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11/07/2007 | FRANCE | N°07/06536

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Chambre civile 3, 11 juillet 2007, 07/06536


T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

3ème chambre 3ème section

No RG :

07/06536

No MINUTE :

Assignation du :

17 Avril 2007

JUGEMENT

rendu le 11 Juillet 2007

DEMANDEUR

Monsieur Marie X...

...

89660 MAILLY LE CHATEAU

représenté par Me Laurent KLEIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire E 1301, et Me Jean GESCHWIND, Avocat au Barreau de Strasbourg,

DÉFENDERESSES

Mademoiselle Sylvia Z...

... - Kilburn - GB

LONDRES NW6 7EP

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eprésentée par Me Francine LEQUILLERIER, avocat au barreau de Paris Vestiaire E1572, et Me Sylvie BAILLEUL, Avocat au Barreau de Lille

S.A.S. LE MANUSCRIT

...

75002 PARIS

déf...

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

3ème chambre 3ème section

No RG :

07/06536

No MINUTE :

Assignation du :

17 Avril 2007

JUGEMENT

rendu le 11 Juillet 2007

DEMANDEUR

Monsieur Marie X...

...

89660 MAILLY LE CHATEAU

représenté par Me Laurent KLEIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire E 1301, et Me Jean GESCHWIND, Avocat au Barreau de Strasbourg,

DÉFENDERESSES

Mademoiselle Sylvia Z...

... - Kilburn - GB

LONDRES NW6 7EP

représentée par Me Francine LEQUILLERIER, avocat au barreau de Paris Vestiaire E1572, et Me Sylvie BAILLEUL, Avocat au Barreau de Lille

S.A.S. LE MANUSCRIT

...

75002 PARIS

défaillante

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Elisabeth BELFORT, Vice-Président, signataire de la décision

Agnès C..., Vice-Président

Michèle D..., Vice-Président,

assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, lors des débats, et de Mme E..., lors du prononcé, signataire de la décision

DEBATS

A l'audience du 29 Mai 2007

tenue en audience publique

JUGEMENT

Prononcé en audience publique

Réputé Contradictoire

en premier ressort

I- RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Marie X... est titulaire d'une maîtrise en sciences politiques, spécialité Etudes centre Est Européennes, auteur d'un mémoire sur l'analyse de l'intervention militaire au Kosovo et d'un autre mémoire dans le cadre de l'Institut National des Langues et Civilisations Orientales sur la Serbie.

Sylvia F... est journaliste et diplômée en sciences politiques. Elle s'est également engagée dès 1996 dans des projets de coopération internationale dans les Balkans où elle a rencontré Marie X....

C'est ainsi que Sylvia Z... et Marie X... ont envisagé la rédaction d'un ouvrage commun dont le titre devait être "BUREK BRIGADA, Fragile, Fière La Serbie d'aujourd'hui" et dont la publication devait être confiée à un éditeur de la région de Strasbourg les Editions H E C HIRLE. Cet ouvrage devait présenter douze portraits de diverses personnalités clés, interrogées sur la base d'un questionnaire, ce questionnaire étant rédigé en serbe ou en anglais et les réponses étant recueillies également en serbe ou en anglais et devant faire l'objet d'une traduction par Marie X... pour celles en serbe.

Au total 29 entretiens ont été réalisés, en anglais ou en serbe, certains par Sylvia Z... seule, certains par Marie X... seule, certains par les deux ensemble.

Puis, à la suite de dissensions entre les deux amies au cours du second semestre 2005, le contrat d'édition avec la société HEC HIRLE était rompu.

Au 1er trimestre 2006 était édité un livre aux éditions Le Manuscrit sous la seule signature de Sylvia Z..., intitulé "Rencontres slaves" et dans lequel étaient repris les travaux destinés à l'ouvrage commun. Estimant que Sylvia Z... avait copié ses traductions ainsi que des passages de son mémoire de DEA sans citation de son nom avec pour seule mention à la fin de l'ouvrage que l'auteur remerciait "Marie pour sa contribution au tout début de ce projet", Marie X... a fait assigner à jour fixe Sylvia Z... et la société d'édition LE MANUSCRIT par acte d'huissier délivré le 17 avril 2007.

Dans ses dernières conclusions signifiées le jour de l'audience, elle demande au tribunal de dire qu'en s'inspirant de ses travaux de recherche contenue dans son mémoire de DEA et en utilisant les informations qui y sont contenues sans en mentionner l'origine, Sylvia Z... a commis un acte de contrefaçon de droit d'auteur, de dire qu'en utilisant les interviews réalisés en langue serbe et les traductions en langue française qu'elle a réalisées sans recueillir son autorisation Sylvia Z... s'est rendue coupable d'actes de contrefaçon portant atteinte à ses droits moraux et patrimoniaux, d'ordonner l'arrêt immédiat de la fabrication de l'ouvrage "Rencontres slaves, la Serbie racontée par les serbes d'aujourd'hui" édité par la société LE MANUSCRIT ainsi que la cessation immédiate de la diffusion de cet ouvrage par quelque moyen que ce soit sous peine d'astreinte, d'ordonner de même le retrait par tout moyen et aux frais de Mademoiselle Z... et de son éditeur de tous les ouvrages déjà distribués et non encore vendus au public ainsi que la destruction des ouvrages en stock, le tout sous contrôle d'huissier, de condamner conjointement et solidairement les défenderesses à lui verser la somme de 50.000 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'atteinte à ses droits patrimoniaux et la somme de 50.000 euros en réparation de l'atteinte à ses droits moraux, ces sommes avec intérêt au taux légal à compter du jour du jugement, d'ordonner la publication du jugement dans trois journaux au choix de la demanderesse et sur le site internet de l'éditeur et de condamner solidairement les défenderesses à lui verser la somme de 15.000 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile .

Sylvia Z... a signifié ses conclusions le 29 mai 2007. Elle demande au tribunal de dire que Marie X... est irrecevable et mal fondée à agir à son encontre, de la débouter de l'ensemble de ses demandes, à titre reconventionnel de la condamner à lui verser la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi, et en tout état d cause de la condamner à lui payer la somme de 15.000 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile

La société LE MANUSCRIT a été assignée en la personne de son gérant mais n'a pas constitué avocat.

En application de l'article 473 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile, la présente décision doit être réputée contradictoire.

II- SUR CE :

* Sur la contrefaçon du mémoire de DEA :

Marie X... fait valoir que Sylvia Z... a repris dans son ouvrage plusieurs éléments de son mémoire. Il en est ainsi de passages des pages suivantes de l'ouvrage de Mademoiselle GAUTHEREAU, page 13, page 16, page 26, page 26, page 30, page 38, page 43, page 127, page 141, page 158 et page 159.

La lecture des passages pertinents des deux ouvrages montre sans aucun doute qu'il n'y a eu aucune copie du mémoire de Marie X... par Sylvia Z.... L'unique reproche fait à Sylvia Z... est en fait d'avoir utilisé des idées ou d'avoir utilisé des informations qui se trouvaient dans le mémoire.

Le tribunal rappelle que les idées étant de libre parcours elles ne sont pas susceptibles de protection au titre des droits d'auteur. Pour ce qui est des informations figurant dans l'ouvrage de Sylvia Z..., telles celles sur ARKAN, sur PINK TV, sur le concept "srpstvo", sur le réseau des femmes en noir, il s'agit d'informations publiques que l'on trouve aisément soit dans des ouvrages soit sur Internet si l'on s'intéresse à l'histoire récente des Balkans. Mademoiselle X... ne peut en aucun cas revendiquer un monopole sur ces informations.

Il convient en conséquence de débouter Marie X... de sa demande en contrefaçon de son mémoire de DEA intitulé "L'aliénation de la résistance serbe de 1991 à 1995" par l'ouvrage de Sylvia Z... "Rencontres slaves".

* Sur la contrefaçon des traductions :

Marie X... reproche également à Sylvia Z... d'avoir recopié et donc contrefait les traductions qu'elle a effectuées des interviews réalisés..

Aux termes des dispositions de l'article L.112-3 du Code de la propriété intellectuelle " Les auteurs de traductions, d'adaptations, transformations ou arrangements des oeuvres de l'esprit jouissent de la protection instituée par le présent code sans préjudice des droits de l'auteur de l'oeuvre originale. (...)".

Il est constant qu'une traduction n'est protégée, comme toute autre oeuvre, que si elle porte l'empreinte de la personnalité de son auteur.

En l'espèce, le tribunal constate à la lecture des textes traduits par Mademoiselle X... et ceux figurant dans l'ouvrage de Mademoiselle Z... qu'ils sont différents même si, étant des traductions, ils ont le même sujet et la même construction. Ces textes, ceux de Mademoiselle X... et ceux de Mademoiselle Z... sont apparemment une traduction mot à mot sans effet ou recherche littéraire de propos recueillis et ne reflètent pas la personnalité de leur auteur.

Ils ne sont donc pas susceptibles de protection sur le fondement des droits d'auteur.

Il convient en conséquence de débouter Marie X... de sa demande de contrefaçon au titre des traductions qu'elle a effectué des interviews figurant dans l'ouvrage "Rencontres slaves".

* Sur la demande reconventionnelle :

Sylvia Z... sollicite le paiement de la somme de 15.000 euros pour procédure abusive. Elle fait valoir d'une part qu'il n'y avait pas d'urgence et d'autre part que son ouvrage a été retiré de la vente ce qui a anéanti tout son travail.

Le tribunal relève à la lecture des courriels échangés entre les deux parties que c'est Marie X... qui a souhaité mettre fin à leur collaboration du fait des critiques émise par Sylvia Z... sur le contrat d'édition alors que l'éditeur avait été trouvé grâce aux relations personnelles du père de Mademoiselle X... et également du fait de son retard à remettre sa partie de l'ouvrage.

Pour ce qui est du préjudice résultant du retrait à la vente de l'ouvrage de Sylvia Z..., le tribunal note que cette dernière a partiellement perdu des mois de travail et qu'il en est résulté un préjudice qui doit cependant être tempéré par le succès limité qu'a eu son livre pendant la période où il a été mis en vente, soit 36 livres papier et 6 livres PDF au total de février 2006 à avril 2007.

Son préjudice sera en conséquence fixé à la somme de 1.500 euros.

* Sur l'article 700 :

Sylvia Z... sollicite le paiement de la somme de 15.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Il serait inéquitable de laisser à sa charge les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens. Il lui sera en conséquence alloué la somme de 4.000 euros de ce chef.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL,

Statuant publiquement, en premier ressort et par jugement réputé contradictoire,

Déboute Marie X... de ses demandes en contrefaçon dirigées contre l'ouvrage "Rencontres slaves" écrit par Sylvia Z... et édité par la société LE MANUSCRIT,

Condamne Marie X... à payer à Sylvia G... la somme de 1.500 euros pour procédure abusive,

Condamne Marie X... à payer à Sylvia Z... la somme de 4.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Condamne Marie X... aux dépens.

Fait à PARIS le 11 juillet 2007 .

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 07/06536
Date de la décision : 11/07/2007
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2007-07-11;07.06536 ?
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