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13/07/2007 | FRANCE | N°05/10787

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Chambre civile 3, 13 juillet 2007, 05/10787


3ème chambre 2ème section
Assignation du : 08 Juillet 2005

JUGEMENT rendu le 13 Juillet 2007

DEMANDEURS
S. A. DEPRAT JEAN 13 bis rue Roger Salengro 59115 LEERS

Intervenant Volontaire
Monsieur Paul X.... Conclusions du 17 / 10 / 05) ...59510 BONDUES

représentée par Me Yves BIZOLLON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire R. 255
DÉFENDERESSES
S. A. R. L. ICAUNAISE DE SERVICE BATIMENT La folie Merat 89240 VILLEFARGEAU

représentée par Me Laurence BROSSET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire G. 762
SAS ETABLISSEMENTS ZURFLUH FE

LLER Autechaux roide 25150 PONT DE ROIDE

représentée par Me Jacques ARMENGAUD, avocat au barreau de ...

3ème chambre 2ème section
Assignation du : 08 Juillet 2005

JUGEMENT rendu le 13 Juillet 2007

DEMANDEURS
S. A. DEPRAT JEAN 13 bis rue Roger Salengro 59115 LEERS

Intervenant Volontaire
Monsieur Paul X.... Conclusions du 17 / 10 / 05) ...59510 BONDUES

représentée par Me Yves BIZOLLON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire R. 255
DÉFENDERESSES
S. A. R. L. ICAUNAISE DE SERVICE BATIMENT La folie Merat 89240 VILLEFARGEAU

représentée par Me Laurence BROSSET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire G. 762
SAS ETABLISSEMENTS ZURFLUH FELLER Autechaux roide 25150 PONT DE ROIDE

représentée par Me Jacques ARMENGAUD, avocat au barreau de PARIS, vestiaire W. 07
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Mme VALLET, Vice- Président, Mme RENARD, Vice- Président signataire de la décision Mme CANAS, Juge

assistée de Marie- Aline PIGNOLET, Greffier lors des débats et de Jeanine ROSTAL, lors du prononcé, signataire de la décision
DEBATS
A l' audience du 16 Mai 2007 tenue en audience publique

JUGEMENT
Prononcé en audience publique Contradictoire en premier ressort

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Monsieur Paul X... est titulaire d' un brevet français no 85 10109 déposé le 28 juin 1985, délivré le 15 juillet 1988 et intitulé " Volet roulant de protection pour ouvertures dans les murs ".
La société anonyme DEPRAT JEAN S. A., spécialisée dans la conception et la fabrication de mécanismes, moteurs, automatismes et composants pour fermeture de bâtiments, est titulaire d' une licence exclusive d' exploitation de ce brevet inscrite le 01er juillet 2004 au Registre National des Brevets sous le numéro 140149, l' avenant conclu entre les parties ayant fait l' objet d' une inscription audit registre le 19 octobre 2004 sous le numéro 142038.
Indiquant avoir eu connaissance de ce qu' une société ICAUNAISE DE SERVICE BATIMENT était en possession de dispositifs de verrouillage automatique reproduisant selon elle les revendications du brevet FR 85 10109, et après y avoir été dûment autorisée, la société DEPRAT JEAN S. A. a fait diligenter le 24 juin 2005 une saisie- contrefaçon dans son établissement sis à VILLEFARGEAU (89).
Cette procédure ayant permis d' établir que les dispositifs de verrouillage litigieux dénommés " MINI BLOCK " étaient commercialisés par la société SERVISTORES, et après y avoir été dûment autorisée le 29 juin 2005, elle a fait diligenter le 01er juillet 2005 une seconde saisie, lors de laquelle la société SERVISTORES a déclaré se fournir auprès de la société ZURFLUH FELLER dont le catalogue présente les produits incriminés sous les références H 854B et H 854C.
Par actes d' huissier en date du 08 juillet 2005, la société DEPRAT JEAN S. A. a fait assigner la société par actions simplifiée ETABLISSEMENTS ZURFLUH FELLER (ci- après ZURFLUH FELLER) et la société à responsabilité limitée ICAUNAISE DE SERVICE BATIMENT devant le Tribunal de Grande Instance de PARIS en contrefaçon des revendications 1 à 7 du brevet FR 85 10109 aux fins d' obtenir, outre une mesure de publication du jugement à intervenir, la condamnation in solidum de ces dernières à lui verser une indemnité provisionnelle de 300. 000, 00 euros en réparation du préjudice subi à fixer à dire d' expert ainsi que la somme de 20. 000, 00 euros au titre de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile et leur condamnation aux entiers dépens, en ce compris les frais des saisies- contrefaçon, le tout sous le bénéfice de l' exécution provisoire.
Monsieur Paul X... est intervenu volontairement à l' instance par conclusions signifiées le 17 octobre 2005, sollicitant la condamnation de la seule société ZURFLUH FELLER à lui payer la somme de 100. 000, 00 euros à titre de dommages- intérêts ainsi que la somme de 20. 000, 00 euros en application de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Par jugement rendu le 06 juillet 2006, le Tribunal de céans a prononcé la nullité de la procédure de saisie- contrefaçon diligentée le 01er juillet 2005 sur le fondement d' une requête présentée le 29 juin 2005, le brevet FR 85 10109 étant à cette date expiré, et a par ailleurs constaté le désistement d' instance et d' action de la société DEPRAT JEAN S. A. à l' encontre de la société ICAUNAISE SERVICE BATIMENT.
Dans leurs dernières conclusions signifiées le 27 avril 2007, la société DEPRAT JEAN S. A. et Monsieur Paul X... demandent au Tribunal de :
- dire et juger que la société ZURFLUH FELLER a commis des actes de contrefaçon des revendications 1 à 7 du brevet français FR 85 10109 dont la société DEPRAT est licenciée exclusive,
- condamner la société ZURFLUH FELLER à verser à la société DEPRAT une indemnité à fixer après expertise pour le préjudice causé et dès à présent par provision une somme de 300. 000, 00 euros,
- condamner la société ZURFLUH FELLER à verser à Monsieur Paul X... une indemnité à fixer après expertise pour le préjudice causé et dès à présent par provision une somme de 100. 000, 00 euros,
- ordonner la publication judiciaire du jugement à intervenir dans cinq journaux ou périodiques au choix de la société DEPRAT et à la charge de la société ZURFLUH FELLER, à concurrence de 4. 000, 00 euros H. T. par insertion,
- condamner la société ZURFLUH FELLER à leur payer la somme de 20. 000, 00 euros chacun au titre de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu' aux entiers dépens, lesquels comprendront notamment les frais de la saisie- contrefaçon du 24 juin 2005,
- ordonner l' exécution provisoire du jugement à intervenir.
Dans le dernier état de ses écritures en date du 03 mai 2007, la société ZURFLUH FELLER demande au Tribunal de prononcer la nullité des revendications 1 à 7 du brevet FR 85 10109 pour défaut de nouveauté et à tout le moins défaut d' activité inventive, de dire qu' en tout état de cause la contrefaçon n' est pas établie et de débouter en conséquence la société DEPRAT JEAN S. A. et Monsieur Paul X... de l' ensemble de leurs demandes. A titre reconventionnel, elle sollicite la condamnation de ces derniers à lui payer la somme de 50. 000, 00 euros à titre de dommages- intérêts pour procédure abusive ainsi que la somme de 20. 000, 00 euros en application des dispositions de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile, outre les entiers dépens.
L' ordonnance de clôture a été rendue le 16 mai 2007.
MOTIFS DE LA DÉCISION
- Sur la portée du brevet français no 85 10109
Attendu que l' invention brevetée concerne un volet roulant de protection pour ouvertures dans les murs ;
Que la partie descriptive rappelle qu' il est généralement utilisé pour protéger des portes, fenêtres ou autres, des volets roulants constitués par un rideau formé de lames de matière synthétique ou métallique, juxtaposées et articulées entre elles, coulissantes dans un cadre fixe placé dans l' ouverture d' un mur ;
Qu' il est indiqué que le rideau du volet s' abaisse ou se relève par des dispositifs de commande intérieure entraînant en rotation le tambour autour duquel s' enroule le rideau, soit manuellement par l' intermédiaire d' une manivelle, soit électriquement par l' intermédiaire d' un moto- réducteur, et que dans ces cas le tambour est bloqué par le dispositif de manoeuvre ;
Qu' il est exposé que dans les réalisations courantes, la partie supérieure du rideau est reliée soit directement au tambour récepteur, soit par le biais de sangles, et que ces deux modes de fixation autorisent une ondulation au niveau de la zone d' enroulement autour du tambour lorsque, le volet étant en position fermé, on essaie de remonter le rideau par l' extérieur en soulevant sa partie inférieure, la protection étant ainsi facilement violée ;
Qu' il est précisé que pour résoudre cette difficulté, il existe actuellement des systèmes de verrouillage à serrure, qui présentent cependant l' inconvénient de compliquer la fabrication des volets de protection et de nécessiter un montage du verrouillage à un endroit bien précis quelquefois difficilement accessible ;
Attendu que le but de l' invention est de proposer un volet roulant de protection pour ouvertures dans les murs qui ne présente pas de tels inconvénients et qui empêche des manoeuvres non autorisées lorsque le volet est en position fermée, soit un volet roulant de protection comportant un dispositif d' auto- blocage du volet en position fermé afin que la partie supérieure du rideau, non guidée dans la zone d' enroulement, ne puisse onduler, ne nécessitant pas de dispositif de blocage supplémentaire à rapporter sur le rideau et enfin pouvant être réalisé en usine sans adaptation particulière lors du montage, hormis un simple réglage de hauteur ;
Attendu que la partie descriptive développe en outre les modes de réalisation de l' invention ;
Attendu que le brevet se compose à cette fin de huit revendications dont seules sont invoquées les revendications 1 à 7, dont la teneur suit :
1. Volet roulant de protection (1) pour ouvertures dans les murs, constitué essentiellement par un rideau (3) articulé, guidé et coulissant dans un cadre fixe (4), placé dans l' ouverture d' un mur (2), le volet roulant (1) présentant une zone d' enroulement (9) dans laquelle le rideau (3) n' est plus guidé pour s' enrouler autour d' un tambour récepteur (6), le tambour récepteur (6) étant mû en rotation par un dispositif- frein de manoeuvre (7) apte également à bloquer sa rotation, caractérisé par le fait qu' il comporte des moyens d' auto- blocage (10) placés dans la zone d' enroulement (9), constitués par des moyens d' arc- boutement (12) placés entre le tambour (6) et l' extrémité supérieure (11) du rideau (3), pour éviter que la partie supérieure (11) du rideau (3) ondule dans la zone d' enroulement (9) lors de la remontée non autorisée du rideau (3), le volet (1) étant en position fermée rideau (3) baissée.
2. Volet roulant selon la revendication 1, caractérisé par le fait que les moyens d' arc- boutement (12) sont constitués par des moyens rigides (13), juxtaposés s' enchevêtrant entre eux, coopérant avec des moyens souples (14) de maintien et de positionnement des moyens rigides (13), afin d' une part d' autoriser l' enroulement des moyens d' arc- boutement (12) autour du tambour (6) pour l' ouverture normale du volet et pour d' autre part qu' ils réalisent une liaison rigide indéformable entre le tambour (6) et le rideau (3) lorsque l' on remonte le rideau du volet (1) par une manoeuvre non autorisée.
3. Volet roulant selon la revendication 2, caractérisé par le fait que les moyens rigides juxtaposés (13) sont constitués par une pluralité de lames (15) rigides présentant sur leurs chants longitudinaux des formes concaves et convexes complémentaires telles que deux lames (15) contigues s' enchevêtrent l' une dans l' autre en créant une articulation fictive.
4. Volet roulant selon la revendication 3, caractérisé par le fait que les formes complémentaires des lames rigides (15) présentent un profil aigu, sensiblement en V.
5. Volet roulant selon la revendication 2, caractérisé par le fait que les moyens souples (14) de maintien et de positionnement des moyens rigides (13) sont constitués par au moins un lien souple élastique (16) sur lequel sont fixés les moyens rigides (13) de façon contigue pour former une liaison rideau- tambour (10), articulée dans le sens d' enroulement du volet (1), présentant un profil convexe.
6. Volet roulant selon la revendication 5, caractérisé par le fait que le lien souple élastique (16) est constitué par une lame ressort d' acier élastique.
7. Volet roulant selon la revendication 5, caractérisé par le fait que les formes complémentaires des différentes lames rigides (15), contigues et fixées sur le lien souple élastique (16), forme un profil convexe de la liaison rideau- tambour (10) dont le rayon de courbure est variable d' une valeur sensiblement égale à celui du tambour récepteur (6) à une valeur de blocage formant arc- boutement entre le rideau (3) et le tambour (6).
- Sur la validité du brevet
* Sur la demande de nullité de la revendication 1 pour défaut de nouveauté et défaut d' activité inventive
Attendu que pour être comprise dans l' état de la technique et privée de nouveauté, l' invention doit se trouver toute entière et dans une seule antériorité au caractère certain avec les éléments qui la constituent, dans la même forme, le même agencement et le même fonctionnement en vue du même résultat ;
Attendu que pour contester la nouveauté de la revendication 1 du brevet français no 85 10109, la société ZURFLUH FELLER oppose en premier lieu un brevet suisse CH 601 638 déposé le 11 octobre 1976 par la société TRABER AG et publié le 14 juillet 1978 ;
Que ce brevet porte sur un volet roulant doté d' un dispositif de blocage articulé sur la lame supérieure du tablier, relié de façon enroulable au tambour et conformé en bandes ;
Que ce dispositif comporte une bande d' acier flexible sur laquelle sont fixés un certain nombre de fers plats espacés d' une distance (b) de sorte que la bande peut se plier librement dans un sens et de façon limitée seulement dans le sens opposé ;
Que lorsque le volet roulant est fermé, le dispositif de blocage est relié au tablier en faisant un angle aigu par rapport au plan vertical du tablier, lequel angle augmente sous l' effet de la force de levage, entraînant ainsi, en cas de manoeuvre illicite pour soulever le volet roulant depuis le bas, un coincement de la lame supérieure du blindage dans les gorges latérales ;
Que cependant la revendication 1 du brevet FR 85 10109 protège non seulement des moyens d' auto- blocage placés dans la zone d' enroulement, tels que divulgués par le brevet TRABER, mais précise en outre que ceux- ci sont constitués par des moyens d' arc- boutement placés entre le tambour et l' extrémité supérieure du rideau ;
Que comme le soutient justement la partie demanderesse, de tels moyens d' arc- boutement ont, selon la terminologie utilisée et conformément à la figure 3 annexée au brevet en cause, une configuration convexe puisqu' ils forment un demi- arc entre la partie supérieure du tablier et le tambour, contre lesquels ils prennent appui ;
Or attendu que le brevet TRABER n' enseigne pas des moyens d' arc- boutement, mais un dispositif de blocage qui, lorsque le volet est fermé, est relié au tablier en faisant un angle aigu et présente ainsi configuration de forme nécessairement concave telle que représentée sur la figure 3 dudit brevet ;
Que ce brevet ne constitue donc pas une antériorité destructrice de nouveauté ;
Attendu que la défenderesse invoque en second lieu une demande de brevet d' invention no 80 16869 déposée auprès de l' INPI le 28 juillet 1980 par la société FERMETURES HENRI PEYRICHOU ;
Que ce document concerne un dispositif de verrouillage automatique en position abaissée d' un tablier de volet roulant, constitué par un moyen de liaison et de blocage interposé entre le tambour d' enroulement du tablier et la lame supérieure de ce dernier ;
Qu' il résulte de la revendication 1 de l' antériorité PEYRICHOU ainsi que de ses figures 2à 5 que ce moyen d' auto- blocage est constitué par une lame ou coquille cintrée de forme convexe ;
Qu' il est ainsi divulgué des moyens d' auto- blocage placés dans la zone d' enroulement et constitués par des moyens d' arc- boutement placés entre le tambour et l' extrémité supérieure du rideau, objet de la revendication 1 du brevet FR 85010109 ;
Que la partie demanderesse oppose que la structure du dispositif de blocage PEYRICHOU est composée d' une unique coquille rigide et se distingue ainsi nettement dudit brevet, selon lequel les moyens d' arc- boutement sont caractérisés par un agencement d' une série d' éléments enchevêtrés entre eux ;
Que cependant, un tel agencement n' est mentionné que dans la revendication 2 du brevet en cause, la revendication 1 faisant uniquement référencé à des " moyens d' arc- boutement " sans autre précision ;
Attendu en conséquence que le document PEYRICHOU apparaissant comme une antériorité de toute pièce, la revendication 1 doit être annulée pour défaut de nouveauté sans qu' il soit besoin d' examiner l' autre moyen de nullité tenant au défaut d' activité inventive ;
Que la revendication principale étant annulée, les revendications 2 à 7 doivent être tenues pour indépendantes et leur validité appréciée isolément.
* Sur la demande de nullité de la revendication 2 pour défaut d' activité inventive
Attendu qu' une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour un homme du métier, elle ne découle pas d' une manière évidente de l' état de la technique ;
Attendu que la défenderesse soutient que la revendication 2 est privée d' activité inventive au regard des enseignements du brevet TRABER précité combinés à ceux du brevet suisse CH 577 621 déposé le 08 janvier 1975 par Andrea B... et publié le 15 juillet 1976 ;
Qu' ainsi qu' il a été précédemment exposé, le brevet TRABER divulgue un dispositif de blocage placé dans la zone d' enroulement et comportant une bande d' acier flexible sur laquelle sont fixés un certain nombre de fers plats rigides espacés d' une distance (b) ;
Que le brevet B... porte quant à lui sur un dispositif pour empêcher le soulèvement depuis l' extérieur des stores constitués de lames tubulaires, composé d' un ou plusieurs éléments en forme de " U " qui maintiennent étroitement unis les uns aux autres deux tubes ou plus constituant la dernière partie d' un store, afin de le rigidifier ;
Que la société ZURFLUH FELLER prétend qu' à partir de la figure A du brevet B..., l' homme du métier déduit de manière évidente que les fers plats du brevet TRABER peuvent être remplacés par des lames enchevêtrées ;
Que cependant, le brevet B... enseigne non pas un système d' auto- blocage indépendant, mais un système constitué par des éléments en forme de " U " ou cavaliers qui sont ajoutés manuellement à cheval sur les lames de tablier, ainsi enchevêtrées, afin de créer une rigidité assurant une fonction de blocage dans l' autre sens de rotation ;
Que l' homme du métier, défini ici comme un technicien spécialisé dans le domaine des volets roulants, ne saurait être conduit à combiner le brevet TRABER, qui porte sur un dispositif de blocage autonome, avec un tel système, qui appartient à l' art antérieur et présente une certaine obsolescence, pour envisager un enchevêtrement des moyens rigides tel que revendiqué dans le brevet FR 85 10109 ;
Qu' au surplus, la société ZURFLUH FELLER ne démontre nullement comment il serait amené, à partir de ces deux antériorités, à mettre en oeuvre des moyens d' arc- boutement de forme convexe, alors que le dispositif TRABER présente une configuration de forme nécessairement concave ainsi qu' il résulte des développements qui précèdent et que le brevet B... porte sur les seuls éléments en forme de " U " et n' enseigne en tout état de cause pas un profil convexe, mais quasiment rectiligne comme l' indique la défenderesse elle- même à la page 19 de ses écritures ;
Attendu qu' il s' en suit que la revendication 2 du brevet FR 85 10109 est porteuse d' activité inventive et est donc valable.
* Sur la demande de nullité des revendications 3 à 7
Attendu que ces revendications placées dans la dépendance directe ou indirecte de la revendication 2 avec laquelle elles se combinent sont également valables.
- Sur la contrefaçon
Attendu qu' aux termes de l' article L. 613- 3 a) du Code de la Propriété Intellectuelle, " Sont interdites, à défaut de consentement du propriétaire du brevet, la fabrication, l' offre, la mise dans le commerce, l' utilisation ou bien l' importation ou la détention aux fins précitées du produit objet du brevet ".
Attendu que la société DEPRAT JEAN S. A. et Monsieur Paul X... font valoir que la fabrication et la commercialisation par la société ZURFLUH FELLER des verrous vendus par la société SERVISTORES sous les références ZH854B et ZH854C sont constitutives de contrefaçon par reproduction des revendications 1 à 7 du brevet français FR 85 10109 ;
Que la revendication 1 ayant été annulée, il n' y a lieu d' examiner les faits de contrefaçon allégués qu' au regard des revendications 2, 3, 4, 5, 6 et 7 ;
Attendu que la défenderesse soutient que le procès- verbal de saisie- contrefaçon dressé le 24 juin 2005 dans les locaux de la société ICAUNAISE DE SERVICE BATIMENT n' établit en aucune manière des actes de contrefaçon qui lui soit imputables et que les autres pièces versées aux débats, dont certaines sont postérieures à la date d' expiration du brevet en cause, ne rapportent la preuve ni du caractère contrefaisant des produits incriminés, ni de leur provenance ;
Qu' il résulte du procès- verbal de saisie- contrefaçon dressé le 24 juin 2005 par Maître Eric C..., Huissier de Justice associé à AUXERRE (89), que la société ICAUNAISE DE SERVICE BATIMENT, qui a une activité d' installation de fermetures de bâtiment de tout type, passe commande de volets roulants et des pièces y afférents auprès de fabricants et grossistes, et notamment auprès de la société SERVISTORES ;
Que dans le catalogue SERVISTORES du 01er mars 2005 au 28 février 2006, tel qu' annexé audit procès- verbal, est présenté en page 49 un mini verrou de sécurité sous les références ZH854B (Mini block 2 maillons pour lame de 8 mm) et ZH854C (Mini block 3 maillons pour lame de 8 mm) ;
Qu' il est suffisamment établi par le procès- verbal de constat dressé le 10 juillet 2006 sur le site internet www. servistores. com et par la production du catalogue SERVISTORES du 01er mars 2006 au 28 février 2007 que les mini verrous de sécurité proposés sous les mêmes références ZH854B et ZH854C correspondent aux mêmes produits que ceux commercialisés en 2005, lorsque le brevet FR 85 10109 était encore en vigueur ;
Que suivant procès- verbal dressé le 14 décembre 2006 par Maître Jean- Charles D..., Huissier de Justice associé à TOURCOING (59), il a été constaté que la société NORPEINTURE a commandé le 11 décembre 2006 auprès de la société SERVISTORES un exemplaire de chacun des verrous ci- dessus référencés qui ont été placés sous scellés ;
Qu' il est ainsi démontré que l' exemplaire original de mini verrou de sécurité à trois maillons versé aux débats correspond à la référence ZH854C du catalogue SERVISTORES du 01er mars 2005 au 28 février 2006 ;
Attendu cependant que pour caractériser des actes de contrefaçon qui lui soient imputables, il appartient aux demandeurs de démontrer au surplus que le verrou en cause a été fabriqué par la société ZURFLUH FELLER ;
Que le seul fait que les catalogues ZURFLUH FELLER 2000, 2003, 2004 et 2005 proposent des verrous dénommés MINIBLOCKSUR- 2 (ou 3) MAILLONS référencés H854B et H854C et que les schémas représentant une vue de dessus de ces produits soient à première vue identiques à ceux figurant sur le catalogue SERVISTORES du 01er mars 2005 au 28 février 2006, est insuffisant à établir un tel lien ;
Qu' en effet, rien ne permet d' affirmer avec certitude, faute de représentation graphique complète ou de description détaillée, que l' exemplaire original versé aux débats correspond aux produits présentés sur le catalogue ZURFLUH FELLER ;
Que le procès- verbal de dépôt dressé le 27 juin 2005 à la requête de la société DEPRAT JEAN S. A. ne permet pas plus de démontrer que le verrou déposé auprès de l' huissier a été fabriqué par la société ZURFLUH FELLER, aucun élément ne rendant possible de faire une relation entre ledit verrou et la documentation ZURFLUH FELLER remise par le conseil en propriété intellectuelle de la requérante et annexée audit procès- verbal ;
Attendu dès lors que, faute de rapporter la preuve de faits de contrefaçon imputables à la défenderesse, la société DEPRAT JEAN S. A. et Monsieur Paul X... ne pourront qu' être déboutés de l' ensemble de leurs demandes à ce titre.
- Sur la demande reconventionnelle en dommages- intérêts
Attendu que l' exercice d' une action en justice constitue, en principe, un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages- intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi, ou d' erreur grossière équipollente au dol ;
Que faute pour la défenderesse de rapporter la preuve d' une quelconque intention de nuire ou d' une légèreté blâmable de la part de la société DEPRAT JEAN S. A. et de Monsieur Paul X..., qui ont pu légitimement se méprendre sur l' étendue de leurs droits, sa demande à ce titre sera rejetée.
- Sur les autres demandes
Attendu qu' il y a lieu de condamner la société DEPRAT JEAN S. A. et Monsieur Paul X..., partie perdante, aux dépens de la présente instance ;
Qu' en outre, ils doivent être condamnés à verser à la société ZURFLUH FELLER une indemnité au titre de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile qu' il est équitable de fixer à la somme de 10. 000, 00 euros.
Attendu que l' exécution provisoire, sans objet, ne saurait être ordonnée.
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire et rendu en premier ressort,
- PRONONCE la nullité de la revendications 1 du brevet français no 85 10109 pour défaut de nouveauté ;
- DEBOUTE la société ETABLISSEMENTS ZURFLUH FELLER de sa demande en nullité des revendications 2 à 7 du brevet français no 85 10109 ;
- DEBOUTE la société DEPRAT JEAN S. A. et Monsieur Paul X... de l' ensemble de leurs demandes ;
- DEBOUTE la société ETABLISSEMENTS ZURFLUH FELLER de sa demande reconventionnelle de dommages- intérêts pour procédure abusive ;
- CONDAMNE la société DEPRAT JEAN S. A. et Monsieur Paul X... à verser à la société ETABLISSEMENTS ZURFLUH FELLER la somme de 10. 000, 00 euros au titre de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
- CONDAMNE la société DEPRAT JEAN S. A. et Monsieur Paul X... aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l' article 699 du nouveau Code de procédure civile ;
- DIT n' y avoir lieu au prononcé de l' exécution provisoire.
Fait et jugé à PARIS le 13 Juillet 2007.


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 05/10787
Date de la décision : 13/07/2007
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2007-07-13;05.10787 ?
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