et non au regard d' un seul de ses éléments ;
Qu' au surplus, et surtout, étant rappelé que, conformément aux dispositions susvisées, la distinctivité d' un signe ne peut être appréciée que par rapport aux produits et services désignés, la couronne, pas plus que la combinaison des éléments ci- dessus décrits, ne sauraient être regardées comme constituant la désignation nécessaire, générique ou usuelle des produits de la classe 25, c' est- à- dire des vêtements ;
Qu' il ne peut pas plus être retenu qu' elles servent à désigner une caractéristique desdits produits ou que leur forme est imposée par leur nature ou leur fonction ;
Qu' un tel signe, même relativement banal, présente donc un caractère arbitraire, et par conséquent distinctif, pour désigner les produits visés au dépôt.
Attendu que la société MONCEY TEXTILES sera dès lors déboutée de sa demande en nullité des marques françaises no 99 809 672, 01 3123 953 et communautaire no 003 715 224.
- Sur la contrefaçon de marques
Attendu que dans le dernier état de leurs écritures, les demanderesses invoquent au soutien de leur demande en contrefaçon les marques suivantes :
- la marque semi- figurative française no 99 809672 déposée le 27 août 1999 pour désigner notamment les " vêtements (habillement) " de la classe 25, ainsi reproduite :
- la marque semi- figurative française no 01 3123953 déposée le 28 septembre 2001 pour désigner notamment les " vêtements, chaussures, chapellerie " de la classe 25, ainsi reproduite :
- la marque figurative communautaire no 003715224 déposée le 16 mars 2004 pour désigner notamment les " vêtements, chaussures, chapellerie " de la classe 25, ainsi reproduite :
Que la société MONCEY TEXTILES a déposé le 18 novembre 2004 la marque semi- figurative no 04 3324571 (et non no 04 3325571 comme indiqué dans les écritures de la partie demanderesse) pour désigner, en classe 25, les " Vêtements (habillement), chaussures (à l' exception des chaussures orthopédiques), chapellerie ", seule arguée de contrefaçon, et ainsi reproduite :
Attendu que les signes étant différents, c' est au regard de l' article 713- 3 du Code de la Propriété Intellectuelle qui dispose que " sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s' il peut en résulter un risque de confusion dans l' esprit du public, l' imitation d' une marque et l' usage d' une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l' enregistrement " qu' il convient d' apprécier cette demande ;
Qu' il convient donc de rechercher au regard d' une appréciation des degrés de similitude entre les marques et les signes et entre les produits désignés, s' il existe un risque de confusion dans l' esprit du public ;
Attendu en l' espèce que les produits désignés par la marque no 04 3324571 sont identiques ou similaires à ceux visés par l' enregistrement des marques no 99 809 672, no 01 3123 953 et no 003 715 224 dont la société PHENIX HOLDING II est titulaire, s' agissant de produits de la classe 25 ;
Qu' il n' y a pas lieu, comme le fait la société MONCEY TEXTILES, d' effectuer une comparaison avec les produits visés à l' enregistrement de la marque no 02 3156423, qui n' est plus invoquée par les demanderesses dans leurs dernières conclusions ;
Attendu qu' il est constant que l' appréciation de la similitude des signes doit être fondée sur l' impression d' ensemble produite par ceux- ci, en tenant compte notamment de leurs éléments distinctifs et dominants ;
Que d' un point de vue visuel, les trois marques invoquées comportent un même élément figuratif caractérisé ainsi qu' il a été précédemment exposé par la combinaison de la lettre " R " contenue dans une forme ovoïde et surmontée d' une couronne stylisée, qui en constitue l' élément dominant, les marques françaises no 99 809672 et no 01 3123953 comportant en outre l' élément verbal " ROYAL WEAR " ;
Que le signe contesté est également constitué par une forme ovoïde surmonté d' une couronne stylisée ;
Que si l' intégralité du logo " RIVALDI " est intégrée dans le cercle, et non pas la seule lettre " R ", celle- ci se distingue cependant nettement des autres caractères tant par sa taille et sa position au centre du cercle que par sa calligraphie particulière, le terme " IVALDI " n' en constituant que la barre principale de gauche ;
Que l' agencement global de l' élément figuratif des marques premières est ainsi repris ;
Qu' au surplus, les termes " ROYAL WEAR " d' une part et " RIVALDI " d' autre part ont en commun les lettres R, A et L, les lettres V et D présentant quant à elles dans leur représentation graphique une relative proximité avec les lettres Y et O ;
Que d' un point de vue phonétique, les éléments verbaux des marques en cause, à savoir " ROYAL WEAR " d' une part, et " RIVALDI " d' une autre part, présentent pour similarité leur lettre d' attaque " R " et le son " AL " ;
Que d' un point de vue conceptuel, la présence d' une couronne stylisée, certes modérément disctinctive dans le domaine concerné ainsi qu' il a été précédemment exposé, renvoie aussi bien dans les marques premières que dans le signe argué de contrefaçon à l' idée de royauté et de supériorité, et ce d' autant plus qu' il n' est pas argué d' une signification particulière du terme " RIVALDI " ;
Attendu que la similarité, voire l' identité des produits concernés associée à la forte similitude des signes pris dans leur ensemble est de nature à entraîner un risque de confusion chez le consommateur d' attention moyenne, qui n' a généralement pas simultanément les deux marques sous les yeux ;
Que la contrefaçon par imitation est ainsi caractérisée ;
Qu' en application combinée des articles L. 711- 4 et L. 714- 3 du Code de la Propriété Intellectuelle, il y a lieu de prononcer la nullité de la marque semi- figurative no 04 3324571, sans qu' il y ait lieu d' examiner plus avant le moyen de fraude développé par les demanderesses.
- Sur les dépôts frauduleux
Attendu que les demanderesses font valoir que les dépôts par la société MONCEY TEXTILES de la marque semi- figurative no04 3324568 et de la marque figurative no04 3324573 sont frauduleux au sens des dispositions du livre VII du Code de la Propriété Intellectuelle puisque celle- ci avait connaissance de l' existence des marques ROYAL WEAR ;
Que cependant, contrairement à ce qu' elles soutiennent, la fraude ne peut en l' espèce résulter de cette seule connaissance des signes antérieurs, qui au demeurant n' est nullement établie, mais suppose, compte tenu des différences entre les signes en cause, que soit démontrée une véritable intention de nuire de la part du déposant ;
Que la preuve d' une telle intention n' est pas rapportée en l' espèce, aucune circonstance particulière n' étant invoquée s' agissant des marques litigieuses, qui n' ont fait l' objet d' aucune demande en contrefaçon ;
Que la demande en annulation des dépôts desdites marques, et la demande subséquente de désignation d' un huissier en vue de surveiller les mesures d' annulation, seront donc rejetées.
- Sur la contrefaçon de droits d' auteur
* Sur la titularité des droits de la société PHENIX HOLDING II
Attendu que la défenderesse soutient que la société PHENIX HOLDING II est irrecevable à agir au titre de la contrefaçon des modèles de vêtements SUBSTANCE, ADRENALINE et DARK dans la mesure où les pièces produites sont insuffisantes à rapporter la preuve qu' elle en est la créatrice ;
Que cependant, la personne morale qui exploite un modèle sous son nom est présumée, à l' égard des tiers recherchés pour contrefaçon, titulaire du droit patrimonial de propriété intellectuelle de l' auteur ;
Qu' en l' espèce, la société PHENIX HOLDING II, qui exploite sous sa marque et par le biais de sa licenciée les modèles de vêtements litigieux, justifie ainsi sa qualité à agir ;
Que la fin de non recevoir soulevée de ce chef sera donc rejetée.
* Sur l' originalité des modèles revendiqués
Attendu que la société PHENIX HOLDING II revendique les modèles de vêtements suivants :
- une veste trois quart matelassée référencée " SUBSTANCE " caractérisée par une triple ceinture ainsi qu' à l' intérieur du vêtement par une doublure comportant l' élément figuratif de la marque, à savoir la couronne et la lettre " R ",
- un sweat- shirt à capuche référencé " ADRENALINE " présentant un liseré gansé surpiqué sur le devant et au dos du vêtement, dont l' intérieur de la capuche comporte une doublure revêtue des éléments caractéristiques de la marque et sur le devant duquel est apposé au centre une couronne stylisée au dessous de laquelle figure la lettre " R ",
- un sweat- shirt référencé " DARK " comportant sur le devant une application stylisée composée de la couronne au dessous de laquelle figure la lettre " R " ainsi que différentes phrases et numéros ;
Attendu que pour contester l' originalité desdits modèles, la société MONCEY TEXTILES soutient que les descriptions telles qu' elles résultent des écritures de la partie adverse ne correspondent pas aux fiches techniques et que ces modèles non identifiés ne peuvent être déclarés originaux ;
Qu' un tel argument ne saurait cependant être retenu, un exemplaire original de chacun des modèles de vêtement en cause étant versé aux débats, sans donner lieu à une quelconque observation de la part de la défenderesse, et permettant dès lors de les identifier avec certitude et d' en apprécier les caractéristiques ;
Que la société MONCEY TEXTILES fait encore valoir que le modèle référencé " SUBSTANCE " est une banale veste trois- quart, que le modèle référencé " ADRENALINE " est un banal sweat- shirt agrémenté de deux fermetures à glissière à l' avant et que le modèle référencé " DARK " est un banal sweat- shirt à col rond ;
Mais attendu qu' en l' absence de production de toute antériorité présentant l' ensemble des caractéristiques revendiquées et ci- dessus rappelées, les modèles de vêtements dont s' agit présentent un aspect esthétique original reflétant l' empreinte de la personnalité de leur auteur et sont donc susceptibles de protection.
* Sur l' atteinte aux droits d' auteur
Attendu qu' aux termes de l' article L. 122- 4 du Code de la Propriété Intellectuelle, " toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l' auteur ou de ses ayants droits ou ayants cause est illicite. Il en va de même pour la traduction, l' adaptation ou la transformation, l' arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque " ;
Qu' en l' espèce, il résulte de l' examen des trois modèles de vêtement argués de contrefaçon et référencés " LIBERATION ", " LUXEMBOURG " et " WHEEL ", dont la défenderesse ne peut sérieusement pour les deux derniers contester la réalité alors que deux exemplaires originaux porteurs de la marque RIVALDI sont versés aux débats, que ceux- ci reproduisent de façon servile ou quasi- servile les éléments ci- dessus relevés au titre du caractère propre et original des modèles " ADRENALINE ", " SUBSTANCE " et " DARK " appartenant à la société PHENIX HOLDING II ;
Que la contrefaçon est ainsi caractérisée.
- Sur la concurrence déloyale et parasitaire
Attendu que les sociétés demanderesses font valoir à ce titre que les marques ROYAL WEAR bénéficient d' une notoriété et d' un succès commercial considérables et d' un réseau de distribution étendu et que la société MONCEY TEXTILES, en commercialisant une même gamme de vêtements dans le même réseau de distribution, s' est volontairement placée dans le sillage de la société RHONETEX en faisant l' économie des frais de création et de promotion auxquels celle- ci a dû faire face, entraînant ainsi un risque de confusion entre les produits et un détournement de sa clientèle ;
Que cependant, elles ne versent aucune pièce, notamment comptables, à l' appui de leurs allégations et ne rapportent pas dès lors la preuve de faits distincts des actes de contrefaçon ci- dessus retenus ;
Qu' elles seront donc déboutées de leur demande à ce titre.
- Sur les mesures réparatrices
Attendu qu' il convient de préciser liminairement que la société RHONETEX, titulaire d' un contrat de licence exclusive d' exploitation, est recevable à solliciter l' indemnisation du préjudice qu' elle a subi du fait des actes de contrefaçon ci- dessus caractérisés à compter du 14 février 2006, date de la publication dudit contrat au Registre National des Marques.
Attendu que les demanderesses font valoir au titre du préjudice résultant tant des actes de contrefaçon de marques commis à leur encontre que des actes de contrefaçon de droits d' auteur qu' elles ont dû exposer des frais élevés pour l' acquisition et l' exploitation des marques " ROYAL WEAR " et qu' elles ont fait d' importants investissements en matière de création, de publicité et de marketing pour promouvoir leurs modèles de vêtements ;

Qu' elles ajoutent que ces agissements ont porté atteinte à leur image de marque à l' intérieur du marché professionnel du prêt- à- porter, du fait de la banalisation des marques " ROYAL WEAR " et de la commercialisation de modèles contrefaisants de qualité inférieure ;
Qu' il résulte des pièces versées aux débats, et notamment du procès- verbal de saisie- contrefaçon dressé le 27 mars 2006 au sein de la boutique de la société MONCEY TEXTILES sise à VILLEURBANNE (69), que :
- la société PHENIX HOLDING II a acquis en 2004 les marques no 99 809672 et no 01 3123953 pour un prix de 300. 000, 00 euros chacune ;
- le contrat de licence exclusive d' exploitation consenti à la société RHONETEX prévoit une redevance de 20 % du chiffre d' affaires hors taxe net réalisé par le licencié ;
- le chiffre d' affaires (cumul Royal Wear et Royal Kids) de la société RHONETEX s' élevait en 2003 à 6. 417. 052, 03 euros, en 2004 à 6. 950. 815, 60 euros, en 2005 à 6. 061. 995, 45 euros et en 2006 à 1. 198. 940, 83 euros pour la période du 01er janvier au 21 avril ;
- la société MONCEY TEXTILES a fait l' acquisition auprès de la société SM STIC de 3. 600 exemplaires du modèle LIBERATION et en a commercialisé 1. 158 exemplaires entre le 09 janvier et le 27 mars 2006 au prix unitaire H. T. de 12, 00 euros ;
- la société MONCEY TEXTILES n' a pas transmis d' autres pièces comptables bien qu' elle s' y soit engagée auprès de l' huissier saisissant lors des opérations de saisie- contrefaçon réalisées au sein de sa boutique sise 27 rue du Château d' Eau à PARIS 10ème ;
Attendu que le Tribunal dispose ainsi d' éléments suffisants, sans qu' il y ait besoin de faire droit à la demande de production de pièces complémentaires, pour allouer à la société PHENIX HOLDING II la somme de 30. 000, 00 euros au titre des actes de contrefaçon de marques commis à son encontre et la somme de 75. 000, 00 euros au titre des actes de contrefaçon de modèles de vêtements ;
Que la société RHONETEX se verra quant à elle allouer la somme de 15. 000, 00 euros au titre des actes de contrefaçon de marques commis à son encontre et la somme de 75. 000, 00 euros au titre des actes de contrefaçons de modèles de vêtements ;
Attendu qu' il sera en outre fait droit aux demandes de mesures d' interdiction et de publication selon les modalités précisées au dispositif ;
Que l' entier préjudice étant ainsi réparé, la demande de confiscation des stocks aux fins de destruction sera rejetée.
- Sur la demande reconventionnelle en dommages- intérêts
Attendu que la société MONCEY TEXTILES ne pourra qu' être déboutée de sa demande reconventionnelle de dommages- intérêts pour procédure abusive, l' action engagée par les demanderesses ayant partiellement prospéré.
- Sur les autres demandes
Attendu qu' il y a lieu de condamner la société MONCEY TEXTILES, partie perdante, aux dépens, lesquels comprendront les frais de saisies- contrefaçon en date du 27 mars 2006 et qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l' article 699 du nouveau Code de procédure civile ;
Qu' en outre, elle doit être condamnée à verser aux sociétés PHENIX HOLDING II et RHONETEX, qui ont dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir leur droits, une indemnité au titre de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile qu' il est équitable de fixer à la somme de 5. 000, 00 euros.
Attendu que les circonstances de l' espèce justifient le prononcé de l' exécution provisoire, qui est en outre compatible avec la nature du litige.
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire et rendu en premier ressort,
- REJETTE la demande d' injonction avant dire droit de communication de pièces comptables formées par les sociétés PHENIX HOLDING II et RHONETEX ;
- DEBOUTE la société MONCEY TEXTILES de sa demande en nullité des marques françaises no 99 809 672, 01 3123 953 et communautaire no 003 715 224 ;
- DIT qu' en déposant et en utilisant la marque RIVALDI no 04 3324571, la société MONCEY TEXTILES s' est rendue coupable de contrefaçon des marques françaises semi- figuratives no 99 809672 et no 01 3123953 et de la marque communautaire figurative no 003 715 224 dont la société PHENIX HOLDING II est titulaire ;
- DECLARE la société PHENIX HOLDING II recevable à agir en contrefaçon de droits d' auteur ;
- DIT que les modèles " ADRENALINE ", " SUBSTANCE " et " DARK " sont originaux et bénéficient de la protection du livre I du Code de la Propriété Intellectuelle ;
- DIT qu' en commercialisant les modèles de vêtements référencés " LIBERATION ", " LUXEMBOURG " et " WHEEL " reproduisant servilement ou quasi- servilement les modèles de vêtements référencés " ADRENALINE ", " SUBSTANCE " et " DARK ", la société MONCEY TEXTILES a porté atteinte aux droits patrimoniaux d' auteur de la société PHENIX HOLDING II ;
En conséquence,
- PRONONCE la nullité de la marque semi- figurative no 04 3324571 déposée le 18 novembre 2004 par la société MONCEY TEXTILES ;
- DIT que la présente décision, une fois devenue définitive, sera transmise, par les soins du greffier saisi à la requête de la partie la plus diligente, à Monsieur le Directeur Général de l' Institut National de la Propriété Industrielle pour inscription au Registre National des Marques ;
- FAIT INTERDICTION à la société MONCEY TEXTILES de poursuivre ces agissements, et ce sous astreinte de 1. 000, 00 euros par infraction constatée à compter de la signification du présent jugement ;
- DIT que le Tribunal se réserve la liquidation de l' astreinte ;
- CONDAMNE la société MONCEY TEXTILES à payer à la société PHENIX HOLDING II la somme de 30. 000, 00 euros à titre de dommages- intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon de marques commis à son encontre ;
- CONDAMNE la société MONCEY TEXTILES à payer à la société PHENIX HOLDING II la somme de 75. 000, 00 euros à titre de dommages- intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon de modèles de vêtements commis à son encontre ;
- CONDAMNE la société MONCEY TEXTILES à payer à la société RHONETEX la somme de 15. 000, 00 euros à titre de dommages- intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon de marques commis à son encontre ;
- CONDAMNE la société MONCEY TEXTILES à payer à la société RHONETEX la somme de 75. 000, 00 euros à titre de dommages- intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon de modèles de vêtements commis à son encontre ;
- AUTORISE la publication du présent jugement, en intégralité ou par extraits, dans cinq journaux ou revues au choix des demanderesses et aux frais de la défenderesse, sans que le coût de chaque publication n' excède, à la charge de celle- ci, la somme de 3. 500, 00 euros H. T. ;
- DEBOUTE les sociétés PHENIX HOLDING II et RHONETEX de leur demande d' annulation des dépôts de la marque semi- figurative no04 3324568 et de la marque figurative no04 3324573 dont la société MONCEY TEXTILES est titulaire et de leur demande subséquente en désignation d' un huissier avec mission de surveiller les mesures d' annulation ;
- DEBOUTE les sociétés PHENIX HOLDING II et RHONETEX de leur demande au titre de la concurrence déloyale et parasitaire ;
- DEBOUTE la société MONCEY TEXTILES de sa demande reconventionnelle en dommages- intérêts ;
- CONDAMNE la société MONCEY TEXTILES à payer aux sociétés PHENIX HOLDING II et RHONETEX la somme de 5. 000, 00 euros au titre de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
- CONDAMNE la société MONCEY TEXTILES aux dépens, lesquels comprendront les frais de saisies- contrefaçon en date du 27 mars 2006 et qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l' article 699 du nouveau Code de procédure civile ;
- ORDONNE l' exécution provisoire.
Fait et jugé à PARIS le 13 Juillet 2007.


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 06/06324
Date de la décision : 13/07/2007
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2007-07-13;06.06324 ?
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